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Décisions

CJCE, 22 mars 1977, n° 78-76

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Steinike & Weinlig

Défendeur :

République fédérale d'Allemagne

CJCE n° 78-76

22 mars 1977

LA COUR,

1. Attendu que, par ordonnance du 10 juin 1976 parvenue au greffe de la Cour le 2 août 1976, le Verwaltungsgericht de Francfort-sur-le-main, a posé, en vertu de l'article 177 du traité, différentes questions tendant à l'interprétation des articles 9, 12, 13, 92, 93 et 95 du traité CEE ;

Que ces questions sont soulevées dans le cadre d'un litige qui oppose une firme allemande, demanderesse au principal, à la République fédérale d'Allemagne, représentée par l'office fédéral allemand de l'alimentation et des forêts (bundesamt für ernahrung und forstwirtschaft) et met en cause la conformité avec le droit communautaire d'une redevance de 20 000 DM prélevée à l'occasion de la transformation, par la demanderesse au principal, de jus d'agrumes importés par elle d'Italie et de différents pays tiers ;

Que cette redevance est destinée, ensemble avec d'autres ressources de nature différente, à alimenter un fonds de promotion des ventes des produits de l'agriculture, de la sylviculture et de l'industrie de l'alimentation allemandes (absatzforderungsfonds der deutschen land -, forst - und ernahrungswirtschaft) ci-après "fonds", créé par une loi fédérale du 26 juin 1969 ;

Que, selon le paragraphe 2 de cette loi, le fonds a pour mission, par le truchement d'un organisme appelé "centrale marketing-gesellschaft der deutschen agrarwirtschaft" (CMA) qu'il finance et contrôle : "d'encourager sous une forme centralisée et par des moyens et des méthodes modernes la vente et l'exploitation de produits de l'agriculture, de la sylviculture et de l'industrie alimentaire allemandes en ouvrant et en entretenant des marchés dans le pays et à l'étranger";

Que l'aide fournie à l'industrie alimentaire l'est sans qu'il soit fait de distinction ente les produits alimentaires allemands fabriqués à partir de matières premières ou de produits demi-finis nationaux ou en provenance d'autres Etats membres ;

Que le Gouvernement fédéral ayant, conformément à l'article 93, paragraphe 3, du traité, informé, au préalable, la Commission de son intention d'instaurer cette aide, cette dernière n'a pas formule d'objections de sorte que la législation en question a été mise en vigueur dans des conditions régulières au regard des procédures prévues par ledit article 93 ;

2. Attendu que, selon la demanderesse au principal, les redevances qui lui sont réclamées seraient contraires au traité et, par conséquent, indues, d'une part, parce qu'elles serviraient à financer une aide qui serait cependant incompatible avec l'article 92 du traité et, d'autre part, parce que, frappant la transformation de jus d'agrumes en provenance d'un autre Etat membre, alors qu'il n'existe pas de produit similaire dans l'Etat membre importateur, elles constitueraient, soit des taxes d'effet équivalant à un droit de douane, interdites par les articles 9, 12 et 13 du traité, soit des impositions intérieures discriminatoires à l'égard d'un produit en provenance d'un autre Etat membre et contraires à l'article 95 ;

3. Attendu qu'une loi fédérale du 23 mars 1972 a exempté de la contribution litigieuse, à l'occasion de sa transformation par une entreprise allemande :'le produit qui, en raison de sa catégorie, ne pousse pas dans des conditions climatiques naturelles à l'intérieur du territoire d'application de cette loi (sur l'absatzforderungsfonds)', d'où est résultée l'exemption des jus d'agrumes ;

Que la contribution litigieuse concerne cependant des jus d'agrumes importés et transformés avant la mise en vigueur de la loi du 23 mars 1972 ;

4. Que c'est au vu de ces considérations qu'il y a lieu de répondre aux questions posées ;

Sur la première question

5. Attendu que par la première question il est demandé si la réglementation de procédure contenue dans l'article 93 du traité CEE empêche une juridiction nationale de demander une décision préjudicielle concernant l'article 92 du même traité et de statuer ensuite sur l'application de cette disposition ;

Que cette question vise, en substance, à voir déterminer le degré l'invocabilité de l'article 92 du traité dans l'ordre juridique interne des Etats membres, soit à l'initiative des particuliers, soit d'office par les juridictions nationales ;

6. Attendu que l'article 92, en son paragraphe 1, déclare que :'sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le Marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etat membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'Etat sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions';

Que, dans ses paragraphes 2 et 3, cette même disposition énumére, d'abord, trois catégories d'aides qui ne tombent pas sous l'interdiction du paragraphe 1, ensuite trois catégories d'aides qui peuvent, sous certaines conditions, être considérées comme compatibles avec le Marché commun, et donne enfin compétence au Conseil pour déterminer d'autres catégories d'aides qui seront alors, elles aussi, considérées comme soustraites à l'interdiction du paragraphe 1 de l'article 92 ;

7. Attendu que de son côté l'article 93, paragraphe 2, alinéa 3, du traité prévoit que :'sur demande d'un Etat membre, le Conseil, statuant à l'unanimité, peut décider qu'une aide, instituée ou à instituer par cet Etat, doit être considérée comme compatible avec le Marché commun, en dérogation des dispositions de l'article 92 ou des règlements prévus ont l'article 94, si des circonstances exceptionnelles justifient une telle décision. Si, à l'égard de cette aide, la Commission a ouvert la procédure prévue au présent paragraphe, alinéa 1, la demande de l'Etat intéressé au Conseil aura pour effet de suspendre ladite procédure jusqu'à la prise de position du Conseil';

Qu'en outre l'article 94 du traité donne compétence au Conseil pour : "prendre tous règlements utiles en vue de l'application des articles 92 et 93 et fixer notamment les conditions d'application de l'article 93, paragraphe 3, et les catégories d'aides qui sont dispensées de cette procédure";

Qu'enfin, en ce qui concerne les produits agricoles, il y a lieu de tenir compte des compétences accordées au Conseil par l'article 42 du traité ;

8. Attendu qu'il résulte de ces dispositions que l'interdiction du paragraphe 1 de l'article 92 n'est ni absolue ni inconditionnelle, le paragraphe 3 de cette même disposition et le paragraphe 2 de l'article 93 accordant suivant les cas à la Commission un large pouvoir d'appréciation et au Conseil un pouvoir étendu en vue d'admettre des aides par dérogation à l'interdiction générale dudit paragraphe 1 ;

9. Attendu que l'appréciation, dans ces cas, de la compatibilité ou de l'incompatibilité avec le Marché commun d'une aide d'Etat soulève des problèmes impliquant la prise en considération et l'appréciation de faits et circonstances économiques complexes et susceptibles de se modifier rapidement ;

Que, pour ce motif, le traité a prévu en son article 93 une procédure spéciale organisant l'examen permanent et le contrôle des aides par la Commission ;

Que, pour les aides existant à l'entrée en vigueur du traité, le paragraphe 2 de l'article 93 prévoit une procédure aboutissant, le cas échéant, à une décision obligeant l'Etat membre concerné à supprimer ou à modifier l'aide dans le délai que la Commission détermine ;

Qu'en ce qui concerne les aides nouvelles que les Etats membres auraient l'intention d'instituer, il est établi une procédure préalable sans laquelle aucune aide ne saurait être considérée comme régulièrement instaurée ;

Que de l'ensemble de ces considérations il résulte que le traité, en organisant par l'article 93 l'examen permanent et le contrôle des aides par la Commission, entend que la reconnaissance de l'incompatibilité éventuelle d'une aide avec le Marché commun résulte, sous le contrôle de la Cour de justice, d'une procédure appropriée dont la mise en œuvre relève de la responsabilité de la Commission ;

10. Attendu que les particuliers ne sauraient, dès lors, en invoquant le seul article 92, contester la compatibilité d'une aide avec le droit communautaire devant les juridictions nationales ni demander à celles-ci de se prononcer, à titre principal ou incident, sur une incompatibilité éventuelle ;

Que, par contre, cette possibilité est donnée dès lors que les dispositions visées de l'article 92 ont été concrétisées par les actes de portée générale prévus par l'article 94 ou par les décisions, dans les cas particuliers, qu'envisage l'article 93, paragraphe 2 ;

11. Attendu que la demanderesse au principal fait à cet égard valoir que l'article 12 du règlement du Conseil 865-68 du 28 juin 1968 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits transformes à base de fruits et légumes, constituerait une mesure de concrétisation et d'application au sens ci-dessus indique permettant aux particuliers d'invoquer devant les juridictions nationales l'article 92 en vue de faire constater l'incompatibilité d'une aide d'Etat avec le Marché commun et en particulier avec l'organisation de marché visée ;

12. Attendu que ledit article 12 dispose que : "sous réserve des dispositions contraires du présent règlement, les articles 92, 93 et 94 du traité sont applicables à la production et au commerce des produits vises à l'article 1";

13. Attendu que l'article 12 a pour objet, en vertu de l'article 42 du traité, de rendre applicable aux produits agricoles qui font l'objet du règlement 865-68 les dispositions des articles 92 à 94, mais sans modifier pour autant la nature et la portée de ces dispositions ;

14. Attendu que les limites ci-dessus indiquées de l'invocabilité de l'article 92 n'impliquent cependant pas que les juridictions nationales ne puissent être saisies de litiges les obligeant à interpréter - le cas échéant, après recours à la procédure de l'article 177 du traité - et à appliquer les dispositions de l'article 92 sans pour autant être appelées à décider de l'incompatibilité éventuelle d'une aide d'Etat, en dehors du cas d'une aide établie en violation des prescriptions de l'article 93, paragraphe 3 ;

Qu'ainsi une juridiction nationale peut être amenée à interpréter et à appliquer la notion d'aide, visée à l'article 92, en vue de déterminer si une mesure étatique instaurée sans tenir compte de la procédure de contrôle préalable de l'article 93, paragraphe 3, devait ou non y être soumise ;

Que de toute manière, aux termes de l'article 177 du traité, il appartient aux juridictions nationales, lorsqu'elles recourent à la procédure dudit article, de décider elles-mêmes de la pertinence des questions posées ;

15. Attendu qu'il y a donc lieu de répondre à la première question que les dispositions de l'article 93 n'empêchent pas une juridiction nationale de déférer à la Cour de justice une question relative à l'interprétation de l'article 92 du traité, lorsque cette juridiction estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour lui permettre de rendre son jugement, étant entendu que cette juridiction n'est pas compétente pour statuer - à défaut de règlements d'exécution au sens de l'article 94 - sur une demande visant à constater l'incompatibilité avec le traité d'une aide existante qui n'a pas fait l'objet d'une décision de la Commission obligeant l'Etat membre concerné à la supprimer ou à la modifier ou d'une aide nouvelle mise en vigueur conformément à l'article 93, paragraphe 3 ;

Sur la deuxième question

16. Attendu que par la deuxième question il est demandé si par " entreprises ou certaines productions" au sens de l'article 92 du traité, il faut n'entendre que les entreprises privées ou également un établissement public sans but lucratif ;

17. Attendu que selon l'article 90, paragraphe 1, du traité : "les Etats membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n'édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles du présent traité, notamment à celles prévues aux articles 7 et 85 à 94 inclus";

Que selon le paragraphe 2 de cette même disposition : "les entreprises chargées de la question de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles du présent traité, notamment aux règles de concurrence dans les limites ou l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie ; le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté";

18. Attendu qu'il résulte de cette disposition que l'article 92 du traité appréhende l'ensemble des entreprises, privées ou publiques, et l'ensemble des productions desdites entreprises, sous la seule réserve de l'article 90, paragraphe 2 ;

Sur les troisième et quatrième questions

19. Attendu que la troisième question vise à savoir si la condition visée par l'expression "aides accordées au moyen de ressources d'Etat" est également remplie lorsque l'organisme d'Etat reçoit lui-même des aides par l'intermédiaire de l'Etat ou d'entreprises privées ;

Que, par une quatrième question, il est demandé si la notion d'aide englobe également l'octroi d'un avantage gratuit, lorsque le bénéficiaire lui-même n'est pas l'entreprise privée, mais l'organisme d'Etat, et s'il y a gratuité lorsque la contribution de l'entreprise particulière, évaluée par rapport à la dépense totale, est insignifiante ;

20. Attendu qu'il y a lieu de répondre ensemble à ces deux questions ;

21. Attendu que l'interdiction de l'article 92, paragraphe 1, englobe l'ensemble des aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'Etat, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre le cas ou l'aide est accordée directement par l'Etat ou par des organismes publics ou privés qu'il institue ou désigne en vue de gérer l'aide ;

Que, pour l'application de l'article 92, ce sont cependant essentiellement les effets de l'aide en ce qui concerne les entreprises ou producteurs bénéficiaires qu'il y a lieu de prendre en considération et non la situation des organismes distributeurs ou gestionnaires de l'aide ;

22. Attendu qu'une mesure de l'autorité publique favorisant certaines entreprises ou certains produits ne perd pas son caractère d'avantage gratuit par le fait qu'elle serait partiellement ou totalement financée par des contributions imposées par l'autorité publique et prélevées sur les entreprises concernées ;

Sur la cinquième question

23. Attendu qu'il est ensuite demandé si le jeu de la concurrence est faussé et le commerce entre Etats membres affecté lorsque l'étude du marché et la publicité faites par l'organisme d'Etat à l'intérieur du pays et à l'étranger sont effectuées également par des institutions analogues d'autres pays de la Communauté ;

24. Attendu qu'une violation éventuelle par un Etat membre d'une obligation lui incombant en vertu du traité, en rapport avec l'interdiction de l'article 92, ne saurait être justifiée par la circonstance que d'autres Etats membres manqueraient également à cette obligation ;

Que l'effet de plusieurs distorsions de la concurrence sur les échanges entre les Etats membres n'est pas de se neutraliser mutuellement mais est, au contraire, de nature cumulative, ce qui en augmente les conséquences nuisibles pour le Marché commun ;

Sur les sixième et septième questions

25. Attendu que par la sixième question il est demandé si une taxe prélevée non sur le produit importé mais sur sa transformation est une taxe d'effet équivalant à un droit de douane au sens des articles 9, paragraphe 1, 12 et 13, paragraphe 2, du traité CEE ;

Que la septième question vise à savoir si la circonstance que des taxes frappant "les produits des autres Etats membres" soient perçues non lors de l'importation, mais seulement lors de la transformation de ces produits, constitue une discrimination au sens de l'article 95 du traité CEE ;

26. Attendu que ces deux questions sont relatives à la délimitation entre une taxe d'effet équivalant à un droit de douane, au sens des articles 9, 12 et 13 du traité et une imposition intérieure au sens de l'article 95 et doivent permettre à la juridiction nationale de classer la redevance due à l'absatzforderungsfonds dans l'une ou l'autre catégorie ;

Qu'il est dès lors indiqué de répondre conjointement à ces deux questions ;

27. Attendu qu'une même imposition ne saurait, dans le système du traité, appartenir simultanément aux deux catégories mentionnées, étant donné que les articles 9 et 12 interdisent, entre les Etats membres, la perception de droits de douane à l'importation et à l'exportation ou de taxes d'effet équivalent, tandis que l'article 95 se borne à interdire la discrimination à l'encontre des produits des autres Etats membres par le moyen d'impositions intérieures ;

28. Attendu qu'ainsi qu'il a été constaté par l'arrêt du 18 juin 1975 (affaire 94-74, IGAV, recueil 1975, p. 710), auquel il est fait référence par la juridiction nationale, l'interdiction de l'article 13, paragraphe 2, vise toute taxe exigée à l'occasion ou en raison de l'importation et qui, frappant spécifiquement un produit importe à l'exclusion du produit national similaire, a pour résultat, en altérant son prix de revient, d'avoir sur la libre circulation des marchandises la même incidence restrictive qu'un droit de douane ;

Que la caractéristique essentielle d'une taxe d'effet équivalant à un droit de douane qui la distingue d'une imposition intérieure est que la première frappe exclusivement le produit importé tandis que la seconde frappe à la fois des produits importés et nationaux ;

Qu'une imposition frappant à la fois des produits importés et des produits similaires pourrait cependant constituer une taxe d'effet équivalant à un droit de douane, si une telle contribution limitée à des produits déterminés était exclusivement destinée à alimenter des activités qui profitent spécifiquement aux produits nationaux imposés, de manière que la charge fiscale incombant à ces derniers serait partiellement ou totalement compensée ;

29. Attendu que lorsque les conditions qui caractérisent une taxe d'effet équivalant à un droit de douane sont réunies, la circonstance que la contribution est prélevée à un stade de la commercialisation ou de la transformation du produit postérieur au franchissement de la frontière est indifférente du moment que c'est en raison du seul franchissement de cette frontière que le produit est frappé, circonstance qui exclut une taxation identique dans le chef du produit national ;

30. Attendu que ne sont pas à considérer comme taxes d'effet équivalent les charges pécuniaires relevant d'un régime général de redevances intérieures appréhendant systématiquement des produits nationaux et des produits importés selon les mêmes critères ;

Que cette situation peut se réaliser même dans le cas ou il s'agit d'un produit importé qui ne rencontre pas de production nationale similaire du moment que la charge frappe des catégories entières de produits nationaux ou étrangers qui se trouvent tous placés dans une situation comparable quelle que soit leur origine ;

Qu'en effet l'article 95 a pour objet d'éliminer les discriminations, directes ou indirectes, à l'égard des produits importés mais non de placer ceux-ci dans une situation fiscale privilégiée par rapport aux produits nationaux ;

Que la discrimination interdite par l'article 95 sera normalement absente lorsqu'une imposition intérieure frappe les produits nationaux et les produits antérieurement importés à l'occasion de leur transformation en produits plus élaborés sans qu'il y ait de différence, à raison de leur provenance, entre les uns et les autres ni dans le taux, ni dans l'assiette, ni dans les modalités de perception ;

Sur les dépens

31. Attendu que les frais exposés par la République fédérale d'Allemagne et la Commission des communautés européennes qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet de remboursement ;

Que la procédure revêtant à l'égard des parties au principal le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens ;

Par ces motifs,

LA COUR, statuant sur les questions à elle soumises par le Verwaltungsgericht de Francfort par ordonnance du 10 juin 1976, dit pour droit :

1°) les dispositions de l'article 93 n'empêchent pas une juridiction nationale de déférer à la Cour de justice une question relative à l'interprétation de l'article 92 du traité, lorsque cette juridiction estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour lui permettre de rendre son jugement, étant entendu que cette juridiction n'est pas compétente pour statuer - à défaut de règlements d'exécution au sens de l'article 94 - sur une demande visant à constater l'incompatibilité avec le traité d'une aide existante qui n'a pas fait l'objet d'une décision de la Commission obligeant l'Etat membre concerné à la supprimer ou à la modifier ou d'une aide nouvelle mise en vigueur conformément à l'article 93, paragraphe 3, du traité ;

2°) l'article 92 du traité appréhende l'ensemble des entreprises, privées ou publiques, et l'ensemble des productions desdites entreprises, sous la seule réserve de l'article 90, paragraphe 2, du traité ;

3°) l'interdiction de l'article 92, paragraphe 1, englobe l'ensemble des aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'Etat, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre le cas ou l'aide est accordée directement par l'Etat ou par des organismes publics ou privés qu'il institue ou désigne en vue de gérer l'aide ;

4°) une mesure de l'autorité publique favorisant certaines entreprises ou certains produits ne perd pas son caractère d'avantage gratuit par le fait qu'elle serait partiellement ou totalement financée par des contributions imposées par l'autorité publique et prélevées sur les entreprises concernées ;

5°) une violation éventuelle par un Etat membre d'une obligation, lui incombant en vertu du traité en rapport avec l'interdiction de l'article 92, ne saurait être justifiée par la circonstance que d'autres Etats membres manqueraient également à cette obligation ;

6°) lorsque les conditions qui caractérisent une taxe d'effet équivalant à un droit de douane sont réunies, la circonstance que la contribution est prélevée à un stade de la commercialisation ou de la transformation du produit postérieur au franchissement de la frontière est indifférente du moment que c'est en raison du seul franchissement de cette frontière que le produit est frappé, circonstance qui exclut une taxation identique dans le chef du produit national ;

7°) la discrimination interdite par l'article 95 sera normalement absente lorsqu'une imposition intérieure frappe les produits nationaux et les produits antérieurement importés à l'occasion de leur transformation en produits plus élaborés sans qu'il y ait de différence, à raison de leur provenance, entre les uns et les autres ni dans le taux, ni dans l'assiette, ni dans les modalités de perception.