Livv
Décisions

Cass. crim., 18 juin 1997, n° 96-83.018

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Blin (faisant fonction)

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. Dintilhac

Avocats :

SCP Coutard, Mayer, Me Parmentier.

TGI Brest, ch. corr., du 2 mai 1995

2 mai 1995

LA COUR : - Vu les mémoires produits en demande et en défense ; - Sur le premier moyen de cassation, pris des articles L. 115-6 du Code de la consommation, du décret du 4 septembre 1973, de l'article 591 du Code de procédure pénale :

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Antoine P coupable du délit de mise en vente de produits portant une appellation d'origine qu'il savait inexacte ;

"aux motifs que, "si le décret du 4 septembre 1973 ne protège que les appellations contrôlées "Vin de Savoie" et "Roussette de Savoie" employées seules ou suivies d'un nom de cru, il n'en demeure pas moins qu'en plaçant le vin incriminé sur le dépliant publicitaire sous l'unité géographique viticole "Savoie" au côté de deux vins d'appellation contrôlée Apremont et Roussette de Savoie sous un nom et avec une étiquette évoquant la montagne, sous une appellation laissant faussement croire que le vin a été produit dans l'aire géographique de production et d'agrément du produit, et après avoir retranché de l'appellation d'origine "Vin de Savoie" les mots "Vin de", sachant cette indication inexacte, en reproduisant cette indication sur ses factures et en proposant à la vente ce vin ainsi dénommé par l'intermédiaire des [magasins Z], Antoine P a bien commis le délit de mise en vente de produits naturels ou fabriqués portant une appellation d'origine qu'il savait inexacte" ;

"alors que les "appellations d'origine" sont légalement définies ; que le terme "Savoie", simple indication d'origine, n'est pas une "appellation d'origine" ; que le délit de l'article L. 115-16 du Code de la consommation, qui a trait aux usages inexacts d'une "appellation d'origine", est par suite inapplicable lorsqu'il n'a été fait aucune application d'une "appellation d'origine" légalement définie" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Y, centrale d'achat des [magasins Z], a fait diffuser dans trois départements bretons un catalogue publicitaire intitulé "Le Guide de nos vins", présentant une sélection de bouteilles mises en vente dans les magasins à grande surface ; que, sous la rubrique "Savoie", figurait, à côté de deux vins d'appellation d'origine contrôlée Apremont et Roussette de Savoie , une bouteille vendue sous la dénomination "X" ; que ce produit comportant une étiquette évoquant un paysage montagnard, en réalité vin de table provenant du Midi de la France, était présenté en rayonnage des magasins avec les vins de Savoie ; qu'Antoine P, responsable du service d'achats des vins à Y, titulaire d'une délégation de pouvoirs du dirigeant de la société en matière de publicité, qualité et dénomination de vente, a notamment été poursuivi pour apposition de la fausse appellation d'origine "Savoie" sur le vin de table "X", délit prévu par l'article L. 115-16 du Code de la consommation ; que le prévenu a fait valoir, pour sa défense, que le terme "Savoie" n'est pas une appellation d'origine mais une simple indication d'origine, échappant aux prévisions du texte, base de la poursuite ;

Attendu que, pour écarter ce moyen et déclarer le prévenu coupable, après requalification, du délit de mise en vente de produits portant une appellation d'origine sciemment inexacte, prévu par le même texte, les juges d'appel énoncent que, si le décret du 4 septembre 1973 protège l'appellation contrôlée "Vin de Savoie" employée seule ou suivie d'un nom de cru, la seule indication du terme "Savoie" pour désigner, aux côtés de deux vins d'appellation contrôlée, un vin de table dont la dénomination et l'étiquette laissent croire qu'il a été produit dans l'aire géographique de production du vin de cette appellation d'origine, caractérise l'infraction ; qu'ils ajoutent qu'il n'importe que le support de la fausse appellation soit en l'espèce constitué par une publicité ainsi que des factures ;

Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué ; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-4, L. 213-1, L. 115-16 du Code de la consommation, 591 du Code de procédure pénale :

"en ce que la cour d'appel a ordonné la publication du présent arrêt par extraits aux frais du condamné dans le journal Ouest-France" ;

"alors que, si le délit de publicité trompeuse et le délit de mise en vente de produits portant une appellation d'origine inexacte peuvent être sanctionnés par la publication du jugement de condamnation, il n'en va pas de même pour le délit de tromperie ; que la cour d'appel, qui a ordonné la publication de son arrêt portant condamnation des chefs de ces trois délits, a par suite prononcé une peine inexistante à l'encontre de l'un d'eux" ;

Attendu que, contrairement aux allégations du demandeur, la peine de publication de la décision est prévue, en matière de fraudes et falsifications, par l'article L. 216-3 du Code de la consommation ; qu'en ordonnant cette mesure à l'égard du prévenu déclaré coupable de tromperie, publicité fausse et mise en vente de produits sous une fausse appellation d'origine, la cour d'appel a fait l'exacte application de ce texte et des articles L. 121-4 et L. 115-16 du Code de la consommation ; que le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.