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Décisions

Cass. com., 24 septembre 2003, n° 99-19.692

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Marven parfumerie (SARL)

Défendeur :

Martinet (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

M. Petit

Avocats :

SCP Célice, Blancpain, Soltner, SCP Defrenois, Levis.

T. com. Orléans, du 4 mai 1994

4 mai 1994

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses six branches: - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Orléans, 3 août 1999), que Mme Knittler a cédé à M. Martinet et à la société Marven parfumerie la quasi-totalité des actions composant le capital de la société Parfumerie Bernier, qui exploitait un fonds de commerce de parfumerie; que les sociétés Chanel et Guerlain, invoquant la méconnaissance des dispositions contractuelles qui obligeaient le distributeur à les informer des modifications affectant le contrôle et la direction de la société, ont résilié les contrats de distribution les liant à celle-ci ; que M. Martinet et la société Marven parfumerie ont demandé des dommages-intérêts à la société d'expertise comptable Acora, rédactrice de l'acte de cession, lui reprochant d'avoir manqué à son devoir de conseil en n'attirant pas l'attention des parties sur la nécessité d'une information préalable des parfumeurs; - Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté cette demande alors, selon le moyen: 1°) que si la validité d'un acte juridique entraîne la production d'effets juridiques, son efficacité suppose que le signataire puisse retirer des effets juridiques les avantages légitimement escomptés; qu'en considérant que l'acte de cession de parts avait en tout état de cause produit ses effets même si, par la suite, des contrats de distribution agréés avaient été résiliés du fait de l'absence d'information des fournisseurs sur les modifications affectant le capital, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1135 du Code civil; 2°) que les compétences personnelles du client ne dispensent pas l'expert comptable, rédacteur de l'acte, de son devoir de conseil; qu'en énonçant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; 3°) que l'obligation de conseil étant due à chacune des parties, il était inopérant de constater que Mme Knittler connaissait l'incessibilité des contrats liant la société Parfumerie Bernier; qu'en fondant sur ce motif le rejet de l'action en réparation des cessionnaires, la cour d'appel a à nouveau violé les articles 1134 et 1135 du Code civil; 4°) qu'il ne résulte pas des termes des contrats cités par la cour d'appel qu'en cas de cession des actions de la société liée par les contrats de distributeur agréé il y ait eu obligation d'informer les fournisseurs comme en cas de cession du fonds de commerce entraînant substitution du distributeur agréé; qu'en se fondant sur les termes de ces contrats, la cour d'appel a violé de plus fort les dispositions susvisées; 5°) qu'en n'expliquant pas en quoi la révocation de Mme Knittler de ses fonctions de Président du conseil d'administration de la société Parfumerie Bernier démontrait une volonté de cacher la cession des actions de cette société, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; 6°) qu'en ne répondant pas aux conclusions des cessionnaires qui avaient fait valoir, preuves chiffrées à l'appui, que la résiliation de contrats de distribution de marques prestigieuses avait entraîné une baisse immédiate du chiffre d'affaires de 40 à 50 % par rapport aux résultats mensuels de l'année précédente, ce qui démontrait l'existence d'un préjudice certain, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant exactement retenu que si le rédacteur d'acte est tenu de s'assurer de la validité et de l'efficacité de l'acte qu'il confectionne, cette obligation n'inclut pas celle d'informer les parties de circonstances dont elles ont déjà connaissance et constaté, par motifs propres et adoptés, que les parties à l'acte de cession étaient informées du caractère incessible des contrats liant la société parfumerie Bernier aux sociétés Chanel et Guerlain, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deux premières branches du moyen, en a déduit à bon droit que la société Acora n'avait pas manqué à son devoir de conseil en n'attirant pas l'attention des parties sur cette circonstance;

Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel n'a pas dit que la révocation de Mme Knittler démontrait une volonté de cacher la cession des actions mais que cette volonté apparaissait à la lecture du procès-verbal de l'assemblée générale ayant procédé à cette révocation;

Et attendu, en troisième lieu, qu'ayant écarté la faute et le lien de causalité, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre aux conclusions tendant à établir l'existence d'un préjudice; d'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa cinquième branche et ne peut être accueilli en ses première et deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus;

Par ces motifs: Rejette le pourvoi.