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Décisions

Cass. crim., 23 février 1989, n° 88-82.291

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

M. Jean Simon

Avocat général :

M. Perfetti

Avocats :

SCP Tiffreau, Thouin-Palat, Me Célice.

TGI Saint-Etienne, ch. corr., du 9 avr. …

9 avril 1987

Rejet du pourvoi formé par B Jean-Jacques, la société x, civilement responsable, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon, 4e chambre, en date du 2 mars 1988, qui, pour publicité de nature à induire en erreur, a condamné le premier nommé à 50 000 francs d'amende, a ordonné la publication de la décision, s'est prononcé sur les réparations civiles et a déclaré la société x civilement responsable

LA COUR: - Vu les mémoires produits en demande et en défense; - Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 1er de la loi du 1er août 1905, 44 de la loi du 27 décembre 1973, 485 et 512 du Code de procédure pénale:

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré B coupable de délit de publicité de nature à induire en erreur, et la société X civilement responsable de celui-ci;

" aux motifs que le port d'une blouse par C où figure une étiquette tissée portant la mention " X-Centre Auto ", alors que ce vendeur est rémunéré par un fabricant réalisant 42 % des ventes de pneus dans le magasin, constitue une publicité de nature à induire en erreur sur les procédés de vente; qu'en fournissant à un salarié de la société Firestone une blouse portant l'étiquette de la société X, B ne pouvait pas ignorer qu'il créait un risque de confusion dans l'esprit des consommateurs, ces derniers pouvant légitimement croire en l'objectivité du vendeur;

"alors 1°) que: il résultait des propres énonciations de l'arrêt que C, préposé de la société Firestone, possédait un badge Firestone mais qu'il ne le portait pas systématiquement; que, dès lors, en imputant à B, préposé de la société X, les faits de publicité de nature à induire en erreur, objet de la prévention, la Cour a violé les textes susvisés;

"alors 2°) que: en se bornant à retenir que B avait fourni à un salarié de la société Firestone une blouse portant l'étiquette " X-Centre Auto ", la Cour, qui n'a pas caractérisé la commission par ledit prévenu d'un acte de publicité, a par là même privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ";

Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué qu'au "centre auto " du magasin X dont B est directeur, la vente des pneumatiques était assurée, notamment, par un employé exclusivement rémunéré par la société Firestone, lequel cependant était vêtu d'une blouse bleue portant sur le côté gauche en rouge sur fond blanc la mention " X-Centre Auto ", et que cet employé conseillait à la clientèle l'achat de pneumatiques Firestone qu'il présentait comme étant de meilleure qualité que ceux de marque Michelin;

Attendu que, sur plainte de la société Michelin, B a été poursuivi pour publicité de nature à induire en erreur;

Attendu qu'après avoir relevé que le salarié de la société Firestone possédait un badge de cette société mais qu'il ne le portait pas systématiquement, la juridiction du second degré, pour déclarer B coupable du délit poursuivi, retient qu'en fournissant à cet employé une blouse laissant croire qu'il appartenait à la société X, le prévenu s'est livré à une publicité de nature à induire en erreur sur les procédés de vente des produits et sur la qualité du vendeur ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs exempts d'insuffisance, la cour d'appel, loin de méconnaître l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973, en a fait l'exacte application ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 44 et 46 de la loi du 27 décembre 1973, 2, 3, 485 et 512 du Code de procédure pénale:

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable la constitution de partie civile de la société Michelin;

"aux motifs que la société Michelin justifie d'un préjudice personnel et direct causé par l'infraction, dès lors que le pourcentage des ventes des pneumatiques de sa marque au magasin X dirigé par le prévenu a baissé;

"alors que la société, dont le chiffre d'affaire baisse en raison de faits constitutifs du délit de publicité de nature à induire en erreur, ne justifie pas d'un préjudice personnel découlant directement de ces mêmes faits; que, dès lors, en retenant le contraire au soutien de sa décision, la Cour a violé les textes susvisés ";

Attendu que pour déclarer recevable la constitution de partie civile de la société Michelin les juges d'appel retiennent que, le nombre de pneumatiques Michelin vendus au magasin Rallye étant tombé, à la suite des procédés de vente instaurés, de 14 500 au cours des années 1980, 1981 et 1982, à 5 754 au cours de l'année 1985, de 32,59 % au magasin X au lieu de 45 à 50 % dans les autres établissements à grande surface, la partie civile justifie d'un préjudice personnel découlant directement de l'infraction poursuivie;

Attendu qu'en l'état de ces motifs la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué; qu'en effet le droit de se constituer partie civile dans une procédure suivie du chef de publicité de nature à induire en erreur n'est pas réservé à l'acheteur mais appartient également au fabriquant du produit concurrent qui a subi un préjudice découlant des faits objet de la poursuite ; d'où il suit que le moyen doit être écarté;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.