Livv
Décisions

Cass. crim., 4 mars 1998, n° 97-80.776

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roman

Rapporteur :

M. Ferrari

Avocat général :

M. le Foyer de Costil

Avocats :

SCP Guiguet, Bachellier, de la Varde.

TGI Alès, ch. corr., du 29 sept. 1995

29 septembre 1995

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par F Alain, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, du 17 janvier 1997, qui, pour publicité de nature à induire en erreur et vente "à la boule de neige", l'a condamné à 100 000 francs d'amende ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 du Code pénal, L. 121-1 du Code de la consommation, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Alain F coupable de publicité trompeuse ;

"aux motifs que courant 1993 et 1994, Alain F, responsable de X, faisait paraître par petites annonces parues dans différentes journaux locaux une proposition d'activité de travail de copie d'adresses à domicile; qu'en réponse à leur demande de renseignements, les personnes intéressées recevaient de X un document intitulé "vous recherchez une activité sérieuse et rentable à domicile?" dont le contenu laissant à penser aux destinataires que l'annonceur offrait une activité rémunérée ("vous êtes l'une des personnes que nous recherchons", "nous cherchons justement un certain nombre de personnes qui désirent se lancer dans cette activité") susceptible de procurer des gains substantiels (1 920 francs par semaine); qu'en réalité, il ne s'agissait pour X que de vendre, pour une somme de 149 francs, une brochure susceptible d'aider son destinataire à réaliser une hypothétique activité de copies d'adresses à domicile; qu'à l'évidence, les lecteurs étaient aguichés par la perspective d'une activité salariée et non par celle de recevoir une brochure; que le prévenu ne saurait s'exonérer de sa responsabilité sous le prétexte qu'il a consulté son expert comptable sur la légalité des procédés, que son activité n'était pas clandestine, qu'il se trouvait en règle avec les administrations concernées et que sa comptabilité avait été régulièrement tenue; que le dossier fait apparaître à cet égard qu'Alain F avait fait imprimer environ 700 brochures et estimait en avoir vendu près de 350 à 149 francs et que son chiffre d'affaires a été évalué pour l'année 1993 à 232 570 francs ;

"alors que le délit de publicité trompeuse suppose, pour être constitué, que l'annonceur ait diffusé une publicité qu'il savait illicite; qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer Alain F, coupable de ce délit que les lecteurs de sa publicité étaient de toute évidence attirés par la perspective d'une activité salariée de travail de copie d'adresses à domicile et non par celle de recevoir une brochure destinée à informer les personnes désireuses d'exercer une telle activité, sans rechercher si le prévenu avait eu conscience de ce que le consommateur moyen pouvait sérieusement croire en une véritable offre de travail à domicile de sa part, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'élément intentionnel de l'infraction dont elle l'a déclaré coupable, et, partant, n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 122-6 du Code de la consommation et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Alain F coupable du délit de vente dite "à la boule de neige" ;

"aux motifs adoptés qu'Alain F proposait, par annonces publicitaires, la vente de thèmes astrologiques en offrant également la possibilité aux adhérents de diffuser à leur tour les études astrologiques d'X, moyennant une commission sur les ventes réalisées et une réduction sur son thème astrologique acheté ; que ce système de vente est formellement interdit par l'article L. 122-6 du Code de la consommation; que l'infraction est donc constituée ;

"et aux motifs propres qu'Alain F ne saurait valablement argumenter sur le prix de 100 francs payé par le diffuseur et celle de la valeur réelle d'un horoscope alors que lui même dans la description du système destinée au diffuseurs, indique notamment : 1°) le prix d'une étude astrologique est fixé à 170 francs; 2°) la marge qui est vous est réservée est de 100 francs soit plus de 50 % ;

"alors que le délit de vente dite "à la boule de neige" suppose, pour être constitué, que la réalisation de la vente soit subordonnée à la collecte d'adhésions ou inscriptions; que le simple fait d'offrir au consommateur le choix entre intégrer le réseau des distributeurs à l'occasion de l'achat d'une marchandise, moyennant une réduction de prix sur cette marchandise et une commission sur chaque vente, et acheter la même marchandise sans remise, s'il ne désire pas recruter de nouveaux acheteurs, n'entre pas dans les prévisions de l'article L. 122-6, alinéa 1er, du Code de la consommation puisque seule la remise, mais non la vente elle-même, est subordonnée à l'acceptation par le destinataire de l'offre de joindre le réseau de vente ;

"alors que le délit de vente "à la boule de neige" suppose encore pour être constitué, que le consommateur se voit proposer un avantage lié à l'acquisition de la marchandise, celle-ci lui étant proposée à un prix inférieur à sa valeur réelle, voire à titre gratuit, afin de l'inciter pernicieusement à accepter l'offre qui lui est faite de trouver de nouveaux acheteurs; qu'en l'espèce, Alain F faisait valoir, dans ses observations orales devant la cour d'appel, que le prix payé par les diffuseurs était au contraire largement supérieur à la valeur réelle des horoscopes; qu'en affirmant que cet argument était sans valeur dans la mesure où Alain F expliquait lui- même à ses diffuseurs que sur le prix de vente d'une étude astrologique fixé à 170 francs, la marge qui leur était réservée était de 100 francs, ce qui fait pourtant seulement apparaître qu'Alain F rémunérait ses distributeurs au moyen d'une commission sur les ventes qu'ils réalisaient, mais ne permet pas d'établir qu'il était parvenu à les recruter de façon insidieuse en leur offrant d'acheter un horoscope à un prix inférieur à sa valeur réelle, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable; d'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.