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Décisions

Cass. crim., 23 janvier 2001, n° 00-83.824

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roman

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. di Guardia

Avocats :

SCP Célice, Blancplain, Soltner.

TGI Paris, 31e ch., du 30 nov. 1998

30 novembre 1998

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par L Pierre, la société M, civilement responsable, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 15 mai 2000, qui pour publicité illicite en faveur du tabac, a condamné le premier à 200 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils; Vu le mémoire produit; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation du principe de la liberté de commerce et d'industrie des articles 7 de la loi du 247 mars 1791, 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, 111-3, 112-1 du Code pénal, L. 355-25, L. 355-26, L. 355-31 du Code de la santé publique, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale et insuffisance de motifs;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Pierre L coupable de publicité illicite en faveur du tabac ou d'un produit du tabac, l'a condamné à payer une amende de 200 000 francs et l'a condamné solidairement avec Serge J à payer au CNCT la somme de 500 000 francs à titre de dommages-intérêts;

"aux motifs qu'à l'évidence, la marque P rappelle la marque P1 ; que la notoriété acquise par P ne saurait suffire à faire disparaître l'infraction a à l'interdiction de publicité directe ou indirecte pour le tabac; qu'avec pertinence, le CNCT fait observer au surplus que la ressemblance entre les signes a été choisie à dessein par les dirigeants du groupe W qui en en font un élément essentiel de leur politique de diversification, visant, selon la partie civile, à tourner les dispositions des lois Veil et Evin; que les prévenus ne peuvent utilement invoquer la dérogation tirée des dispositions de l'alinéa 2 de l'article L. 355-26 du Code de la santé publique dès lors que la marque P est un service et non un produit, la société P ayant une activité d'agence de voyages (arrêt p. 9);

"alors, d'une part, qu'en allant jusqu'à interdire purement et simplement à la société demanderesse l'utilisation de son nom commercial, dont il n'est pas contesté que celui-ci avait été régulièrement déposé avant même l'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1991, sans tenir compte du principe supérieur de la liberté du commerce et de l'industrie auquel cette interdiction porte nécessairement atteinte, et sans même rechercher à concilier les intérêts en présence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;

"alors, d'autre part, que nul ne peut être puni pour un délit d'une peine qui n'est pas prévue par la loi; que viole ce principe la cour d'appel dont la décision aboutit objectivement à interdire à une société l'utilisation pure et simple de son nom commercial;

"alors, enfin, que constitue une atteinte disproportionnée par rapport aux objectifs de santé publique poursuivis par les articles L. 355-25 et L. 355-26 du Code de la santé publique, le fait d'interdire de manière générale et absolue à une société exerçant de manière effective une activité de tour opérator depuis 1987 d'utiliser son nom commercial, sans même relever, en dehors de l'indication de la marque elle-même, l'existence du moindre élément dans les publicités incriminées susceptible de rappeler le tabac ou un produit du tabac";

Attendu que, pour déclarer Pierre L coupable de publicité directe illicite en faveur du tabac, l'arrêt attaqué énonce que société M qu'il dirige, exploitant une agence de voyage sous le nom commercial de P, a effectué une campagne publicitaire par voie de presse et d'affichage en faveur de cette activité; que les juges retiennent que, dès lors que la dénomination utilisée pour vanter l'agence de voyage rappelle le tabac ou un produit du tabac, la publicité est illicite, par application des articles L. 355-25 et L. 355-26, anciens, du Code de la santé publique;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.