Cass. crim., 12 novembre 1997, n° 96-84.396
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Culié
Rapporteur :
Mme Ferrari
Avocat général :
M. le Foyer de Costil
LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par le Procureur général près la Cour d'appel de Caen, contre l'arrêt de cette même cour d'appel, chambre correctionnelle, du 6 septembre 1996, qui a relaxé Anne R dans les poursuites exercées contre elle pour publicité de nature à induire en erreur; - Vu le mémoire produit; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 121-1 et L. 121-6 du Code de la consommation, 339 de la loi du 16 décembre 1992, 591 et 593 du Code de procédure pénale, et contradiction de motifs; - Vu lesdits articles; - Attendu que la mauvaise foi de l'annonceur n'est pas un élément constitutif du délit de publicité fausse ou de nature à induire en erreur;
Attendu, en outre, que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société X fabrique des purées de légumes en utilisant un traitement thermique équivalent à la pasteurisation; que les préparations ayant été commercialisées sous un emballage qui mentionne le terme "fraîches", Anne R, dirigeante de la société, est poursuivie pour publicité trompeuse;
Attendu que, pour la relaxer, les juges d'appel, après avoir relevé que, sur l'intervention de la Direction Départementale, de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, la prévenue avait donné des instructions pour supprimer les mentions "frais" figurant sur l'emballage, exposent que le cartonnier a fait disparaître les manchettes en gros caractères mais omis d'enlever le qualificatif "fraîches"utilisé à deux reprises dans le texte en petits caractères figurant au dos du paquet de purée; qu'ils retiennent que l'inadvertance du cartonnier puis de la prévenue ne saurait caractériser l'élément intentionnel du délit; qu'ils ajoutent que le produit commercialisé "apparaît à l'évidence comme un plat cuisiné" de sorte que sa présentation n'est pas trompeuse pour le consommateur;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, d'une part, la négligence de l'annonceur, qui n'a pas vérifié la sincérité et la véracité du message publicitaire incriminé avant d'en assurer la diffusion, caractérise l'élément moral du délit de publicité trompeuse,et que, d'autre part, les juges ne pouvaient sans se contredire à la fois constater que la préparation avait subi un traitement thermique équivalent à la pasteurisation et affirmer que l'indication "purées fraîches" portée sur son emballage ne constituait pas une présentation fausse,la cour d'appel a méconnu les principes ci-dessus rappelés; d'où il suit que la cassation est encourue;
Par ces motifs, casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la Cour d'appel de Caen, du 6 septembre 1996, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel d'Amiens, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.