Livv
Décisions

Cass. crim., 23 avril 1997, n° 96-81.498

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Fabre

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. Dintilhac

Avocat :

Me Roger.

TGI Paris, 12e ch., du 17 mai 1995

17 mai 1995

Rejet du pourvoi formé par G Alain, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, 9e chambre, du 1er mars 1996, qui, pour complicité de publicité fausse ou de nature à induire en erreur, l'a condamné à 10 mois d'emprisonnement avec sursis et 150 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR: - Vu le mémoire produit; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 121-5 du Code de la consommation, 60 de l'ancien Code pénal, L. 121-7 du nouveau Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale:

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alain G coupable du délit de complicité de publicité fausse ou de nature à induire en erreur et l'a condamné à 10 mois d'emprisonnement avec sursis et 150 000 francs d'amende et a accordé des réparations civiles aux parties civiles;

"aux motifs qu'Alain G, qui intervenait dans la société comme prestataire de service, à un double titre, d'une part, en fournissant le matériel informatique permettant d'éditer des thèmes astraux et, d'autre part, en rédigeant et en réalisant le graphisme des courriers publicitaires, savait exactement comment étaient établis les thèmes proposés dans ces courriers et savait nécessairement qu'aucune étude préalable à l'envoi des courriers n'était effectuée; que sa responsabilité pénale sera retenue en tant que complice pour avoir fourni les moyens nécessaires à la commission du délit;

"alors qu'aux termes de l'article L. 121-5 du Code de la consommation, la complicité en matière de publicité mensongère est punissable dans les conditions de droit commun; qu'il en résulte que, conformément aux dispositions des articles 60 de l'ancien Code pénal et 121-7 du nouveau Code pénal auxquels renvoie cet article, la complicité n'est punissable que s'il est établi que le complice a agi en connaissant l'existence du caractère mensonger de la publicité ou en sachant qu'elle était de nature à induire en erreur un consommateur moyen sur la portée des engagements pris par l'annonceur; qu'en déduisant cette connaissance d'une présomption présentant un caractère manifestement hypothétique et sans s'attacher à la nature même de la prestation offerte, apporter aux consommateurs les espoirs et encouragements qu'ils sollicitent eux-mêmes, la Cour a privé sa décision de toute base légale;

"alors, d'autre part, qu'il appartenait à la cour d'appel de constater la réunion des éléments légaux de cette complicité selon les règles du droit commun, la seule affirmation qu'Alain G savait exactement comment étaient établis les thèmes proposés dans ces courriers et savait nécessairement qu'aucune étude préalable à l'envoi des courriers n'était effectuée étant insuffisante au respect des prescriptions légales; qu'ainsi l'arrêt est à nouveau entaché d'un manque de base légale; "que, de surcroît, dans ces conclusions d'appel, régulièrement déposées mais délaissées par l'arrêt attaqué, Alain G, contestant toute connaissance des méthodes commerciales de la société X et de ses dirigeants, faisait péremptoirement valoir que l'existence ou non de la publicité mensongère et la politique de prospection de la clientèle dépendait des seuls dirigeants de la société X et, partant, d'une décision prise en aval de son intervention et à laquelle il est toujours resté étranger, son rôle se bornant à la mise en page des courriers, la Cour a encore privé de base légale sa décision ";

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'Alain G est l'auteur d'un logiciel "Y " destiné à l'édition automatisée de prévisions et de thèmes astraux; qu'il a concédé une licence d'utilisation de ce programme à une société de vente par correspondance de produits se rapportant à l'astrologie; que cette société, qui avait par ailleurs obtenu le droit exclusif d'utiliser le nom et l'image d'une astrologue renommée, a adressé, à plusieurs milliers de personnes sélectionnées sur un fichier, une lettre personnalisée, censée émaner de cette astrologue, annonçant au destinataire qu'il résultait de l'étude de "la courbe de son biorythme astral de chance " ou de son dossier personnel qu'il se trouvait dans une situation catastrophique; que le document proposait au lecteur, pour y mettre un terme, la fourniture de prestations consistant en une "voyance astrale personnelle " ou en un thème astral de naissance, ainsi que la vente d'une médaille et d'un "bracelet des souhaits ";

Attendu que, sur la plainte de nombreuses personnes, Alain G, avec les dirigeants de la société et l'astrologue, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour escroquerie; que la cour d'appel a requalifié les faits en publicité trompeuse, et retenu que les lettres publicitaires avaient été diffusées, contrairement à la teneur du message, sans qu'aucune étude préalable de la situation du destinataire ait été effectuée par l'astrologue liée à l'annonceur, ni par aucun autre, et que la prestation personnelle proposée n'était pas fournie par cette astrologue mais éditée automatiquement à l'aide du logiciel "Y ";

Attendu que, pour déclarer Alain G coupable de complicité de ce délit, les juges du second degré relèvent que le prévenu a rédigé les lettres publicitaires et conçu leur graphisme; qu'ils énoncent qu'il connaissait en tant que créateur du logiciel fourni à l'annonceur le mode de réalisation des prestations offertes par la publicité et savait nécessairement qu'aucune étude personnalisée, préalable à l'envoi de celle-ci, n'avait été effectuée;

Attendu qu'en l'état de ces motifs exempts d'insuffisance, qui caractérisent en tous ses éléments la complicité de publicité fausse imputée au demandeur, la cour d'appel a justifié sa décision au regard de l'article L. 121-5 du Code de la consommation; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.