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Décisions

Cass. crim., 2 juin 1999, n° 98-84.879

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

M. Schumacher

Avocat général :

M. Di Guardia

Avocat :

Me Vuitton.

TGI La Roche-sur-Yon, ch. corr., du 25 n…

25 novembre 1996

LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par G Bleuette, épouse B, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 12 février 1998, qui, pour escroqueries et publicité de nature à induire en erreur, l'a condamnée à 1 an d'emprisonnement dont 8 mois avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils; -Vu le mémoire produit; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 405 et 42 anciens du Code pénal, 131 et 313 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Bleuette B coupable d'escroquerie au préjudice des parties civiles, en répression l'a condamnée à une peine de 1 an d'emprisonnement dont 8 mois avec sursis, outre une mise à l'épreuve de 2 ans et a statué sur les intérêts civils;

"aux motifs qu'il résulte des éléments de la procédure et des débats à l'audience qu'à la suite de plusieurs plaintes déposées, les enquêtes de gendarmerie et de la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes ont établi que, courant 1993, Bleuette B, sa soeur Mme C et sa belle-soeur Mme G ont fait paraître des annonces dans différents journaux sur le plan national, proposant une activité à domicile sous le nom "X"; les annonces étaient ainsi rédigées: "recherche personnes pour activité à domicile à temps complet ou partiel, écrire à (indication du nom, prénom et adresse de Mme B, ou Mme C, ou Mme G"), que les personnes qui répondaient se voyaient remettre des feuillets vantant les mérites du travail à domicile dans les termes suivants: "travail simple - libre - gagne de l'argent honnêtement et facilement"; il était proposé l'envoi d'une méthode intitulée "programme X" en échange d'un paiement de 150 francs ou 170 francs, la demande de la somme figurait après les mérites du travail à domicile sous le titre "garantie" et avec notamment les mentions suivantes: "cette somme vous sera remboursée intégralement avant la fin de votre premier mois d'activité; attention la présente offre est sérieuse et n'est pas une chaîne"; qu'après avoir envoyé le chèque, l'intéressé soit ne recevait rien, soit recevait plusieurs feuillets comportant le titre "plan de travail" mais aucun travail n'était proposé et le chèque était encaissé dans tous les cas; que les investigations permettaient de recenser 216 victimes au total pour un montant de 31 610 francs perçu; Bleuette B était concernée directement par 108 victimes pour un montant de 16 500 francs; les allégations figurant dans les annonces et les mentions inscrites dans les documents envoyés aux personnes intéressées par le travail à domicile étaient fausses, elles ont été destinées à la remise du chèque de 150 ou 170 francs par chaque personne, ce qui constitue le délit d'escroquerie; par ailleurs, la garantie par voie de presse de travaux à domicile, simples, permettant des gains honnêtes et faciles, constitue le délit de publicité mensongère; que Bleuette B ne peut valablement soutenir qu'elle n'avait pas conscience du caractère délictueux de ses agissements et qu'elle pensait qu'il s'agissait d'un simple travail de mise sous enveloppe, les chèques étant encaissés directement à son ordre;

"alors, d'une part, que de simples allégations mensongères ne sauraient être constitutives de manœuvres frauduleuses; qu'en l'espèce les mentions figurant dans les annonces et dans les feuillets se caractérisaient par leur caractère mensonger mais ne constituaient pas des manœuvres frauduleuses; qu'en déclarant néanmoins le délit d'escroquerie constitué, la Cour a violé les textes visés au moyen;

"alors, d'autre part, que les juges du fond sont tenus de caractériser les manœuvres frauduleuses qu'ils retiennent à l'encontre du prévenu; qu'en l'espèce, la Cour, en limitant sa motivation à une description des faits imputables à la prévenue sans caractériser en quoi ces faits étaient constitutifs des manœuvres frauduleuses nécessaires à caractériser le délit d'escroquerie, n'a pas légalement justifié son arrêt;

"alors, enfin, que les manœuvres frauduleuses doivent avoir été déterminantes de la remise des fonds; que la Cour, qui ne s'est pas expliquée sur le caractère déterminant des manœuvres frauduleuses, n'a pas légalement justifié l'arrêt déféré";

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;

"en ce que l'arrêt confirmatif a reconnu Bleuette B coupable de publicité mensongère et de nature à induire en erreur;

"aux motifs que la garantie par voie de presse de travaux à domicile simples permettant des gains honnêtes et faciles constitue le délit de publicité mensongère;

"alors qu'il résulte des motifs de l'arrêt que le feuillet contenant la garantie "de revenus honnêtes et faciles" était envoyé nommément à toute personne ayant répondu à l'annonce, de sorte que cette garantie à caractère individuel n'est pas constitutive d'une publicité au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation; qu'en retenant Bleuette B dans les liens de la prévention du chef du délit précité, la Cour a méconnu le sens et la portée des textes visés au moyen";

Les moyens étant réunis; - Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré la prévenue coupable;d'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 132-19, alinéa 2, du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale;

"en ce que l'arrêt a confirmé la condamnation de Bleuette B à 1 an d'emprisonnement dont 8 mois avec sursis;

"aux motifs que la sanction des premiers juges l'ayant condamnée à 1 an dont 8 mois d'emprisonnement avec sursis assorti d'une mise à l'épreuve pendant 2 ans avec obligation d'indemniser les victimes doit être confirmée, compte-tenu de la nature des faits qui se sont déroulés sur plusieurs mois;

"alors qu'il n'a pas spécialement motivé le choix d'une telle peine, pour partie sans sursis, en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur";

Attendu que, pour confirmer la peine d'emprisonnement, pour partie sans sursis, prononcée par le tribunal correctionnel, les juges du second degré, retiennent, notamment, que les escroqueries et les publicités mensongères ont été commises sur le plan nationnal au préjudice de 216 victimes à la recherche d'un emploi à domicile; qu'ils énoncent que cette peine est justifiée par la nature des faits qui se sont déroulés sur plusieurs mois;

Attendu qu'en cet état, la cour d'appel n'encourt pas le grief invoqué au moyen, lequel doit être écarté;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.