CA Rouen, ch. corr., 26 mars 1997, n° 96-00772
ROUEN
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Syndicat des détaillants spécialistes du disque, Débard (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tardif
Conseillers :
MM. Cardon, Gallais
Avocats :
Mes Veil, Sago
S Jean-Pierre a été à la requête du Ministère public cité directement par exploit délivré le 26 juin 1996 à Maire devant le Tribunal de police de Rouen.
Il était prévenu d'avoir à Rouen, courant juin 1995, effectué une publicité à l'égard du consommateur comportant une annonce de réduction de prix :
- sans faire apparaître l'importance de la réduction en valeur absolue ou en pourcentage par rapport au prix de référence alors que la publicité était faite à l'extérieur du point de vente ;
- en n'appliquant pas la réduction au prix le plus bas effectivement pratiqué au cours des trente jours précédant le début de la publicité et ce, pour quatre articles ;
Infractions prévues et réprimées par les articles 2-3 de l'arrêté du 2 septembre 1977, article 33 du décret du 30 décembre 1986.
Q a été à la requête du Ministère public cité directement par exploit délivré le 27 août 1996 à domicile (AR signé le 29 août 1996) devant le Tribunal de police de Rouen.
Il était prévenu d'avoir à Rouen, courant juin 1995, effectué une publicité à l'égard du consommateur comportant une annonce de réduction de prix :
- sans faire apparaître l'importance de la réduction en valeur absolue ou en pourcentage par rapport au prix de référence alors que la publicité était faite à l'extérieur du point de vente ;
- en n'appliquant pas la réduction au prix le pus bas effectivement pratiqué au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité et ce, pour quatre articles ;
Infractions prévues et réprimées par les articles 2-3 de l'arrêté du 2 septembre 1977, article 33 du décret du 30 décembre 1986.
Le tribunal par jugement contradictoire du 7 novembre 1996 a adopté le dispositif suivant :
"Déclare M. Q Pierre-Yves et M. S Jean-Pierre coupables des faits qui leur sont reprochés.
En répression, condamne M. Q Pierre-Yves à quatre amendes de dix mille francs (10 000 F) chacune et condamne M. S Jean-Pierre à quatre amendes de dix mille francs (10 000 F) chacune.
Reçoit le Syndicat des détaillants spécialistes du disque et la société Débard en leur constitution de partie civile ;
Condamne M. Q Pierre-Yves et M. S Jean-Pierre in solidum, à payer au Syndicat des détaillants spécialistes du disque la somme de cinq mille francs (5 000 F) à titre de dommages-intérêts.
Ordonne à titre de réparation civile la publication du présent jugement dans les journaux Paris-Normandie et Le Figaro, à concurrence de la somme de cinq mille francs (5 000 F) par insertion, à la charge de M. Q Pierre-Yves et de M. S Jean-Pierre.
Déboute la société Débard de sa demande de dommages-intérêts.
Condamne in solidum M. Q Pierre-Yves et M. S Jean-Pierre aux intérêts de droit à compter de ce jour".
Par déclaration au greffe du tribunal les prévenus le 18 novembre 1996 sur les dispositions pénales et civiles, le Ministère public le même jour sur les seules dispositions pénales et la partie civile le 19 novembre 1996 sur les dispositions pénales et civiles ont interjeté appel de cette décision.
S Jean-Pierre a été cité devant la cour par exploit délivré le 14 janvier 1997 à Mairie (AR signé le 20 janvier 1997). Il ne défère pas devant la cour.
Par lettre adressée au président de la chambre, il demande à être jugé en son absence après audition de son défenseur auquel il a donné pouvoir de le représenter. L'arrêt à intervenir sera rendu contradictoirement à son égard conformément aux dispositions de l'article 411 du Code de procédure pénale.
Q Pierre-Yves a été cité devant la cour par exploit délivré le 22 janvier 1997 à Mairie (AR signé le 24 janvier 1997). Il ne défère pas devant la cour.
Par lettre adressée au Président de la Chambre il demande à être jugé en son absence après audition de son défenseur auquel il a donné pouvoir de le représenter. L'arrêt à intervenir sera rendu contradictoirement à son égard conformément aux dispositions de l'article 411 du Code de procédure pénale.
La partie civile, le Syndicat des détaillants spécialistes du disque, régulièrement citée devant la cour par exploit délivré le 16 décembre 1996 à personne morale est absente représentée. L'arrêt sera rendu contradictoirement à son égard.
La partie civile, la société Débard, régulièrement citée devant la cour par exploit délivré le 16 décembre 1996 à personne morale (AR signé le 17 décembre 1996) est absente représentée. L'arrêt sera rendu contradictoirement à son égard.
Sur la recevabilité de l'appel :
Les dispositions des articles 496 et suivants du Code de procédure pénale étant respectées, les appels sont recevables.
Sur les prétentions des parties :
L'avocat des prévenus indique que X désirait mener un combat politique mettant en lumière la différence du taux de la TVA existant entre le livre et le disque d'où sa publicité effectuée à l'occasion de la fête de la musique du mois de juin 1995.
Il développe les faits tels qu'ils ressortent du procès-verbal de la DGCCRF et indique qu'il ne s'agit pas d'une publicité chiffrée mais d'une publicité littéraire.
Il expose les faits tels que, selon ses clients, s'est produite la seconde infraction.
Il demande donc à la cour de :
- dire non constituées les infractions aux dispositions de l'arrêté n° 77-105-P relatives à la publicité des prix reprochés à MM. Jean-Pierre S et Pierre-Yves Q et, en conséquence ;
- infirmer le jugement du 7 novembre 1996 en ce qu'il a condamné MM. Jean-Pierre S et Pierre-Yves Q des chefs d'infraction aux articles 2 et 3 de l'arrêté n° 77-105-P du 2 septembre 1977 ;
- relaxer purement et simplement MM. Jean-Pierre S et Pierre-Yves Q des chefs d'infraction aux articles 2 et 3 de l'arrêt n° 77-105-P du 2 septembre 1977 ;
- débouter le Syndicat des détaillants spécialistes du disque (SDSD) et la société Débard de leur constitution de partie civile.
Qu'il justifie ainsi :
Qu'après un bref rappel des faits, il sera démontré que MM. S et Q doivent être purement et simplement relaxés des fins de la poursuite.
I - Faits et procédure
Attendu que les vendredi 16 et samedi 17 juin 1995, à l'occasion de la fête de la musique, X a procédé à une opération promotionnelle annoncée de la manière suivante :
"le disque est surtaxé !
vendredi 16 et samedi 17 juin
pour la fête de la musique,
X baisse la TVA sur le disque de 18,6 % à 5,5 %*
(taux actuel sur le livre)
Hors prix vert : - 20 % sur toutes les nouveautés
Remise directe aux caisses
*X prend à sa charge la différente avec le taux légal
Offre valable uniquement les 16 et 17 juin 1995".
Qu'à la suite de cette annonce publicitaire, M. Max Débard, directeur de la société Mégasoft Loisirs, a cru devoir saisir la DGCCRF de Haute-Normandie le 19 juin 1995 au motif que X "ne peut prétendre baisser la TVA, cette mesure est du ressort de l'Etat".
Que sur cette dénonciation, les agents de la DGCCRF se sont présentés dans les locaux de X le 30 juin 1995 et ont demandé la communication du rouleau de caisse n° 5 du 16 juin 1995 sur lequel ils ont relevé vingt-quatre références de produits vendus entre 18 heures 30 et 19 heures 10 pour lesquels ils ont constaté que la remise annoncée avait été appliquée.
Qu'à cette même occasion, les agents de la DGCCRF ont également demandé la communication du registre informatique contenant les enregistrements des ventes réalisées pour les produits sélectionnés sur les deux mois précédant la promotion.
Attendu qu'à la suite de cette visite, la DGCCRF a, le 29 août 1995, dressé un procès-verbal d'infraction à l'encontre de X, lui reprochant d'avoir, à l'occasion de l'opération promotionnelle des 16 et 17 juin 1995, manqué aux dispositions des articles 2 et 3 de l'arrêté n° 77-105-P relatif à la publicité des prix.
Que selon ledit procès-verbal, X aurait commis :
- une infraction à l'article 2 de l'arrêté du 2 septembre 1977, en ne mentionnant pas la réduction de prix en valeur absolue ou en pourcentage par rapport au prix de référence sur l'affiche avant le passage en caisse du client ;
- quatre infractions à l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977, en ne pratiquant pas la remise annoncée sur le prix le plus bas pratiqué durant les trente derniers jours précédant la publicité.
Attendu que c'est dans ces conditions que MM. S et Q ont été cités par exploit des 26 juin et 11 juillet 1996 devant le Tribunal de police de Rouen, à la demande de M. le Procureur de la République, pour avoir "à Rouen, courant juin 1995, effectué une publicité à l'égard du consommateur comportant une annonce de réduction de prix :
- sans faire apparaître l'importance de la réduction en valeur absolue ou en pourcentage par rapport au prix de référence alors que la publicité était faite à l'extérieur du point de vente ;
- en n'appliquant pas la réduction au prix le plus bas effectivement pratiquée au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité et ce, pour quatre articles ;
infractions prévues et réprimées par les articles 2-3 de l'arrêté n° 77-105-P du 2 septembre 1977, article 33 du décret 86-1309 du 30 décembre 1986".
Qu'il sera cependant ci-après démontré que les cinq infractions retenues par le procès-verbal du 29 août 1995 ne sont nullement constituées.
II - Discussion :
1) Sur l'applicabilité de l'arrêté n° 77-105-P du 2 septembre 1977 :
Attendu que pour condamner MM. S et Q, le Tribunal de police de Rouen a retenu qu'"un slogan annonçant une baisse de la TVA sur le disque de 18,6 % à 5,5 % en dehors du fait que le slogan peut s'inscrire dans le cadre d'une campagne politique sur la baisse de la TVA sur le disque, fait apparaître une réduction sur le prix chiffrée".
Qu'il est cependant constant que l'annonce incriminée est située hors du champ d'application de l'arrêté du 2 septembre 1977.
Qu'en effet, la circulaire du 4 mars 1978 relative aux conditions d'application de l'arrêté n° 77-105-P du 2 septembre 1977 relatif à la publicité des prix à l'égard du consommateur (BOSP du 4 mars 1978 et rectificatif dans le BOSP du 21 mars 1978) dispose :
"Le champ d'application de l'arrêté, du seul fait qu'il est pris en application de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, est limité aux publicités de prix et d'annonces de réduction de prix comportant des indications chiffrées.
Il ne vise donc pas les annonces purement littéraires non chiffrées dont l'objet est de faire connaître que, d'une manière générale, les prix pratiqués par un magasin sur tout ou partie des produits sont plus bas que dans d'autres magasins ou qu'au cours d'une période précédente".
Qu'en l'espèce, il ne saurait être contesté que tel est précisément le cas de l'annonce incriminée qui revêt un caractère purement littéraire, au sens de la circulaire précitée du 4 mars 1978.
Qu'il convient de rappeler les termes de ladite annonce :
"le disque est surtaxé !
vendredi 16 et samedi 17 juin
pour la fête de la musique,
X baisse la TVA sur le disque de 18,6 % à 5,5 %*
(taux actuel sur le livre)
Hors prix vert : - 20 % sur toutes les nouveautés
Remise directe aux caisses
*X prend à sa charge la différence avec le taux légal
Offre valable uniquement les 16 et 17 juin 1995".
Qu'ainsi, il est clair que l'annonce incriminée revêtait un caractère purement littéraire et non chiffré dont l'objet était de faire connaître que, d'une manière générale, le taux de TVA appliqué aux disques est supérieur à celui appliqué aux autres produits culturels, tel que, notamment, le livre, et que X entend en conséquence, de manière temporaire, corriger une telle discrimination.
Qu'en l'espèce, et contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal de police de Rouen, la seule mention des taux de TVA applicables ne pouvait suffire à requalifier l'annonce incriminée en annonce chiffrée.
Qu'il est en effet constant que la simple indication du taux de TVA par X dans son annonce publicitaire ne visait qu'à sensibiliser les consommateurs, au cours d'une opération strictement liée à la Fête de la Musique, au fait que X entend manifester son opposition au caractère discriminatoire du taux de TVA appliqué au disque.
Qu'il convient, en effet, de préciser que le taux de TVA applicable au disque fait l'objet en France de critiques unanimes de la part des professionnels de la production et de la distribution de disques qui ont encore été renouvelées et relayées avec vigueur par la Presse Nationale à l'occasion du Midem organisé à Cannes en janvier 1997.
Que X s'est donc bornée à se faire l'écho de cette polémique auprès des consommateurs et pour l'illustrer à simuler, ce que serait le prix des disques en France s'il bénéficiait du taux de TVA réduit effectivement appliqué aux autres produits culturels.
Qu'il convient à cet égard de rappeler que le slogan incriminé débutait par l'accroche"Le disque est surtaxé".
Qu'ainsi l'annonce incriminée avait pour seul objectif de faire prendre conscience aux consommateurs de l'écart existant entre le taux de TVA applicable au disque et celui applicable, par exemple au livre, ce qui supposait nécessairement pour les besoins de la démonstration une comparaison des taux de TVA respectifs.
Que dès lors, l'annonce incriminée se bornait simplement à préciser la baisse de la TVA sur le disque du taux normal au taux réduit qui devrait légitimement lui être appliqué.
Qu'en aucun cas, il ne s'agit là d'une indication chiffrée de réduction de prix.
Que la cour ne manquera d'ailleurs pas de relever que le procès-verbal de contravention dressé le 29 août 1995 reproche à X de n'avoir pas fait apparaître"en valeur absolue ou en pourcentage"la réduction par rapport au prix de référence, ce qui démontre bien le caractère littéraire d'une telle annonce.
Que de fait, la présence des mentions de la valeur absolue et en pourcentage aurait effectivement eu pour effet de caractériser une opération de rabais de prix qui n'était en l'espèce pas le but poursuivi par X dont le seul objectif était précisément d'afficher une annonce littéraire visant à illustrer son combat pour l'application au disque du même taux de TVA que celui appliqué aux autres produits culturels.
Que la cour ne pourra donc que constater que les faits cités ne sont pas constitutifs des infractions poursuivies.
2) Sur la matérialité des infractions reprochées à MM. S et Q :
Attendu qu'au surplus, il apparaît que les quatre infractions à l'article 3 de l'arrêté n° 77-105-P reprochées à MM. S et Q ne sont pas constituées.
Qu'il est tout d'abord reproché à MM. S et Q de n'avoir pas pratiqué la réduction de prix annoncée au prix le plus effectivement pratiqué au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité et ce, pour quatre articles.
Qu'à ce titre, le procès-verbal d'infraction du 29 août 1995 a retenu que quatre titres, en l'espèce, Pavarotti and Friends, Radio Reggae, Barry Lindon, Techno Tribe, n'auraient pas fait l'objet d'une réduction du prix de vente pratiquée sur la base du prix le plus bas effectivement pratiqué au cours des trente jours précédents.
Qu'il convient de rappeler que, comme l'a elle-même relevé la DGCCRF dans son procès-verbal du 29 août 1995, trois des quatre titres en cause (Pavarotti, Radio Reggae, Techno Tribe) constituaient des titres mis en vente sur le marché français au mois de mai 1995.
Qu'il est en effet constant que la politique commerciale de X Rouen est de pratiquer un prix de lancement pour tous les nouveaux disques compacts nouvellement mis sur le marché français.
Qu'ainsi, pendant une période d'un mois, ces titres sont vendus avec une réduction de 20 % sur le prix de vente.
Qu'à l'expiration de ce délai d'un mois, le prix de vente est majoré de 20 %.
Qu'il est également constant qu'à la date de l'opération incriminée, c'est-à-dire les 16 et 17 juin 1995, les trois titres en cause ne faisaient plus l'objet du prix de lancement, le délai d'un mois étant expiré.
Qu'en conséquence, il ne saurait être reproché à MM. S et Q d'avoir appliqué la réduction annoncée sur un prix majoré de 20 %, puisque le prix minoré de 20 % relevé par la DGCCRF correspondait, en réalité, à un prix de lancement qui, comme tel, ne saurait être considéré comme le prix effectivement pratiqué retenu par l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977.
Qu'à cet égard, contrairement à ce qui a été jugé par le Tribunal de police de Rouen, un prix de lancement tel que celui pratiqué par X Rouen ne peut en aucun cas être retenu en tant que prix effectivement pratiqué au sens de l'arrêt du 2 septembre 1977.
Qu'il est en effet précisé, dans l'annonce incriminée, que l'opération ne s'applique pas aux "prix verts : - 20 % sur toutes les nouveautés".
Que dès lors, il est constant que ces deux réductions ne pouvaient en aucun cas être cumulées en raison du caractère exceptionnel et nécessairement limité dans le temps d'un prix de lancement.
Que dès lors, X était bien fondée à appliquer la réduction annoncée sur la base du prix de vente desdits articles.
Attendu en conséquence que la cour ne pourra que constater que les infractions reprochées à MM. S et Q ne sont pas constituées et devra en conséquence les relaxer des faits poursuivis.
Subsidiairement, l'avocat des prévenus sollicite en cas de condamnation, une réduction du montant des contraventions fixées par le premier juge.
Le Ministère public expose que la décision du premier juge, parfaitement motivée, doit être confirmée.
Il rappelle que les faits sont constitués, qu'il s'agit en effet d'une publicité extérieure destinée aux passants dans la rue, que le rabais pratiqué n'a pas été établi sur le prix de vente des trente derniers jours, lui-même faisant l'objet d'une remise de 20 % mais sur le prix hors remise, qu'il ne s'agit pas d'une annonce littéraire puisqu'il existe des pourcentages applicables et appliqués soit une différence de 18,6 % - 5,5 % = 13,1 %, que le contrôle a montré une baisse réelle de 16 % sur quatre produits.
Il requiert la confirmation du jugement entrepris.
Les parties civiles sollicitent de :
- Sur les réquisitions du Ministère public, statuer ce que de droit,
- Condamner MM. S Jean-Pierre et Pierre-Yves Q à payer à la société Anonyme Débard la somme de 1 796 000 F ainsi que celle de 50 000 F à titre de dommages-intérêts au Syndicat des détaillants spécialistes du disque ;
- Condamner les mêmes au paiement de 20 000 F, à chacun des concluants, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- Subsidiairement, ordonner telle mesure d'expertise qu'il plaira à la cour afin de fournir tous éléments permettant de déterminer le préjudice subi par la SA Débard du fait des agissements de MM. S et Q ;
- Condamner les défendeurs en tous les dépens.
Qu'elles justifient ainsi :
Sur la culpabilité :
La défense soutient que :
"X baisse la TVA de 18,6 % à 5,5 % remise directe aux caisses" est purement littéraire car non chiffrée.
Ceci est faux.
- C'est une infraction à l'Ordonnance de 1986, article 28, et aux articles 2 et 3 de l'arrêté du 77-105.
- C'est également une publicité mensongère
L. 121-1 du Code de la consommation
une pratique de prix illicites
Articles 7, 8 et 17 de l'ordonnance du 1er décembre 1996
justifiant le renvoi en correctionnelle.
Il ne s'agit pas d'une publicité littéraire mais d'un ensemble chiffré destiné à tromper le consommateur.
Cf. Rapport DGCCRF.
- Il n'y a pas eu baisse de la TVA, X n'en avait pas de droit !
- Elle avait (et elle l'a fait) obligation de calculer la TVA au taux légal en vigueur.
- Même si elle faisait une remise de prix équivalente à une réduction comparative à une baisse virtuelle du taux de TVA !
Les parties civiles :
Seront :
le Syndicat de détaillants spécialistes du disque
dont les statuts ont été établis le 22 janvier 1994
M. Débard en est le président (AGO du 17 juin 1996)
la SA Débard est inscrite au RC
Il est à noter que la défense elle-même cite la circulaire du 4 mars 1978 qui interdit les annonces de réduction de prix comportant des indications chiffrées.
Comment soutenir que tel n'était pas le cas lorsqu'on lit :
"baisse de 18,6 % à 5,5 % ... X prend à sa charge la différence avec le taux légal" ?
Ceci est vraiment léger.
Sur la constitution des parties civiles :
Ces parties civiles sont recevables selon une jurisprudence constante et ce, même pour un concurrent qui ne souffre qu'indirectement de la publicité mensongère.
Sur l'appel incident :
La concluante entend solliciter la condamnation des défendeurs au paiement 1 796 000 F.
Cet élément résulte des commentaires sur le résultat comptable du magasin de Rouen, du Cabinet d'Expertise Comptable Haussetete.
En supposant, et en admettant qu'il s'agisse d'une analyse unilatérale, nous sollicitons une mesure d'expertise pour déterminer le préjudice réel résultant de la désaffection créée par cette publicitaire mensongère.
Sur ce
La cour motive sa décision sur les considérations suivantes :
Sur la culpabilité :
Sur l'application de l'article 2 de l'arrêté du 2 septembre 1977 : aux termes de l'article 2 de l'arrêté n° 77-105-P du 2 septembre 1977, relatif à la publication des prix à l'égard du consommateur, "toute publicité à l'égard du consommateur comportant une annonce de réduction de prix doit obéir aux conditions suivantes : "lorsqu'elle est faite hors des lieux de vente, elle doit préciser l'importance de la réduction soit en valeur absolue, soit en pourcentage par rapport au prix de référence défini à l'article 3".
Au préalable, il est constant, en l'espèce, que la publicité était faite hors des lieux de vente puisqu'effectuée côté rue du magasin.
Il n'est pas contestable qu'un slogan annonçant une baisse de la TVA sur les disques de 18,6 % à 5,5 %, en dehors du fait que ce slogan peut s'inscrire dans le cadre d'une campagne politique sur la baisse de la TVA sur le disque, fait apparaître une réduction de prix chiffrée.
Il convient également d'ajouter que, verticalement, pour rendre l'offre plus attractive X a écrit qu'elle "prenait à sa charge la différence avec le taux légal", qu'ainsi il s'agit d'une annonce chiffrée qui tombe sous le coup de l'article 2 précité.
Les services de la DGCCRF ont établi que la réduction réelle consentie aux caisses était de 11,5 % alors que l'annonce en fixait les limites à la différence entre 18,6 % et 5,5 % soit 13,1 %.
En conséquence, l'infraction aux dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 2 septembre 1977 est constituée.
La culpabilité des prévenus sera donc confirmée.
Sur l'application de l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977 :
L'article 3 de ce même arrêté dispose que "le prix de référence visé par le présent arrêté ne peut excéder le plus bas effectivement pratiqué par l'annonceur pour un article ou une prestation similaire, dans le même établissement de vente au détail, au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité".
Le prix "effectivement pratiqué" s'entend du prix marqué, appliqué à l'ensemble de la clientèle ; dans ces conditions les prix de lancement, dits "prix verts" sont bien des prix marqués, effectivement pratiqués à l'égard de la clientèle courante, doivent être pris en considération pour la détermination du prix de référence visé à l'article 3 précité.
Or, en l'espèce, il résulte du procès-verbal que pour trois produits, sur les vingt-quatre retenus par les Services de la DGCCRF, Pavarotti and Friends, Radio Reggae et Techno Tribe, le prix le plus bas effectivement pratiqué au cours des trente jours précédant le début de la publicité, était le prix de lancement soit le prix de vente minoré de 20 %, que le prix de référence sur lequel la remise de 11,5 % a été appliqué pour ces trois produits n'a pas été le prix de lancement, et donc n'a pas été le prix le plus bas effectivement pratiqué.
M. Q et M. S doivent donc être déclarés coupables de ces quatre autres contraventions, infractions aux dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977.
Sur les sanctions :
Il convient de constater que les infractions ont été commises dans le cadre d'une action nationale de X tendant à obtenir un résultat politique selon les écritures présentées, qu'il n'existe donc aucune circonstance atténuante à ce comportement réfléchi.
Il convient en conséquence de fixer chaque amende due (au nombre de cinq) au maximum de la peine encourue soit 10 000 F par contravention.
Sur l'action civile :
Le Syndicat des détaillants spécialistes du disque et la société Débard se sont constitués parties civiles, il convient donc de les recevoir.
Sur les demandes du Syndicat des détaillants spécialistes du disque :
Devant la cour, le Syndicat des détaillants spécialistes du disque sollicite une somme de 50 000 F à titre de dommages-intérêts et de 20 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Compte tenu de l'objet du syndicat, il convient de lui allouer une somme de 5 000 F de ce chef et de 1 500 F par application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
Sur les demandes de la société Débard :
Devant la cour, la société Débard sollicite une somme de 1 796 000 F à titre de dommages-intérêts et de 20 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure pénale.
Elle justifie l'augmentation de ses demandes par rapport à la juridiction du premier degré par le fait qu'elle n'a pas réalisé son chiffre d'affaires prévisionnel et que cette différence est due au comportement agressif de X.
Il convient de constater que la société Débard ne justifie ses demandes que par le fait qu'elle n'a pas réalisé son chiffre d'affaires prévisionnel, qu'elle ne démontre pas qu'il existe un lien de causalité entre les faits poursuivis et son déficit comptable, celui-ci étant d'ailleurs établi sur la période allant de novembre 1994 à ce jour.
Il convient donc de la débouter de ses demandes.
Sur la publicité du présent jugement :
La publicité de la présente décision n'étant pas demandée à titre de réparation civile devant la cour, le jugement déféré sera donc modifié en ce sens qu'elle ne sera pas ordonnée puisque non sollicitée.
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, En la forme : Reçoit les appels, Au fond : Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré Q Pierre-Yves et S Jean-Pierre coupables, L'infirmant sur la sanction, Les condamne chacun à cinq amendes de 10 000 F chacune, Reçoit le Syndicat des détaillants spécialistes du disque et la société Débard en leur constitution, Condamne in solidum les prévenus à payer au Syndicat des détaillants spécialistes du disque la somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts et la somme de 1 500 F par application en cause d'appel de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, Déboute la société Débard de ses demandes, La présente procédure est assujettie à un droit fixe de 800 F (par prévenu) dont sont redevables S Jean-Pierre et Q Pierre-Yves, Fixe la duré de la contrainte par corps conformément à l'article 750 du Code de procédure pénale, Condamne les prévenus aux dépens de l'action civile.