TA Versailles, 3e ch., 28 mai 2002, n° 99-7517
VERSAILLES
Jugement
PARTIES
Demandeur :
Milliot
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dacre-Wright
Commissaire du gouvernement :
Mme Agier-Cabanes.
Rapporteur :
M. Malagies
Vu la requête, enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Versailles le 1er décembre 1999, présentée par M. Bric Milliot, demeurant <adresse>;
M. Milliot demande que le tribunal annule la décision commune du maire de la commune de Montlhéry et de l'organisateur de la brocante qui a lieu sur son territoire, par laquelle il lui est fait interdiction d'y exercer l'activité de commerçant non sédentaire;
Il soutient:
- qu'il a écrit au maire le 26 septembre 1999 en raison du comportement de M. Brianceau, titulaire d'une occupation du domaine public par contrat de location et organisateur sur le parking de la piscine d'une brocante mensuelle; que c'est cet organisateur qui a répondu à sa lettre en lui confirmant, le 30 septembre 1999 qu'en accord avec la mairie, il était décidé de ne plus le prendre comme commerçant alimentaire sur la brocante; qu'à la foire à la brocante du 30 octobre 1999, les forces de police lui ont interdit l'accès au rassemblement; que, par lettre du 2 novembre, le maire et le maire adjoint confirmaient au président de la fédération nationale des syndicats des commerçants non sédentaires les conditions dans lesquelles en application d'une convention passée avec la commune, M. Brianceau gère sa manifestation et soulignaient que dans ce cadre les conflits avec les exposants n'étaient pas du ressort de la collectivité locale et que rien n'autorisait M. Milliot à venir troubler l'ordre public samedi matin;
- qu'il n'a jamais été à l'origine d'un trouble à l'ordre public, ainsi que l'attestent par lettre trois témoins ayant participé à la brocante du 25 septembre 1999;
- que la décision de l'exclure est illégale comme contraire à la liberté du commerce et de l'industrie et comme prise par une personne incompétente pour se substituer au maire, seule autorité compétente pour exercer le pouvoir de police dans les grands rassemblements comme les foires et marchés ainsi que le prévoit l'article L. 2212-2 3e alinéa du Code général des collectivités territoriales; que le prestataire de services comme M. Brianceau n'a reçu délégation d'aucun pouvoir de police comme le refus d'attribution d'emplacement pour un motif, du reste erroné tiré d'un trouble à l'ordre public;
Vu la décision attaquée;
Vu le mémoire enregistré le 12 février 2000, présenté pour la commune de Montlhéry, représentée par son maire, par Maître Nageotte-Soflanos, avocat;
la commune de Montlhéry conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. Milliot à lui verser 5 000 F au titre de l'article L. 8-1 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel;
Elle soutient:
- que la requête est irrecevable comme non accompagnée de la décision attaquée;
- que, par décision du 24 novembre 1998, le maire a, au nom de sa commune, mis à la disposition de M. Brianceau le parc de stationnement de la piscine, charge à lui d'y organiser une foire à la brocante mensuelle;
- qu'en vertu de la circulaire du 16 janvier 1997, seul l'organisateur est responsable du déroulement conforme de la vente;
- que les conflits entre l'organisateur et M. Milliot participant â la brocante jusqu'en septembre 1999 sont étrangers et inopposables à la commune;
- que le litige relève du droit privé dès lors que le maire n'a jamais usé de ses pouvoirs de police, ni interdit l'exercice de l'activité de M. Milliot;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier;
Vu la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996;
Vu le Code du domaine public;
Vu le Code général des collectivités territoriales;
Vu le décret n° 96-1097 du 16 décembre 1996;
Vu la circulaire du 16 janvier 1997 portant sur la réglementation prévue par le chapitre premier, Titre 111, de la loi n° 96-603 du 5 juillet1996;
Vu le Code de justice administrative;
Vu les avis d'audience notifiés conformément à l'article R. 711-2 du Code de justice administrative;
Entendu à l'audience publique du 28 mai 2002: M. Malagies, conseiller, en son rapport; M. Milliot, requérant, en ses observations; Mme Agier Cabanes, commissaire du gouvernement, en ses conclusions;
Sur la compétence:
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa du I de l'article 7 du décret susvisé du 16 décembre 1996: "Lorsqu'une même opération de vente au déballage concerne plusieurs vendeurs, la demande, est adressée à l'autorité compétente par l'organisateur de cette opération pour la surface totale de vente envisagée"; que la circulaire ministérielle susvisée du 16 janvier 1997 précise, sans y rajouter, qu'il appartient dans ce cas à l'autorité compétente de vérifier que la manifestation commerciale est conforme à l'autorisation délivrée, auprès de l'organisateur, seul responsable du déroulement conforme de la vente; qu'il suit de là que, dans le cadre d'une telle manifestation, le pouvoir d'autoriser un commerçant non sédentaire à y participer ou de lui refuser la poursuite de sa participation est conféré à l'organisateur de cette manifestation;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision en date du 24 novembre 1998, le maire de la commune de Montlhéry a mis à la disposition de M. Brianceau, notamment, le parc de stationnement de la piscine municipale en vue de l'organisation, à des périodes prédéterminées, de diverses manifestations commerciales ou brocantes; qu'en vertu de ce qui a été dit ci-dessus, il appartenait à M. Brianceau d'autoriser les commerçants non sédentaires à participer à ces manifestations ou, le cas échéant, de leur refuser la poursuite de leur participation; que les décisions qu'il prenait ainsi constituaient, en réalité, à raison du lieu où se déroulait la manifestation, des décisions d'acceptation ou de refus d'occupation du terrain public communal; que ces décisions avaient, par suite, le caractère d'actes administratifs pris en vertu des prérogatives de puissance publique qui lui étaient dévolues en application des dispositions de l'article 7 du décret du 16 décembre 1996, rappelé ci-dessus, à la suite de la décision du 24 novembre 1998;
Considérant que, par une décision en date du 30 septembre 1999, M. Brianceau a indiqué à M. Milliot, commerçant non sédentaire tenant une buvette, qu'il ne voulait plus l'accueillir dans la brocante de Montlhéry en raison d'incidents survenus avec des usagers de façon répétée et, en dernier lieu, le 25 septembre 1999; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, cette décision a le caractère d'un acte administratif; que, par ailleurs, M. Milliot soutient sans être contredit que, ce même 30 septembre 1999, les forces de police lui ont interdit l'accès à la brocante en question; que cette intervention de la force publique résulte nécessairement d'une décision du maire de la commune de Montlhéry de mettre en œuvre, à la demande de M. Brianceau, les pouvoirs de police qu'il tient de l'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales afin d'assurer l'exécution de la décision d'interdiction; que, dès lors, il appartient au juge administratif de statuer sur les conclusions de M. Milliot contestant les conditions dans lesquelles est intervenue son éviction de la brocante de Montlhéry;
Au fond:
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête:
Considérant que M. Milliot doit être regardé comme sollicitant l'annulation des décisions précitées de M. Brianceau, d'une part, et du maire de la commune de Montlhéry, d'autre part;
Considérant que M. Milliot ne conteste pas la nature des incidents du 25 septembre 1999, ni la circonstance, mentionnée par M. Brianceau dans sa décision du 30 septembre 1999, que des incidents antérieurs l'avaient déjà opposé à ce dernier; que, par suite, M. Brianceau, en prenant la décision de l'exclure de la brocante de Montlhéry, et le maire de cette commune, en en assurant l'exécution par le concours de la force publique, se sont bornés à préserver la tranquillité de cette manifestation commerciale et le bon usage du domaine public communal;qu'ils n'ont pas, de ce fait, porté à la liberté du commerce une atteinte disproportionnée avec le but dans lequel ces décisions ont été prises;que celles-ci n'interdisant nullement à M. Milliot de participer à d'autres manifestations commerciales y compris, le cas échéant, sur le territoire de la commune de Montlhéry, elles ne peuvent être regardées comme constituant une interdiction générale et absolue de poursuivre son activité;que, dès lors, M. Milliot n'est pas fondé à en demander l'annulation;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative:
Considérant qu'il y a lieu, dans la circonstance de l'espèce, de condamner M. Milliot à verser une somme de 400 euros à la commune de Montlhéry;
DECIDE:
Article 1er: La requête de M. Bric Milliot est rejetée.
Article 2: M. Milliot versera à la commune de Montlhéry une somme de 400 euros en application de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.
Article 3: Le présent jugement sera notifié à M. Milliot et à la commune de Montlhéry. Copie en sera adressée à M. Brianceau.