CA Paris, 13e ch. A, 15 janvier 2002, n° 01-03056
PARIS
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guilbaud
Avocat général :
M. Madranges
Conseillers :
M. Nivose, Mme Geraud Charvet
Avocat :
Me Guerreiro.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE:
LA PREVENTION:
C Patrice est poursuivi pour avoir à Paris:
- du 18 septembre 1999 au 30 octobre 1999, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur le prix et les conditions de vente des biens qui font l'objet de la publicité, les procédés de vente, en l'espèce en proposant à la vente des tapis en annonçant une réduction de prix en pourcentage ou par un double marquage de prix alors que le prix de référence indiqué n'a jamais été effectivement pratiqué
- du 15 octobre 1999 au 30 novembre 1999, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur le prix et les conditions de vente des biens qui font l'objet de la publicité, les procédés de vente, en l'espèce en proposant à la vente des tapis en annonçant une réduction de prix en pourcentage ou par un double marquage de prix alors que le prix de référence indiqué n'a jamais été effectivement pratiqué
LE JUGEMENT:
Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré C Patrice:
coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, faits commis du 18-09-1999 au 30-10-1999, à Paris, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, faits commis du 15 octobre 1999 au 30 novembre 1999, à Paris, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation
et, en application de ces articles,
l'a condamné à 30 000 F d'amende
a ordonné la publication du jugement dans Le Figaro
a dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable le condamné
LES APPELS:
Appel a été interjeté par:
- Monsieur C Patrice, le 13 décembre 2000
- M. le Procureur de la République, le 13 décembre 2000 contre Monsieur C Patrice
DÉCISION:
Rendue contradictoirement en application de l'article 410 du CPP et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant sur les appels régulièrement formés par le prévenu et le Ministère public à l'encontre du jugement du Tribunal de grande instance de Paris (31e chambre) en date du 5 décembre 2000, auquel la cour renvoie pour l'exposé de la prévention.
Patrice C, prévenu régulièrement cité à personne ne comparait pas à l'audience de la cour; il sera statué contradictoirement à son égard, en application des dispositions de l'article 410 du Code de procédure pénale.
Monsieur l'Avocat général requiert confirmation du jugement.
L'avocat du prévenu dépose des conclusions sollicitant la relaxe, en faisant valoir que Monsieur C a justifié des prix initiaux qui auraient du être pratiqués sur les tapis concernés; il a été entendu en sa plaidoirie.
RAPPEL DES FAITS
Au mois de septembre 1999, la SARL X dont le gérant est Patrice C qui exploite un magasin de vente au détail de tapis situé <adresse>à Paris 15e, a annoncé au moyen d'affichettes apposées sur la vitrine de l'établissement et d'une publicité dans "les nouvelles du 16e", une opération devant se dérouler à partir du samedi 18 septembre 1999, de vente d'un lot d'environ 250 tapis iraniens, avec des remises de 50 % minimum; cette publicité énumérait une liste de tapis accompagnée d'un double marquage de prix.
Les fonctionnaires de la DGCCRF ont procédé le 28 septembre 1999 à un contrôle de l'opération en cours, qui selon Monsieur C devait se dérouler jusqu'à fin octobre; ils ont procédé à un relevé de prix et demandé la production d'un certain nombre de documents.
N'ayant pas reçu ces documents, les fonctionnaires de la DGCCRF se sont présentés une deuxième fois au magasin X le 3 novembre 1999, où ils ont constaté qu'une nouvelle opération commerciale était en cours, annoncée au moyen de calicots apposés sur la partie supérieure du magasin, indiquant "foire aux tapis: - 40 % sur 300 tapis d'orient, et - 30 % sur 200 tapis mécaniques"; Monsieur C a précisé que cette opération avait commencé le 15 octobre 1999 et devait s'achever fin novembre.
Au vu des constatations effectuées sur place, des documents remis par Monsieur C complétés de ses déclarations, les agents de la DGCCRF ont établi le 14 janvier 2000 un procès verbal relevant que le fait d'annoncer une réduction de prix en pourcentage et/ou par un double marquage de prix, par rapport à des prix n'ayant pas été effectivement pratiqués dans les 30 jours précédant le début de la publicité, constituait une publicité mensongère sur la réalité des rabais effectivement consentis pendant cette période.
Monsieur C, entendu par les services de police, a précisé que lors de ces opérations, les prix de référence et les prix après réduction étaient clairement indiqués, qu'il n'y avait aucune volonté de tromper le client mais au contraire plus de transparence par rapport aux pratiques de nombreux magasins de tapis qui proposent verbalement et systématiquement aux clients des réductions souvent très importantes; il a indiqué enfin que depuis ces contrôles, il affichait désormais des prix nets sur ses articles, avec pour conséquence une baisse du chiffre d'affaire de l'ordre de 10 à 20 %.
Aucune mention ne figure au casier judiciaire de Monsieur C.
Sur ce
Il ressort des constatations faites par les agents de la DGCCRF, que lors des deux opérations publicitaires réalisées, sur les articles dûment facturés par ses fournisseurs à Monsieur C, les prix de référence avant réduction indiqués étaient établis par application d'un coefficient multiplicateur élevé (moyenne arithmétique: 4,40), alors que l'examen du compte de résultat de la société pour l'exercice 1998, fait apparaître en réalité un coefficient multiplicateur de 2,20.
Les attestations versées au débat en cause d'appel (Monsieur Chevalier expert près la Cour d'appel de Paris et le directeur général de la Maison Y qui a fourni à la société X un lot de tapis à des conditions de remise importante), outre qu'elles sont imprécises sur les prix initiaux, n'établissent pas que ces prix de référence aient été réellement pratiqués par Monsieur C.
Au contraire, l'examen des factures de vente et "débits comptants" établis durant la période de 30 jours précédant le début de l'opération publicitaire (17 août au 17 septembre 1999), fait apparaître que les ventes de tapis aux consommateurs s'accompagnaient presque systématiquement de réductions de prix, la quasi-totalité des documents de vente indiquant "prix net" ou "prix exceptionnel", ce qui confirme la pratique de rabais systématiques par les établissements X.
Il est donc établi que Patrice C, lors des deux opérations publicitaires réalisées du 18 septembre au 30 octobre 1999 et du 15 octobre au 30 novembre 1999, a annoncé une réduction de prix en pourcentage et par un double marquage de prix, par rapport à des prix n'ayant pas été effectivement pratiqués dans les 30 jours précédant le début de la publicité, ce qui constitue une présentation de nature à induire en erreur le consommateur sur la réalité des rabais effectivement consentis pendant cette période.
L'infraction de publicité mensongère est constituée en tous ses éléments et le jugement sera confirmé sur la déclaration de culpabilité.
En raison des conséquences importantes que ce type de pratique, émanant d'un professionnel averti, emporte au détriment du consommateur, la cour estime devoir:
faire une application plus rigoureuse de la loi pénale en élevant le montant de l'amende prononcée par les premiers juges à la somme de 12 000 euros;
La cour ordonnera en outre la publication, par extraits, de l'arrêt à intervenir, dans le journal Le Figaro, aux frais du condamné.
Par ces motifs, LA COUR Statuant publiquement, contradictoirement en application de l'article 410 du Code de procédure pénale. Reçoit les appels du prévenu et du Ministère public, Confirme le jugement attaqué sur la déclaration de culpabilité. Le réformant en répression: Condamne Patrice C à une amende de 12 000 euros, Ordonne la publication, par extraits, du présent arrêt dans le journal Le Figaro, aux frais du condamné. Dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 120 euros dont est redevable le condamné.