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Décisions

CA Riom, 1re ch. civ., 22 février 2001, n° 00-00625

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Groupe Ford France (SA)

Défendeur :

Veysseyre (Epoux), Velay Automobiles (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gabin

Conseillers :

Mmes Valtin, Ladant

Avoués :

SCP Gutton-Perrin, Mes Rahon, Mottet

Avocats :

Mes Florentin, Bonnet, Bellut

TGI Puy-en-Velay, du 18 févr. 2000

18 février 2000

Vu le jugement du 18 février 2000 par lequel le Tribunal de grande instance du Puy-en-Velay a principalement:

- reçu l'intervention volontaire de la SA Ford France,

- jugé ladite société sans qualité à critiquer les opérations d'expertise,

- prononcé la résolution de la vente du véhicule Ford Maverick 2,7 TD conçue le 5 novembre 1996 entre la SA Velay Automobiles et les époux Veysseyre,

- jugé que la société Velay Automobiles doit reprendre le véhicule Ford,

- condamné la société Velay Automobiles à restituer aux époux Veysseyre, indivisément la somme de 192 100 F, outre intérêts au taux légal à compter du jugement,

- débouté les époux Veysseyre de leur demande en remboursement des frais occasionnés par la vente,

- condamné la société Velay Automobiles à leur verser indivisément la somme de 20 000 F de dommages-intérêts en réparation de l'immobilisation du véhicule,

- condamné la société Ford France à relever et garantir la société Velay Automobiles des condamnations sus-prononcées,

- débouté la société Ford France de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- condamné in solidum la société Velay Automobiles et la société Ford France à verser aux époux Veysseyre, indivisément, 7 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens;

Vu l'appel régulièrement interjeté de la décision susvisée par la SA Groupe Ford France, suivant déclaration du 29 février 2000;

Vu les conclusions d'infirmation déposées le 15 juin 2000 par Ford France SAS pour voir débouter les intimés de toutes leurs actions et conclusions en constatant que le rapport d'expertise a violé les droits de la défense et pour les voir condamner à lui payer les sommes de 50 000 F pour procédure abusive et 15 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Vu les conclusions de réformation déposées le 3 janvier 2001 par la société Velay Automobiles dans les termes essentiels suivants, faisant application de l'article 1641 du Code civil:

- dire que les époux Veysseyre ne rapportent pas la preuve d'un défaut rendant le véhicule impropre à son usage,

- rejeter en conséquence l'ensemble de leurs prétentions;

- à titre subsidiaire, réduire leurs réclamations, prononcer la résolution de la vente intervenue entre la société Ford France et la société Velay Automobiles, condamner la société Ford France à garantir la société Velay Automobiles de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre et condamner les époux Veysseyre, et, subsidiairement, la société Ford France au paiement d'une somme de 15 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Vu les conclusions de confirmation déposées le 12 septembre 2001 par les époux Veysseyre en ce qu'a été prononcée la résolution de la vente du véhicule du 5 novembre 1996 et tendant à l'allocation de la somme de 100 000 F à titre de dommages-intérêts ainsi qu'à la condamnation de la société Ford France à leur payer la somme de 15 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Attendu qu'en ce qui concerne la prétendue violation des droits de la défense par le rapport de l'expert Chabannes désigné par ordonnance de référé, invoquée par la société Ford France, il y a lieu tout d'abord de constater que l'expert a bien noté la présente à ses opérations de ladite société ainsi que celle de son conseil; qu'il a également joint à son rapport les courriers des 18 juillet et 8 septembre 1997 de celle-ci et a répondu aux dires qui y étaient contenus;

Que si l'expert n'a pas adressé son rapport à la société Ford France, étant observé qu'il n'y a pas eu, à la connaissance de la cour, divulgation d'un pré-rapport, il n'avait pas à le faire spontanément puisque celle-ci n'a pas invoqué, devant lui, la qualité de partie intervenante et qu'elle ne justifie pas lui avoir demandé copie de ce rapport;

Qu'en tout état de cause, la société Ford France a bien disposé dudit rapport devant les premiers juges et devant la cour; qu'elle a ainsi pu discuter ce rapport qui a répondu à ses dires; que c'est ainsi à tort que le tribunal a dit qu'elle n'avait pas qualité pour discuter l'expertise, alors, au surplus, qu'elle est intervenue volontairement à l'instance et que sa garantie a été sollicitée par la société Velay Automobiles;

Que dans ces conditions, le principe du contradictoire est respecté;

Attendu qu'il convient, en outre, d'observer que l'expert qui avait demandé des informations à la société Ford France concernant "certains documents (constructeur) indispensables pour analyser les "courbes" qu'il possédait, selon son courrier adressé au conseil de cette société, le 24 juillet 1997, n'a jamais reçu la courbe de puissance et la courbe couple moteur sollicitées;

Que l'appelante a estimé ne pas avoir d'obligation à fournir lesdits documents et a invité l'expert à prendre attache avec la société Nissan, ce qu'elle aurait dû faire elle-même, en sa qualité de constructeur du véhicule même si toutes les pièces dudit véhicule n'émanent pas de Ford même;

Qu'elle ne saurait maintenant reprocher à l'expert de ne pas avoir tenu compte de ces pièces qu'elle ne produit d'ailleurs toujours pas;

Qu'elle se contente de critiquer, comme la société Velay Automobiles, l'absence d'essais sur route en arguant d'une part que cela était indispensable, l'essai sur banc ne permettant pas, selon elle, d'évaluer la puissance du véhicule, d'autre part que la mission confiée à l'expert par l'ordonnance de référé lui aurait fait obligation de procéder à cet essai sur route, ce qui est une interprétation toute personnelle de la société Ford France, puisque l'ordonnance en cause prévoyait de faire "tous essais utiles";

Que l'expert a parfaitement répondu à cette mission en expliquant très précisément, dans son rapport, la fiabilité de l'essai sur banc, en l'absence des documents sollicités, étant précisé que s'il fait état de la puissance à la roue, c'est bien la puissance moteur qu'il a analysée et retenue avec ledit essai, comme noté en page 23 du rapport;

Qu'aucun avis spécialisé contraire, aucun document contraire ne sont produits à l'encontre des conclusions techniques de l'expert;

Qu'au surplus, le procès-verbal des mines et le certificat de conformité, ce dernier rédigé en octobre 1996, présentés en copies, datées de juin 1997, ne constituent pas des données fiables puisque antérieures à l'acquisition du véhicule par les intimés et aux réparations ayant entraîné le déficit de puissance, constaté par l'expert qui explique que la résolution du problème primitif de coupure d'alimentation par le remplacement par le constructeur de la cartographie a, en revanche, pénalisé le rendement du moteur, les critères de puissance et de couple étant très nettement inférieurs aux données du constructeur et qu'ainsi le véhicule ne correspond plus aux critères du constructeur;

Qu'on ne peut pas reprocher aux intimés d'avoir modifié leur demande par rapport à ce qu'elle était au moment du référé, puisqu'ils ne savaient pas alors quel était l'état de leur véhicule depuis la réparation effectuée et qu'on ne peut pas les blâmer non plus, vu les diverses interventions sur ledit véhicule, d'avoir refusé de reprendre leur véhicule avant de le faire examiner par un expert judiciaire, ce qui a d'ailleurs été révélateur au vu de ce qui précède;

Qu'ainsi, non seulement, ils ont acquis un véhicule qui n'était pas conforme aux critères de puissance contractuellement fixés, mais encore le déficit de puissance finalement constaté par l'expert sur un véhicule 4x4, dont il est légitime d'attendre des performances inévitablement dépendantes de la puissance du moteur, diminue l'usage de ce véhicule de telle façon que les intimés ne l'auraient pas acquis ou en auraient donné un moindre prix s'ils l'avaient connu;

Que dans ces conditions, c'est à juste titre que la résolution de la vente et la restitution du prix ont été prononcées en application des dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil;

Que c'est également à juste titre que les premiers juges ont débouté les époux Veysseyre de leur demande en remboursement des frais occasionnés par la vente, les documents produits relatifs à deux prêts contractés par ceux-ci en octobre et novembre 1996, soit un prêt pour besoins personnels de 30 000 F et un prêt de 60 000 F, ne permettant pas de dire que ces sommes ont été affectées en tout ou en partie au financement du véhicule en cause qui a été partiellement réglé par la reprise de leur ancien véhicule;

Attendu, par contre, que l'immobilisation du véhicule vicié a incontestablement causé un préjudice aux intimés qui ont été privés du véhicule acquis au cours de toute la procédure, n'ont eu un véhicule prêté par leur garage que pendant une courte période et qui justifient enfin avoir acquis, en août 1997, un véhicule beaucoup moins "sportif" pour 48 000 F environ;

Que dans ces conditions, la somme de 30 000 F indemnisera justement leur préjudice;

Attendu qu'ainsi la décision de première instance sera confirmée sauf à dire que c'est à tort que les premiers juges ont dit que la société Ford France était sans qualité à critiquer les opérations d'expertise et à augmenter les dommages-intérêts alloués en réparation de l'immobilisation du véhicule à 30 000 F comme dit ci-dessus;

Attendu que la société Ford France, succombant en son recours, sera condamnée aux dépens d'appel et à payer aux époux Veysseyre une indemnité complémentaire de 7 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Que toutes autres demandes seront rejetées comme non fondées;

Par ces motifs, Statuant publiquement et contradictoirement, Déclare recevable en la forme l'appel interjeté; Au fond, confirme la décision déférée sauf à: dire que c'est à tort que les premiers juges ont dit que la société Ford France était sans qualité à critiquer les opérations d'expertise, porter à la somme de 30 000 F (4 573,47 euros) au lieu de 20 000 F les dommages-intérêts alloués en réparation de l'immobilisation du véhicule Ford Maverick 2,7 TD; Condamne la société Ford France à payer aux époux Veysseyre une indemnité complémentaire de 7 000 F (1 067,14 euros) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; La condamne aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile; Rejette toutes autres demandes.