Cass. crim., 23 septembre 2003, n° 03-82.338
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
Mme Beaudonnet
Avocat général :
M. Mouton
Avocats :
SCP Parmentier, Didier.
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par Brun-Chautemps Bernadette, partie civile, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 20 juin 2002, qui dans la procédure suivie contre Philippe P et Fabrice O du chef d'infractions à la législation sur le démarchage à domicile, a prononcé sur les intérêts civils; - Vu le mémoire produit; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 121-25, L. 121-26, L. 121-28, L. 121-31 du Code de la consommation, 2, 591 et 593 du Code de procédure pénale;
"en ce que l'arrêt attaqué a débouté Bernadette Brun-Chautemps de ses demandes de dommages-intérêts;
"aux motifs que c'est à juste titre que le tribunal a relevé que le chèque litigieux, remis avant l'expiration du délai légal de sept jours, ce qui a constitué l'infraction, n'a été encaissé qu'après l'expiration du délai, en l'espèce le 20 juillet 1998; que Bernadette Brun-Chautemps, au contraire de M. et Mme Carlini, autres parties civiles devant le tribunal, n'a pas manifesté son intention de se rétracter de sa commande dans le délai de sept jours; que, si Bernadette Brun-Chautemps, par exemple, avait remis le chèque d'acompte le 16 juillet, soit au-delà du délai, et date à laquelle elle espérait encore se voir livrer sa véranda, le préjudice eût été le même, mais l'infraction n'aurait pas été constituée; qu'il en ressort, comme l'a noté le premier juge, qu'il n'y a pas de lien de causalité entre l'infraction commise ayant occasionné la condamnation prononcée par le tribunal et le préjudice subi, lequel n'est en réalité que la conséquence de la procédure collective entamée contre la société Akena;
"alors que le préjudice subi par un consommateur qui, démarché à son domicile, a remis un chèque à titre d'acompte avant l'expiration du délai visé à l'article L. 121-25 du Code de la consommation, est constitué, notamment, par le paiement de la provision de ce chèque; que la victime est fondée à obtenir de chacun des auteurs de l'infraction, outre du civilement responsable, le paiement d'une somme égale à ce montant, nonobstant les circonstances inopérantes que la victime ne se soit pas rétractée dans le délai de réflexion, que le chèque ait été encaissé après l'expiration de ce délai ou que le civilement responsable fasse l'objet d'une procédure collective";
Vu les articles L. 121-26 et L. 121-31 du Code de la consommation; - Attendu qu'il résulte du second de ces textes qu'à l'occasion des poursuites pénales exercées, en application du premier, contre le vendeur, le prestataire de services ou le démarcheur, le client qui s'est constitué partie civile est recevable à demander devant la juridiction répressive une somme égale au montant des paiements effectués ou des effets souscrits, sans préjudice de tous dommages-intérêts;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, démarchée à son domicile par Fabrice O, Bernadette Brun-Chautemps a, le 7 juillet 1998, commandé à la société Akena, dirigée par Philippe P, une véranda et remis au vendeur un chèque d'acompte de 11 190 F; qu'après la cessation des paiements de ta société Akena, le 30 juillet 1998, la commande n'a pas été honorée; que Fabrice O et Philippe P ont été définitivement condamnés par le tribunal correctionnel pour avoir obtenu une contrepartie avant l'expiration du délai de réflexion de 7 jours prévu par l'article L. 121-25 du Code de la consommation; que le tribunal a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de Bernadette Brun-Chautemps;
Attendu que, pour dire recevables, mais non fondées, les demandes de restitution d'acompte et de dommages- intérêts présentées par la partie civile, la cour d'appel, saisie du seul appel de Bernadette Brun-Chautemps, retient que le préjudice invoqué ne résultait pas de l'infraction sanctionnée, dès lors que le chèque d'acompte n'avait pas été encaissé avant l'expiration du délai légal de réflexion, durant lequel la cliente ne s'était pas rétractée;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés;d'où il suit que la cassation est encourue;
Par ces motifs: casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Poitiers, en date du 20 juin 2002, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi; Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Limoges, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.