Cass. crim., 23 janvier 2001, n° 00-82.714
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Roman (faisant fonction)
Rapporteur :
Mme Ferrari
Avocat général :
M. Di Guardia
Avocat :
Me Choucroy.
LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par X, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 23 mars 2000, qui, pour publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur les intérêts civils; - Vu le mémoire produit; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6, alinéa 1, L. 121-6 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse aux conclusions, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de publicité mensongère;
"aux motifs que Y est un établissement supérieur dispensant une formation dans le domaine du tourisme et des voyages, elle a diffusé dans le courant de l'année 1997 une brochure présentant ses activités dont l'auteur est X; qu'elle délivre des cartes d'étudiants à ses élèves, sans se soucier s'ils bénéficient d'une couverture sociale, alors qu'ils sont censés effectuer des études dans un établissement supérieur; que les élèves de cet établissement ont été trompés par les allégations mensongères contenues dans le prospectus que distribue Y, et plus particulièrement par la brochure éditée en 1997, qui fait croire qu'il dispose de quatre filières de spécialisation: - enseignement approfondi de langues étrangères, selon l'emploi du temps 4 à 6 heures de langues par semaine, sans équipement vidéo ou de salle destinée à cet usage; - enseignement de l'informatique: cet établissement dispose d'une salle dont les capacités d'accueil sont limitées, 3 ordinateurs fonctionnent en réalité, il s'agit de simples logiciels de bureautique, il propose théoriquement des logiciels spécialisés de type Socrate et Amadeus leur emploi est limité à deux heures d'informatique, certains cours annoncés dans la brochure prévoient une section aéronautique qui comprend théoriquement des cours de maintien, de calcul rapide, d'étude des fuseaux horaires, de billetterie, de tarification, d'hôtellerie, de service restauration qui ne sont pas effectivement enseignés; que l'école annonce une formation de qualité grâce à des enseignants diplômés de grandes écoles ou universités, cet enseignement s'étant limité à des cours d'esthétique; que l'école prévoit en outre de nombreux stages, seuls quelques élèves ont pu en bénéficier; qu'il convient de remarquer que les quelques postes obtenus correspondent à ces emplois de remplacement; que ces allégations mensongères sont des manœuvres appuyées par un prospectus luxueux, présentant une formation sérieuse, alliant aux enseignements spécifiques des stages en entreprises formant l'élève sur le terrain; elles ont été utilisées en 1997 pour persuader les étudiants de qualité moyenne, de s'y inscrire en suscitant chez eux des espoirs de réussite professionnelle; que, grâce à ces manœuvres frauduleuses, 150 élèves se sont inscrits dans cette formation dite supérieure pour un prix moyen de 19 500 francs auquel s'ajoutent les frais notamment de présentation au certificat de sécurité sauvetage et les frais d'inscription proprement dits de 2 800 francs; que ces élèves ont perdu le bénéfice d'une année de formation et une absence générée par les manœuvres de Y dans son document édité en 1997; que la formation qu'ils étaient en droit d'attendre de l'école, au vu de ses engagements dans la brochure publicitaire, ne leur a jamais été fournie: les stages à l'étranger n'ont pas été assurés, les stages en agence de voyages aéroport ou compagnie aérienne n'ont été proposés qu'à une faible minorité, durant peu de temps et ne comprenaient pas les heures promises; les cours d'informatique ont été effectués avec un matériel insuffisant en tout cas sur les logiciels professionnels annoncés;
"alors, d'une part, que le juge correctionnel ne peut prononcer une peine à raison d'un fait pénalement réprimé que s'il constate dans sa décision l'existence de tous les éléments constitutifs de l'infraction; que le délit de publicité mensongère suppose que le message incriminé puisse induire en erreur un consommateur moyen et porte sur l'un des éléments cités par la loi; qu'en l'espèce, ne caractérisent pas le délit de publicité mensongère et privent leur décision de toute base légale, les juges du fond qui se bornent à faire état de ce que les élèves ont été trompés par les allégations mensongères contenues dans le prospectus que distribue Y sans établir que la brochure litigieuse était de nature à tromper ou induire en erreur un consommateur moyen;
"alors, d'autre part, que le prévenu faisait, notamment, valoir dans ses conclusions d'appel: 1°) qu'en ce qui concerne les stages, quelle que soit l'école, chaque étudiant, suivant les recherches ou les propositions de stages, a la possibilité indifféremment d'exercer celui-ci, soit en France, soit à l'étranger; qu'il incombe à l'étudiant soit de trouver lui-même un stage, soit d'exprimer un tel souhait au sein de l'école; que quant aux stages nationaux, tous les employeurs n'ont pu être satisfaits; 2°) que, sur l'équipement et le matériel informatique, ordinateurs et logiciels professionnels, dès le mois d'avril 1995, dans l'intérêt de Y, X a procédé à l'acquisition de 14 postes informatiques; que, si le demandeur n'a pu acquérir les logiciels Socrate et Amadeus pour lesquels toute une procédure de régularisation et d'agrément s'impose, tous les moyens ont été mis en œuvre pour y pallier par le recours régulier à des sous-traitants extérieurs; 3°) qu'en ce qui concerne les diplômes préparés, si l'année de spécialisation comportait quatre options, pour l'année 1996-1997, seules deux ont été effectives, compte tenu de la réalité des étudiants inscrits; 4°) qu'en ce qui concerne la formation de qualité dispensée grâce à des enseignants diplômés de grandes écoles et universités, l'enseignement dispensé par Y était conforme à ce qui était annoncé; qu'ainsi, M. Gonzales, professeur de tourisme, natif du Chili, diplômé de l'université du Chili et de Paris était docteur en droit et en littérature; que Mme Beaurepaire, professeur d'italien, native d'Italie avait un doctorat de langue et de littérature étrangère obtenu à l'université de Rome; qu'ainsi, les allégations consignées dans la brochure litigieuse n'ont pas été trahies; qu'elles n'ont pu induire en erreur les étudiants puisque les enseignements annoncés ont été dispensés, les emplois du temps respectés, les diplômes préparés; que ces arguments étaient péremptoires et qu'en omettant de les examiner, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision";
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable et ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer le préjudice découlant de cette infraction; d'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;
Rejette le pourvoi.