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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. B, 20 mars 2003, n° 99-3553

NÎMES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Clemaron Conseils Environnement (SA)

Défendeur :

Svedala Allis Mineral Systems (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Conseillers :

M. Bertrand, Bancal

Avoués :

SCP Guizard, SCP Pomies Richaud Astraud

Avocats :

Me Ostian, SCPA Coet Delahaut-Lavoillotte.

T. com. Alès, du 1er juin 1999

1 juin 1999

Vu le contrat du 18 novembre 1994, par lequel la SA Clemaron Conseilss Environnement, devenait agent commercial de la SA Allis Mineral Systems France, actuellement Svedala Allis Mineral Systems, à compter du 1er janvier 1995,

Vu la lettre de rupture de la SA Svedala Allis Mineral Systems, adressée le 17 septembre 1997 à l'agent commercial,

Vu l'assignation du 15 juillet 1998 délivrée à la requête de la SA Clemaron Conseilss Environnement à la SA Svedala Allis Mineral Systems, aux fins de paiement:

1°) d'une facture du 27 juin 1997 pour 334 804,90 F TTC,

2°) d'un rappel de commissions pour 257 778,50 F TTC,

3°) d'une indemnité de rupture pour 634 035,60 F TTC,

Vu le jugement rendu le 1er juin 1999 par le Tribunal de commerce d'Alès:

- déboutant la SA Clemaron Conseilss Environnement de ses demandes en paiement de commissions,

- donnant acte à la SA Svedala Allis Mineral Systems de son règlement de 41 250 F,

- condamnant la SA Svedala Allis Mineral Systems au paiement:

1°) d'une indemnité de rupture de 266 480 F HT avec exécution provisoire,

2°) d'une indemnité de 8 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Vu l'appel interjeté le 21 juin 1999 par la SA Clemaron Conseilss Environnement,

Vu l'arrêt rendu le 9 novembre 2000 par la cour de ce siège:

- recevant les appels,

- ordonnant une expertise,

Vu le rapport de l'expert Merilhou, déposé le 4 mars 2002,

Vu les conclusions, avec bordereau récapitulatif, de la SA Clemaron Conseilss Environnement, signifiées le 15 mai 2002, sollicitant:

- la réformation partielle,

- la condamnation de la SA Svedala Allis Mineral Systems, à lui payer avec intérêts de droit:

1°) 118 832,02 euro TTC à titre de rappel de commissions,

2°) 191 712,67 euro à TTC à titre d'indemnité de rupture, calculée sur une base de trois années,

3°) 10 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- tout en donnant acte à SA Svedala Allis Mineral Systems de ce qu'elle a réglé le 24 juin 1999, 48 993,28 euro en exécution du jugement déféré,

Vu les conclusions, avec bordereau récapitulatif, de la SA Svedala Allis Mineral Systems, signifiées le 9 décembre 2002, sollicitant:

- la réformation partielle,

- la fixation à 3 839,20 euro TTC du rappel de commissions, et à 23 021,25 euro TTC de l'indemnité de rupture,

Motifs de la décision:

Sur le contrat d'agent commercial et sa portée:

Après un premier contrat à l'essai du 24 novembre 1992, par contrat du 18 novembre 1994, Christian Clemaron Conseilss Environnement devenait "Agent commercial exclusif de vente chargé de vendre le matériel de la Société Allis Mineral Systems France, de sa fabrication présente et future", sur le secteur géographique correspondant aux départements 38-73-74-01-69.

N'étaient pas concernés par cette exclusivité géographique:

- les constructeurs de matériel de carrière,

- le matériel d'occasion.

L'agent bénéficiait en outre d'une "option" sur le secteur géographique correspondant aux départements suivants: 25-39-71-26, où il n'avait pas d'exclusivité.

Le contrat fixait un mode de rémunération variable, d'après la nature des biens vendus, et le montant de la facturation (page 4).

Contrairement à ce que prétend le mandant, la vente de matériel d'occasion ou provenant d'autres fabricants, voire de matériels n'étant plus fabriqués, ne privait nullement l'agent de tout droit à commission, la clause d'exclusion de ces matériels, ne concernant que l'exclusivité géographique (page 2 du contrat, paragraphe secteur).

De même, l'agent commercial ayant permis à son mandant de réaliser des ventes au Liban, ce qui n'est pas contesté, a droit à des commissions, puisque ces opérations conclues pendant la durée du contrat d'agence, l'ont bien été grâce à son intervention. Et s'il est exact que le contrat n'a pas déterminé le mode de calcul des commissions pour de telles opérations, le mandant a bien accepté de les conclure dans ce pays, a considéré qu'une commission était due à l'agent, et ne peut donc le priver d'une rémunération "raisonnable", tenant compte de tous les éléments.

Enfin, s'il est prétendu par le mandant, que l'agent avait accepté un commissionnement réduit, inférieur à celui fixé par écrit, pour la période concernée par le rappel de commissions, la cour relève:

- que la lecture de la lettre du 23 avril 1997 de SA Clemaron Conseilss Environnement, ainsi que celle des autres courriers échangés entre les parties, ne démontre nullement l'existence d'un "accord des deux parties" pour accepter une telle réduction;

- que site contrat prévoyait en effet "en cas de rabais ou remises", la possibilité de réduire la rémunération de l'agent, c'était "en fonction des conditions particulières à chaque affaire, après accord des parties";

- que la SA Svedala Allis Mineral Systems n'établit nullement, pour chacune des affaires concernées par les demandes de commissions, qu'il y ait eu:

- rabais ou remises,

- ou autres conditions particulières,

- et accord des deux parties pour réduire les commissions;

- que SA Svedala Allis Mineral Systems ne prouve donc ni l'existence d'avenant, ni la renonciation de l'agent au paiement de sommes contractuellement dues.

Par contre, il ne peut être réclamé de commissions pour:

- les frais de transport,

- les emballages,

- les frais de montage (page 4 du contrat).

Et si des factures de reconditionnement et de réparation, ne font pas apparaître distinctement:

- les frais de main d'œuvre,

- le coût des pièces détachées,

il y a impossibilité de déterminer le commissionnement dû sur les seules pièces détachées.

Sur les rappels de commission:

Après l'assignation, la SA Svedala Allis Mineral Systems a réglé une commission de 41 250 F.

Dans ses dernières écritures, elle estime qu'il y a lieu d'évaluer le rappel de commissions à 3 839,20 euro TTC (ce qui correspond à 25 183,50 F).

Contrairement à ce qu'elle prétend, il ressort des recherches de l'expert (cf. page 9 et annexe 1), qu'un poste de concassage H 4000 MF, correspondant à une commande du 9 décembre 1996, a été facturé par la SA Svedala Allis Mineral Systems, le 7 février 1997, à la SA Tarmac Granulats, et livré à ce client, dans le Rhône à Saint-Didier-sur-Beaujeu (69), département concerné par l'exclusivité géographique (page 2 du contrat).

Alors que les parties avaient convenu, devant l'expert, que le fait générateur de la commission, était le lien de livraison et de fonctionnement des machines, l'agent commercial a donc droit à des commissions pour cette opération.

Si le mandant estime que l'expert est allé au-delà des demandes de l'agent, la cour relève:

- que lors de la procédure, ce dernier s'est toujours plaint de ne pas disposer de tous les documents utiles lui permettant d'établir ses factures de commissions, ce qui explique ses premières demandes;

- que pour l'année 1994, des commissions ont d'ailleurs été calculées par l'expert, en l'absence de factures, mais après examen de la comptabilité de la SA Svedala Allis Mineral Systems.

Alors que le sérieux, la compétence, et l'impartialité de l'expert judiciaire, ne sont pas sérieusement contestées, qu'il a procédé à des recherches approfondies concernant les factures litigieuses, qu'il a dans ses calculs, appliqué avec justesse, les clauses contractuelles,

que les contestations du mandant ne sont pas fondées, que certaines réclamations de l'agent commercial ont pu être écartées de ses calculs, faute de preuve de leur exigibilité, que les pièces produites par les parties confortent les recherches expertAlès (pages 11 à 17 du rapport),

il convient de faire droit aux demandes de condamnation de SA Svedala Allis Mineral Systems, au titre des rappels de commissions pour la somme suivantes:

année 1994:

- commissions dues à la SA Clemaron: 187 164,36 F

- commissions versées par la SA Svedala: 133 448,80 F

- solde dû HT: 53 715,56 F

année 1995:

- commissions dues à la SA Clemaron: 366 311,52 F

- commissions versées par la SA Svedala: 233 902,47 F

- solde dû HT: 132 409,05 F

année 1996:

- commissions dues à la SA Clemaron: 58 132,14 F

- commissions versées par la SA Svedala: 36 228,00 F

- solde dû HT: 21 908,14 F

année 1997:

- commissions dues à la SA Clemaron: 212 418,75 F

- commissions versées par la SA Svedala (y compris versement de 41 250 F, en cours d'instance): 129 590,10 F

- solde du HT: 82 828,65 F

soit un Total restant dû: HT de: 290 861,40 F; TTC de: 347 870,23 F

soit: 53 032,48 euro.

Ladite somme portera intérêt au taux légal, à compter de la demande en justice, formulée par assignation du 15 juillet 1998.

Le jugement déféré sera donc réformé en ce qu'il a débouté l'agent commercial de ses demandes en paiement de commissions.

Sur l'indemnité de rupture:

En application de l'article L. 134-12 du Code de commerce, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice du préjudice subi.

Cette indemnité doit s'apprécier, notamment en considération de la perte de commissions auxquels l'agent aurait pu prétendre, et de la réduction du bénéfice qu'il aurait tiré, de l'investissement réalisé pour l'exercice de son mandat.

L'indemnité compensatrice est souvent fixée à deux années de commission.

Pour le calcul de cette indemnité, doivent être prises en considération, les commissions perçues à l'occasion de la prospection de l'agent commercial, même en dehors de son secteur, ou pour des ventes indirectes.

Doivent donc être pris en considération l'ensemble des commissions dues à l'agent commercial, y compris celles concernant des opérations à l'étranger, approuvées par le mandant, dont il n'est pas contesté, qu'elles ont été le résultat du travail de l'agent.

Alors que les relations contractuelles ont d'abord débuté par un contrat à l'essai du 24 novembre 1992 puis par un contrat du 18 novembre 1994, qui s'est exécuté du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1997, que les recherches expertAlès et les pièces des parties ont établi une activité régulière de l'agent au moins sur 4 années (soit de 1994 à 1997), que le principe d'une indemnité de rupture est admis pour le mandant, de même que son calcul sur les trois derniers exercices, pour aboutir à deux années de commissions, correspondant à la moyenne annuelle de ces trois exercices, qu'il n'est pas justifié par la SA Clemaron Conseilss Environnement, d'un préjudice découlant de la rupture, excédant deux années de commissions, il convient de calculer comme suit l'indemnité compensatrice:

- moyenne annuelle HT des commissions des exercices 1995, 1996 et 1997: 212 288,80 F,

- soit pour deux années HT: 424 577,60 F;

et TTC: 307 794,80 F

soit: 77 412,82 euro, somme que portera intérêts au taux légal à compter de la demande en justice.

Des sommes précédemment allouées à l'agent commercial, il convient de déduire, comme le reconnaît d'ailleurs la SA Clemaron Conseilss Environnement, les sommes déjà perçues au titre de l'exécution provisoire, soit 48 993,28 euro.

Le jugement déféré sera donc confirmé partiellement en ce qu'il a reconnu le principe d'une indemnité compensatoire due à l'agent commercial, mais réformée quant à son montant.

Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile:

L'équité commandait d'allouer en premier ressort à la SA Clemaron, une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, justement arbitrée par les premiers juges,

En cause d'appel, l'équité commande de lui allouer une indemnité supplémentaire, à hauteur de 3 600 euro.

Sur les dépens:

Succombant, la SA Svedala Allis Mineral Systems supportera les dépens, qui comprendront notamment le coût de l'expertise de Laurent Merilhou.

Par ces motifs: LA COUR: Statuant publiquement, contradictoirement, Vu l'arrêt rendu le 9 novembre 2000 par la cour de ce siège; recevant les appels, ordonnant une expertise; Confirme partiellement le jugement déféré en ce qu'il a: 1°) dit que la SA Svedala Allis Mineral Systems devait régler à la SA Clemaron Conseilss Environnement, une indemnité de rupture; 2°) condamné la SA Svedala Allis Mineral Systems à payer à la SA Clemaron Conseilss Environnement, la somme de 6 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; 3°) condamné la SA Svedala Allis Mineral Systems aux dépens; Le réforme pour le surplus; Et statuant à nouveau, Condamne la SA Svedala Allis Mineral Systems, à payer à la SA Clemaron Conseilss Environnement: 53 032,48 euro à titre de rappel de commissions, 77 412,82 euro à titre d'indemnité compensatrice, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 15 juillet 1998; Dit que viendront en déduction, à due concurrence, les sommes déjà versées par la SA Svedala Allis Mineral Systems, soit 48 993,28 euro; Complétant ledit jugement, Condamne la SA Svedala Allis Mineral Systems à payer, à la Clemaron Conseilss Environnement, 3 600 euro, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Condamne la SA Svedala Allis Mineral Systems, aux dépens d'appel, qui correspondent notamment le coût de l'expertise de Laurent Merilhou, et autorise la SCP Guizard Servais, avoués, à les recouvrer, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.