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Décisions

TPICE, 5e ch. élargie, 22 novembre 2001, n° T-9/98

TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Mitteldeutsche Erdoel-Raffinerie GmbH

Défendeur :

Commission des Communautés européennes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lindh

Juges :

MM. García-Valdecasas, Cooke, Vilaras, Forwood

Avocats :

Mes Schütte, Maier, Lüdicke.

Comm. CE, du 1er oct. 1997

1 octobre 1997

LE Tribunal DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES (cinquième chambre élargie),

Faits et procédure

1. La requérante est une filiale de la société anonyme française Elf Aquitaine (ci-après "Elf"). Elle a été constituée en vue de la construction d'une raffinerie à Leuna (Land de Saxe-Anhalt) (ci-après la "raffinerie Leuna 2000" ou le "projet Leuna 2000") à la suite d'un accord du 23 juillet 1992 relatif à la privatisation d'une ancienne raffinerie à Leuna et de Minol AG, un distributeur de produits pétroliers raffinés. Les travaux de construction, qui ont débuté dans le courant de l'année 1993, devaient, selon les plans initiaux d'Elf, être terminés en juillet 1996. Ils n'ont, en réalité, pu être achevés qu'en novembre 1997 en raison de circonstances indépendantes de la volonté de la requérante, à savoir, principalement, la présence, sur le terrain, de bombes et de mines datant de la seconde guerre mondiale.

2. Les autorités allemandes ont décidé d'octroyer un ensemble d'aides à la requérante en vue de la réalisation du projet Leuna 2000, dont une aide d'un montant de 360 millions de marks allemands (DEM) au titre de la prime fiscale à l'investissement de 8 % pour les investissements dans les nouveaux Länder prévue par la Investitionszulagengesetz 1993 (loi de 1993 sur l'encouragement des investissements, ci-après la "InvZulG"). En 1995, une partie de ce montant, à savoir 97,5 millions de DEM, a été versée à la requérante pour les investissements qu'elle avait effectués au cours de l'année précédente dans le cadre de ce projet.

3. L'article 3, paragraphe 3, de la InvZulG prévoyait que, pour pouvoir bénéficier de la prime fiscale de 8 %, l'intéressé devait avoir commencé la réalisation de son projet d'investissement entre le 31 décembre 1992 et le 1er juillet 1994, et l'avoir terminée avant le 1er janvier 1997. Dans l'hypothèse où le projet n'était pas entièrement réalisé dans ce délai, l'intéressé était tenu de rembourser les sommes qu'il avait déjà perçues au titre de la prime fiscale. Par lettre du 24 novembre 1992, la Commission avait informé le Gouvernement allemand de sa décision du 11 novembre 1992 de ne pas soulever d'objection à l'encontre de ce régime d'aides au titre des articles 92 et 93 du traité CE (devenus, après modification, articles 87 CE et 88 CE).

4. Par décision du 30 juin 1993, la Commission a déclaré l'ensemble d'aides, visé au point 2 ci-dessus, compatible avec le marché commun au titre de l'article 92, paragraphe 3, du traité (JO C 214, p. 9, ci-après la "décision du 30 juin 1993"). Par décision du 25 octobre 1994, elle a autorisé l'octroi d'aides supplémentaires en faveur du projet Leuna 2000 (JO C 385, p. 35, ci-après la "décision du 25 octobre 1994").

5. L'article 3, paragraphe 3, de la InvZulG a été modifié par l'article 18, paragraphe 1, de la Jahressteuergesetz 1996 (loi fiscale annuelle de 1996), adoptée le 11 octobre 1995 et entrée en vigueur le 1er janvier 1996. En application de cette dernière disposition, pour pouvoir bénéficier de la prime fiscale de 8 %, l'intéressé devait désormais avoir terminé la réalisation de son projet d'investissement avant le 1er janvier 1999. La période durant laquelle la réalisation de ce projet devait avoir débuté était, elle, inchangée.

6. Par communication du 19 décembre 1995, le Gouvernement allemand a notifié tardivement cette modification à la Commission. Par lettre du 17 novembre 1995, le ministère fédéral des Finances avait, toutefois, donné des instructions aux administrations des finances des Länder de ne pas l'appliquer avant que la Commission ne l'ait autorisée conformément aux articles 92 et 93 du traité.

7. Par décision du 3 juillet 1996, notifiée au Gouvernement allemand le 31 juillet 1996, la Commission a ouvert la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, du traité à l'encontre de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 (JO C 290, p. 8). Elle a invité la République fédérale d'Allemagne ainsi que les autres États membres et les parties intéressées à présenter leurs observations. Le Gouvernement allemand et Elf ont communiqué leurs observations, respectivement, par lettres des 9 septembre et 29 octobre 1996. Le Gouvernement français a présenté ses observations le 30 octobre 1996, en renvoyant aux commentaires d'Elf.

8. Entre décembre 1996 et juillet 1997, la Commission et les autorités allemandes se sont réunies à plusieurs reprises pour discuter de l'affaire.

9. Le 1er octobre 1997, la Commission a clos la procédure en adoptant la décision 98-194-CE concernant la prolongation du régime de prime fiscale à l'investissement de 8 % pour les investissements dans les nouveaux Länder introduite par la loi fiscale annuelle de 1996 (JO 1998, L 73, p. 38, ci-après la "décision litigieuse"). Son dispositif se lit comme suit:

"Article premier

L'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, qui modifie l'article 3 de la [InvZulG] en ce sens que la prime fiscale à l'investissement de 8 % est désormais accordée aux investissements commencés après le 31 décembre 1992 et avant le 1er juillet 1994 et terminés avant le 1er janvier 1999 (au lieu d'avant le 1er janvier 1997), introduit une aide d'État supplémentaire en faveur des entreprises qui ont effectué des investissements dans les nouveaux Länder. Cette aide, qui est entrée en vigueur en violation de l'article 93, paragraphe 3, du traité, est illégale. Elle est incompatible avec le marché commun, puisqu'elle ne contribue pas à la réalisation d'un des objectifs énumérés à l'article 92, paragraphes 2 et 3, du traité.

Article 2

L'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 doit être abrogé. L'Allemagne est tenue d'exiger le remboursement de toutes les aides octroyées en application de cette disposition. Le montant de l'aide doit être remboursé conformément aux procédures et aux dispositions du droit allemand, majoré des intérêts calculés sur la base du taux de référence appliqué pour l'appréciation des régimes d'aides régionales, ces intérêts commençant à courir depuis la date d'octroi de l'aide.

Article 3

L'Allemagne informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures prises pour s'y conformer.

Article 4

La République fédérale d'Allemagne est destinataire de la présente décision."

10. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 janvier 1998, la requérante a introduit le présent recours.

11. Le 30 janvier 1998, le Gouvernement allemand a notifié à la Commission un compromis conclu le 30 décembre 1997 entre Elf et la requérante, d'une part, et le Bundesanstalt für vereinigungsbedingte Sonderaufgaben (office fédéral des dépenses spéciales liées à la réunification, ci-après le "BvS"), d'autre part. Ce compromis prévoyait, notamment, le paiement, par le BvS et le Land de Saxe-Anhalt, respectivement, de 240 millions de DEM et de 120 millions de DEM à la requérante. La mise en œuvre du compromis était soumise à l'autorisation préalable de la Commission au regard des règles communautaires en matière d'aides d'État.

12. Par lettre du 13 mars 1998, le Gouvernement allemand a indiqué à la Commission que la décision litigieuse avait été exécutée par le biais de l'article 12 de la Gesetzes zur weiteren Fortentwicklung des Finanzplatzes Deutschland (loi pour le développement futur de la place financière d'Allemagne). Cette loi a été adoptée par le Bundestag le 13 février 1998, approuvée par le Bundesrat le 6 mars 1998 et publiée le 24 mars 1998.

13. Par ordonnance du 30 avril 1998, le président de la quatrième chambre élargie du Tribunal a suspendu la procédure jusqu'au 15 juin 1998. Par ordonnance du 10 juin 1998, il a étendu cette suspension jusqu'au 15 juillet 1998.

14. Par acte séparé, déposé au greffe le 21 septembre 1998, la Commission a soulevé une exception d'irrecevabilité au titre de l'article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

15. La requérante a déposé ses observations sur l'exception d'irrecevabilité le 9 novembre 1998.

16. Le 17 mars 1999, le Tribunal (cinquième chambre élargie) a, en application de l'article 64, paragraphe 3, du règlement de procédure, invité les parties à donner des précisions sur le compromis ainsi qu'à indiquer si elles estimaient qu'il y aurait toujours lieu de statuer dans l'hypothèse où il viendrait à être mis en œuvre. Les parties ont répondu à cette demande par lettres du 31 mars 1999.

17. Par ordonnance du 11 mai 1999, le Tribunal (cinquième chambre élargie) a joint au fond l'exception d'irrecevabilité.

18. Le 13 mars 2000, la Commission a adopté une décision dans laquelle elle a constaté que le compromis ne contenait aucun élément d'aide d'État au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité pour ce qui est du paiement de 240 millions de DEM par le BvS (ci-après la "décision du 13 mars 2000"). S'agissant du paiement de 120 millions de DEM par le Land de Saxe-Anhalt, elle a considéré que cette mesure constituait une aide d'État, mais l'a déclarée compatible avec le marché commun.

19. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre élargie) a décidé d'ouvrir la procédure orale. Dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, il a invité les parties et la République fédérale d'Allemagne à produire certains documents et à répondre à certaines questions. Les parties et la République fédérale d'Allemagne ont donné suite à cette demande dans le délai imparti.

20. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience du 25 janvier 2001.

Conclusions des parties

21. La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- rejeter l'exception d'irrecevabilité;

- annuler la décision litigieuse dans la mesure où elle lui porte préjudice;

- condamner la Commission aux dépens.

22. La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- rejeter le recours comme irrecevable;

- à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé;

- condamner la requérante aux dépens.

Sur la recevabilité

23. La Commission soutient que le recours est irrecevable au motif que la requérante n'est pas directement et individuellement concernée par la décision litigieuse et qu'elle n'a aucun intérêt à obtenir son annulation.

24. En l'espèce, il convient d'examiner, tout d'abord, l'existence d'un intérêt à agir chez la requérante.

Sur l'intérêt à agir

Arguments des parties

25. La Commission estime que la requérante ne justifie pas d'un intérêt à agir dès lors qu'il est manifeste que le régime d'aides en cause ne serait pas réintroduit en cas d'annulation de la décision litigieuse. Elle expose, à cet égard, que la République fédérale d'Allemagne a pris les mesures législatives nécessaires pour exécuter cette décision, que ces mesures sont entrées en vigueur le 28 mars 1998 et que les administrations fiscales des Länder ont commencé à réclamer aux investisseurs qui n'avaient pu terminer la réalisation de leur projet avant le 1er janvier 1997 le remboursement des sommes qu'ils avaient déjà perçues au titre de la prime fiscale de 8 %. Elle fait également observer que le Gouvernement allemand n'a pas introduit de recours en annulation contre la décision litigieuse et n'est pas intervenu au soutien des conclusions de la requérante dans le cadre du présent recours.

26. La Commission ajoute que le compromis, qu'elle a approuvé par décision du 13 mars 2000, a réglé le litige relatif au paiement de la prime fiscale de 8 % à la requérante. Elle fait remarquer que cette dernière s'est d'ailleurs engagée à se désister du présent recours une fois l'approbation dudit compromis donnée et la somme de 360 millions de DEM versée.

27. La requérante prétend justifier d'un intérêt à agir.

28. En premier lieu, elle soutient que, en cas d'annulation de la décision litigieuse, l'abrogation de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 ne pourra, en vertu du principe de protection de la confiance légitime, lui être opposée. En outre, en l'absence de pareille annulation, elle ne serait pas en mesure, selon le droit allemand, de présenter d'éventuelles demandes accessoires.

29. En deuxième lieu, la requérante estime que le fait que la République fédérale d'Allemagne n'ait pas attaqué la décision litigieuse et ne soit pas intervenue dans le présent recours est dénué de toute pertinence.

30. En troisième lieu, elle relève que la question de la recevabilité du recours doit être appréciée par rapport à la date du dépôt de la requête et fait remarquer que, à cette date, le compromis n'avait pas encore été approuvé par la Commission, et l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 n'avait pas encore été abrogé.

31. S'agissant du compromis, la requérante a précisé, à l'audience, que, à la suite de la décision du 13 mars 2000, le BvS lui avait versé la somme convenue de 240 millions de DEM. Pour ce qui est de la somme de 120 millions de DEM à charge du Land de Saxe-Anhalt, elle a expliqué que, initialement, il était prévu une compensation avec la somme de 97,5 millions de DEM qu'elle avait perçue en 1995 au titre de la prime fiscale de 8 %. La Commission ayant soulevé des objections à l'encontre d'une telle compensation, la requérante aurait remboursé cette dernière somme en la déposant sur un compte bloqué afin d'éviter qu'il ne soit réintégré au budget général du Land de Saxe-Anhalt - les primes fiscales à l'investissement ne relevant, en effet, pas d'un poste de dépenses spécifique - et ne puisse, de ce fait, être utilisé par ce Land pour effectuer le paiement qui lui incombe en vertu du compromis. Selon la requérante, si le Tribunal devait annuler la décision litigieuse et si les autorités allemandes devaient, par voie de conséquence, révoquer l'avis de recouvrement relatif à la somme de 97,5 millions de DEM, celle-ci deviendrait disponible aux fins de l'exécution du compromis. Quant au solde de 22,5 millions de DEM, le BvS aurait accepté de le verser à la requérante devant l'impossibilité du Land de Saxe-Anhalt d'assumer une telle charge financière.

Appréciation du Tribunal

32. En vertu d'une jurisprudence constante, la recevabilité d'un recours en annulation introduit par une personne physique ou morale est subordonnée à la condition qu'elle justifie d'un intérêt à agir (ordonnance du Tribunal du 10 février 2000, Andriotis/Commission et Cedefop, T-5-99, Rec. p. II-235, point 36, et arrêt du Tribunal du 6 juillet 2000, AICS/Parlement, T-139-99, Rec. p. II-2849, point 28). Un tel intérêt n'existe que si l'annulation de l'acte est susceptible, par elle-même, d'avoir des conséquences juridiques (arrêt de la Cour du 24 juin 1986, Akzo Chemie/Commission, 53-85, Rec. p. 1965, point 21, et arrêt du Tribunal du 25 mars 1999, Gencor/Commission, T-102-96, Rec. p. II-753, point 40).

33. Par ailleurs, l'intérêt à agir en annulation s'apprécie au jour où le recours est formé (arrêt de la Cour du 16 décembre 1963, Forges de Clabecq/Haute Autorité, 14-63, Rec. p. 719, 748, et arrêt du Tribunal du 15 décembre 1999, Kesko/Commission, T-22-97, Rec. p. II-3775, point 55).

34. En l'espèce, il ne saurait être tiré argument du fait que le Gouvernement allemand a pleinement exécuté la décision litigieuse et n'aurait pas l'intention de réintroduire le régime d'aides en cause en cas d'annulation de celle-ci pour dénier un intérêt à agir à la requérante. Il ressort, en effet, du dossier que si l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 avait été maintenu, elle aurait bénéficié de la prime fiscale de 8 % pour son projet d'investissement, dès lors qu'elle remplissait toutes les conditions prévues à cet égard par la InvZulG et qu'elle avait terminé ce projet avant le 1er janvier 1999. Dans ces circonstances, il ne saurait être exclu que, ainsi qu'elle l'avance, la requérante puisse faire valoir certaines prétentions auprès des autorités allemandes dans l'hypothèse où la décision litigieuse serait jugée illégale par le Tribunal.

35. Il ne saurait également être tiré aucune conclusion du choix, tout à fait légitime, du Gouvernement allemand de ne pas poursuivre, de son côté, l'annulation de la décision litigieuse ni d'intervenir au soutien des conclusions de la requérante dans la présente affaire.

36. Par ailleurs, la conclusion, le 30 décembre 1997, du compromis n'a pas privé la requérante de son intérêt à agir. Il est, en effet, constant entre les parties que la mise en œuvre de ce compromis était subordonnée à l'approbation de la Commission. Or, celle-ci n'est intervenue que le 13 mars 2000, soit plus de deux ans après la date d'introduction du présent recours.

37. Quant à la question de savoir si ladite approbation aurait, par la suite, retiré à la requérante son intérêt à poursuivre l'instance, il suffit de constater que la Commission n'a pas sérieusement mis en doute l'affirmation de la requérante selon laquelle le Land de Saxe-Anhalt n'aurait la faculté de disposer de la somme de 97,5 millions de DEM, actuellement déposée sur un compte bloqué, pour mettre entièrement en œuvre le compromis que dans l'hypothèse où le Tribunal annulerait la décision litigieuse (voir point 31 ci-dessus). L'allégation, formulée par la Commission lors de l'audience, selon laquelle la requérante tendrait à obtenir un double paiement de la somme de 360 millions de DEM, une première fois au titre du régime d'aides en cause et une seconde fois au titre du compromis, doit être écartée. En effet, le compromis prévoit expressément que la requérante remboursera au BvS toute somme qui lui serait versée au titre de la prime fiscale de 8 % et qui lui permettrait de disposer d'un montant supérieur à 360 millions de DEM.

38. Il résulte des considérations qui précèdent que la requérante justifie d'un intérêt à obtenir l'annulation de la décision litigieuse.

Sur la question de savoir si la requérante est directement concernée par la décision litigieuse

Arguments des parties

39. La Commission soutient que la décision litigieuse ne porte pas directement atteinte aux droits de la requérante.

40. Elle affirme que l'obligation de remboursement imposée à la requérante résulte non pas de la décision litigieuse, mais du fait qu'elle ne remplissait pas la condition prévue par la InvZulG, dans sa version de 1993, selon laquelle la réalisation du projet d'investissement devait être terminée avant le 1er janvier 1997. À cet égard, l'article 2 de la décision litigieuse ne viserait, en fait, que les aides octroyées en application de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996. Or, il n'existerait aucun cas d'application dudit article 2 dès lors que, à la suite de la lettre du 17 novembre 1995 du ministère fédéral des Finances (voir point 6 ci-dessus), la modification de l'article 3, paragraphe 3, de la InvZulG n'a pas été mise en œuvre.

41. La Commission ajoute que, à la date du dépôt de l'acte par lequel elle a soulevé une exception d'irrecevabilité, les autorités allemandes n'avaient pas encore exigé de la requérante qu'elle rembourse la somme de 97,5 millions de DEM déjà obtenue au titre de la prime fiscale de 8 % pour l'année 1994. Elle estime que, si la décision litigieuse avait directement entraîné une obligation de remboursement, celui-ci aurait dû intervenir dans un délai de deux mois à compter de la notification de cette décision.

42. Enfin, la Commission invoque le fait que, en cas d'annulation de la décision litigieuse, la requérante ne pourrait prétendre à aucun paiement au titre de la prime fiscale en cause, dès lors que la modification apportée à la InvZulG par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 a entre-temps été abrogée.

43. La requérante soutient qu'elle est directement concernée par la décision litigieuse.

44. En premier lieu, elle relève que la prime fiscale est octroyée directement par le droit fédéral allemand, de sorte que toute entreprise qui répond aux conditions prévues par la InvZulG a droit à cette prime sans qu'une décision discrétionnaire de l'administration soit nécessaire. Elle indique, ensuite, qu'elle remplissait les conditions fixées par la loi précitée, telle que modifiée par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, la construction de la raffinerie Leuna 2000 ayant été achevée en novembre 1997. Par conséquent, si la Commission avait approuvé cette disposition, la requérante aurait eu directement droit à la somme de 360 millions de DEM au titre de la prime fiscale de 8 %. La requérante ajoute que, conformément au principe de protection de la confiance légitime, elle peut prétendre au maintien de ce droit malgré l'exécution, par la République fédérale d'Allemagne, de la décision litigieuse.

45. En deuxième lieu, la requérante soutient que l'article 2 de la décision litigieuse a eu pour conséquence directe de l'obliger à rembourser la somme de 97,5 millions de DEM qu'elle avait perçue en 1995 au titre de la prime fiscale de 8 %. Elle fait observer, à cet égard, qu'il est de jurisprudence constante que les autorités nationales ne disposent d'aucun pouvoir discrétionnaire pour la récupération des aides versées (arrêts de la Cour du 21 mars 1990, Belgique/Commission, C-142-87, Rec. p. I-959, point 61, du 20 septembre 1990, Commission/Allemagne, C-5-89, Rec. p. I-3437, point 12, et du 20 mars 1997, Alcan Deutschland, C-24-95, Rec. p. I-1591, point 24). La requérante considère que l'affirmation de la Commission selon laquelle l'obligation de remboursement découlerait de la InvZulG est erronée. Elle fait remarquer que la Commission a subordonné son approbation du compromis au remboursement du montant susvisé, ce qui démontrerait que cette dernière estime qu'il a été illégalement versé sur la base de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996. En outre, l'avis de recouvrement émis par les autorités allemandes se fonderait sur cette dernière disposition.

Appréciation du Tribunal

46. Il convient de rappeler, à titre liminaire, que, selon l'article 173, quatrième alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 230, quatrième alinéa, CE), une personne physique ou morale ne peut former un recours contre une décision adressée à une autre personne que si cette décision la concerne directement et individuellement. La décision litigieuse ayant été adressée à la République fédérale d'Allemagne, il y a lieu d'examiner, en premier lieu, si elle concerne directement la requérante.

47. Il est de jurisprudence constante que, pour concerner directement un requérant privé, au sens de la disposition précitée, l'acte communautaire entrepris doit produire directement des effets sur la situation juridique de l'intéressé et sa mise en œuvre doit revêtir un caractère purement automatique et découler de la seule réglementation communautaire, sans application d'autres règles intermédiaires (arrêt de la Cour du 5 mai 1998, Dreyfus/Commission, C-386-96 P, Rec. p. I-2309, point 43, et arrêt du Tribunal du 13 décembre 2000, DSTV/Commission, T-69-99, Rec. p. II-4039, point 24).

48. Il en va de même lorsque la possibilité pour les destinataires de ne pas donner suite à l'acte communautaire est purement théorique, leur volonté de tirer des conséquences conformes à celui-ci ne faisant aucun doute (arrêts de la cour du 17 janvier 1985, Piraiki-Patraiki e.a./Commission, 11-82, Rec. p. 207, points 8 à 10, et Dreyfus/Commission, précité, point 44).

49. En l'espèce, il y a lieu de constater que, en vertu de l'article 2, première phrase, de la décision litigieuse, la République fédérale d'Allemagne était obligée d'abroger l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996. Du fait de cette abrogation, la date limite de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale de 8 % a été automatiquement ramenée du 31 décembre 1998 au 31 décembre 1996.

50. Partant, les autorités allemandes ont été contraintes de récupérer auprès des investisseurs qui n'avaient pas réalisé l'intégralité de leur projet à cette dernière date les sommes qu'ils avaient déjà perçues au titre de la prime fiscale de 8 %. Ainsi, s'agissant de la requérante, il ressort du dossier qu'elle a dû rembourser la somme de 97,5 millions de DEM qui lui avait été versée en 1995. La circonstance que ce remboursement n'est pas intervenu dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision litigieuse à la République fédérale d'Allemagne (voir point 41 ci-dessus) est inopérante, tant il est constant que cet État était tenu d'exécuter cette décision. Quant au fait que, formellement, l'obligation de remboursement visée à l'article 2, seconde phrase, de la décision litigieuse ne concerne que les aides octroyées en application de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, il est dépourvu de pertinence dès lors que, ainsi que constaté ci-dessus, l'obligation d'abrogation contenue dans la première phrase du même article 2 a eu pour conséquence nécessaire de contraindre les autorités allemandes à récupérer 97,5 millions de DEM auprès de la requérante.

51. En outre, il ressort du dossier que la requérante remplissait toutes les conditions prévues par la InvZulG et que, son projet d'investissement ayant été entièrement réalisé avant le 1er janvier 1999, elle aurait bénéficié de la prime fiscale de 8 % si la modification apportée à cette loi par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 avait été maintenue. La volonté des autorités allemandes d'octroyer cette aide à la requérante ne faisait, notamment, aucun doute. S'agissant de l'argument que la Commission tire du fait que cette dernière disposition a été abrogée (voir point 42 ci-dessus), il est dénué de pertinence pour l'examen de la question de savoir si la requérante est directement concernée par la décision litigieuse.

52. Il résulte des considérations qui précèdent que la position juridique de la requérante est directement affectée par la décision litigieuse.

Sur la question de savoir si la requérante est individuellement concernée par la décision litigieuse

Arguments des parties

53. La Commission relève que, selon une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d'une décision ne sauraient être individuellement concernés, au sens de l'article 173, quatrième alinéa, du traité, que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d'une manière analogue à celle dont le destinataire le serait (arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25-62, Rec. p. 197, 223, du 14 juillet 1983, Spijker/Commission, 231-82, Rec. p. 2559, point 8, et du 18 mai 1994, Codorniu/Conseil, C-309-89, Rec. p. I-1853, point 20; arrêts du Tribunal du 19 mai 1994, Air France/Commission, T-2-93, Rec. p. II-323, point 42, du 27 avril 1995, ASPEC e.a./Commission, T-435-93, Rec. p. II-1281, point 62, du 13 décembre 1995, Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, T-481-93 et T-484-93, Rec. p. II-2941, point 51, et du 5 juin 1996, Kahn Scheepvaart/Commission, T-398-94, Rec. p. II-477, point 37).

54. Elle fait remarquer que l'article 1er de la InvZulG définit les bénéficiaires de la prime fiscale de 8 % comme étant les contribuables, au sens des lois relatives à l'impôt sur les revenus et à l'impôt sur les sociétés, qui réalisent sur le territoire assisté des investissements éligibles au sens des articles 2 et 3 de la InvZulG, que ce territoire correspond à celui des nouveaux Länder et que les investissements en question sont, pour l'essentiel, l'acquisition et la production de biens meubles neufs amortissables.

55. Elle ajoute que la modification introduite par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 bénéficiait à deux catégories d'intéressés, à savoir, premièrement, ceux qui avaient demandé et obtenu une prime fiscale de 8 % pour les années 1994 à 1996, mais n'avaient pu réaliser la totalité de leur projet avant le 1er janvier 1997 et qui auraient, dès lors, dû rembourser cette prime (ci-après la "première catégorie") et, deuxièmement, ceux qui avaient commencé à réaliser des investissements avant le 1er juillet 1994, mais n'avaient pas revendiqué ladite prime pour les années 1994 à 1996 dès lors qu'ils savaient qu'ils ne pourraient terminer leur projet avant le 1er janvier 1997 (ci-après la "seconde catégorie").

56. Selon la Commission, ces éléments démontrent que le champ d'application de la réglementation en cause ne se limite pas au cas de la requérante et que le nombre de bénéficiaires potentiels et l'identité de ceux-ci ne pouvaient être déterminés avec certitude.

57. Elle soutient, ensuite, que la décision litigieuse, dès lors qu'elle interdit l'application d'une réglementation générale, se présente elle-même, à l'égard des bénéficiaires potentiels de celle-ci, comme une mesure de portée générale qui s'applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l'égard d'une catégorie de personnes envisagées de manière générale et abstraite. Cette décision n'atteindrait la requérante qu'en raison de sa qualité objective d'investisseur dans la zone d'aide concernée, au même titre que tout autre investisseur se trouvant, actuellement ou potentiellement, dans une situation identique (arrêts Piraiki-Patraiki e.a./Commission, précité, point 14, Spijker/Commission, précité, point 9, et Kahn Scheepvaart/Commission, précité, point 41).

58. Par ailleurs, la Commission conteste le bien-fondé des différentes circonstances invoquées par la requérante au soutien de sa thèse selon laquelle elle est individuellement concernée par la décision litigieuse.

59. En premier lieu, elle estime que l'argumentation de la requérante selon laquelle elle ne poursuit l'annulation de cette décision que dans la mesure où elle s'abstient d'autoriser, dans son cas particulier, l'application de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 ne saurait être acceptée.

60. En effet, premièrement, il ne serait nullement établi que cette disposition était spécialement destinée à régler la situation de la requérante. Le fait, mentionné dans une communication du Gouvernement allemand à la Commission du 23 juin 1998, que la prime fiscale de 8 % a dû être remboursée dans plus de 100 cas prouverait, en réalité, le contraire. En outre, un nombre indéterminable de bénéficiaires potentiels relèveraient de la seconde catégorie. En tout état de cause, les motifs qui président à l'adoption d'un régime général d'aides ne seraient pas pertinents pour apprécier la qualité à agir d'une partie requérante.

61. Deuxièmement, la Commission fait valoir que la décision litigieuse ne saurait être interprétée comme comportant une partie distincte relative à la situation de la requérante. Elle souligne qu'elle n'aurait pu opérer une telle distinction dès lors que la notification du 19 décembre 1995 avait pour seul objet un régime général d'aides, susceptible de bénéficier à toute personne remplissant certaines conditions objectives, et que ce régime était déjà entré en vigueur à cette date. Les observations du 9 septembre 1996 du Gouvernement allemand ne sauraient, par ailleurs, s'analyser comme une notification d'une aide spécifique en faveur de la requérante. Elles confirmeraient, au contraire, que la prolongation de la période de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale de 8 % n'était pas censée profiter à la seule requérante et n'évoqueraient le projet Leuna 2000 qu'à titre d'exemple. En tout état de cause, même si le Gouvernement allemand avait eu l'intention de présenter cette prolongation comme une aide au bénéfice exclusif de la requérante, cette circonstance aurait été inopérante. Selon la Commission, en effet, la qualification d'une mesure d'aide spécifique ou de régime général d'aides est fonction de critères objectifs, et non de l'appréciation subjective de l'autorité notifiante. Enfin, elle fait remarquer qu'il aurait été loisible au Gouvernement allemand de retirer sa notification originale et de lui notifier une aide spécifique en faveur de la requérante.

62. Troisièmement, la Commission conteste n'avoir eu aucune objection de principe, au regard des règles communautaires en matière d'aides d'État, à l'encontre de l'application de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 au cas spécifique de la requérante.

63. En deuxième lieu, elle répète que le nombre de cas concernés par la prolongation de la période de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale de 8 % n'était pas connu. Elle ajoute que, en tout état de cause, il est de jurisprudence constante que "la nature réglementaire d'un acte n'est pas mise en cause par la possibilité de déterminer le nombre ou même l'identité des sujets de droit auxquels il s'applique à un moment donné, tant qu'il est constant que cette application s'effectue en vertu d'une situation objective de droit ou de fait définie par l'acte, en relation avec la finalité de ce dernier" (arrêt Spijker/Commission, précité, point 10).

64. En troisième lieu, la Commission avance que la circonstance que la requérante ait participé à la procédure administrative et qu'elle soit nommément citée dans la décision litigieuse ne permet pas de lui reconnaître qualité à agir. Elle conteste, tout d'abord, la pertinence de la jurisprudence invoquée par la requérante dans sa requête. En effet, quatre des cinq arrêts cités par celle-ci concerneraient des procédures et règlements antidumping, soit une situation totalement différente de celle de la présente affaire. S'agissant du cinquième arrêt invoqué, à savoir l'arrêt de la cour du 28 janvier 1986, Cofaz e.a./Commission (169-84, Rec. p. 391), les principes qu'il pose ne seraient pas applicables en l'espèce, dès lors que la requérante n'a pas été à l'origine d'une plainte ayant donné lieu à l'ouverture de la procédure administrative et que ses observations n'ont pas déterminé le déroulement de celle-ci. La Commission ajoute que la seule circonstance que la requérante ait présenté des observations lors de la procédure administrative ou qu'elle puisse éventuellement être considérée comme un intéressé au sens de l'article 93, paragraphe 2, du traité ne saurait suffire à l'individualiser de manière analogue à celle du destinataire de la décision (arrêt Kahn Scheepvaart/Commission, point 42, précité, et ordonnance du Tribunal du 18 février 1998, Comité d'entreprise de la société française de production e.a./Commission, T-189-97, Rec. p. II-335, points 42 et 44). Elle fait remarquer, ensuite, que la requérante n'a été nommément citée aux points II et III des considérants de la décision litigieuse que pour reprendre l'argumentation du Gouvernement allemand, lequel avait invoqué les difficultés de cette entreprise pour justifier le régime d'aides.

65. La requérante prétend que la décision litigieuse l'atteint en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d'une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne.

66. À cet égard, elle souligne, en premier lieu, qu'elle n'attaque cette décision que dans la mesure où elle ne fait pas droit à la demande du Gouvernement allemand d'autoriser, dans son cas particulier, l'application de la modification de la InvZulG. Le fait que cette loi constitue un régime général d'aides et que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 porte modification d'un tel régime serait donc sans pertinence.

67. Selon la requérante, la notification du Gouvernement allemand avait, en effet, un double objet, à savoir, d'une part, un régime général d'aides et, d'autre part, une aide spécifique en sa faveur. Le Gouvernement allemand aurait introduit ce second volet de la notification dans le cadre de ses observations du 9 septembre 1996, lorsqu'il était apparu que la Commission avait certaines objections à l'encontre de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996. Ces observations auraient, ainsi, modifié la notification originale du 19 décembre 1995.

68. La requérante prétend que cette dernière disposition avait été adoptée spécialement pour elle par les autorités allemandes. Le Land de Saxe-Anhalt aurait, en effet, pris l'initiative de demander une modification de la InvZulG lorsqu'il était apparu que, pour des raisons non imputables à la requérante, le projet Leuna 2000 ne pourrait être achevé avant la fin de l'année 1996. Elle fait remarquer que, en septembre 1996, le ministère fédéral de l'Économie lui avait d'ailleurs indiqué que, à sa connaissance, elle était la seule entreprise à bénéficier de la prolongation opérée par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 et que ce n'est qu'ultérieurement qu'il est apparu que d'autres entreprises pourraient également en profiter.

69. Par ailleurs, la requérante avance que la Commission n'avait aucune objection de principe quant à la compatibilité avec le marché commun de l'application de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 à son cas spécifique. Elle fait remarquer que, par sa décision du 30 juin 1993, la Commission avait d'ailleurs déjà autorisé l'octroi de la somme de 360 millions de DEM en faveur de son projet d'investissement.

70. Enfin, la requérante estime que la Commission ne saurait prétendre qu'il aurait été illicite, en droit constitutionnel allemand, de limiter l'application d'une loi fédérale à un cas particulier. En effet, quand bien même une aide serait instaurée par une loi, rien ne s'opposerait à ce que la Commission, statuant au regard des règles communautaires en matière d'aides d'État, se contente d'autoriser un cas déterminé d'application de ladite loi et interdise tous les autres.

71. En deuxième lieu, la requérante relève que le nombre d'entreprises susceptibles de bénéficier de la prolongation prévue par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 est objectivement limité et déterminable. Seules seraient, en effet, concernées par cette mesure les entreprises qui avaient commencé à réaliser un projet d'investissement entre le 1er janvier 1993 et le 30 juin 1994 et présenté une première demande de prime fiscale de 8 % auprès des autorités allemandes avant le 30 septembre 1995 (voir point 89 ci-après). Elle réaffirme que, au moment de l'adoption de la décision litigieuse, elle était le seul bénéficiaire connu de cette prolongation. La circonstance qu'il ressortirait de la communication du Gouvernement allemand du 23 juillet 1998 que plus de 100 entreprises ont profité de ladite prolongation serait sans pertinence, dès lors qu'elle est postérieure à la décision litigieuse. En outre, d'une part, le remboursement de la prime fiscale de 8 % n'aurait, en réalité, été réclamé que dans 62 cas et, d'autre part, il serait douteux que ces cas concernent tous des primes fiscales octroyées sur la base de l'article 3, paragraphe 3, de la InvZulG.

72. En troisième lieu, la requérante fait valoir qu'elle est désignée nommément à plusieurs endroits dans la décision litigieuse, que sa situation particulière a déterminé le déroulement de la procédure administrative et qu'Elf a activement participé à cette procédure et présenté de nombreuses observations. Au soutien de ses arguments, elle invoque plusieurs arrêts de la Cour rendus dans des affaires antidumping (arrêts du 21 février 1984, Allied Corporation e.a./Commission, 239-82 et 275-82, Rec. p. 1005, du 20 mars 1985, Timex/Conseil et Commission, 264-82, Rec. p. 849, du 14 mars 1990, Nashua Corporation e.a./Commission et Conseil, C-133-87 et C-150-87, Rec. p. I-719, et du 16 mai 1991, Extramet Industrie/Conseil, C-358-89, Rec. p. I-2501), ainsi que l'arrêt Cofaz e.a./Commission, précité, dans lequel la Cour aurait déclaré qu'il y a lieu de s'inspirer de la jurisprudence relative à la procédure antidumping pour apprécier si une partie requérante a qualité pour agir dans un recours en annulation en matière d'aides d'État. Elle ajoute que ce dernier arrêt ne saurait être interprété en ce sens que les entreprises ne pouvant pas démontrer qu'elles se trouvent dans une situation identique à celle examinée dans cet arrêt ne pourraient jamais être considérées comme individuellement concernées au sens de l'article 173 du traité (arrêts du Tribunal du 27 avril 1995, ASPEC e.a./Commission, T-435-93, Rec. p. II-1281, point 64, et du 5 novembre 1997, Ducros/Commission, T-149-95, Rec. p. II-2031, point 34). Dès lors, le fait qu'elle n'ait pas été à l'origine d'une plainte ayant donné lieu à l'ouverture de la procédure administrative ne serait pas déterminant en l'espèce.

Appréciation du Tribunal

73. La décision litigieuse ayant été adressée à la République fédérale d'Allemagne, il convient d'examiner, en second lieu, si elle concerne individuellement la requérante (voir point 46 ci-dessus).

74. À titre liminaire, il y a lieu d'écarter l'argumentation de la requérante selon laquelle la notification, par le Gouvernement allemand, de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 à la Commission visait, outre un régime général d'aides, une aide spécifique en sa faveur, de sorte que la décision litigieuse avait elle-même un double objet (voir points 66 et 67 ci-dessus). En effet, ainsi que l'admet la requérante, par sa communication du 19 décembre 1995 (voir point 6 ci-dessus), le Gouvernement allemand avait notifié une disposition portant modification de l'article 3 de la InvZulG, lequel constituait un régime général d'aides. Cette notification n'a pas été ultérieurement modifiée par le Gouvernement allemand. En particulier, ses observations du 9 septembre 1996 ne sauraient être interprétées comme ayant eu pour objet ou pour conséquence d'introduire une notification complémentaire d'une aide spécifique en faveur de la requérante. Dans ces observations, le Gouvernement allemand continue, en effet, clairement à solliciter l'approbation du régime d'aides tel que notifié en décembre 1995, mais en tentant de démontrer que, en pratique, celui-ci ne produira des effets qu'au bénéfice de la requérante.

75. Il convient de relever, ensuite, que, selon une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d'une décision ne sauraient prétendre être individuellement concernés que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d'une manière analogue à celle dont le destinataire le serait (arrêts Plaumann/Commission, précité, p. 223, et Cofaz e.a./Commission, précité, point 22; arrêts du Tribunal du 22 octobre 1996, Skibsvaerftsforeningen e.a./Commission, T-266-94 Rec. p. II-1399, point 44, du 15 décembre 1999, Freistaat Sachsen e.a./Commission, T-132-96 et T-143-96, Rec. p. II-3663, point 83, et du 21 mars 2001, Hamburger Hafen-und Lagerhaus e.a./Commission, T-69-96, Rec. p. II-1037, point 35).

76. En l'espèce, il ressort du dossier - et il est constant entre les parties - que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 constitue une disposition fiscale ayant une portée générale.

77. Dès lors qu'elle interdit, de manière générale, l'application d'une telle disposition, la décision litigieuse, bien qu'elle soit adressée à un État membre, se présente à l'égard des bénéficiaires potentiels de ladite disposition comme une mesure de portée générale qui s'applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l'égard d'une catégorie de personnes envisagées de manière générale et abstraite (arrêt du Tribunal du 11 février 1999, Arbeitsgemeinschaft Deutscher Luftfahrt-Unternehmen et Hapag-Lloyd/Commission, T-86-96, Rec. p. II-179, point 45). Ainsi, il y a lieu de remarquer que la requérante reconnaît elle-même que d'autres investisseurs étaient susceptibles de bénéficier de la prolongation de la période de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale de 8 % (voir point 68 ci-dessus) et que, à la suite de la décision litigieuse, le remboursement de cette prime avait dû être réclamé dans un certain nombre de cas (voir point 71 ci-dessus).

78. Toutefois, nonobstant ces constatations, il ne saurait être considéré que la décision litigieuse atteint la requérante en raison de sa seule qualité objective de bénéficiaire potentiel de ladite prime, au même titre que tout autre opérateur se trouvant, actuellement ou potentiellement, dans une situation identique (arrêts de la Cour Piraiki-Patraiki e.a./Commission, précité, point 14, et du 2 février 1988, Van der Kooy e.a./Commission, 67-85, 68-85 et 70-85, Rec. p. 219, point 15). Une série d'éléments place, en effet, la requérante dans une situation de fait qui la caractérise par rapport à tout autre opérateur.

79. Ainsi, il y a lieu de relever, tout d'abord, que le projet d'investissement de la requérante était indubitablement éligible à la prime fiscale de 8 % et que, par sa décision du 30 juin 1993, la Commission avait expressément déclaré l'octroi d'un ensemble d'aides au soutien de ce projet - dont une aide de 360 millions de DEM au titre de cette prime fiscale - compatible avec le marché commun. Il est constant entre les parties que ledit projet n'a pu être entièrement réalisé avant le 1er janvier 1997, ainsi qu'exigé par l'article 3, paragraphe 3, de la InvZulG, dans sa version de 1993, en raison de circonstances imprévues et indépendantes de la volonté de la requérante. Il est également établi que le projet d'investissement de la requérante n'aurait subi aucune modification, ni quant à sa nature ni quant à son étendue, durant la période supplémentaire de deux ans introduite par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 et que cette prolongation lui aurait permis de bénéficier de la prime fiscale de 8 % sans entraîner le moindre changement dans l'intensité des différentes aides prévues.

80. Il convient de constater, ensuite, qu'il ressort clairement du dossier, et notamment de la décision litigieuse (voir le point III des considérants), que l'adoption de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 a, notamment, été motivée par les particularités ci-dessus mentionnées de la situation de la requérante.

81. Par ailleurs, durant la procédure administrative, cette situation particulière a fait l'objet non seulement d'observations écrites de la part du Gouvernement allemand et de la société mère de la requérante, mais également de discussions approfondies entre ce Gouvernement et la Commission.

82. En outre, le Gouvernement allemand a proposé à cette dernière de n'appliquer l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 qu'à la requérante et de notifier individuellement tous les autres cas éventuels d'application de cette disposition. Dans la décision litigieuse, la Commission a expressément examiné cette proposition et indiqué les motifs pour lesquels elle ne pouvait être acceptée.

83. Il est donc manifeste que, contrairement à ce que laisse entendre la Commission dans ses écritures, le cas de la requérante n'a pas été simplement envisagé à titre d'illustration d'un grand projet industriel couvert par le régime d'aides en cause.

84. Enfin, il apparaît, à la lecture de la décision litigieuse, que la Commission, qui avait déjà approuvé le régime de la prime fiscale de 8 % (voir point 3 ci-dessus) et déclaré l'octroi d'un ensemble d'aides en faveur du projet Leuna 2000 - dont l'aide de 360 millions de DEM au titre de cette prime - compatible avec le marché commun (voir point 4 ci-dessus), était disposée à trouver une solution au cas de la requérante. Il ressort de cette décision, et des déclarations faites par la Commission lors de l'audience, que l'obstacle à une telle solution était la prétendue impossibilité pour le Gouvernement allemand de garantir que la prolongation de la période de réalisation des investissements bénéficierait à la seule requérante. En d'autres termes, l'impossibilité alléguée d'isoler le cas de la requérante sur le plan national, au regard de l'application de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, a été un élément important de la décision litigieuse.

85. Il y a, dès lors, lieu de conclure que la requérante est individuellement concernée par la décision litigieuse. Partant, le recours doit être déclaré recevable.

Sur le fond

86. Au soutien de son recours, la requérante soulève plusieurs moyens qu'il convient de regrouper comme suit: un premier moyen tiré de la violation de l'article 92, paragraphe 2, sous c), du traité et d'un défaut de motivation, un deuxième moyen pris de la violation de l'article 92, paragraphe 3, du traité, un troisième moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité, un quatrième moyen pris de la violation de l'article 93, paragraphe 1, du traité, et, enfin, un cinquième moyen tiré d'un défaut de motivation. Nonobstant l'intitulé du deuxième moyen, qui se réfère exclusivement à l'article 92, paragraphe 3, du traité, l'argumentation de la requérante tend en réalité à démontrer, de manière plus générale, une violation de l'article 92 du traité. Il convient, dès lors, de requalifier ce moyen en ce sens qu'il est tiré d'une violation de l'article 92 du traité.

87. En l'espèce, il y a lieu d'examiner, tout d'abord, conjointement les deuxième et troisième moyens.

Sur les deuxième et troisième moyens, tirés de la violation de l'article 92 du traité et du principe de proportionnalité

Arguments des parties

88. S'agissant du moyen tiré de la violation de l'article 92 du traité, la requérante reproche à la Commission, en premier lieu, d'avoir qualifié d'aide d'État supplémentaire la prolongation de la période de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale de 8 %. Cette prolongation n'aurait, en effet, eu pour conséquence que de maintenir des droits qui menaçaient de disparaître en raison du retard pris dans l'achèvement de projets d'investissement particulièrement complexes.

89. Elle expose également que le groupe de bénéficiaires potentiels de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 était déjà arrêté lorsque cette disposition a été adoptée, de sorte que la prolongation n'aurait pu profiter à des investisseurs qui n'auraient pas eu droit à la prime fiscale de 8 % en vertu de la InvZulG, dans sa version de 1993. Elle relève, à cet égard, que, conformément à l'article 6, paragraphe 1, de la InvZulG, la demande de prime fiscale devait être présentée avant le 30 septembre de l'année civile qui suivait l'exercice financier au cours duquel la réalisation des investissements avait été achevée, des acomptes avaient été versés ou une partie des frais de construction avait été supportée. Elle précise, ensuite, que l'intéressé, dès lors qu'il devait avoir commencé la réalisation de son projet d'investissement avant le 1er juillet 1994, avait nécessairement déjà commandé ou fait réaliser certaines prestations à cette date et, de ce fait, versé des acomptes ou supporté certains frais de construction au cours de l'année 1994. Selon la requérante, l'intéressé devait, par voie de conséquence, avoir introduit sa demande de prime fiscale avant le 30 septembre 1995. Lors de l'audience, la requérante a soutenu que si un investisseur décidait de ne pas déposer de demande de prime fiscale pour une année donnée avant le 30 septembre de l'année suivante, il n'était plus autorisé à le faire ultérieurement. En revanche, elle a admis qu'un investisseur ayant commencé la réalisation de son projet dans le délai requis et n'ayant pas sollicité de prime fiscale avant le 30 septembre 1995 pour des investissements réalisés en 1994 aurait théoriquement pu obtenir, sur la base de la InvZulG telle que modifiée, une prime fiscale pour, par exemple, des travaux réalisés en 1997 s'il avait présenté une demande à cet effet avant le 30 septembre 1998.

90. Enfin, la requérante souligne que, en tout état de cause, la modification de la InvZulG n'a introduit aucune aide d'État supplémentaire pour ce qui est de son cas particulier.

91. En deuxième lieu, elle soutient que la Commission a violé l'article 92 du traité en considérant que la prolongation de la période de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale de 8 % introduisait une aide au fonctionnement.

92. Cette prime fiscale présenterait, en effet, manifestement toutes les caractéristiques d'une aide à l'investissement, telles que définies par le juge communautaire dans sa jurisprudence et par la Commission dans ses communications sur la méthode pour l'application de l'article 92, paragraphe 3, sous a) et c), du traité aux aides régionales (JO 1988, C 212, p. 2) et sur les régimes d'aides à finalité régionale (JO 1979, C 31, p. 9). Selon la requérante, une telle aide à l'investissement ne saurait - à tout le moins pour ce qui est de son cas particulier - être devenue une aide au fonctionnement du seul fait de la prolongation de la période de réalisation des investissements. Elle souligne que cette prolongation n'aurait entraîné aucune prestation pécuniaire supplémentaire en son chef et que la prime fiscale de 8 % aurait dû lui être attribuée en vertu des décisions des 30 juin 1993 et 25 octobre 1994, indépendamment de la date d'achèvement de son projet. Enfin, elle avance que, s'agissant de ce projet, ladite prolongation ne modifie aucunement la distorsion de concurrence potentiellement liée à la prime fiscale de 8 %, déclarée compatible avec le marché commun par la Commission dans ces décisions.

93. La requérante ajoute que la Commission a décrit de façon inexacte la position du Gouvernement allemand lorsqu'elle indique, dans la décision litigieuse, que celui-ci, dans sa notification du 19 décembre 1995, avait exposé que la prolongation de la période de réalisation des investissements était destinée, "en tant qu'aide au fonctionnement, à augmenter le capital propre de l'entreprise concernée".

94. En troisième lieu, la requérante avance que la Commission a violé l'article 92, paragraphe 3, sous a), du traité en excluant l'applicabilité de cette disposition au motif que l'économie est-allemande ne serait pas la seule à bénéficier de l'aide. Elle souligne que, aux termes de l'article 1er, paragraphe 2, de la InvZulG, les investissements doivent être réalisés dans les nouveaux Länder, que la prime fiscale doit être affectée au capital propre des unités de production qui y sont situées et que la prolongation de la période de réalisation des investissements est inopérante à cet égard. Elle conteste, par ailleurs, la pertinence de l'argument de la Commission selon lequel l'aide pourrait être utilisée pour financer des activités en dehors des nouveaux Länder, en relevant qu'il est indifférent qu'une entreprise, après avoir réalisé un projet d'investissement et obtenu les aides destinées à le soutenir, utilise ces aides dans une autre unité d'exploitation.

95. La Commission maintient, en premier lieu, que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 introduisait une aide d'État supplémentaire.

96. Elle avance, tout d'abord, que cette disposition permettait à des entreprises qui avaient commencé à réaliser un projet d'investissement dans le délai prescrit, mais n'avaient pas, à l'époque, revendiqué la prime fiscale de 8 % parce qu'elles savaient qu'elles ne pourraient pas l'achever avant le 1er janvier 1997, de bénéficier de cette prime.

97. Elle conteste le bien-fondé de l'interprétation que la requérante donne de l'article 6, paragraphe 1, de la InvZulG. Elle soutient que la demande de prime fiscale de 8 % ne devait pas nécessairement avoir été introduite avant le 30 septembre 1995, l'intéressé pouvant attendre jusqu'au 30 septembre de l'année qui suit l'exercice au cours duquel le projet d'investissement est complètement réalisé pour réclamer cette prime. Ainsi, selon la Commission, du fait de l'adoption de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, l'investisseur ayant terminé son projet au cours de l'année 1998 aurait pu présenter pour la première fois, à ce moment-là, une demande de prime fiscale, couvrant les années 1994 à 1998.

98. La Commission invoque, ensuite, le fait que la modification de la InvZulG a entraîné un assouplissement des conditions d'octroi de la prime fiscale de 8 %. Elle aurait, plus particulièrement, eu pour conséquence d'éliminer le risque, pour l'investisseur qui avait pris la décision d'investir en escomptant bénéficier de cette prime fiscale, de ne pouvoir réaliser la totalité du projet d'investissement dans le délai initialement prévu.

99. Dans son mémoire en défense, elle fait également observer que, l'article 4 de la InvZulG définissant la base de calcul de la prime fiscale de 8 % comme étant la "somme des coûts d'acquisition et de production des investissements éligibles terminés au cours de l'exercice", une entreprise aurait pu bénéficier de cette prime pour les investissements supplémentaires qu'elle aurait réalisés au cours de la période de prolongation de deux ans.

100. Enfin, la Commission fait remarquer que la modification de la InvZulG opérée par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 revenait elle-même à "modifier des aides" au sens de l'article 93, paragraphe 3, du traité, ce qui nécessitait qu'elle en soit informée et prenne une décision.

101. En deuxième lieu, la Commission renvoie au point IV des considérants de la décision litigieuse pour démontrer que la prolongation du délai de réalisation des investissements constitue une aide au fonctionnement.

102. En troisième lieu, elle expose que cette prolongation aurait pu bénéficier à des entreprises situées en-dehors des régions assistées dès lors qu'elle n'encourage aucun investissement supplémentaire.

103. Sous le moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité, la requérante fait grief à la Commission de ne pas avoir exclu son cas particulier de la déclaration d'incompatibilité avec le marché commun et de ne pas l'avoir exonérée de l'obligation de remboursement des aides octroyées en application de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996.

104. Elle rappelle, tout d'abord, que, dans sa décision du 30 juin 1993, la Commission avait déjà approuvé l'octroi d'un ensemble d'aides en faveur du projet Leuna 2000, dont l'aide de 360 millions de DEM au titre de la prime fiscale de 8 %. La légalité de cet ensemble d'aides ne dépendrait pas de façon déterminante de la circonstance que les travaux devaient être achevés avant le 31 décembre 1996. Elle réaffirme également que la Commission n'avait aucune objection de principe, au regard des règles communautaires en matière d'aides d'État, pour ce qui est de l'application de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 à son cas particulier.

105. La requérante expose, ensuite, que la décision litigieuse se réfère, en plusieurs endroits, à sa situation particulière, que le Gouvernement allemand avait déclaré que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 avait été adopté en raison du projet Leuna 2000 et que les gouvernements allemand et français, ainsi qu'Elf, avaient clairement expliqué, au cours de la procédure administrative, que ce projet présentait une série de particularités qui la distinguaient des autres entreprises susceptibles de bénéficier de la disposition précitée. Elle rappelle la proposition qui avait été faite à la Commission par le Gouvernement allemand durant la procédure administrative (voir point 81 ci-dessus) et relève que, par lettre du 25 septembre 1997, elle a soumis à la Commission un projet de formulation alternative du dispositif de la décision litigieuse qui aurait permis, sous le couvert d'une déclaration générale, de couvrir son cas particulier.

106. Selon la requérante, dans ces circonstances, la Commission ne pouvait se limiter à une analyse générale et abstraite de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, mais devait également statuer séparément sur son cas particulier. Elle estime que, en refusant la proposition du Gouvernement allemand et en adoptant une déclaration générale d'incompatibilité, la Commission a pris une mesure disproportionnée par rapport au but poursuivi et lui a imposé inutilement une charge financière considérable.

107. La requérante soutient qu'aucun motif d'ordre procédural n'empêchait la Commission de traiter de manière distincte son cas particulier. Elle ajoute que la solution proposée par le Gouvernement allemand aurait été juridiquement possible et n'aurait pas présenté de difficultés sur le plan administratif. La Commission ne saurait, notamment, objecter qu'il n'aurait pas été possible, en droit allemand, d'adopter une loi fédérale pour le seul cas de la requérante. L'adoption d'une loi individuelle ne serait, en effet, illicite que dans le cas visé à l'article 19, paragraphe 1, première phrase, de la Loi fondamentale allemande, à savoir dans l'hypothèse où elle limite un droit fondamental, et non lorsque, comme en l'espèce, elle crée un droit.

108. La Commission conteste avoir méconnu le principe de proportionnalité.

109. Elle fait remarquer, tout d'abord, que le Gouvernement allemand ne lui avait notifié qu'un régime général d'aides, de sorte que, pour des motifs de procédure, il ne lui était pas possible de traiter séparément le cas de la requérante. Elle considère que, si ce Gouvernement avait voulu qu'elle se prononce simultanément sur une aide spécifique en faveur de la requérante, il aurait également dû lui notifier séparément une telle aide, voire transformer sa notification originale en une notification de projet d'aide individuelle.

110. La Commission conteste, ensuite, que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 avait le caractère d'une disposition à caractère individuel. Elle relève que le Gouvernement allemand avait d'ailleurs lui-même déclaré qu'il n'était pas possible, pour des raisons juridiques, de promulguer une loi fédérale destinée au seul cas de la requérante et affirme qu'il ne lui appartenait pas de vérifier le bien-fondé de cette déclaration.

111. Par ailleurs, s'agissant des motifs pour lesquels la solution proposée par le Gouvernement allemand ne pouvait être acceptée, elle cite les trois derniers paragraphes du point IV des considérants de la décision litigieuse. Elle souligne, en substance, que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 était déjà entré en vigueur et constituait une disposition de nature générale, susceptible d'être automatiquement invoquée par tout investisseur en remplissant les conditions objectives.

112. Enfin, la Commission considère que, en tout état de cause, la situation particulière de la requérante ne justifiait pas de dérogation dans la décision litigieuse. En effet, s'agissant de son projet, la requérante ne démontrerait ni que la prolongation de la période de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale l'aurait incitée à effectuer des investissements supplémentaires dans les régions assistées ni que cette prolongation n'introduisait pas une aide au fonctionnement.

Appréciation du Tribunal

113. À titre liminaire, il convient de rappeler que l'article 92 du traité a pour objectif d'assurer que la concurrence ne soit pas faussée dans le marché intérieur [voir article 3, sous g), du traité CE (devenu, après modification, article 3, sous g), CE)]. L'article 92, paragraphe 1, du traité déclare incompatibles avec le marché commun les aides étatiques qui faussent ou menacent de fausser la concurrence dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres.

114. Il importe de relever également que, lorsque la Commission jouit d'une liberté d'appréciation importante, comme c'est le cas pour l'application de l'article 92 du traité, le juge communautaire, en contrôlant la légalité de l'exercice d'une telle liberté, ne saurait substituer son appréciation en la matière à celle de l'autorité compétente, mais doit se limiter à examiner si cette dernière est entachée d'erreur manifeste ou de détournement de pouvoir (arrêts de la Cour du 14 janvier 1997, Espagne/Commission, C-169-95, Rec. p. I-135, point 34, et du 5 octobre 2000, Allemagne/Commission, C-288-96, Rec. p. I-8237, point 26).

115. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que le principe de proportionnalité exige que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché, étant entendu que, lorsqu'un choix s'offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante (arrêt de la Cour du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15-83, Rec. p. 2171, point 25, et arrêt du Tribunal du 29 septembre 2000, CETM/Commission, T-55-99, Rec. p. II-3207, point 163).

116. Enfin, il convient de constater que le fait que, formellement, la Commission soit saisie d'une notification ayant pour objet un régime d'aides ne s'oppose nullement à ce que, à côté d'un examen général et abstrait de ce régime, elle en examine l'application dans un cas particulier. De même, dans la décision qu'elle adopte à l'issue de son examen, la Commission a la possibilité de considérer que certains cas d'application du régime d'aides notifié constituent une aide et d'autres non, ou de ne déclarer que certains cas incompatibles avec le marché commun. Dans l'exercice de son large pouvoir d'appréciation, elle peut, notamment, opérer une différenciation entre les bénéficiaires du régime d'aides notifié, eu égard à certaines caractéristiques qu'ils présentent ou conditions auxquelles ils répondent [voir, par exemple, décision 2000-394-CE de la Commission, du 25 novembre 1999, concernant les mesures d'aides en faveur des entreprises implantées sur le territoire de Venise et de Chioggia, prévues par les lois n° 30-1997 et n° 206-1995 instituant des réductions de charges sociales (JO L 150, p. 50)].

117. En l'espèce, la Commission ne pouvait se contenter de procéder à une analyse générale et abstraite de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, mais devait également examiner le cas spécifique de la requérante. Un tel examen s'imposait non seulement au vu des particularités du projet d'investissement de la requérante (voir point 79 ci-dessus) - dont la Commission avait pleinement connaissance -, mais aussi en raison du fait que, au cours de la procédure administrative, le Gouvernement allemand avait fait une demande expresse en ce sens.

118. La Commission ne saurait objecter, à cet égard, que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 était déjà entré en vigueur et constituait une disposition de nature générale, susceptible d'être automatiquement invoquée par tout investisseur qui remplissait les conditions objectives prévues pour son application. Le cas échéant, il aurait, en effet, appartenu à la République fédérale d'Allemagne d'adopter toutes les mesures législatives et administratives nécessaires pour mettre en œuvre la décision de la Commission. C'est à cet État qu'il aurait incombé d'assumer les éventuelles difficultés résultant de sa notification tardive du régime d'aides en cause.

119. C'est à la lumière de ces principes et constatations que les arguments des parties doivent être examinés.

120. Dans la décision litigieuse, la Commission a estimé, tout d'abord, que la prolongation de la période de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale de 8 %, introduite par l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, constituait une aide d'État supplémentaire en faveur des entreprises qui ont effectué des investissements dans les nouveaux Länder. Elle a exposé, ensuite, que cette aide n'encourageait aucun investissement additionnel et devait, par voie de conséquence, être considérée comme une aide au fonctionnement destinée à augmenter le capital propre des entreprises concernées. Enfin, elle a écarté la possibilité d'appliquer la dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 3, sous a), du traité au motif, notamment, que l'économie des nouveaux Länder ne serait pas la seule à bénéficier de cette aide au fonctionnement. Selon la Commission, en effet, "les entreprises qui remplissent les conditions peuvent maintenir des unités d'exploitation en état de fonctionnement autre part également et pourraient ainsi utiliser l'aide pour financer des activités situées ailleurs qu'en Allemagne de l'Est".

121. Il ressort du dossier et des explications fournies par la Commission lors de l'audience que celle-ci a distingué deux catégories différentes de bénéficiaires potentiels de la mesure d'aide en cause pour aboutir à ces conclusions.

122. La première catégorie est constituée des entreprises qui avaient décidé de réaliser un projet d'investissement dans les nouveaux Länder en tablant sur la prime fiscale de 8 %, qui avaient commencé la réalisation de leur projet entre le 1er janvier 1993 et le 30 juin 1994 et présenté en temps utile des demandes de versements partiels de ladite prime mais qui, contrairement à leurs prévisions initiales, n'avaient finalement pu terminer ce projet avant le 1er janvier 1997. Dans la décision litigieuse, la Commission relève, à cet égard, que "les entreprises qui ont pris la décision d'investir en comptant sur la prime fiscale à l'investissement de 8 % sans prévoir une certaine marge temporelle pour couvrir les risques liés à cette décision ont accepté une aide à l'investissement qui pourrait s'avérer moins importante que celle dont elles auraient bénéficié en remplissant les critères de la InvZulG de 1993, et ont considéré que leur investissement était rentable malgré ces risques". Elle ajoute que "[la] prolongation du délai n'occasionne aucun investissement supplémentaire et ne devrait guère influer sur l'achèvement des investissements commencés". Invitée par le Tribunal, lors de l'audience, à donner des précisions, la Commission a déclaré que, s'agissant des entreprises relevant de la première catégorie, l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 introduisait une aide d'État supplémentaire en ce qu'il "éliminait le risque", pour ces entreprises, de ne pas terminer leur projet d'investissement dans le délai requis.

123. La seconde catégorie comprend les entreprises qui avaient également commencé à réaliser un projet d'investissement dans les nouveaux Länder entre le 1er janvier 1993 et le 30 juin 1994, mais n'avaient pas présenté de demande de prime fiscale de 8 % avant l'adoption de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996, car elles savaient qu'elles n'auraient pas été en mesure de terminer leur projet avant le 1er janvier 1997. La Commission soutient que, du fait de la prolongation de deux ans introduite par cette disposition, ces entreprises pouvaient dorénavant prétendre au versement de cette prime fiscale. Cela constituerait non une incitation pour des investissements supplémentaires, mais un "bénéfice inattendu pour les entreprises ayant à l'origine calculé leur investissement de telle sorte qu'il aurait été rentable même sans cette aide". Il convient de relever que, lors de l'audience, la requérante a admis que, théoriquement, une entreprise ayant commencé à réaliser un projet d'investissement dans le délai requis mais n'ayant pas sollicité l'octroi de la prime fiscale de 8 % avant l'adoption de l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 aurait pu, à la suite de la mise en œuvre de cette disposition, obtenir cette prime pour des travaux réalisés en 1997 en présentant, pour la première fois, une demande à cet effet avant le 30 septembre 1998 (voir point 89 ci-dessus). Elle reconnaît, de la sorte, que ladite disposition pouvait engendrer un "bénéfice inattendu" au profit de certaines entreprises.

124. Toutefois, la Commission range la requérante parmi les entreprises de la première catégorie. Il n'y a, dès lors, pas lieu, en l'espèce, de se prononcer sur le bien-fondé de la détermination de la seconde catégorie ni, partant, sur la divergence d'interprétation, entre les parties, de l'article 6, paragraphe 1, de la InvZulG (voir points 89 et 97 ci-dessus).

125. S'agissant de la requérante, il y a lieu de considérer que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 n'a pas, manifestement, introduit une aide supplémentaire ni, partant, une aide au fonctionnement.

126. Il ressort, en effet, du dossier qu'elle ne s'est pas engagée dans le projet Leuna 2000 en prenant le risque de ne pouvoir le terminer avant le 1er janvier 1997, date visée à l'article 3, paragraphe 3, de la InvZulG, dans sa version de 1993. Outre le fait qu'elle avait prévu une certaine marge de temps pour la réalisation de ce projet - celle-ci devant initialement être achevée en juillet 1996 -, il importe de souligner que le retard intervenu résultait de circonstances totalement indépendantes de sa volonté et qu'elle n'aurait pas nécessairement dû envisager lorsqu'elle a pris sa décision d'investir. Il ne saurait donc être présumé que la requérante avait considéré son projet d'investissement comme "rentable" même en l'absence de versement de la prime fiscale de 8 %.

127. La Commission ne pouvait pas davantage conclure à l'existence d'une quelconque autre aide d'État supplémentaire en faveur de la requérante. En particulier, la Commission, qui, dès l'origine, connaissait la nature et l'étendue exactes du projet d'investissement de la requérante ainsi que le montant et l'intensité des différentes aides octroyées au soutien de celui-ci (voir, notamment, la décision du 30 juin 1993), ne pouvait que constater que ces différents paramètres ne seraient nullement modifiés du fait de la prolongation de deux ans de la période de réalisation des investissements ouvrant droit à la prime fiscale de 8 %.

128. Enfin, s'agissant de l'argumentation que la Commission tire de la définition de la base de calcul de cette prime fiscale pour considérer que la prolongation susvisée permettrait à une entreprise de bénéficier de ladite prime pour des investissements réalisés au cours de la nouvelle période de deux ans (voir point 99 ci-dessus), il y a lieu d'observer qu'elle s'oppose totalement à son allégation selon laquelle ladite prolongation n'a encouragé aucun investissement supplémentaire. Il convient de rappeler, en outre, que, aux termes de l'article 3, paragraphe 3, de la InvZulG (dans ses versions originale et modifiée), la réalisation du projet d'investissement doit avoir débuté - et sa portée devait donc déjà être définie - entre le 31 décembre 1992 et le 1er juillet 1994. S'agissant, plus particulièrement, de la requérante, il ressort du dossier et des explications qu'elle a fournies lors de l'audience que, préalablement à sa mise en œuvre, son projet avait été défini avec précision et fait l'objet de discussions approfondies tant avec les autorités allemandes qu'avec la Commission (voir, notamment, la décision du 30 juin 1993).

129. En tout état de cause, à supposer qu'il soit admis que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 introduisait une aide d'État supplémentaire également en faveur de la requérante, il n'était pas justifié de déclarer cette aide incompatible avec le marché commun dans le cas de cette dernière. À cet égard, il convient de rappeler, d'une part, que la Commission non seulement n'avait soulevé aucune objection à l'encontre du régime de la prime fiscale de 8 %, mais en plus avait expressément déclaré l'octroi d'un ensemble d'aides en faveur du projet Leuna 2000 - dont l'aide de 360 millions de DEM au titre de cette prime - compatible avec le marché commun en vertu de l'article 92, paragraphe 3, du traité et, d'autre part, que la simple prolongation de la période de réalisation des investissements n'était pas de nature à modifier la nature et l'étendue de ce projet ou le montant et l'intensité de cet ensemble d'aides. Dans ces conditions, la Commission n'avait aucune raison de supposer que ladite prolongation serait de nature à fausser ou à menacer de fausser la concurrence, du moins dans une mesure plus importante que le projet Leuna 2000 tel que notifié initialement, si bien qu'elle serait incompatible avec le marché commun.

130. Il résulte de ce qui précède que, s'agissant de la requérante, la Commission aurait dû considérer que l'article 18, paragraphe 1, de la loi fiscale annuelle de 1996 n'introduisait pas d'aide d'État supplémentaire ou, à tout le moins, que l'aide supplémentaire instituée était compatible avec le marché commun.

131. En s'abstenant d'agir de la sorte, pour, dans tous les cas, conclure, que cette disposition introduit une aide d'État supplémentaire, déclarer cette aide incompatible avec le marché commun et exiger l'abrogation de ladite disposition, la Commission a méconnu l'article 92 du traité ainsi que le principe de proportionnalité.

132. Il s'ensuit que les deuxième et troisième moyens sont fondés. La décision litigieuse doit donc être annulée dans la mesure où elle concerne la situation de la requérante sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres arguments invoqués par cette dernière au soutien desdits moyens ou sur ses autres moyens.

Sur les dépens

133. Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de décider qu'elle supportera, outre ses propres dépens, ceux de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE Tribunal (cinquième chambre élargie)

Déclare et arrête:

1) La décision 98-194-CE de la Commission, du 1er octobre 1997, concernant la prolongation du régime de prime fiscale à l'investissement de 8 % pour les investissements dans les nouveaux Länder introduit par la loi fiscale annuelle de 1996 est annulée dans la mesure où elle concerne la situation de la requérante.

2) La Commission supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante.