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Décisions

CA Rennes, 3e ch., 21 juin 2001, n° 99-01227

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Moignard

Avocat général :

M. Aubry

Conseillers :

Mme Legeard, M. Lourdelle

Avocats :

Mes Briand, Vincot, Laraize, Kerneis, Cartron

CA Rennes n° 99-01227

21 juin 2001

Rappel de la procédure:

Le jugement:

Le Tribunal correctionnel de Quimper par jugement contradictoire en date du 29 janvier 1998, pour

demande ou obtention de paiement ou d'accord avant la fin du délai de réflexion - démarchage

escroquerie

publicité mensongère ou de nature à induire en erreur

abus de la faiblesse ou de l'ignorance d'une personne démarchée: souscription d'un engagement

a relaxé G Gérard pour des faits de publicité de nature à induire en erreur, portant sur la vente de salle de bains et cuisine, de non-respect du délai de réflexion lors du démarchage à domicile des époux Tanguy et d'abus de faiblesse au préjudice de Madame Kerc'hrom et pour des faits commis postérieurs au 21.6.1989 l'a condamné à 10 mois d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à 80 000 F d'amende

et pour

demande ou obtention de paiement ou d'accord avant la fin du délai de réflexion - démarchage

escroquerie

publicité mensongère ou de nature à induire en erreur

abus de la faiblesse ou de l'ignorance d'une personne démarchée: souscription d'un engagement

a relaxé M Denis pour les faits d'escroquerie à l'égard des époux Altero et de Madame Le Brun et les faits commis postérieurement au 21.6.1989 - le déclare coupable de l'ensemble des autres faits commis antérieurement au 21.6.1989, à 14 mois d'emprisonnement avec sursis, ainsi qu'à 150 000 F d'amende.

Les appels:

Appel a été interjeté par:

Monsieur M Denis, le 3 février 1998 sur les dispositions pénales et civiles

M. le Procureur de la République, le 4 février 1998

La Confédération syndicale du cadre de vie du Finistère, le 12 février 1998 sur les dispositions civiles

L'Union fédérale des consommateurs, le 12 février 1998 sur les dispositions civiles

La prévention:

Considérant qu'il est fait grief à Gérard G:

D'avoir de 1988 à 1991 dans le département du Finistère, à l'occasion de démarchage à domicile obtenu des personnes ci-après une contrepartie ou un engagement avant l'expiration du délai de réflexion, ce au préjudice des consorts Altero, Aranegas (en 1989 et en 1990), Coroller, Gloaguen J, Gloaguen L, Kerc'hrom, Kern, Lebrun, Lecomte, Le Donge, Le Guillou, Maline, Manach, Marrec, Salis, Tanguy, Theven, Le Saux, Toulgoat, Zubiaurre (en 1989 et 1990);

infraction prévue et réprimée par la les articles 3 et 4 de la loi du 22.12.72 remplacés par les articles L. 121-25 à L. 121-31 du Code de la consommation

- d'avoir dans le département du Finistère de 88 à 91 en employant des manœuvres frauduleuses, savoir en simulant l'obtention de conditions favorables auprès de la direction contactée par téléphone, déterminé des clients et notamment les époux Coroller, à remettre des fonds;

infraction prévue et réprimée par les articles 313-1, 313-7, 313-8 du Code pénal;

- d'avoir dans le département du Finistère de 88 à 91 en employant des manœuvres frauduleuses, savoir par présentation d'une pseudo étude thermique, déterminé des clients et notamment les consorts Altero et Lebrun à remettre des fonds;

infraction prévue et réprimée par les articles 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal;

- d'avoir dans le département du Finistère en 1990, en employant des manœuvres frauduleuses, savoir l'intervention d'une prétendue animatrice de télévision au téléphone, déterminé M. Lecomte à remettre des fonds;

infraction prévue et réprimée par les articles 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal;

- d'avoir dans le département du Finistère en 88, en employant des manœuvres frauduleuses, savoir en présentant un crédit comme étant gratuit alors qu'il ne s'agissait que d'un crédit différé donnant lieu à pénalités en cas de remboursement anticipé, déterminé les consorts Le Donge et Maline à remettre des fonds;

infraction prévue et réprimée par les articles 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal;

- d'avoir en 1990 dans le département du Finistère, effectué une publicité de nature à induire en erreur, en faisant paraître des annonces supposées émaner de particuliers ce qui avait pour objet d'amener la clientèle à appeler l'entreprise;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir de 88 à 91, dans le département du Finistère, effectué une publicité de nature à induire en erreur, en procédant à l'annonce de fausses tombola et d'attribution de cadeaux pour parrainage non suivies d'effet;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir de 88 à 91 dans le département du Finistère effectué une publicité de nature à induire en erreur, en présentant un crédit différé comme un crédit gratuit (0 F pendant un an);

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir en 91 sur le territoire national effectué une publicité de nature à induire en erreur, en présentant l'attribution d'une remise d'un mois de salaire, cette remise étant de fait soumise à des conditions relatives au montant de l'achat;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir en 90 sur le territoire national effectué une publicité de nature à induire en erreur, en proposant une salle de bains à 5 900 F ne correspondant pas à celle figurant en photographie;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère courant mai 90 lors d'un démarchage à domicile, fait souscrire aux époux Aranegas un engagement dont ils n'étaient pas en mesure d'en apprécier la portée en refaisant un contrat à la date du premier sans en laisser le double;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir en 90 dans le Finistère lors d'un démarchage à domicile fait souscrire à M. Lecomte un engagement dont il ne pouvait apprécier la portée en le portant à acquérir du mobilier non nécessaire dans des conditions financières dépassant ses facultés;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir en 90 dans le Finistère lors de deux démarchages à domicile fait souscrire à M. Salis deux engagements dont il ne pouvait mesurer la portée, à défaut de maîtriser le français, en le faisant souscrire un crédit avec assurance décès sur deux têtes alors que son épouse était gravement malade;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 90, lors d'un démarchage à domicile fait souscrire aux époux Tanguy un engagement dont ils ne pouvaient apprécier la portée en les portant à acquérir du mobilier non nécessaire;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 90 lors d'un démarchage à domicile fait souscrire à Madame Le Saux un engagement dont elle ne pouvait mesurer la portée en la portant à acquérir du mobilier dépassant ses facultés financières alors qu'elle avait déjà passé commande chez un concurrent;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 89 lors d'un démarchage à domicile fait souscrire aux époux Theven un engagement dont ils ne pouvaient mesurer la portée (double illisible);

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 90 lors d'un démarchage à domicile fait souscrire aux époux Toulgoat un engagement dont ils ne pouvaient apprécier la portée (renonciation à annulation);

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 88 lors d'un démarchage à domicile fait souscrire à L. Gloaguen un engagement dont il ne pouvait apprécier la portée (double illisible);

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

Considérant qu'il est fait grief à Denis M:

- d'avoir de 1988 à 1991 dans le département du Finistère, à l'occasion de démarchages à domicile obtenu des personnes ci-après une contrepartie ou un engagement avant l'expiration du délai de réflexion, ce au préjudice des consorts Altero, Aranegas (en 1989 et 1990), Coroller, Gloaguen J, Gloaguen L, Kerc'hrom, Kern, Lebrun, Lecomte, Le Donge, Le Guillou, Maline, Manach, Marrec, Salis, Tanguy, Theven, Le Saux, Toulgoat, Zubiaurre (en 1989 et 1990);

infraction prévue et réprimée par la les articles 3 et 4 de la loi du 22.12.72 remplacés par les articles L. 121-25 à L. 121-31 du Code de la consommation

- d'avoir dans le département du Finistère de 88 à 91 en employant des manœuvres frauduleuses, savoir en simulant l'obtention de conditions favorables auprès de la direction contactée par téléphone, déterminé des clients et notamment les époux Coroller, à remettre des fonds;

infraction prévue et réprimée par les articles 313-1, 313-7, 313-8 du Code pénal;

- d'avoir dans le département du Finistère de 88 à 91 en employant des manœuvres frauduleuses, savoir par présentation d'une pseudo étude thermique, déterminé des clients et notamment les consorts Altero et Lebrun à remettre des fonds;

infraction prévue et réprimée par les articles 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal;

- d'avoir dans le département du Finistère en 1990, en employant des manœuvres frauduleuses, savoir l'intervention d'une prétendue animatrice de télévision au téléphone, déterminé M. Lecomte à remettre des fonds;

infraction prévue et réprimée par les articles 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal;

- d'avoir dans le département du Finistère en 88, en employant des manœuvres frauduleuses, savoir en présentant un crédit comme étant gratuit alors qu'il ne s'agissait que d'un crédit différé donnant lieu à pénalités en cas de remboursement anticipé, déterminé les consorts Le Donge et Maline à remettre des fonds;

infraction prévue et réprimée par les articles 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal;

- d'avoir en 1990 dans le département du Finistère, effectué une publicité de nature à induire en erreur, en faisant paraître des annonces supposées émaner de particuliers ce qui avait pour objet d'amener la clientèle à appeler l'entreprise;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir de 88 à 91, dans le département du Finistère, effectué une publicité de nature à induire en erreur, en procédant à l'annonce de fausses tombola et d'attribution de cadeaux pour parrainage non suivies d'effet;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir de 88 à 91 dans le département du Finistère effectué une publicité de nature à induire en erreur, en présentant un crédit différé comme un crédit gratuit (0 F pendant un an);

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir en 91 sur le territoire national effectué une publicité de nature à induire en erreur, en présentant l'attribution d'une remise d'un mois de salaire, cette remise étant de fait soumise à des conditions relatives au montant de l'achat;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir en 90 sur le territoire national effectué une publicité de nature à induire en erreur, en proposant une salle de bains à 5 900 F ne correspondant pas à celle figurant en photographie;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir en 90 sur le territoire national effectué une publicité de nature à induire en erreur, en proposant une salle de bains à 9 900 F ne correspondant pas à celle figurant en photographie;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère courant mai 90 lors d'un démarchage à domicile, fait souscrire aux époux Aranegas un engagement dont ils n'étaient pas en mesure d'en apprécier la portée en refaisant un contrat à la date du premier sans en laisser le double;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir en 91 dans le Finistère lors d'un démarchage à domicile fait souscrire à Mme Kerc'hrom un engagement dont elle ne pouvait apprécier la portée en refaisant un contrat où la cliente ne bénéficiait plus de la remise promise et en ne renseignant pas le TEG sur le contrat de financement;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir en 90 dans le Finistère lors d'un démarchage à domicile fait souscrire à M. Lecomte un engagement dont il ne pouvait apprécier la portée en le portant à acquérir du mobilier non nécessaire dans des conditions financières dépassant ses facultés;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir en 90 dans le Finistère lors de deux démarchages à domicile fait souscrire à M. Salis deux engagements dont il ne pouvait mesurer la portée, à défaut de maîtriser le français, en le faisant souscrire un crédit avec assurance décès sur deux têtes alors que son épouse était gravement malade;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 90, lors d'un démarchage à domicile fait souscrire aux époux Tanguy un engagement dont ils ne pouvaient apprécier la portée en les portant à acquérir du mobilier non nécessaire;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 90 lors d'un démarchage à domicile fait souscrire à Madame Le Saux un engagement dont elle ne pouvait mesurer la portée en la portant à acquérir du mobilier dépassant ses facultés financières alors qu'elle avait déjà passé commande chez un concurrent;

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 89 lors d'un démarchage à domicile fait souscrire aux époux Theven un engagement dont ils ne pouvaient mesurer la portée (double illisible);

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 90 lors d'un démarchage à domicile fait souscrire aux époux Toulgoat un engagement dont ils ne pouvaient apprécier la portée (renonciation à annulation);

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

- d'avoir dans le Finistère en 88 lors d'un démarchage à domicile fait souscrire à L. Gloaguen un engagement dont il ne pouvait apprécier la portée (double illisible);

infraction prévue et réprimée par les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code de la consommation;

En la forme:

Les appels de Denis M, du Ministère public, de la Confédération syndicale du cadre de vie du Finistère et de l'Union fédérale des consommateurs sont réguliers et recevables.

Au fond:

Une enquête de la DCCRF du Finistère a concerné une SA "X" exploitant à Quimper des magasins à l'enseigne "Y", "Z" et "W", la SA X franchisant de très nombreux commerces en France voire à l'étranger.

Les fonctionnaires relevaient parmi les pratiques de ces magasins et des démarcheurs, des publicités mensongères, des obtentions de contreparties ou engagements avant la fin du délai de réflexion à l'occasion d'un démarchage à domicile, des escroqueries et des abus de faiblesse.

Il a été rapporté par des clients que des dépliants publicitaires promettaient une remise de 3 000 F en cas de parrainage d'un nouveau client alors que M. Quemere, ayant "parrainé son neveu", n'a pas obtenu cette réduction.

De même, Madame Kerc'hrom ou les époux Le Guillou se plaignaient d'attendre encore des remises annoncées pour 7 000 F ou une réduction de 30 % clairement affichée mais jamais effective.

Selon d'autres clients, en 1990, paraissaient dans des journaux gratuits des petites annonces semblant émaner de particuliers et faisant état de ventes d'urgence motivées par un départ ou un divorce, les intéressés cédant des meubles de cuisine aménagée. En réalité, le numéro de téléphone indiqué attirait la personne intéressée vers le magasin.

En octobre 1988, une publicité indiquait "zéro franc pendant un an" alors qu'en réalité il s'agissait d'un simple différé de paiement des échéances avec intérêts décomptés avec pénalités en cas de remboursements anticipés.

Des publicités pour une cuisine et pour une salle de bains comportaient des photographies qui ne laissaient pas clairement apparaître que les appareils ménagers étaient de couleur brune alors que les meubles étaient blancs ou que les éléments de salle de bains n'avaient pas l'apparence qui leur étaient donnés sur la photographie, soit parce qu'ils étaient différents soit parce que les angles de prises de vies étaient avantageux.

Enfin, en février 1991, apparaissaient tant dans les journaux gratuits que dans "Télé sept jours" ou "Télé star" des publicités annonçant: "Pour faciliter votre achat de cuisine, nous vous offrons "un mois de salaire" avec la mention dans le chiffre 1: "c'est possible?" et en caractère vingt fois plus petit que les lettres du message principal et 50 fois plus petit que le chiffre 1 la mention quasi illisible: "A valoir sur votre achat d'une cuisine (valeur meuble) selon barème au magasin (sur justificatif de salaire net).

Il était relevé cinq cas de perception d'acompte dès le jour de la commande lors de démarchage à domicile:

- le 20 juin 1988, Louise Kern, une cuisine, acompte 2 560 F par chèque:

L'intéressée faisait l'objet d'un démarchage le 20 juin 1988, après prise d'un rendez-vous par téléphone. A la signature du bon de commande, elle remettait un acompte par chèque d'un montant de 2 560 F. Elle se présentait toutefois au magasin dans les sept jours pour dire qu'elle renonçait à son achat et demandait la restitution de son chèque. La personne qui la recevait refusait et lui faisait en outre remettre le bon de commande. Il lui était proposé ensuite d'établir un nouveau bon de commande, ce qui était fait le 28 juin 1988. Ce bon de commande mentionnait le versement d'un acompte, qui était d'ailleurs le même que celui qui avait été versé le 20 juin. La cliente téléphonait ultérieurement au magasin pour annuler. On lui proposait alors de modifier la commande à partir d'un nouveau devis, pour lequel elle devait se rendre au magasin. Ce devis ne lui serait remis que si elle signait.

- le 7 décembre 1988, Lucien Gloaguen, une cheminée, acompte de 2 044 F par chèque:

L'intéressé faisait l'objet d'un démarchage par téléphone et, lors de la commande, réglait un acompte pour une cheminée. Sur un montant total de 27 894 F, le vendeur demandait un chèque de 2 044 F dès la passation de la commande. Le banquier du client lui faisait remarquer qu'en définitive il paierait 193 % du prix, ce qui l'amenait le 29 mars 1990 à écrire pour annuler le financement, voulant substituer à celui-ci un prêt bancaire. Il lui était répondu par Z de s'adresser à Paris à la société V. Le contrat faisait en réalité ultérieurement l'objet d'un jugement du 12 décembre 1991 qui déclarait la déchéance des intérêts.

- le 21 avril 1989, client Manach, des éléments de cheminée, acompte de 891 F;

- le 22 avril 1989, clients Le Guillou, un salon, acompte de 4 500 F:

Les intéressés étaient appelés par téléphone le 21 avril 1989 comme étant les gagnants d'une tombola où ils avaient gagné 30 % de réduction et la reprise éventuelle de leur vieux salon, à valoir sur un salon neuf. Rendez-vous était pris pour le 22 avril, mais le démarcheur ne parlait pas des avantages mentionnés par téléphone, si ce n'est pour indiquer que la personne qui avait téléphoné avait commis une faute professionnelle et n'aurait pas dû annoncer ces avantages, car le salon choisi bénéficiait déjà d'un prix préférentiel et il était donc impossible de pratiquer la réduction annoncée. Finalement, après tractation avec la direction, il était proposé le paiement en cinq fois avec versement d'un acompte de 4 500 F à la commande et de 4 500 F à la livraison, déduction faite de la reprise de l'ancien salon pour 4 500 F.

- le 30 mars 1991, client Recorbet, un salon, acompte 5 000 F:

Suite à un appel téléphonique, l'intéressée; se rendait au magasin Y le 30 mars 1991. Elle se voyait alors remettre un bon ou un ticket et s'entendait demander si elle était intéressée par l'achat d'un salon. Dès lors, le vendeur "ne la lâchait plus" et dans ses manœuvres, faisait intervenir le directeur du magasin, M. Garcia, qui proposait à la cliente une remise de 3 000 F. Elle signait en définitive un bon de commande et remettait un chèque d'acompte d'un montant de 5 000 F. Il est à souligner que l'intéressée qui disposait alors de revenus de l'ordre de 2 500 F, se trouvait alors en longue maladie. Elle demandait la résiliation le 4 avril 1991, après avoir fait opposition au chèque le 2 avril. Y lui écrivait le 9 avril que la direction ne pouvait accepter sa demande de résiliation. Ce refus lui était confirmé oralement, alors qu'elle se rendait au magasin.

Lors d'autres démarchages à domicile étaient obtenus par les vendeurs et techniciens commerciaux des autorisations de prélèvements bancaires:

- le 15 mars 1988, les époux Altero:

Il apparaissait que le bon de commande était illisible. Lors de la prise de commande, la publicité annonçait l'existence d'un crédit report. Or, la première échéance était prélevée au bout de trois mois au lieu de douze et néanmoins la déchéance du terme était dénoncée par la société crédit V. Le Tribunal d'instance de Chateaulin était saisi et les époux Altero bénéficiaient d'un règlement judiciaire civil, compte tenu de leur surendettement. Dans cette affaire, la commande d'une cheminée était influencée par la présentation fallacieuse d'une soi disant étude thermique où était d'une manière totalement fantaisiste indiqués des flux d'air chaud et froid et venaient à l'appui d'une démonstration d'une économie substantielle de coût de chauffage. Un engagement était immédiatement souscrit dès la commande du matériel.

- le 23 mars 1988, Gilbert Le Donge:

Celui-ci souscrivait, dans le cadre de l'opération "0 F pendant 12 mois". Le client envisageait de payer sa cuisine au comptant, mais se laissait convaincre par les arguments du vendeur. Ultérieurement, il apparaissait que l'opération s'analysait aux yeux du financeur comme étant une location-vente, alors qu'elle était présentée comme un crédit gratuit pendant un an. Le client était très manifestement trompé sur les caractéristiques du financement proposé. Il apparaissait d'ailleurs que, compte tenu de l'indemnité demandée, l'intérêt sur 12 mois s'établissait à 25,16 %. Un engagement était immédiatement souscrit dès la commande.

- le 28 septembre 1988, Etienne Lebrun:

Il s'agissait d'une vente de cheminée, financée par V. Le contrat était signé alors même que le même mois était prise une mesure de tutelle aux prestations sociales et se posait très sérieusement le problème du contenu du dossier ayant entraîné l'accord de financement. L'intéressé était admis au surendettement à la fin de l'année 1990, avec un redressement impossible. L'examen normal de financement devait aboutir au refus de leur droit. Il était remarqué en outre que le client avait bénéficié de démonstration de l'économie d'énergie avec un dessin "d'air chaud et d'air froid" qui sera saisi dans le dossier au siège de Y.

Un engagement était immédiatement obtenu lors de la commande.

- le 28 septembre 1988, Roger Lecomte:

Celui-ci a souscrit une commande de meubles pour 18 500 F avec engagement signé immédiat.

- le 14 octobre 1988, les époux Maline:

A la suite d'un achat d'une cheminée par le voisin, les époux Maline étaient démarchés par T, vendeur de X, dans le cadre de l'opération "0 F pendant un an". Un bon de commande était signé le 14 octobre 1988 pour l'achat d'un salon et d'une cheminée sous la forme d'une location-vente. Le prix était ramené de 53 852 F à 48 000 F, avec proposition de différé du remboursement du financement jusqu'au mois de février 1990 (livraison en novembre 1989). Le financement de 48 000 F était remboursé en 96 loyers de 1 044 F. Toutefois, au moment de solder le comptant en février 1990, V réclamait une somme totale de 59 122,75 F incluant les intérêts sur l'année écoulée, pour un montant de 11 122,76 F (soit un intérêt de 23,17 %). Il était remarqué que V négociait les rachats de location-vente alors que les contrats ne comportaient aucune clause de rachat de contrat et que les indemnités réclamées étaient fixées unilatéralement par V.

L'autorisation de prélèvement bancaire avait été obtenu dès le jour de la commande.

- les époux Coroller:

Ces clients étaient attirés à la fin de 1988 par la publicité "devis gratuit sans engagement". A la fin 1988, ils commandaient une cuisine livrable en février 1989. En avril 1989, ils acquéraient un salon et en 1990, l'un des vendeurs (T) cherchait à leur vendre une chambre à coucher en indiquant que dans la mesure où ils étaient de bons clients, il leur ferait application des tarifs de 1989 au lieu de ceux de 1990 tout en leur demandant de verser un acompte qui était refusé. Durant cette visite, T appelait la direction à Quimper et faisait entendre aux clients la conversation dans laquelle la direction acceptait la proposition d'un crédit gratuit de six ans et menaçait le vendeur de conclure l'affaire ou son avenir professionnel était engagé. Les clients finissaient par signer à la fois le bon de commande et l'offre de crédit et les autorisations de prélèvements. Une nouvelle offre de crédit intervenait ultérieurement, suite à des difficultés de paiement. Devant le refus de ces nouveaux engagements, les clients s'entendaient menacer de l'envoi de l'huissier.

- le 7 février 1989, Corinne Faugas et René Marrec:

Les intéressés acquéraient une cuisine puis une cheminée. Ils ne pouvaient pas payer la cheminée et la société X acceptait de la placer en dépôt-vente "dans nos murs". Toutefois, celle-ci était perdue puis retrouvée dans un dépôt-vente étranger, à Quimperlé. On leur proposait ensuite de l'échanger contre un salon d'exposition.

Le dossier de crédit initial comporte une autorisation de prélèvement signée dès le jour de la commande.

- en novembre 1989 et mai 1990:

Les époux Aranegas étaient contactés par téléphone et une date de visite était retenue au cours de laquelle s'effectuait le véritable démarchage. Un bon de commande était établi et doublé d'une offre préalable de crédit. Les autorisations de prélèvement étaient établies dans le même moment. Le bon de commande, d'une valeur de 21 000 F, était signé le jour même et scindé en six mensualités de 3 500 F sans intérêts. Quelques jours après, les époux Aranegas recontactaient le vendeur afin d'indiquer qu'ils ne pourraient pas payer. Trois d'entre eux revenaient en décembre 1989 (P, T et F) afin de renégocier le crédit et l'épouse signait une deuxième offre préalable de crédit et du même montant mais étalée sur cinq ans pour des mensualités de 541,12 F. Elle ne recevait pas d'exemplaire de cette offre. Les modalités de crédit étaient connues du client seulement à réception de la lettre d'acceptation de la société de crédit au mois de 1990. Il apparaissait en outre à la réception du matériel que les mesures avaient été mal prises et comportaient des erreurs de cote. En outre, la cuisine avait été très mal montée. Cela n'empêchait pas que le 11 mai 1990, le vendeur T et un autre revenaient chez les mêmes et leur faisaient signer un bon de commande pour un salon d'une valeur de 54 000 F avec un engagement de crédit sur 10 ans pour des mensualités de 1 200 F! Deux jours après, l'épouse appelait le vendeur pour indiquer qu'elle ne pourrait pas payer.

Dans cette affaire, comme dans de très nombreuses autres, les clients, qui très souvent ne disposaient pas d'un bon de commande muni de la partie détachable pour l'annulation, ou n'employaient pas celle-ci faute d'en connaître le fonctionnement, mais manifestaient sans équivoque auprès de la société leur volonté de revenir sur leur engagement, étaient victimes de manœuvres d'attente de la société X qui, au-delà du délai de sept jours, leur indiquait que leur engagement était définitif et qu'il ne pouvait y être revenu. Dans le cas particulier, on peut s'interroger en outre sur le démarchage opéré chez des clients parfaitement connus qui se trouvaient déjà avec des difficultés importantes pour un engagement de 21 000 F et auxquels ont fait immédiatement après la livraison de la cuisine signer un nouvel engagement pour un salon d'une valeur de 54 000 F.

Dans ce cas particulier, entre le 14 et le 18 mai 1990, MM. T et F revenaient chez les époux Aranegas et voulaient les convaincre de maintenir leur commande puis leur faisaient signer un nouveau bon de commande prévoyant des mensualités moins importantes et une offre préalable de crédit qui était d'ailleurs antidatée, portant la date du 11 mai, ce qui réduisait bien sûr à néant le délai de rétractation de sept jours. Il s'avérera d'ailleurs que le plan du financement pour la cuisine avait été rejeté par X et qu'ultérieurement, le financement du salon avait fait l'objet d'un rejet de la part de l'organisme de crédit, ce qui n'empêchait pas le vendeur de revenir chez le client pour lui proposer d'autres modalités de paiement, chez un autre organisme de crédit. Ce financement était néanmoins refusé également. L'autorisation de prélèvement sur compte bancaire était signée dès la première visite. En l'espèce, était utilisé également le système de cadeau pour amadouer le client, système qui relevait en réalité de l'auto-parrainage tombant sous le coup de la réglementation sur les ventes avec prime.

- les 10 mai et 26 juin 1990, Salvatore Salis:

L'intéressé passait commande d'un salon pour un montant de 42 251 F le 10 mars 1990 et d'une salle de bains pour un montant de 19 500 F le 23 juin 1990. Pour le salon, 96 échéances assorties d'une assurance invalidité-décès de 50 % sur chaque tête et, pour la salle de bains, 48 loyers avec les mêmes conditions. Dans les deux cas, le client avait signé une autorisation de prélèvement sur compte bancaire le jour même de la commande. Il apparaissait que l'intéressé était un immigré d'origine italienne et parlant difficilement le français et qu'il ne pouvait avoir appréhendé la portée des contrats qu'il souscrivait. De plus, son épouse était à l'époque gravement malade. Il ne pouvait obtenir de prise en charge, après le décès de son épouse, des échéances des financements par l'assurance.

- le 16 février 1991, Myriam Lagadec épouse Kerc'hrom:

L'intéressée était l'objet d'un démarchage téléphonique. Il lui était annoncé que le tirage au sort lui avait fait gagner une cuisine. Il lui était proposé la visite d'un représentant pour établir un devis gratuit. Le 16 février 1991, un vendeur faisait établir un bon de commande et une remise de 7 000 F était proposée sur une cuisine d'un montant net après remise d'un prix de 36 395 F, avec un crédit A de 32 000 F sur 48 mois. La cliente annulait la commande le lendemain ou surlendemain. Le jour suivant, le vendeur revenait pour proposer un nouveau crédit plus avantageux, assorti d'un nouveau bon de commande où la remise n'apparaissait plus, ce qui amenait à une nouvelle offre préalable d'un crédit de 39 000 F sur 48 mois. Il était à remarquer que le bon de commande ne comportait aucune indication du taux effectif global du crédit et qu'une autorisation de prélèvement bancaire avait été exigée de la part du vendeur dès la signature du bon de commande et de l'offre de crédit. Le bordereau d'annulation était également non conforme.

- le 20 février 1991, Janine Gloaguen:

Cette cliente commandait le 20 février 1991 une cuisine pour laquelle elle signait une autorisation de prélèvement. Le taux indiqué quant au crédit était de 3,9 %.

Il était encore constaté un certain nombre de cas pouvant relever de l'abus de faiblesse:

Les époux Aranegas, couple dont l'insolvabilité était patente, compte tenu de la disposition d'un seul salaire de 4 700 F pour faire vivre six personnes et rembourser un prêt immobilier par mensualité de 3 000 F, qui a fait l'objet d'un véritable harcèlement de la part des vendeurs de la société qui se sont présentés à trois à son domicile en décembre 1989 puis à deux en février 1990 et lui ont fait souscrire deux offres de prêt, pour un montant de 54 000 F en refaisant la seconde fois un contrat à la date du premier sans en laisser le double, lui interdisant ainsi de mesurer la portée de son engagement et particulièrement son caractère disproportionné par rapport à ses ressources;

Roger Lecomte, adulte handicapé décrit par ses proches comme particulièrement crédule, influençable et peu apte à la réflexion, à qui a été vendu un mobilier, pour une valeur de 18 500 F et un coût total à crédit de 22 802,22 F, dont il n'avait pas l'usage et sous des conditions financières dépassant ses capacités;

Salvatore Salis, d'origine italienne, dont la méconnaissance de la langue française était inévitablement perceptible par le démarcheur, se trouvant dans l'impossibilité de comprendre la portée des deux engagements que lui a fait souscrire un vendeur de la société, prévoyant notamment un crédit avec une assurance décès sur la tête de son épouse, déjà gravement malade et devant décéder quelques mois après;

Les époux Tanguy, couple dont l'épouse était âgée de 76 ans au moment des faits, gravement malade et ne pouvant accomplir seule les actes de la vie courante du fait de la maladie (leucémie) dont elle était atteinte, et le mari de 84 ans, ne jouissant plus de toutes ses facultés mentales, tous les éléments perceptibles par le vendeur qui les a lui-même transportés dans sa voiture, à qui a été vendu des éléments de cuisine dont il n'avait pas l'usage et qui ont été entassés dans la cuisine qu'ils ont rendue inaccessible;

Marcelle Tosetti, travailleuse intérimaire, dont le statut, connu du vendeur n'offrait pas une garantie de ressources régulières et constantes dans leur montant, auprès de qui la vente d'une cuisine a été conclue, alors qu'elle venait de souscrire un contrat identique auprès d'une société concurrente, contre l'assurance de la résolution de celui-ci, dont le vendeur avait connaissance, et en la sécurisant par la souscription d'une assurance chômage à laquelle elle ne pouvait cependant pas prétendre compte tenu de son statut;

Les époux Theven, à qui l'offre de location vente remise ne comportait aucune indication lisible du coût total de l'opération, ce que le vendeur ne pouvait ignorer en la leur remettant, les privant de toute capacité d'apprécier la portée de leur engagement;

Lucien Gloaguen, à qui l'offre de location vente remise ne comportait aucune indication lisible du coût total de l'opération, ce que le vendeur ne pouvait ignorer en la lui remettant, le privant de toute capacité d'apprécier la portée de son engagement;

Rémy Toulgoat, dont l'achat auprès de Y a été conclu contre la promesse d'une annulation d'une première vente intervenue concomitamment avec une société concurrente, la renonciation de l'intéressé à l'annulation de la seconde étant obtenue par deux vendeurs de la société sous la contrainte, interdisant à l'acheteur d'apprécier la portée de son engagement.

Monsieur et Madame Kerc'hrom, qui ont été démarchés téléphoniquement avaient gagné un lot. Il leur a été proposé une visite pour un devis gratuit et le 16.2.91, un vendeur a établi un bon de commande avec remise de 7 000 F sur 43 395 F = 36 395 F sans les appareils ménagers. Le crédit était de 32 000 F sur 4 ans.

Le lendemain, le vendeur est revenu pour proposer un "crédit plus avantageux" = 39 000 F sur 4 ans sans indication de taux effectif global.

D'autres faits et pratiques habituelles ont été retenues comme escroquerie:

* L'intervention d'une présentatrice de la télévision au téléphone, de nature à impressionner des personnes simples telles que Roger Lecomte, pensionné adulte handicapé depuis 39 ans, pouvant connaître et apprécier "Annie Pujol", célèbre en son temps.

* L'annonce de "crédits gratuits" qui n'étaient que différés, voir locations avec options d'achat dit "leasing".

Ainsi pour Madame Michelle Lagadec épouse Lamour:

Une commande était passée en novembre 1988 pour un insert de cheminée, en essayant en outre de lui vendre un salon à des conditions de prix et de financement avantageux. Le prix du salon était ramené de 34 964 F à 28 360 F. On lui proposait également de différer les remboursements du financement à partir du mois d'avril 1990, tout en réservant la possibilité de remboursement par anticipation. Le bon de commande était signé ainsi ce qui s'avérait être une offre de location-vente, avec un différé de remboursement de 12 mois. Le montant du financement de 28 360 F correspondait au prix comptant et la cliente s'engageait pour 72 loyers de 658,83 F, le vendeur précisant qu'il n'y aurait pas d'intérêts à payer en cas de remboursement anticipé. Toutefois, le 12 décembre 1988, la cliente se rendait à Y pour demander que ce point particulier figure sur le bon de commande, qui était complété par M. B, directeur du magasin Y s'engageant à régler les intérêts éventuels sur la première année. La cliente était à nouveau recontactée par le magasin, qui indiquait, le 16 décembre 1988, que les mensualités étaient en réalité de 762,29 F. Au moment de la résiliation, V réclamait 5 027,33 F à titre d'indemnités pour remboursement anticipé et le successeur de M. B, M. C, indiquait qu'il n'était pas question de respecter la clause figurant sur le bon de commande, dont la validité était contestée par Y pour absence de signature du directeur du magasin. Le litige était toutefois réglé grâce à l'intervention de la DCCRF. Il apparaissait donc que la publicité pratiquée par Y était en fait mensongère puisque la présentation en était: "0 F pendant un an", ce que tous les clients interprétaient comme étant l'absence d'intérêts demandés pour cette période, ce qui leur permettait éventuellement un différé d'un an dans le paiement. Toutefois, Y et la société de financement analysaient l'opération comme étant en réalité une location-vente et que si les intérêts n'étaient pas réclamés la première année, ils étaient en réalité reportés sur les années suivantes et étaient donc, en tout état de cause, payés. Il y avait là un abus dans la présentation constitutive de publicité mensongère. En outre, l'indemnité de rachat était fixée unilatéralement par V.

* Une pseudo étude thermique ou calorifique concernant les cheminées, tendant à faire apparaître un pourcentage d'économie sur les factures de chauffage sensiblement équivalent aux mensualités du crédit ainsi présenté comme indolores.

Selon le vendeur Thierry T, les commerciaux avaient ordre de donner un taux d'économie d'énergie suivant un barème calorifique remis en photocopie.

Tout le monde ignore totalement quels sont les paramètres de ce barème et le taux d'économie était illusoire et fictif.

Le client n'en conservait pas trace à l'exception d'un schéma aux apparences techniques avec quelques calculs pour appuyer la démonstration.

Ces manœuvres tendant à persuader les clients d'une excellente affaire aboutissait toujours à des taux d'économie supérieurs à 45 %.

* Une méthode de passage de relais par appel téléphonique à la direction pour simuler des conditions de paiement et de financement plus favorables et en apparence accordées à titre très exceptionnel et de faveur alors qu'il n'en était rien.

Les premiers juges ont considéré la situation des deux personnes renvoyées devant lui:

- Denis M, PDG de la SA X

- Gérard G, responsable du télémarketing et des commerciaux

à raison d'une délégation de responsabilité du 21 juin 1989 et les a, après relaxes partielles, condamnés respectivement à 14 mois d'emprisonnement avec sursis et 150 000 F d'amende et 10 mois d'emprisonnement avec suris et 80 000 F d'amende outre des dommages-intérêts pour les parties civiles.

Denis M, appelant, a conclu à la confirmation de sa relaxe à raison de la délégation de responsabilité acceptée par Gérard G et pour les faits antérieurs au 21 juin 1989:

- que les cuisines intégrées et les cheminées étaient des meubles par destinations, et que ce n'est qu'après l'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 1989 que les dispositions relatives au démarchages à domicile leur sont applicables;

- que les autorisations de prélèvement pouvaient être remises, sans infraction à l'article L. 311-28 du Code de la consommation, l'article précédant dudit Code prévoyant que les autorisations en question ne prennent effet et sont subordonnées à la validité du contrat de vente;

- que manquent à l'abus de faiblesse diverses circonstances de fait qui doivent être cumulativement réunies;

- que de plus il n'a pas personnellement commis ces faits, seul G apparaissant comme assurant la formation et donnant des instructions aux commerciaux;

- que les publicités retenues comme mensongères ne sont pas établies matériellement concernant les petites annonces;

- que les remises, tombolas et cadeaux de parrainage ont été en réalité affectifs;

- que la publicité "0 F pendant un an" mentionnait également "location avec option d'achat" et d'autres mentions claires ne faisant pas référence à la gratuité du crédit;

- que pour l'offre d'un mois de salaire, il était fait référence à un barème et que pour la quasi-majorité des clients la remise, qui atteignait 4 500 à 5 000 F, correspondait au SMIC et que le message publicitaire indiquait une possibilité et non une certitude par la mention "c'est possible?" avec un point d'interrogation;

- que les faits d'escroquerie retenus datant d'avant avril 1994, seul le texte de l'ancien Code pénal doit s'appliquer et qu'en l'espèce il n'y a ni manœuvres pour faire croire à la survenance d'un événement chimérique, ni la preuve de ce que ces manœuvres aient pu être déterminantes du consentement.

Gérard G, bien que non appelant, a conclu à sa relaxe, contestant la validité de la délégation de responsabilité du 21 juin 1989 et indiquant que notamment les publicités ont été faites aux services de la SA X au niveau national et non dans les magasins de Quimper où il travaillait.

Il rappelle la politique commerciale de l'entreprise: sa méthode originale dite "de l'entonnoir", son concept de télé-marketing, les ventes à crédit V, partenaire contractuel, les méthodes de recrutement imposées avec documents guides précis pour les commerciaux et la surveillance du système par des animateurs-inspecteurs de la franchise.

L'UFC de Quimper et l'UDCLCN du Finistère ont conclu à l'infirmation du jugement et sollicitent la condamnation in solidum des deux prévenus à leur payer à chacune 30 000 F à titre de dommages-intérêts et 6 000 F en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale outre publication d'extraits de l'arrêt à intervenir.

Sur ce,

1°) Sur la délégation de responsabilité:

Gérard G a accepté et reçu le 21 juin 1989 une délégation de responsabilité avec pour fonctions de:

- d'embaucher le personnel du centre "Y" de Quimper,

- de le licencier si nécessaire,

- de donner toutes instructions,

- de veiller au respect de la réglementation,

- de participer à la formation,

- d'expliquer les campagnes promotionnelles et publicitaires,

- de coordonner l'ensemble des services des trois magasins et de les animer.

Les employés, notamment vendeurs, ont indiqué qu'ils ont reçu régulièrement de Gérard G, dès avant cette délégation d'ailleurs, les directives et techniques de ventes.

Divers consommateurs l'ont eu comme correspondant au téléphone au titre de la direction du magasin.

S'il a débuté comme vendeur, son parcours professionnel et sa rémunération d'environ 40 000 F par mois à l'époque permettaient de considérer qu'il avait tant les aptitudes que l'autorité et les moyens d'exercer ces responsabilités.

Par contre, il apparaît que le PDG de la SA, Didier M a directement participé à la mise au point des campagnes promotionnelles et de publicité reprises ensuite localement et que cette délégation ne peut exclure sa propre responsabilité de ce chef.

De même, il résulte de la procédure et d'un article publié en avril 1991 dans la revue "Armor magazine" que Denis M est à l'origine de la politique commerciale en cause, a toujours revendiqué la paternité des "concepts" et méthodes employés qui lui ont permis, à partir de rien, de hisser sa société parmi les plus brillantes du palmarès de l'époque avec un chiffre d'affaires de deux milliards de francs pour 1989 et la création de nombreux points de ventes nouveaux chaque année.

Cette délégation de responsabilité, si elle permet de recherche Gérard G pour la période postérieure au 26.1.1989, n'exclut pas la responsabilité du dirigeant de l'entreprise pour toute la période objet des poursuites.

2°) Sur les publicités mensongères:

Il n'a pas été joint au dossier les publications dans la presse relatives aux petites annonces censées émaner de particuliers et permettant de capter la clientèle intéressée par des cuisines et des salles de bains.

Faute de preuve du message publicitaire, ces faits ne peuvent être retenus même s'ils dénotent une conception particulière du démarchage de la clientèle.

De même les motifs des premiers juges seront repris et adoptés s'agissant des photographies de cuisine et salle de bains avec descriptifs au bas.

Les messages publicitaires annonçant des remises qui se sont révélées illusoires sous conditions de parrainage ou non, sont par contre au dossier et étaient manifestement de nature à induire en erreur le client potentiel, des réductions de 3 000 F, 7 000 F ou de 30 % n'étant pas anodines et pouvant se révéler déterminantes lors d'un achat.

Le message publicitaire indiquant "0 F pendant un an" était également de nature à induire en erreur le consommateur étant précisé qu'il ne s'agissait que de différés de règlement, le plus souvent des loyers d'un leasing.

Les publicités mentionnant une remise d'un mois de salaire étaient, de par la disproportion entre cette annonce alléchante imprimée en très gros caractères et les mentions obscures ou ambiguës écrites en typographie minuscule, de nature à induire le chaland en erreur et à l'attirer de manière à ce qu'il téléphone au magasin.

Il apparaît de la procédure et des débats que Denis M agissait très directement sur l'organisation des campagnes promotionnelles et publicitaires dont il indique qu'il y en avait une nouvelle chaque mois. C'est lui qui était en contact avec le cabinet de publicité, qui soumettait les projets à un conseil juridique et qui, finalement, donnait son accord pour le lancement. Il doit donc en assumer la responsabilité.

Gérard G, non appelant, a accepté sa déclaration de culpabilité de ce chef, était, pour la période retenue par les premiers juges, en charge des activités commerciales des magasins de Quimper où les publicités ont été largement diffusées. Il sera donc retenu sa responsabilité de ce chef à compter du 21.6.1989.

3°) Sur les infractions relatives au démarchage à domicile:

a°) Sur la nature des biens offerts à la vente:

Les effets mobiliers ne deviennent immeubles par destinations aux termes des articles 524 et 525 du Code civil que si le propriétaire de l'immeuble les immobilise et les affecte au service de l'immeuble.

Tel ne peut être le cas de meubles de cuisine ou d'éléments de cheminées acquis par des locataires ou pris en location d'achat dite "leasing" où lesdits objets restent propriété du loueur finançant l'opération.

De plus, en cas d'achat véritable, les crédits à la consommation dont s'agit sont tous des contrats V relatifs à des achats d'objets mobiliers.

Il ne peut donc être argumenté sérieusement que les règles relatives au démarchage à domicile ne s'appliquaient pas à l'espèce d'autant que des éléments préfabriqués de cuisine ne peuvent être compris parmi les meubles attachés à perpétuelle demeure, même s'ils ont été acquis par un propriétaire et fixés par lui avec des crampons dans un mur, car celui qui les emporte peut facilement, et sans altérer la substance de l'immeuble, les détacher en effectuant au besoin de légers travaux de replâtrage sur le mur auquel ils étaient attachés.

De plus, le fait que la loi, en sa rédaction du 23 juin 1989 s'applique expressément aux opérations sur les immeubles par destination, ne change rien à la question d'autant que ce texte prenait acte d'une jurisprudence antérieure.

b°) Sur les acomptes perçus le jour du démarchage:

Ces infractions aux dispositions de l'article L. 121-26 du Code de la consommation sont formellement établis au dossier pour les clients:

- Madame Louise Kern, le 20 juin 1988 (2 560 F),

- M. Lucien Gloasguen, le 7 décembre 1988 (2 044 F),

- M. Manach, le 21 avril 1989 (891 F),

- les époux Le Guillou, le 22 avril 1989 (4 500 F),

- et M. Recorbet, le 30 mars 1991 (5 000 F).

c°) Sur les autres contreparties obtenues le jour du démarchage:

L'autorisation de prélèvement bancaire, même si elle peut être révoquée par le signataire, est une contrepartie, quelque soit la suite donnée au contrat qui lui a servi de fondement, en effet la loi entend protéger le consommateur démarché et empêcher que soit obtenu de lui quelque engagement.

Les articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation, codifiant la loi du 10.1.78 dite "Scriver" et dont il sera observé qu'ils ne concernent pas le financement des "immeubles", ne sont pas en contradiction avec les dispositions de l'article L. 121-26 du même Code ainsi précisées.

En effet, l'article L. 311-27 ne concerne pas les ventes lors d'un démarchage à domicile et l'article L. 311-28 ne fait que rappeler les règles posées par l'article L. 121-26.

Doivent être retenus les dix cas rappelés lors de l'exposé des faits:

- époux Altero: 15 mars 1988,

- Gilbert Le Donge: 23 mars 1988,

- Etienne Lebrun: 28 septembre 1988,

- Roger Lecomte: 28 septembre 1988,

- époux Maline: 14 octobre 1988,

- époux Coroller: 6 février 1989,

- Corinne Faugas et René Marrec: 7 février 1989,

- Salvatore Salis: 10 mai et 26 juin 1990,

- Madame Kerc'hrom: 16 février 1991,

- Janine Gloaguen: 20 février 1991.

4°) Sur les escroqueries:

Les méthodes utilisées sous les enseignes "X", ont pris parfois le caractère de manœuvres et avaient toujours pour objectif d'obtenir d'un client la souscription d'une commande et des engagements financiers.

Si la pseudo-intervention, peut-être pré-enregistrée, d'une animatrice de télévision n'apparaît pas déterminante dans la remise de fonds ou d'un engagement et relève plutôt d'un abus de faiblesse à l'égard de la personne handicapée visée au dossier, les crédits présentés comme "gratuits" alors qu'il n'y avait qu'un différé de remboursement ou de paiement des loyers du "leasing", les exposés pseudo-techniques avec étude thermique ou calorifique et les méthodes de passage de relais décrites plus haut étaient en réalité des manœuvres dolosives, imaginées, conçues, mises au point et mises en œuvre pour abuser une clientèle "ciblée" comme vulnérable et obtenir indûment des commandes qui, sans celles-ci, n'auraient pas été passées.

Il s'agit donc bien là d'escroqueries, mises en œuvre par celui qui revendique dans l'interview déjà citée d'avril 1991 la paternité des "concepts" et méthodes utilisées".

Elles ont été ensuite mises en application par Gérard G qui formait les commerciaux après leur recrutement.

Denis M doit donc être déclaré coupable pour toute la période objet des poursuites et Gérard G pour celle postérieure à la délégation de responsabilité du 21.6.1989.

5°) Sur les abus de faiblesse:

Ceux-ci, déjà décrits, ont été analysés par les premiers juges par des motifs que la cour adopte.

Il a déjà été répondu sur l'applicabilité du texte concernant le démarchage aux objets ici proposés.

Les clients dont s'agit, étaient manifestement, et pour des raisons diverses, fragilisés face à la politique commerciale et aux pratiques agressives mises en œuvre sur les "concepts" de Denis M.

Les démarcheurs ont largement abusé de situations sociales, psychologiques ou médicales précaires pour faire souscrire à tout prix des commandes hors de proportions avec les besoins et les possibilités financières des clients;

Les "commerciaux" agissaient ainsi en fonction des directives reçues et motivés par le système d'intéressement au chiffre d'affaires. Ce concept mis en œuvre et encouragé par Denis M accompagné par Gérard G après juin 1989 doit entraîner la responsabilité de ceux-ci.

Gérard G n'a d'ailleurs pas contesté sa condamnation de ce chef.

6°) Sur les peines:

Les pratiques commerciales dont s'agit, revendiquées en son temps par le PDG de la SA X, ont permis à celle-ci un développement rapide et considérable.

Les pénalités doivent être à la mesure des chiffres d'affaires annoncés et de la multiplicité des infractions relevées.

Gérard G, non appelant, n'a en réalité pas contesté les condamnations prononcées par les premiers juges et celles-ci seront confirmées.

Denis M, principal auteur des faits et concepteur des méthodes utilisées doit être sévèrement sanctionné.

La peine d'emprisonnement partielle sans sursis prononcée contre lui sera confirmée et l'amende sera portée à 200 000 F.

7°) Sur l'action civile:

Les premiers juges ont très exactement et justement évalué les préjudices subis par ces associations de protection des consommateurs à raison des agissements retenus comme constitués.

Le jugement sera donc confirmé sur le montant des dommages-intérêts.

Les condamnations au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale seront confirmées également et il y sera ajouté de nouvelles indemnités en cause d'appel.

Par ces motifs, LA COUR, Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, par arrêt et contradictoire à l'égard de G Gérard, de M Denis, de l'Union fédérale des consommateurs, de la Confédération syndicale du cadre de vie du Finistère, et par défaut à l'égard de Le Brun Odile et de Maline Daniel, En la forme: Reçoit les appels, Au fond: Sur l'action publique: Infirme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau: - Relaxe Denis M et Gérard G du chef de publicité de nature à induire en erreur, portant sur la vente d'une salle de bains à 5 900 F et d'une cuisine à 9 900 F et sur les annonces supposées émaner de particuliers. - Relaxe Gérard G pour les autres faits antérieurs au 21 juin 1989. - Déclare Denis M et Gérard G coupables des autres faits objets de la prévention. - En répression: - Confirme le jugement entrepris sur les peines en ce qui concerne Gérard G. Constate que l'avertissement prévu à l'article 132-29 du Code pénal n'a pu être donné au prévenu absent lors du prononcé de l'arrêt, - Statuant à nouveau: Condamne Denis M à 14 mois d'emprisonnement avec sursis et 200 000 F (30 489,80 euros) d'amende. Constate que l'avertissement prévu à l'article 132-29 du Code pénal n'a pu être donné au prévenu absent lors du prononcé de l'arrêt, prononce la contrainte par corps pour les deux condamnés. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F (121,96 euros) dont est redevable chacun des condamnés, Le tout par application des articles susvisés, 800-1, 749 et 750 du Code de procédure pénale. Sur l'action civile: Confirme le jugement sur les condamnations civiles. Y ajoutant, condamne solidairement Denis M et Gérard G à payer à l'association UFC 29 la somme de 1 500 F (228,67 euros) en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale devant la cour. Dit qu'il n'y aura lieu à condamnation aux dépens en vertu de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 et du décret d'application n° 93-867 du 28 juin 1993.