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Décisions

CA Aix-en-Provence, 5e ch. corr., 18 mars 1997, n° 97-174

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Association commerciale industrielle artisanale services et professions libérales des cantons de Cannes, Chambre syndicale des détaillants en chaussure des Appels Maritimes, Jacques Loup (SA), Union départementale Orgeco 06

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ellul

Conseillers :

Mmes Coux, Delpon

Avocats :

Mes Delmas, Guetta

TGI Nice, du 19 mai 1995

19 mai 1995

Décision:

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,

JP T a été poursuivi devant le Tribunal correctionnel de Nice pour:

- avoir à Cannes et Nice, courant juillet 1994, en tous cas depuis temps non prescrit par voie de presse écrite et distribution de tracts sur la voie publique, effectué une publicité portant sur une vente au déballage non autorisée, faits prévus par les articles L. 121-15 al. 1 1° 2 du Code de la consommation et 1 de la loi du 30 décembre 1906 et réprimés par les articles L. 121-15 al. 2 et L. 121-15 al. 3 du Code de la consommation,

- avoir à Cannes, courant juillet 1994 et le 11 août 1994, en tout cas depuis temps non prescrit, effectué une vente au déballage de marchandises neuves (chaussures) sans autorisation municipale préalable,

fait prévus par les articles 2, 1 al. 1 de la loi du 30 décembre 1906, 1, 4, 5, al. 1 du décret 62-1463 du 26 novembre 1972 et réprimés par l'article 2 de la loi du 30 décembre 1906.

Par jugement contradictoire du 19 mai 1995, le tribunal l'a déclaré coupable et condamné à 15 000 F d'amende.

Statuant sur l'action civile, le tribunal a:

- reçu l'Union départementale Orgeco, la Chambre syndicale des détaillants en chaussure des Alpes-Maritimes, l'Association commerciale industrielle en chaussure des Alpes-Maritimes, l'Association commerciale industrielle artisanale services et professions libérales des cantons de Cannes ou l'ACIAC et la société Jacques Loup SA en leurs constitutions de parties civiles,

- condamné JP T à payer:

* à l'Union départementale Orgeco la somme de 500 F à titre de dommages-intérêts et 1 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,

* la Chambre syndicale des détaillants en chaussure des Alpes-Maritimes la somme de 10 000 F,

* à l'ACIAC la somme de 10 000 F,

* à la société Jacques Loup SA la somme de 1 F à titre de dommages-intérêts et la somme de 2 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

JP T a interjeté appel par déclaration du 23 juin 1995 et le Ministère public a exercé la même voie de recours le même jour.

JP T, cité à parquet général le 10 janvier 1997 et ayant reçu le 22 janvier 1997 la citation transmise à Monaco où il est domicilié, a comparu.

L'Orgeco, citée le 9 janvier 1997, n'a pas comparu.

La Chambre syndicale des détaillants en chaussure, citée le 8 janvier 1997, l'ACIAC et la société Jacques Loup, citée le 9 janvier 1997, ont été représentées à l'audience par leur avocat commun.

L'avocat de JP T a déposé des conclusions pour demander à la cour de le relaxer au motif que les faits lu étant reprochés ne sont pas constitutifs des infractions poursuivies et que la preuve de l'intention frauduleuse n'est pas rapportée.

A l'appui du recours, il fait valoir que:

- le prévenu, dirigeant de la société X, a mis en œuvre une politique commerciale qui répond à la définition du discount, et la publicité qu'il a diffusée pour l'ouverture de la boutique Y, faisait partie de la démarche de vente au discount sans conférer à la vente objet de la publicité un caractère occasionnel ou exceptionnel,

- les locaux loués pour effectuer la vente objet de la publicité étaient des locaux à usage général de commerce, et non uniquement destinés à être loués à une banque; Ils étaient adaptés au style de vente pratiqué par le prévenu, style de vente ne nécessitant pas des aménagements particuliers,

- la courte durée de la location s'explique par la volonté du prévenu de faire une période d'essai,

- JP T, qui a effectué la vente dans les locaux à usage général du commerce, n'avait pas l'intention de pratiquer une vente au déballage.

Les parties civiles comparantes ont déposé des conclusions pour demander à la cour de confirmer le jugement et de condamner le prévenu à leur payer 15 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Motifs de la décision:

Attendu que l'arrêt sera rendu par défaut à l'égard de l'Orgeco qui n'a pas comparu, et contradictoirement à l'égard des autres parties;

Attendu que les appels interjetés dans les forme et délai légaux sont recevables;

Attendu que JP T est le gérant d'une SARL X dont l'activité est la vente de chaussures, d'articles de maroquinerie et de vêtements de cuir; qu'à la date des faits cette société exploitait plusieurs magasins sous l'enseigne Y, notamment à Nice et à Cannes;

Attendu que suivant bail commercial daté du 8 juillet 1994, JP T louait pour le compte de sa société un local commercial pour une période de 2 mois, commençant à courir le 15 juillet 1994 et se terminant le 15 septembre 1994; que le local loué, précédemment occupé par la banque Lloyd, était situé à l'angle des rues <adresse>;

Attendu que dans ces locaux constitués de plusieurs pièces, JP T a procédé à la vente au détail de chaussures, sans avoir effectué un quelconque aménagement (vitrine ou présentoirs); que des adhésifs ont été placés sur les vitres (ne permettant pas de voir l'intérieur en raison de la présence de rideaux) et les murs des locaux loués avec les mentions "300 m² Discount Chaussures - 7 salles de chaussures - ici - 8 000 paires de chaussures"; que sur la porte d'entrée se trouvait un panneau au nom de la Lloyd Bank et indiquant l'adresse de son nouveau siège;

Attendu que, pour procédure à cette vente JP T a fait diffuser une publicité dans Nice Matin (notamment les 20 et 22 juillet 1994) comportant les mentions "ouverture - Discount Chaussures - venez découvrir en plein centre de Cannes - 10 000 paires de chaussures hommes - femmes - enfants à des prix incroyables - 300 m² d'exposition"; que, parallèlement, il faisait distribuer des milliers de tracts comportant les mentions "incroyable en plein centre de Cannes ouverture d'un discount chaussures - plus de 10 000 paires de chaussures de 20 à 250 F - venez vite à l'angle des rues <adresse>";

Attendu que la vente à laquelle a procédé JP T a bien eu lieu dans des locaux non habituellement destinés au commerce de chaussures;que l'absence d'aménagements et d'enseigne ainsi que la présence d'adhésifs, facilement enlevables, sur les vitres et murs du local loué pour deux mois pendant l'été, dans une ville touristique, particulièrement fréquentée en cette saison, démontre bien le caractère occasionnel et exceptionnel de la vente, caractère occasionnel d'autant plus évident que le nombre de chaussures en vente était précisé;que l'importance du stock et l'attractivité des prix annoncés à grand renfort de publicité établit que JP T a bien procédé à une vente au déballage;

Attendu que JP T, qui n'a sollicité aucune autorisation pour procéder à cette vente a bien agi de mauvaise foi et en toute connaissance de cause; que cette mauvaise foi est d'autant mieux établie qu'il n'a apposé sur les lieux de la vente aucune enseigne permettant de l'identifier alors que tous ses autres commerces de vente de chaussures portaient celle de Y et que le 21 juillet 1994, il a refusé de communiquer à l'huissier désigné par ordonnance de référé, suite à la requête notamment de la Chambre syndicale des détaillants en chaussures, la provenance des marchandises par production de ses livres et factures ainsi que le bail et nom du bailleur; que ce comportement est démonstratif de ce que JP T savait qu'il procédait illégalement à une vente au déballage;

Attendu que les infractions reprochées à JP T étant établies, le jugement sera confirmé tant sur l'action publique que sur l'action civile, JP T devant réparer les conséquences dommageables des délits qu'il a commis et justement évaluées en fonction des éléments d'appréciation fournis;

Attendu qu'il sera ajouté au jugement, JP T étant condamné à payer à chacune des parties civiles représentées à l'audience la somme de 1 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale pour les frais irrépétibles d'appel qu'elles ont été contraintes d'engager;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt de défaut à l'égard de l'Orgeco, contradictoirement à l'égard des autres parties, et en matière correctionnelle, En la forme, reçoit les appels, Au fond, confirme le jugement, Ajoutant au jugement, condamne JP T à payer au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale pour les frais irrépétibles d'appel; - 1 000 F à la Chambre syndicale des détaillants en chaussure des Alpes-Maritimes, - 1 000 F à l'ACIAC, - 1 000 F à société J. Loup, Dit qu'en application des dispositions de l'article 473 du Code de procédure pénale modifié par la loi 93-2 du 4 janvier 1993, la contrainte par corps s'exercera conformément aux dispositions des articles 749 et suivants du Code de procédure pénale, Le tout conformément aux articles visés au jugement, au présent arrêt, et aux articles 512 et suivants du Code de procédure pénale.