Cass. com., 8 juillet 2003, n° 00-16.882
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Souchon (ès qual.), Wissous automobiles (Sté)
Défendeur :
Automobiles Peugeot (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Orsini
Avocat général :
M. Feuillard
Avocats :
SCP Tiffreau, SCP Gatineau.
LA COUR: - Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 17 mars 2000), qu'après la mise en redressement puis liquidation judiciaires de la société Wissous automobiles (la société), concessionnaire de la société Automobiles Peugeot (la société Peugeot), par jugements des 24 septembre et 24 novembre 1997, le liquidateur a assigné la société Peugeot sur le fondement des articles 180 et 182 de la loi du 25 janvier 1985, invoquant sa qualité de dirigeant de fait de la société, ainsi que, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil; que la cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il avait rejeté les demandes fondées sur les dispositions de la loi du 25 janvier 1985 et retenant l'irrecevabilité des demandes fondées sur l'article 1382 du Code civil, les a rejetées;
Sur les deux moyens réunis, pris en leurs diverses branches: - Attendu que M. Souchon, en sa qualité de liquidateur, fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son action en responsabilité de droit commun dirigée contre la société Peugeot, alors, selon le moyen: 1) que l'action en responsabilité civile de droit commun intentée par le liquidateur tendait à établir une série de fautes du concédant dans l'exécution du contrat de concession; qu' en retenant que cette action tendait "à démontrer que la société Peugeot avait eu l'entière maîtrise de l'activité économique, et par conséquent financière et comptable, de la société Wissous, la cour d'appel a dénaturé les conclusions du liquidateur de la société Wissous et violé l'article 1134 du Code civil; 2) que le "principe du non-cumul" entre l'action en comblement de passif et l'action en responsabilité civile de droit commun ne peut être invoqué dans l'hypothèse où l'action en responsabilité civile n'est pas fondée sur la qualité de dirigeant de la personne actionnée; qu'en l'espèce, en faisant application du principe du non-cumul, alors que l'action en responsabilité civile intentée par la société Wissous, tendant à établir une faute du concédant dans l'exécution du contrat de concession, ne mettait en cause la société Peugeot qu'en qualité de contractant, et non de dirigeant, la cour d'appel a violé les articles 180 et suivants de la loi du 25 janvier 1985 et 1382 du Code civil; 3) que le principe du non-cumul ne peut être invoqué dans l'hypothèse où la personne visée par ces deux actions n'a pas dirigé l'entreprise en déconfiture; qu'en faisant application de ce principe au profit de la société Peugeot, après avoir constaté que celle-ci n'avait été dirigeant ni de droit ni de fait de la société Wissous, la cour d'appel a violé les articles 180 de la loi du 25 janvier 1985; 4) que la société Wissous soutenait, à l'appui de son action en responsabilité civile de droit commun, que le concédant avait été fautif envers le concessionnaire en l' ayant empêché, après l'ouverture de la procédure collective, de présenter un plan de redressement; qu'en retenant que cette action en responsabilité civile de droit commun tendait "à démontrer que la société Peugeot a eu l'entière maîtrise de l'activité économique et par conséquent financière et comptable de la société Wissous", la cour d'appel a méconnu les termes clairs et précis des conclusions de M. Souchon, en violation de l'article 1134 du Code civil; 5) qu'en toute hypothèse, "le principe du non-cumul" n'interdit pas d'exercer, subsidiairement à une action en comblement de passif, une action en responsabilité civile de droit commun à raison de faits postérieurs à l'ouverture de la procédure collective; qu'en faisant application de ce "principe du non-cumul" au profit de la société Peugeot, au prétexte que M. Souchon avait intenté une action en comblement de passif, alors que son action en responsabilité civile de droit commun était fondée sur des faits postérieurs à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé les articles 180 et suivants de la loi du 25 janvier 1985 et 1382 du Code civil;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé que les conclusions tendaient "essentiellement" à démontrer que la société Peugeot avait eu l'entière maîtrise de l'activité économique de la société Wissous, la cour d'appel n'a pas dénaturé les conclusions du liquidateur de la société Wissous;
Attendu, en second lieu, que lorsque le redressement ou la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, les dispositions des articles 180 et 183 de la loi du 25 janvier 1985, devenus les articles L. 624-3 et L. 624-6 du Code de commerce, qui ouvrent aux conditions qu'ils prévoient, une action en paiement des dettes sociales à l'encontre des dirigeants de droit ou de fait en cas de faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif, ne se cumulent pas avec celles des articles 1382 et 1383 du Code civil; qu'il s'ensuit que la cour d'appel a, à juste titre, retenu qu'ayant engagé de façon expresse et principale, contre la société Peugeot, l'action fondée sur les deux premiers textes précités, le liquidateur est irrecevable à exercer concurremment contre cette société l'action fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil;
Attendu, en troisième lieu, qu'est inopérant le moyen, qui, reprochant à l'arrêt d'avoir rejeté l'action à l'encontre de la société Peugeot, en sa qualité de cocontractant, fondé sur une faute contractuelle du concédant dans l'exécution puis la résiliation du contrat de concession, à raison de faits postérieurs à l'ouverture de la procédure collective, invoque à tort une violation des dispositions de l'article 1382 du Code civil; d'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus;
Par ces motifs: rejette le pourvoi.