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Décisions

CA Douai, 6e ch. corr., 10 octobre 2002, n° 02-00931

DOUAI

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Sorlin

Substitut :

Général: M. Chaillet

Conseillers :

Mme Barberger, M. Gaidon

Avocat :

Me Dutertre.

TGI Boulogne-sur-Mer, ch. corr., du 5 fé…

5 février 2002

Rappel de la procédure

Par jugement en date du 5 février 2002, le Tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer a notamment:

- déclaré Antoine C coupable d'avoir à Boulogne-sur-Mer le 7 février 2001, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, détenu en vue de la vente ou de la distribution à titre gratuit, mis en vente, vendu ou distribué à titre gratuit des denrées alimentaires comportant un étiquetage de nature à créer une confusion dans l'esprit de l'acheteur ou du consommateur, notamment sur ses caractéristiques, nature, identité, qualités, composition, quantité, durabilité, conservation, origine ou provenance, mode de fabrication ou d'obtention, en l'espèce en procédant à un étiquetage concernant 28 796 boîtes de sardines marinées de 100 grammes, 358 boîtes de un kilogramme de sardines marinées en boîtes sans porter de mentions concernant le numéro d'agrément, la température de conservation, le numéro de lot ou date de fabrication, l'adresse du fabricant;

Infraction prévue par art. R. 112-6, art. R. 112-7, art. R. 112-1, art. R. 112-14 al. 3, art. L. 214-1 2°, art. L. 214-2 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par art. L. 214-2 al. 1 du Code de la consommation;

- d'avoir à Boulogne-sur-Mer, le 7 février 2001, trompé ou tenté de tromper le consommateur par le réétiquetage de sardines et anchois marinés visant à étendre la date limite de consommation initialement fixée pour une durée de trois mois;

Infraction par art. L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par art. L. 213-1, art. L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation;

- l'a condamné à 100 jours amende de 10 euros pour le délit, et 29 154 amendes de 1 euro pour les contraventions.

Antoine C a interjeté appel le 14 février 2002.

Le Ministère public a interjeté appel le même jour.

Antoine C, assisté de son conseil, demande à la cour de :

- à titre principal, constater la nullité des procès-verbaux établis par les services vétérinaires le 7 février 2001,

- subsidiairement, le renvoyer des fins de la poursuite.

Il soutient les moyens suivants:

La visite de l'établissement X a été faite de façon non contradictoire par les services enquêteurs.

Les procès-verbaux qui se réfèrent notamment à "un nombre important de cartons avec des étiquettes non conformes" sont imprécis.

Les produits litigieux étaient conservés uniquement dans le cadre d'un litige avec un fournisseur.

Les règles relatives à l'étiquetage des produits ont été respectées, et il n'y avait aucun risque à mentionner trois mois supplémentaires, dans la mesure où les produits marinés ont une durée de vie supérieure à un an.

Sur ce point, il existe un usage professionnel caractérisé selon lequel l'étiquetage des produits individuels est possible, s'il est identique à celui du carton d'origine.

Rappel des faits

Le 7 février 2001, les services vétérinaires du Ministère public de l'Agriculture et de la Pêche procédaient à l'inspection de l'établissement X sis <adresse>à Boulogne-sur-Mer.

Ces services constataient les irrégularités suivantes

La chambre froide contenait des cartons dans lesquels se trouvaient des boîtes en plastique de semi-conserves de sardines et d'anchois marinés.

Or, un nombre important de ces cartons portait une date limite de consommation dépassée, et certaines boîtes ne portaient pas d'étiquettes, soit un total de 43 990 boîtes.

De plus, les services enquêteurs relevaient que certaines étiquettes de cartons ne portaient pas les mentions obligatoires (numéro d'agrément ou estampille, température de consommation du produit, numéro de lot ou date de fabrication, adresse du fabricant).

Enfin, certains produits dont la date de consommation était dépassée, avaient été réétiquetés avec une date de consommation prolongée de trois mois.

Antoine C, PDG de la société X, était par la suite entendu par les services de police.

Il précisait qu'un lot de marchandises servant de preuve dans un litige avec le fournisseur et portant des étiquettes avec une date dépassée, avait été conservé,

Que pour les emballages de 1 kg, la date limite imposée par le fournisseur turc étant indicative, il était d'usage lors de la réexpédition, d'apposer une étiquette avec une date limite de vente prolongée de trois mois, à condition que les analyses effectuées par l'AFSSA soient satisfaisantes.

Il ajoutait qu'une demande d'autorisation exceptionnelle de réétiquetage avait été formulée auprès des services vétérinaires d'Arras, à laquelle il n'avait pas été donné de réponse.

Sur ce

Sur la nullité de la procédure

Attendu que le contrôle a été effectué en l'espèce de façon inopinée, ce qui exclut nécessairement que le PDG de la société X aurait dû être avisé par avance de sa date;

Qu'Antoine C précise dans son audition que l'intervention des services vétérinaires a eu lieu en présence de son fils Eddo C, dans l'entreprise;

Que le prévenu qui a été entendu par la suite par les services de police, a été en mesure d'apporter toutes explications sur les faits qui lui étaient reprochés, de sorte que la procédure a été établie de façon contradictoire

Que même si le procès-verbal se réfère bien à "un nombre important de cartons", il précise, en revanche, le nombre de boîtes dépourvues d'étiquettes (43990);

Que dans ces conditions, le prévenu ne peut valablement soutenir le fait que le procès-verbal ne serait pas précis;

Sur le fond

Attendu que les contraventions reprochées à Antoine C, qui ont été commises antérieurement au 17 mai 2002, se trouvent amnistiées en application de l'article 2 de la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002;

Que dès lors, il convient de constater l'extinction de l'action publique exercée à l'encontre d'Antoine C de ces chefs.

Sur le délit de tromperie

Attendu qu'Antoine C n'établit en rien que les produits prétendument conservés dans le cadre d'un litige avec un fournisseur, n'auraient pas par la suite pu être mis en vente;

Que les faits reprochés au prévenu ne concernent en aucun cas la régularité de l'étiquetage ni la qualité intrinsèque des produits, mais consistent en une tromperie;

Qu'en ayant déclaré devant les services de police qu'il était d'usage de réétiqueter les produits avec une date limite de vente prolongée de trois mois, dans la mesure où la date limite imposée par le fournisseur turc était indicative, Antoine C qui n'établit pas au vu des pièces produites avoir tenu ses contractants informés de ce soi-disant usage, reconnaît par là même les faits de tromperie.

Attendu dans ces conditions que les faits sont établis, qu'il sera fait une application différente de la loi pénale concernant la peine.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement; Rejette les exceptions de nullité; Déclare éteinte par l'amnistie l'action publique exercée à l'encontre d'Antoine C du chef des contraventions, Confirme le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité concernant le délit de tromperie. L'infirme en répression, Condamne Antoine C à une amende de 4 000 euros. Ordonne la confiscation des marchandises saisies. Dit que la présente décision est assujettie au droit fixe de procédure de 120 euros dont est redevable chaque condamné.