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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 26 avril 2001, n° 1999-20151

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Compain

Défendeur :

RII Diffusion Relais Informatique Internationale Diffusion (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Main

Conseillers :

M. Faucher, Mme Briottet

Avoués :

SCP Regnier-Bequet, SCP Taze-Bernard-Belfayol-Broquet

Avocats :

Mes Chapuis, Debetz.

T. com. Bobigny, 8e ch., du 11 juin 1999

11 juin 1999

Par jugement du 11 juin 1999, le Tribunal de commerce de Bobigny a:

- débouté Patrice Compain de la demande qu'il avait formée contre la SARL RIID tendant à voir obtenir une indemnité de rupture et le paiement de commissions au titre du contrat de représentation passé entre parties le 2 janvier 1996, motif pris de ce que le demandeur non inscrit au registre des agents commerciaux n'avait pu souscrire une convention valable, et l'a condamné à 7 000 F de frais irrépétibles;

- mis hors de cause la société Topfinex intervenante volontaire aux côtés de Patrice Compain;

Ce dernier interjette appel, et aux termes de ses ultimes écritures signifiées le 17 janvier 2001, il soutient que l'inscription au registre spécial n'est pas une condition de validité de la convention, qui devait s'analyser à tout le moins en un mandat d'intérêt commun dont la rupture unilatérale était susceptible de donner lieu à des dommages-intérêts, alors qu'en l'espèce, si un nouveau contrat avait été proposé le montant inférieur des commissions, la suppression de celles récurrentes et l'absence d'exclusivité territoriale le rendait inacceptable; Ainsi, il réclame 531 156 F d'indemnité de rupture, 250 000 F de provision sur commissions, 76 640 F et 82 760 F sur commissions récurrentes, 64 304 F et 24 120 F sur arriéré, ce, outre 40 000 F de frais irrépétibles;

Selon écritures du 4 janvier 2001, la SARL RIID objecte que Patrice Compain est irrecevable à agir en application des articles 30 et suivants du nouveau Code de procédure civile puisqu'il ne percevait de rémunération qu'à travers la société Topfinex dont il était le salarié; Au fond, elle fait valoir que Patrice Compain ne s'est pas comporté en bon professionnel, son activité s'avérant des plus insuffisantes et sa disponibilité inexistante changeant d'adresse et ne disposant ni de fax ni de répondeur ; Elle ajoute qu'un contrat d'agent commercial à durée déterminée, et qui arrive à l'expiration du terme fixé, n'est pas soumis à un renouvellement obligatoire à peine d'assimilation à une rupture unilatérale et n'œuvre droit à aucune indemnité ; Pour ce qui est des commissions, elle rappelle qu'il y a eu substitution de créancier, et que celles-ci ne pouvaient être réclamées qu'à la seule société Topfinex qui n'est pas intimée ni en cause; Très subsidiairement, elle conteste les chiffres avancés et sollicite une mesure d'expertise ; Enfin elle conclut à l'octroi de 20 000 F de frais irrépétibles;

Sur quoi

Considérant qu'il est admis que l'obligation d'immatriculation des agents sur un registre spécial n'est pas une condition de validité de l'engagement;

Qu'il suit que la convention du 2 janvier 1996 n'est pas nulle;

Considérant d'autre part que l'article 31 du nouveau Code de procédure civile dispose que l'action en justice n'est ouverte qu'à ceux qui justifient d'un intérêt positif et concret, né et actuel;

Qu'en l'espèce Patrice Compain entend tirer effet des obligations du contrat passé entre les parties, consécutivement à la résiliation dénoncée par la SARL RIID le 22 septembre 1997 avec effet au 31 décembre 1997, à savoir paiement d'une indemnité de rupture et liquidation du compte commissions;

Considérant que le contrat dont s'agit, intitulé de représentation pour la vente du progiciel Liber, prévoit en son article 2, au titre " Durée " qu'il commence le 2 janvier 1996 et se termine le 31 décembre 1996 et qu'il est renouvelable par tacite reconduction sauf dénonciation avec un préavis de trois mois;que le contrat dispose aussi au titre "Résiliation" qu'il peut être résilié au terme ou chaque année après ce terme, la résiliation intervenant au 31 décembre, sous réserve de préavis de trois mois ;qu'enfin à l'article 4, au titre "Conditions financières", il est dit "le relevé de commissions donnera lieu à l'établissement par l'Agent (ou par une autre société désignée par lui même et approuvée par RII Diffusion) d'une facture à RII Diffusion".

Qu'il suit que Patrice Compain est bien partie prenante et que la tierce société Topfinex, non citée, n'est intervenue que dans le cadre des modalités accessoires de paiement;

Que dès lors il apparaît bien que le véritable demandeur à l'instance est Patrice Compain: - que l'action est recevable;

Considérant que le contrat, renouvelable par période dont le nombre n'était pas limité selon tacite reconduction annuelle expresse, a été renouvelé une dernière fois le 31 décembre 1996 et qu'il est ainsi devenu à durée indéterminée puisqu'il y avait prorogation successives possibles à l'infini ;- que le terme qui dépendait alors de la décision unilatérale des parties et non d'un événement objectif n'était plus qu'une restriction du droit de résilier à certaines dates;

Considérant que la présente rupture a eu lieu sans faute grave de l'agent, comme le montre le respect du préavis et l'intention du mandat d'établir un nouveau contrat, qu'il n'y avait en effet que prestations déficientes, et cette appréciation ne sera examinée que postérieurement à la lettre de rupture sur revendication de ses droits par l'agent;

Considérant qu'en vertu de l'article 12 de la loi du 25 juin 1991 une indemnité compensatrice est due à l'agent en cas de cessation des relations en réparation du préjudice subi;

Considérant que les éléments fournis à cet égard revêtent une certaine ambiguïté; que notamment les commissions perçues entre les mains de la société Topfinex n'auraient pas été déclarées fiscalement et l'activité faible, que par ailleurs l'ancienneté est d'à peine 2 ans ; - que les calculs sont formellement contestés;

Qu'il importe dès lors de clarifier contradictoirement les comptes des parties et d'organiser à cette fin une expertise;

Par ces motifs, LA COUR, Infirme le jugement entrepris, A nouveau, Dit valable la convention de représentation souscrite le 2 janvier 1996 entre Patrice Compain et la SARL RII Diffusion et l'action recevable; Déclare fondées en leur principe les demandes d'indemnisation et de paiement de commissions; Ordonne quant à leur application une mesure d'expertise; Désigne Monsieur Bernard Charrin, demeurant 65, avenue Kléber 75006 Paris, téléphone 01 44 34 08 53, expert près la Cour d'appel de Paris, avec mission, après s'être fait remettre tous documents utiles: de dresser un état des commissions perçues en 1996 et 1997, d'en redresser, le cas échéant les erreurs, de déterminer et chiffrer les commissions dues en souffrance et récurrentes, de chiffrer la perte des commissions et la réduction du bénéfice qui aurait pu être tiré d'éventuels investissements effectués par Patrice Compain; plus généralement donner les éléments chiffrés du préjudice subi par Patrice Compain du fait de la rupture du contrat d'agent; Dit que Patrice Compain devra consigner au greffe de la cour la somme de 30 000 F à valoir sur les honoraires avant le 10 juin 2001; Dit que cette somme doit être versée au régisseur d'avances et de recettes de la Cour d'appel de Paris, 34 Quai des Orfèvres 75055 Paris Louvre SP; Dit que dans les deux mois, à compter de sa saisine, l'expert indiquera le montant de sa rémunération définitive prévisible afin que soit éventuellement ordonnée une provision complémentaire dans les conditions de l'article 280 du nouveau Code de procédure civile et qu'à défaut d'une telle indication le montant de la consignation initiale constituera la rémunération définitive de l'expert; Dit que l'expert devra déposer son rapport en double exemplaire au service de la mise en état de la cour d'appel le 31 octobre 2001 au plus tard; Renvoie d'ores et déjà l'affaire à la prochaine audience utile de la mise en état, soit au vendredi 14 décembre 2001 à 13 heures.