Livv
Décisions

CCE, 17 octobre 2001, n° M.2187

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

CVC/Lenzing

CCE n° M.2187

17 octobre 2001

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 57, vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1310-97 (2), et notamment son article 8, paragraphe 3, vu la décision de la Commission du 22 juin 2001 d'engager la procédure dans la présente affaire, après avoir donné aux entreprises concernées la possibilité de faire connaître leurs observations à propos des objections soulevées par la Commission, après consultation du Comité consultatif en matière de concentrations (3), vu le rapport final du conseiller-auditeur dans la présente affaire (4), considérant ce qui suit :

(1) Le 4 mai 2001, la Commission a reçu notification, conformément à l'article 4 du règlement (CEE) n° 4064-89 (ci-après dénommé "le règlement sur les concentrations") d'un projet de concentration par lequel CVC Capital Partners Group Ltd (ci-après dénommé "CVC") acquerra indirectement, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations, le contrôle exclusif de l'entreprise autrichienne Lenzing AG (ci-après dénommée "Lenzing"), au moyen d'une acquisition d'actions.

(2) Après avoir examiné la notification, la Commission est parvenue à la conclusion que l'opération notifiée entrait dans le champ d'application du règlement sur les concentrations et soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun et avec le fonctionnement de l'accord EEE.

(3) Après un examen approfondi de l'affaire, la Commission est parvenue à la conclusion que le projet de concentration était de nature à créer ou à renforcer une position dominante qui entraverait de façon significative une concurrence effective dans le Marché commun ainsi que le fonctionnement de l'accord EEE.

I. Les parties

(4) CVC gère et fournit des services de consultant pour des fonds d'investissement. Elle détient une participation de contrôle dans plus de 70 sociétés, parmi lesquelles le groupe Acordis (5) qui opère dans le secteur des fibres artificielles et des matériaux spécialisés destinés à des applications industrielles, techniques, médicales et hygiéniques.

(5) Lenzing opère dans le secteur de la production et de la commercialisation de fibres cellulosiques artificielles destinées à des applications textiles et non textiles, de l'ingénierie ainsi que de la production de films plastiques et de papier.

II. L'opération

(6) Pour permettre à CVC d'acquérir le contrôle exclusif de Lenzing, une société autrichienne contrôlée par CVC, Zellulosefaser Beteiligungsgesellschaft mbH rachètera la participation majoritaire de Bank Austria dans Lenzing. Une fois cette opération réalisée, CVC transférera également à Zellulosefaser Beteiligungsgesellschaft mbH les parts qu'elle détient dans certaines filiales d'Acordis, notamment Tencel (fibres discontinues de viscose, lyocell), Enka (fils textiles de viscose), Cordenka (fils de viscose industriels), ainsi que dans les activités d'Acordis dans le secteur des fibres acryliques à Kelheim (Allemagne) et à Grimsby (Royaume-Uni). Si le projet de concentration n'est pas approuvé par la Commission avant le [...]* (*), l'accord d'achat d'actions et d'obligations convertibles du 14 février 2001 expirera et deviendra nul et non avenu.

III. La concentration

(7) L'opération notifiée permettra à CVC d'acquérir indirectement le contrôle exclusif de Lenzing et elle constitue donc une concentration au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations.

IV. Dimension communautaire

(8) Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 5 milliards d'euros (CVC : [...]* millions d'euros en 2000; Lenzing : [...]* millions d'euros en 2000). Chacune d'elles réalise dans la Communauté un chiffre d'affaires supérieur à 250 millions d'euros (CVC : [...]* millions d'euros en 2000; Lenzing : [...]* millions d'euros en 2000), mais aucune d'entre elles ne réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires communautaire dans un seul et même État membre (6). L'opération notifiée a donc une dimension communautaire au sens de l'article 1er, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations et constitue un cas de coopération au sens de l'accord EEE, conformément à l'article 2, paragraphe 1, point c), du protocole 24 à cet accord.

V. Procédure

(9) Le 30 mai 2001, les parties ont proposé des engagements, conformément à l'article 6, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations, afin d'obtenir l'autorisation de l'opération notifiée au terme de la première phase. À la suite de cette proposition, le délai prévu pour l'examen préliminaire a été porté d'un mois à six semaines, conformément à l'article 10, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations.

(10) Le 22 juin 2001, la Commission a décidé d'engager la procédure conformément à l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement sur les concentrations.

(11) Le 9 août 2001, la Commission a transmis à la partie notifiante une communication au titre de l'article 18 du règlement sur les concentrations et du protocole 21 à l'accord EEE (ci-après dénommée "communication des griefs"). Après avoir consulté le dossier de la Commission le 13 août 2001, la partie notifiante a transmis, le 29 août 2001, une réponse conjointe de CVC, Acordis et Lenzing à la communication des griefs (ci-après dénommée "la réponse"). Le 21 août 2001, CVC a fait savoir au conseiller-auditeur de la Commission qu'elle n'exercerait pas son droit à réclamer une audition. Le 11 septembre 2001, la Commission a fourni des informations complémentaires à la partie notifiante, dans lesquelles elle résumait certains éléments factuels du dossier. La partie notifiante a communiqué des observations complémentaires sur ces informations dans une lettre du 17 septembre 2001 (ci-après dénommée "la lettre supplémentaire").

(12) Le 25 septembre 2001, la partie notifiante a présenté des engagements destinés à écarter les doutes quant aux problèmes de concurrence recensés par la Commission dans sa communication des griefs. Leur description et leur appréciation figurent aux points 254 et suivants.

VI. Compatibilité avec le Marché commun

A. Les marchés en cause

1. Remarques préliminaires

(13) La concentration notifiée concerne le secteur des fibres, plus particulièrement la production et la commercialisation de fibres artificielles discontinues destinées à des applications tant textiles que non textiles (ce dernier secteur étant également appelé "non tissé"). Si Acordis opère dans de nombreux secteurs relatifs aux fibres (7), le seul secteur où il y ait chevauchement d'activités est celui des fibres cellulosiques discontinues, notamment les fibres discontinues en viscose et les fibres discontinues en lyocell. En effet, l'opération donnerait naissance au plus important fournisseur mondial de ces produits. Les parties à la concentration estimant que le marché de produits en cause comprend tous les types de fibres naturelles, synthétiques et cellulosiques (mais pas les fils), les paragraphes suivants sur la classification des fibres fourniront les informations nécessaires à ce sujet.

a) Distinction entre fibres discontinues et fils continus

Fibres discontinues

(14) Les fibres discontinues représentent environ 70 % de la demande mondiale de fibres et ont traditionnellement été utilisées avant tout dans des applications textiles. Les fibres naturelles (à l'exception de la soie), qu'elles soient d'origine animale ou végétale, sont des fibres discontinues, c'est-à-dire des fibres d'une longueur limitée. Le coton et la laine, par exemple, qui sont les deux fibres discontinues naturelles les plus utilisées, sont caractérisées respectivement par des longueurs de fibres d'environ 40 millimètres (mm) et 70-80 mm. Les fibres discontinues sont soit filées pour être transformées en fils qui seront ensuite tissés ou tricotés pour des applications textiles, soit utilisées sous forme non tissée, c'est-à-dire traditionnellement comme feutres ou matière de garnissage pour coussins, couvertures, etc, mais aussi, plus récemment, pour un nombre toujours plus grand d'applications.

(15) Les fibres discontinues artificielles ont été mises au point pour imiter, mais aussi pour souligner les qualités des fibres naturelles. Il existe deux types de fibres artificielles : les fibres cellulosiques (telles que la viscose et le lyocell), qui sont fabriquées à partir de pâte de bois, et les fibres synthétiques (telles que le polyester, le polypropylène, le polyamide et les fibres acryliques), qui sont généralement produites par procédé thermoplastique. Ces fibres sont extrudées en faisceau puis coupées en brins, ce qui en fait des fibres discontinues.

Fils continus

(16) Contrairement aux fibres discontinues, les fils continus (artificiels) sont produits par un procédé entièrement différent, dans des installations de production différentes, et possèdent des caractéristiques de performance qui leur sont propres. Ils sont en outre utilisés pour des applications différentes. Bien qu'ils soient en principe produits à partir des mêmes matières premières cellulosiques ou synthétiques que les fibres discontinues artificielles, les fils continus sont extrudés sous forme d'un seul fil continu qui est ensuite enroulé sur une bobine et peut mesurer plusieurs kilomètres. Les critères de qualité de la matière première avant extrusion sont beaucoup plus élevés (les inégalités et les impuretés doivent être éliminées) et les quantités produites sont sensiblement plus faibles que dans le cas des fibres discontinues. Le fil continu est donc beaucoup plus cher que les fibres discontinues (8). Les fils continus de viscose sont par exemple utilisés pour renforcer les pneus de voitures, pour lesquels la résistance des fibres discontinues de viscose tissées serait tout à fait insuffisante.

Position habituelle de la Commission

(17) Dans des décisions antérieures (9), la Commission a estimé que les fibres discontinues et les fils continus appartenaient à des marchés de produit différents, une distinction que la partie notifiante ne conteste pas. En outre, il n'existe aucun chevauchement horizontal entre les parties dans le secteur du fil continu. En effet, seul le groupe Acordis produit différents types de fils continus cellulosiques artificiels et de fils continus synthétiques.

b) Distinction par domaines d'application et types de fibre

(18) Dans des décisions antérieures relatives au secteur des fibres, la Commission avait également procédé à une autre distinction fondamentale, en fonction des domaines d'application. Elle avait estimé que les fibres destinées aux applications textiles, aux applications industrielles et aux revêtements de sol (tapis) appartenaient à des marchés de produit distincts (10). Sur ces marchés, la Commission avait également estimé qu'il fallait opérer une distinction par type de fibres (11). Cette approche se reflète également dans l'encadrement des aides à l'industrie des fibres synthétiques de 1996 (12).

c) Définition du marché de produits proposée par les parties

(19) Les parties estiment que le marché de produits en cause comprend non seulement les fibres discontinues cellulosiques artificielles, mais l'ensemble des fibres discontinues artificielles (cellulosiques et synthétiques) et naturelles. Elles font valoir qu'il existe une forte substituabilité entre les différentes fibres, notamment entre le coton, la viscose et le polyester.

2. Méthodologie

(20) La Commission a procédé à un examen approfondi du marché en cause, dans lequel ont été impliqués à la fois les clients directs des parties et les clients situés en aval, ainsi que les parties elles-mêmes et leurs concurrents. La Commission a reçu plus de 100 réponses à ses questions, dont la plupart émanaient de clients directs des parties. Cette enquête lui a permis de réaliser une analyse des questions en cause tant du point de vue de la demande que du point de vue de l'offre, et d'établir notamment s'il convenait d'opérer les distinctions suivantes :

- distinction entre fibres discontinues cellulosiques artificielles (viscose et lyocell), fibres discontinues synthétiques (polyester et polypropylène notamment) et fibres naturelles (en particulier le coton);

- distinction entre différents types de fibres discontinues cellulosiques artificielles (viscose et lyocell); - d'autres distinctions en fonction des domaines d'application et des groupes de clients.

(21) La Commission a également analysé une quantité importante de données sur les volumes des ventes des parties et les prix qu'elles ont appliqués sur plusieurs années, ainsi que les corrélations entre les prix et les élasticités-prix.

(22) Les fibres que la partie notifiante considère être les substituts les plus proches des fibres discontinues cellulosiques artificielles sont le coton, le polyester et le polypropylène (ce dernier dans une mesure beaucoup plus limitée, essentiellement dans le secteur des non tissés). Le raisonnement de la Commission relatif à la définition des marchés de produits en cause sera donc axé sur la substituabilité entre ces fibres et les fibres discontinues en viscose et en lyocell, ainsi que sur la substituabilité entre les fibres discontinues en viscose et les fibres discontinues en lyocell.

Observations des parties

Taux de réponse des clients

(23) Dans leur réponse (13), les parties font valoir que le taux de réponse à l'enquête réalisée par la Commission sur le marché est nettement inférieur à 50 % et que le dossier de la Commission n'est donc, de toute évidence, pas représentatif de la réaction de la plus grande partie du marché.

(24) Après avoir examiné cet argument, la Commission confirme que les résultats de son enquête fournissent une base factuelle fiable pour son appréciation de l'opération notifiée. Le taux de réponse des clients immédiats des parties dans l'EEE, qui sont d'une importance cruciale pour l'appréciation des effets de l'opération notifiée sur le marché européen, a été nettement supérieur à 50 % tant en valeur absolue qu'en pourcentage du volume des ventes des parties. Il convient en outre de noter que l'enquête de la Commission a englobé à la fois des petits et des gros clients, sur tous les segments des activités concernées des parties. Ses résultats peuvent donc être considérés comme représentatifs. Le taux de réponse plus faible des clients situés en dehors de l'EEE et des clients situés en aval, qui ont été inclus dans l'enquête à titre purement complémentaire, n'affecte pas la représentativité de l'enquête de la Commission (14).

Méthodologie utilisée pour la réalisation du test de l'augmentation de prix légère, mais significative et permanente

(25) Dans sa lettre supplémentaire (15), la partie notifiante affirme également qu'il y a une erreur fondamentale dans la méthodologie appliquée par la Commission pour réaliser le test de l'augmentation de prix légère, mais significative et permanente (16) et que l'approche adoptée par la Commission dans les questions 8 à 15 de son questionnaire phase II aux clients n'était pas appropriée (17). D'après la partie notifiante, les résultats d'un test aussi hypothétique sont subjectifs, inévitablement arbitraires et peu fiables. La partie notifiante fait valoir que les questions adressées par la Commission aux clients des parties ne précisent pas si les augmentations de prix d'une fibre auraient lieu par rapport au prix d'autres fibres et ne précisent pas non plus les délais dans lesquels ce changement interviendrait; d'après la partie notifiante, un délai d'au moins un an aurait été approprié. Elle fait également valoir que les questionnaires ne contenaient pas, parmi les options proposées, une réduction du volume de fabrication des produits à base de viscose ou de lyocell. Enfin, elle estime que la Commission aurait dû demander des données empiriques sur la mesure dans laquelle les clients ont, dans le passé, réduit leur consommation de viscose et de lyocell en réaction à des différences permanentes entre les prix relatifs de la viscose et du lyocell, et les prix d'autres fibres.

(26) Après avoir examiné ces arguments, la Commission maintient que son enquête, notamment les questions adressées aux clients des parties au cours de la phase II, constitue une base fiable et objective pour la définition du marché de produits en cause et pour l'appréciation de l'opération notifiée du point de vue de la concurrence. La réalisation du test de l'augmentation de prix légère, mais significative et permanente, dans la présente affaire, est conforme à la pratique de la Commission en la matière (18). Il convient notamment de noter que ce test est, par définition, d'une nature hypothétique. En outre, il présuppose généralement une augmentation de prix permanente, excluant de ce fait toutes les fluctuations transitoires. De fait, le questionnaire de la Commission se référait explicitement à des augmentations de prix "permanentes". L'indication d'un délai concret pour le passage à un autre produit aurait été arbitraire, et les parties n'ont d'ailleurs pas précisé pour quelle raison elles estimaient qu'un délai d'"au moins un an" aurait été approprié.

(27) En outre, chacune des questions contestées par les parties précisait clairement que les augmentations de prix hypothétiques des fibres de viscose ou de lyocell devaient être considérées dans le contexte de l'existence d'autres fibres susceptibles de les remplacer; la Commission a explicitement demandé si les clients "utiliseraient d'autres fibres à la place" ou "passeraient des fibres de viscose ou de lyocell à un autre type de fibres" (19). Il ressort donc clairement de ce qui précède que l'enquête de la Commission se référait à des écarts de prix hypothétiques et relatifs entre les fibres de viscose et de lyocell et d'autres types de fibres. On note également que les questions ne se référaient à une augmentation de prix que pour les fibres de viscose ou le lyocell, ce qui montre bien, avec les références à d'autres fibres, que les prix de ces dernières étaient supposés être stables.

(28) En outre, et contrairement à ce qu'affirment les parties notifiantes, le questionnaire de la Commission comprenait bien une question relative à une réduction des volumes de fabrication des produits à base de viscose et de lyocell. Le questionnaire demandait aux clients dans quelle mesure ils réduiraient leur consommation globale de fibres de viscose ou de lyocell, selon le cas, en réponse à une augmentation de prix (20).

(29) Enfin, la Commission note que son appréciation n'est pas uniquement basée sur une analyse prospective d'un passage hypothétique à d'autres fibres, mais également sur des données empiriques relatives à l'évolution du marché dans le passé. De fait, l'analyse de corrélation entre les prix de la Commission (voir ci-dessous considérants 72 et suivants notamment) était destinée à établir d'éventuels schémas de remplacement dans le passé, sur la base de données empiriques fournies par les parties elles-mêmes. (Il convient de noter que les objections des parties sur l'application à des données anciennes de techniques statistiques telles que la corrélation - évoquées à la section suivante - sont en contradiction avec leur insistance, exprimée dans la lettre supplémentaire, pour que l'on utilise des données sur les pratiques passées - qui doivent, bien sûr, être analysées pour être utiles).

Utilisation de données sur la corrélation

(30) Dans leur réponse, enfin (21), les parties estiment que la Commission a accordé, dans sa communication des griefs, une importance excessive aux données sur la corrélation plutôt qu'à des exemples effectifs de passage à d'autres fibres. Après avoir examiné ces arguments, la Commission est amenée à conclure qu'elle ne partage pas l'opinion des parties. Elle commentera ci-dessous son utilisation des données sur la corrélation et la question du passage à d'autres fibres (voir considérants 78 et 79 et 111 à 115)

3. La distinction fondamentale entre les fibres discontinues de viscose, les fibres discontinues de lyocell, le coton, le polyester et le polypropylène

(31) L'examen du marché a montré qu'il était nécessaire d'opérer une distinction fondamentale entre les fibres discontinues de viscose, les fibres discontinues de lyocell, le coton, le polyester le polypropylène.

a) Substituabilité du point de vue de la demande

(32) Pour que deux produits soient jugés substituables, le client direct doit considérer comme réaliste et rationnel de réagir à, par exemple, une augmentation légère, mais sensible et non transitoire, du prix d'un produit en le remplaçant par un autre produit, dans des délais relativement courts. Chaque produit doit constituer une solution de remplacement rationnelle à l'autre, en termes tant économiques que techniques (22). Bien que l'on puisse admettre que ces différents types de fibres soient interchangeables dans une mesure limitée, la substituabilité du point de vue de la demande entre les fibres cellulosiques artificielles et les autres fibres, ainsi qu'entre les deux principaux types de fibres cellulosiques (viscose et lyocell), n'est pas suffisante pour en conclure qu'elles appartiennent au même marché de produits.Ces conclusions ont été confirmées par les résultats de l'examen du marché réalisé par la Commission.

Fibres discontinues en viscose

Caractéristiques distinctives du produit

(33) Les fibres de viscose sont un produit qui présente des caractéristiques très particulières, qui les distinguent de toutes les autres fibres. Un grand nombre des clients interrogés par la Commission lors de son enquête ont souligné ces caractéristiques des fibres de viscose. La principale d'entre elles est leur forte capacité d'absorption de l'humidité, alliée à une capacité élevée de rétention des liquides, qui vont au-delà des capacités d'absorption de toutes les autres fibres considérées comme de proches substituts par la partie notifiante, en l'occurrence le coton, le polyester et le polypropylène. Ces caractéristiques permettent aux fibres de viscose d'être utilisées pour un vaste éventail d'applications, tant textiles (en raison du confort au porter qui en résulte) que non tissées (produits ménagers, produits médicaux et d'hygiène, produits d'hygiène personnelle et applications industrielles tels que les filtres ou le matériau intérieur de soutien pour le cuir artificiel) (23).

(34) L'une des caractéristiques distinguant les fibres de viscose du polyester et du polypropylène est leur biodégradabilité, qui constitue un facteur important, notamment dans le domaine des produits non tissés jetables. Dans le domaine textile, ce sont la douceur et la drapabilité des fibres de viscose qui présentent une importance particulière par rapport au coton (24). En outre, les fibres de viscose possèdent des caractéristiques particulières à la teinture qui les distinguent du coton et du polyester, pour les applications tant textiles que non tissées.

(35) Toutefois, les fibres de viscose possèdent également des caractéristiques distinctives qui limitent leur utilisation dans certains domaines d'application. Par exemple, leur allongement élevé à l'état mouillé et leur faible ténacité en milieu humide ne leur permettent pas d'être lavées en machine à l'état pur. Grâce à leur facilité de traitement, les fibres de viscose sont souvent utilisées en mélange, tant avec du coton qu'avec du polyester, ce qui permet de profiter des avantages respectifs de ces produits tout en minimisant les inconvénients de chaque fibre. Ce fait constitue à lui seul une indication du caractère distinctif des fibres de viscose, notamment si l'on considère qu'elles sont plus chères que les autres fibres (25) : si une utilisation des fibres de viscose n'apportait pas une valeur ajoutée aux produits, elles ne seraient pas choisies, compte tenu de leur prix plus élevé.

Absence de flexibilité de la demande

(36) L'enquête réalisée par la Commission a révélé que la substituabilité sur le plan de la demande entre les fibres de viscose et les autres fibres était insuffisante pour les inclure toutes dans le même marché en cause. En effet, une majorité des clients interrogés ont déclaré qu'ils n'avaient aucune possibilité de remplacer les fibres de viscose dans leurs produits. Certains d'entre eux ont déclaré qu'ils cesseraient de produire le produit concerné et la grande majorité qu'ils ne réagiraient pas au cas où les prix des fibres de viscose augmenteraient de 5 à 10 %. Les raisons les plus couramment citées pour cette absence de changement étaient les caractéristiques particulières des fibres de viscose et les exigences des clients en aval.

(37) Dans leur réponse (26), les parties font également valoir qu'une majorité de clients (52 %) ont déclaré qu'ils réduiraient leurs volumes en réaction à une augmentation légère mais permanente des prix; 18 % ont répondu que leur réaction dépendrait des conditions du marché et 24 % seulement qu'ils ne réduiraient pas leurs volumes et ne passeraient pas à d'autres fibres. En outre, les parties estiment qu'il faudrait accorder plus d'importance aux preuves effectives d'un passage à d'autres fibres (27).

(38) Après avoir examiné ces arguments, la Commission maintient ses conclusions initiales qui reposent sur les résultats de l'enquête. Premièrement, il convient de noter que la méthodologie utilisée par les parties pour calculer leurs chiffres n'est pas cohérente, dans la mesure où elle n'opère pas de distinction entre les réponses aux questionnaires phase I et les réponses aux questionnaires phase II de la Commission, ce qui aboutit inévitablement à un double comptage des réponses des clients ayant répondu aux deux questionnaires. En outre, les questions posées aux clients lors de la phase I et de la phase II étaient sensiblement différentes et ne peuvent donc être évaluées conjointement (28). En outre, étant donné que la réponse ne cite que des pourcentages et ne donne jamais ni de chiffres absolus ni de références précises au dossier de la Commission, celle-ci n'est pas en mesure de vérifier les chiffres en question. Elle ne peut donc pas s'appuyer sur les chiffres fournis par les parties pour apprécier l'opération notifiée et renvoie à sa propre analyse du volume des passages à d'autres fibres figurant au point 40.

(39) Deuxièmement, en ce qui concerne les preuves d'un passage effectif (intégral et partiel) mentionnées par les parties, la Commission ne nie pas que certains clients soient effectivement passés à d'autres fibres. Il convient toutefois de noter qu'il s'agit d'exemples isolés, qui ne sont pas représentatifs de la réaction générale du marché mise en évidence par l'enquête de la Commission (29).

(40) En outre, en se basant sur une synthèse anonymisée des passages à d'autres fibres en cas d'une augmentation légère mais permanente des prix de 10 % (30), la Commission a pondéré les réponses des clients à son enquête en fonction de la quantité de fibres achetée par chaque client en 2000. Le résultat de cette analyse est que l'effet d'une augmentation du prix des fibres de viscose de 10 % sur les ventes de fibres par les parties à ces clients seraient inférieurs à 5 % en termes de pertes de ventes consécutives à un passage à d'autres fibres (31), ce qui confirme pleinement l'opinion de la Commission sur la substituabilité insuffisante, sur le plan de la demande, entre les fibres de viscose et les autres fibres, qui ne permet pas de les inclure dans le même marché en cause.

(41) Dans sa lettre supplémentaire, la partie notifiante a fait valoir que la Commission n'avait pas compté au nombre des clients passant à d'autres fibres ceux qui ont déclaré qu'ils réduiraient ou arrêteraient la production de produits à base de fibres de viscose ou de lyocell au cas où les prix de ces deux derniers produits augmenteraient de 5 à 10 %.

(42) Après avoir examiné cet argument, la Commission maintient que les clients ayant répondu qu'ils arrêteraient ou réduiraient la fabrication de produits à base de fibres de viscose n'appartiennent pas à la même catégorie que ceux qui passeraient à d'autres fibres. Si les clients qui ont répondu qu'ils passeraient à d'autres fibres peuvent théoriquement laisser entrevoir l'existence d'un marché de produits plus large, pour autant que ce passage à d'autres fibres se fasse à une échelle suffisamment vaste pour rendre non rentable une augmentation de prix de 5 à 10 %, les clients ayant répondu qu'ils cesseraient ou réduiraient leur production permettent d'aboutir à la conclusion exactement inverse en termes de définition du marché de produits. En effet, de par la nature même de leur réponse, ces derniers montrent qu'ils sont très dépendants d'un type de fibre spécifique et ne sont pas en mesure de passer à d'autres fibres, même s'il devait y avoir des augmentations de prix sensibles et permanentes.

Tendances de la consommation à long et à court terme

(43) La partie notifiante souligne les tendances à long terme de la consommation de fibres discontinues, qui montrent par exemple une baisse de la consommation de fibres de viscose, après le sommet atteint vers 1970. Elle établit un parallèle entre ce phénomène et la très forte augmentation de la consommation de polyester, d'une part, ainsi que la consommation croissante d'autres fibres synthétiques, telles que le polypropylène (32), d'autre part.

(44) Toutefois, la Commission note que la baisse de la consommation de fibres de viscose (33), qui s'est en tout état de cause fortement ralentie en Europe dans les années 90, ne constitue pas en soi la preuve de la substituabilité des fibres de viscose et d'autres types de fibres discontinues. Au contraire, c'est la capacité des fibres de viscose à trouver de nouveaux domaines d'application, tels que le secteur des non tissés en pleine expansion (34), qui devrait être considérée comme une preuve de leurs caractéristiques distinctives par rapport à toutes les autres fibres, et du fait qu'elles ne sont pas suffisamment substituables à celles-ci. Si les fibres de viscose, qui coûtent généralement plus cher que les autres fibres (35), étaient totalement interchangeables avec ces fibres, elles auraient été totalement remplacées (36).

(45) En outre, le remplacement d'une fibre par une autre est souvent suscité par des évolutions technologiques majeures et ne peut être considéré comme indicatif d'une substituabilité générale et suffisante entre les fibres. Ici aussi, cela apparaît tout particulièrement dans le secteur des non tissés. Par exemple, l'utilisation des fibres de viscose pour les toiles de surface des couches pour bébés n'a jamais cessé, en raison d'importantes modifications apportées au produit lui-même, telles que la fabrication de changes à couches multiples et le développement de polymères super-absorbants. En ce qui concerne l'industrie textile, les nouvelles technologies de tissage et de finissage, ainsi que le développement de nouveaux matériaux synthétiques ou cellulosiques, peuvent avoir une influence déterminante sur l'utilisation et la consommation de fibres. Toutefois, l'utilisation de fibres différentes dans des produits sensiblement modifiés ne peut pas être considérée comme une preuve de l'existence d'un marché de produits commun pour les deux types de fibres.

(46) Dans leur réponse (37), les parties nient que des évolutions technologiques majeures se soient produites récemment dans les secteurs de la filature et du finissage.

(47) Après avoir examiné ces arguments, la Commission maintient qu'il y a effectivement eu dans le passé, et qu'il pourra y avoir à l'avenir, des évolutions technologiques majeures dans le secteur des fibres cellulosiques, qui auront une influence importante sur la capacité de traitement des fibres et donc sur leur consommation. Elle renvoie aux produits développés par les parties elles-mêmes, telles que les fibres de lyocell non fibrillantes, et à la coopération de celles-ci avec les filatures et les spécialistes de la teinture pour le traitement du lyocell. De même, toutes les qualités de fibres ne sont pas également adaptées à la filature rotor (38). Même en l'absence d'évolutions technologiques majeures, l'utilisation de fibres différentes dans des produits sensiblement modifiés n'indique pas l'existence d'un marché de produits commun pour les deux types de fibres.

(48) Deuxièmement, les parties font valoir dans leur réponse (39) que dans les applications non tissées, les fibres de viscose sont soumises à une alternance de cycles d'expansion et de récession. Les fournisseurs et des clients concurrents repèrent les autres fibres meilleur marchés dès que leur usage final devient suffisamment large. Ils investissent dans toutes les évolutions technologiques nécessaires et la viscose est alors supplantée. D'après les parties, cela devrait prouver la vulnérabilité de la viscose dans le secteur des non tissés.

(49) La Commission, en revanche, estime que ces arguments, tels qu'ils sont exposés dans la réponse, ne contredisent pas son analyse. Son principal point de désaccord avec les parties concerne l'interprétation de l'évolution de l'utilisation des fibres consécutive aux changements technologiques. À cet égard, la Commission affirme que ces changements, qui ne sont effectifs qu'à moyen ou à long terme, n'indiquent pas que les fibres de viscose et d'autres fibres appartiennent au même marché de produits. Les évolutions techniques qui pourraient permettre d'utiliser d'autres fibres meilleur marché sont, de par leur nature même, caractérisées par un certain degré d'incertitude, et leur impact ne se fera de toute façon sentir qu'à moyen ou à long terme. Les acheteurs actuels de fibres de viscose, même s'ils sont suffisamment puissants pour poursuivre une stratégie active de promotion du développement technologique afin de pouvoir utiliser d'autres fibres meilleur marché, n'ont aucune autre possibilité de changement avant que ces évolutions technologiques ne se soient concrétisées. L'enquête de la Commission n'a pas mis en évidence de perspectives d'abandon des fibres de viscose de qualité courante à court terme en raison d'évolutions technologiques actuelles ou à venir (40).

(50) L'analyse relative aux évolutions technologiques vaut également pour les changements de mode, à une différence évidente près, à savoir que la mode, contrairement aux évolutions technologiques, entraîne des changements à court terme dans les schémas de consommation. Les types ou mélanges de fibres utilisés pour la production d'un type spécifique de vêtements peuvent changer d'une année à l'autre, en fonction de la tendance de la mode. D'autres types ou mélanges de fibres ne seront pas suffisamment substituables en cas de changement de mode, dans la mesure où les produits fabriqués à partir de ces mélanges ne seront pas considérés comme à la mode et donc dignes d'être achetés. De fait, un nombre important des acheteurs de textiles interrogés par la Commission au cours de son enquête ont répondu que la mode avait un impact sensible sur la consommation de fibres de viscose (41).

(51) Dans leur réponse (42), les parties font valoir que l'appréciation de la Commission ne tient pas compte de la "concurrence par la rentabilité" entre les fibres. En outre, elles rappellent que la mode est éphémère.

(52) Après avoir examiné ces arguments, la Commission maintient son analyse. Premièrement, il convient de noter que les parties elles-mêmes reconnaissent que les clients "n'évaluent pas uniquement les différences de prix entre les différents vêtements; ils prennent en considération un ensemble d'éléments comprenant le prix, l'esthétique, la fonctionnalité, la marque, le style, etc" lorsqu'ils choisissent un vêtement donné (43). Selon la Commission, cela confirme que le choix des fibres ne dépend pas en premier lieu de considérations liées au prix. Deuxièmement, la Commission partage l'avis des parties sur le caractère essentiellement éphémère de la mode et considère que cela confirme précisément son analyse ci-dessus de la substituabilité limitée entre les fibres à un moment donné.

(53) On peut donc en conclure que le choix des fibres de viscose par les clients ne dépend pas en premier lieu du prix, mais plutôt des caractéristiques spécifiques du produit, de l'innovation et des préférences des consommateurs à un moment donné (44). La substituabilité n'est suffisante pour qu'un monopoleur éventuel considère des augmentations de prix potentielles comme non rentables.

Lyocell

(54) Les parties estiment également qu'il n'existe pas de marché spécifique pour le lyocell. Elles font valoir que le lyocell est un produit qui est toujours à la recherche d'un marché qui lui soit propre et qui devrait être considéré comme substituable à d'autres fibres, notamment aux fibres de viscose, mais également au coton et au polyester. Cette opinion n'a pas été confirmée par les résultats de l'examen du marché et de l'analyse de la corrélation entre les prix réalisés par la Commission.

(55) Au contraire, les fibres de lyocell (ci-après dénommées "lyocell") (45) possèdent des caractéristiques spécifiques, qui les distinguent nettement des fibres de viscose. Ces caractéristiques sont notamment leur ténacité élevée à l'état tant sec que mouillé et leur faible rétrécissement dans l'eau, ce qui permet de minimiser les pertes au finissage et le rétrécissement lors du nettoyage.

(56) Le lyocell est souvent utilisé en mélange avec d'autres fibres, telles que la viscose, le lin, le coton, le polyamide ou le polyester. Jusqu'à présent, ses propriétés particulières ont essentiellement été exploitées par les producteurs de textile haut de gamme de marque (46), actuellement beaucoup plus cher que n'importe laquelle des autres fibres considérées (47). En effet, pour les jeans de luxe, l'une des principales application du lyocell, les fibres de viscose sont considérées comme totalement inappropriées.

(57) De même, les applications textiles peuvent illustrer les caractéristiques distinctives du lyocell par rapport au coton. En dépit de son prix sensiblement plus élevé, le lyocell est par exemple utilisé pour certains types de jeans, parce qu'il permet d'ajouter un toucher et une drapabilité spécifiques au produit. En outre, la ténacité à sec et la capacité de rétention d'eau du lyocell sont supérieures à celles du coton.

(58) Si on le compare aux fibres synthétiques, c'est le caractère cellulosique du lyocell qui lui donne une capacité élevée d'absorption de l'humidité et entraîne, dans les applications textiles, un confort au porter élevé, que les synthétiques n'atteignent pas. En outre, la biodégradabilité du lyocell, qui est une propriété que possèdent aussi d'autres fibres cellulosiques et naturelles, le distingue nettement de toutes les autres fibres synthétiques citées comme substituts. La biodégradabilité constitue un facteur important, notamment pour les non tissés jetables. Cette caractéristique a d'ailleurs été soulignée dans les réponses apportées à la Commission lors de son enquête.

(59) Enfin, le lyocell a une caractéristique tout à fait particulière, que ne possède aucune des fibres conventionnelles : sa tendance à la fibrillation (48). D'un côté, cette tendance peut constituer un inconvénient, dans la mesure où elle nécessite des techniques de filage et de teinture spéciales et contribue à rendre le tissu plus gris après des lavages répétés. De l'autre, elle peut être exploitée pour créer des tissus tout à fait spéciaux, avec une drapabilité et une douceur au toucher exceptionnelles, ce que l'on appelle l'effet "peau de pêche". Aucune autre fibre ne peut produire cet effet à un degré comparable.

(60) Dans leur réponse (49), les parties font valoir que la communication des griefs de la Commission ignore le fait que le coton est la principale fibre concurrente du lyocell. En outre, elles estiment que la Commission a commis une erreur factuelle en déclarant qu'aucune autre fibre ne possédait exactement les mêmes caractéristiques spécifiques que le lyocell, notamment sa tendance à fibriller; elles se réfèrent à des notes d'Acordis sur des appels de clients et fournissent des échantillons de tissus.

(61) Après avoir examiné ces arguments, la Commission maintient son analyse. Premièrement, il convient de noter que la concurrence entre le lyocell et les autres fibres, en particulier entre le lyocell et le coton, constitue un sujet essentiel tant dans l'enquête de la Commission que dans son analyse de corrélation entre les prix (voir considérant 74).

(62) Deuxièmement, la Commission note que les exemples de passage à d'autres fibres chez les clients cités par les parties à l'annexe 9 de leur réponse ne sont pas représentatifs des réponses de l'ensemble des clients à l'enquête. Si la Commission ne nie pas que certains clients passent effectivement à d'autres fibres, elle ne considère pas ces exemples comme suffisants pour inclure le lyocell dans un marché de produits plus vaste comprenant également d'autres types de fibres (voir considérants 63 et 67).

(63) L'enquête menée par la Commission sur le marché a confirmé qu'il n'existait pas une substituabilité suffisante sur le plan de la demande entre le lyocell et les autres fibres pour qu'il soit inclus dans le même marché de produits en cause. En effet, une grande majorité des clients interrogés ont déclaré qu'ils n'étaient absolument pas en mesure de remplacer le lyocell dans leurs produits. D'après les réponses données, en cas d'une augmentation du prix du lyocell de 5 à 10 %, certains clients devraient cesser la fabrication du produit concerné et la grande majorité d'entre eux ne procéderaient tout simplement à aucun changement. Les raisons les plus couramment citées pour justifier ce comportement sont les caractéristiques spécifiques du lyocell et les exigences des clients en aval (50).

(64) Dans leur réponse (51), les parties avancent que la Commission interprète de façon subjective les réactions des acheteurs de lyocell. Selon elles, le pourcentage de ces clients ayant déclaré qu'ils ne passeraient pas à une autre fibre ne représente que 11,5 %.

(65) Après avoir examiné ces arguments, la Commission maintient ses conclusions initiales qui reposent sur les résultats de l'enquête qu'elle a menée. Tout d'abord, il convient de noter que la méthodologie appliquée par les parties pour calculer leurs chiffres comporte des incohérences, dans la mesure où elle n'opère aucune distinction entre les réponses aux questionnaires phase I et les réponses aux questionnaires phase II de la Commission, ce qui aboutit inévitablement à un double comptage des réponses des clients ayant répondu aux deux questionnaires. En outre, les questions posées aux clients dans les deux questionnaires étaient sensiblement différentes et ne peuvent donc pas être évaluées conjointement. De plus, les parties ont mal interprété certaines réponses des clients figurant dans le dossier de la Commission, qu'elles incluent dans leur propre analyse (52). La Commission ne peut donc utiliser ces chiffres pour son appréciation de l'opération notifiée.

(66) Enfin, en ce qui concerne les preuves d'un passage effectif (intégral et partiel) à d'autres fibres mentionnées par les parties, la Commission ne nie pas que certains clients soient effectivement passés à d'autres fibres. Il convient toutefois de noter qu'il s'agit d'exemples isolés qui ne sont pas représentatifs de la réaction générale du marché telle qu'elle ressort de l'enquête de la Commission (53).

(67) En outre, sur la base de la synthèse anonymisée des clients qui passeraient à d'autres fibres en réaction à une augmentation de prix légère mais permanente de 10 % (54), la Commission a pondéré les réponses des clients à son enquête en fonction des quantités de fibres achetées par chaque client en 2000. Le résultat de cette analyse est qu'une augmentation du prix du lyocell de 10 % aurait pour effet de faire baisser les ventes des parties à ces clients d'environ 15 % (pour les clients de l'EEE) ou de moins de 10 % (pour les clients EEE et hors EEE), à la suite du passage de ces clients à d'autres fibres (55). Une baisse des ventes de l'ordre de 10 à 15 % à la suite du passage de clients à d'autres produits ne peut pas être considérée comme suffisante pour rendre des augmentations de prix non profitables.

(68) Cela demeure vrai même si la situation actuelle de surcapacité devait être prise en considération, dans la mesure où les parties pourraient adopter une stratégie de fermeture ou de mise en sommeil d'installations entières (ou simplement de chaînes de production individuelles), ce qui leur permettrait de réduire leurs coûts fixes. En tout état de cause, ces réductions de production entraîneraient une baisse des coûts variables. Ces économies de coût et les recettes accrues qui seraient générées par des prix plus élevés feraient plus que compenser les pertes de recettes dues au passage à d'autre fibres (56). Des réductions de production nettement supérieures à 10 % peuvent donc être profitables au cas où les prix seraient augmentés de 10 %.

b) Substituabilité sur le plan de l'offre

(69) Il n'existe aucune substituabilité sur le plan de l'offre entre les fibres synthétiques et les fibres cellulosiques artificielles, car elles sont fabriquées à partir de matières premières entièrement différentes, avec des processus de production différents et dans des usines différentes.

(70) De même, il n'existe aucune substituabilité sur le plan de l'offre entre le lyocell et les fibres de viscose. Bien que les fibres de viscose et de lyocell soient toutes deux des fibres cellulosiques artificielles, le lyocell est produit dans des usines différentes, à l'aide d'un processus de production entièrement différent, en l'occurrence un processus de filage au solvant avec lequel la fibre est constituée en dissolvant directement de la pâte de bois dans des solvants organiques (alors que la viscose doit subir un processus chimique différent de brassage et de xanthation qui, contrairement au processus de production du lyocell, comprend la formation d'un dérivé, puis la dissolution du xanthate dans une solution de soude caustique avant qu'il ne soit extrudé par passage dans des filières). Des équipements et des machines spéciaux sont nécessaires pour produire le lyocell. La technologie de production nécessite d'importants capitaux. C'est la raison pour laquelle le lyocell est actuellement, et de loin, la fibre cellulosique artificielle dont le coût de production est le plus élevé (57). En revanche, la production du lyocell est écologique, notamment si on la compare à celle de la viscose, dans la mesure où le solvant utilisé pour dissoudre la cellulose (NMMO) et l'eau utilisée pour produire du lyocell peuvent être recyclés dans une très large mesure.

(71) De l'avis des concurrents, avis qui n'a pas été contesté par la partie notifiante, passer de la production de fibres de viscose à celle de lyocell nécessiterait la construction d'une installation de production entièrement nouvelle et ne pourrait donc se faire qu'à un coût et avec des délais considérables.

c) Analyse de la corrélation entre les prix et des élasticités-prix

(72) Pour définir les marchés de produits en cause, la Commission prend en considération les éléments quantitatifs disponibles, capables de résister à un examen rigoureux, pour établir les schémas de substitution qui se sont produits dans le passé (58). Dans la présente affaire, la Commission a analysé les corrélations entre les prix et les élasticités-prix croisées pour les fibres de viscose et leurs substituts potentiels, sur la base des données mensuelles sur les ventes fournies par les parties à la concentration notifiée. Les données examinées couvrent une période de dix ans, qui va de janvier 1991 à mai 2001. Les résultats de cette analyse confirment la conclusion de l'existence de marchés de produits distincts mentionnée ci-dessus.

Analyse de corrélation entre les prix : fibres de viscose et autres types de fibres

(73) Une analyse de corrélation entre des prix est destinée à mesurer la sensibilité du prix d'un produit par rapport au prix d'un produit supposé être un substitut. Dans la présente affaire, l'analyse avait pour objectif de mesurer le degré de pression concurrentielle qui existe entre les fibres de viscose et d'autres types de fibres. Ces résultats révèlent qu'il n'existe pas, ni pour les applications textiles ni pour les applications non tissées, de corrélations suffisantes entre les fibres de viscose, d'une part, et le coton, le polyester ou le polypropylène, d'autre part, pour que ces produits soient inclus dans le même marché en cause.

(74) L'élément de mesure quantifiant la dépendance globale de deux séries chronologiques de prix, et donc le degré de substituabilité entre deux produits, est appelé le coefficient de corrélation. Par définition, un coefficient de corrélation positif se situe entre 0 et +1 : plus le degré de corrélation entre deux produits est élevé (c'est-à-dire plus le coefficient de corrélation s'approche de +1), plus l'existence d'un marché de produits commun comprenant les deux produits est probable. Les données figurant au tableau 1 ci-dessous montrent qu'il n'existe pas de corrélation sensible entre les prix des fibres de viscose et ceux du coton, ni entre ceux des fibres de viscose et du polyester ou entre ceux des fibres de viscose et du polypropylène. Même le coefficient le plus élevé (ó = 0,44), qui exprime la corrélation entre les fibres de viscose et le polyester, n'est pas suffisamment élevé pour justifier l'hypothèse d'un marché de produits commun (59).

EMPLACEMENT TABLEAU

Analyse des élasticités-prix croisées: fibres de viscose et autres types de fibres

(75) Les résultats exposés ci-dessus à propos de la définition des marchés de produits en cause sont confirmés par l'analyse des élasticités-prix croisées. Les élasticités-prix croisées servent à mesurer l'évolution de la demande d'un produit donné consécutive à une modification du prix d'autres produits, ce qui permet d'obtenir des informations sur la mesure dans laquelle des produits peuvent se substituer les uns aux autres du point de vue de la demande.Dans la présente affaire, l'analyse avait pour objectif de mesurer l'évolution de la demande de fibres de viscose qui résulterait d'une modification des prix du coton, du polyester et du polypropylène. Ces résultats montrent que les fluctuations passées des prix du coton, du polyester et du polypropylène n'ont pas entraîné de modification sensible de la demande de fibres de viscose et indiquent donc, eux aussi, l'existence d'un marché de produits distinct pour les fibres de viscose.

(76) Plus le degré d'élasticité pour deux produits est élevé (c'est-à-dire plus le coefficient est important), plus l'existence d'un Marché commun, comprenant les deux produits, est probable. D'une manière générale, une élasticité-prix croisée inférieure à +1 signifie que les produits ne constituent pas des substituts effectifs. Ainsi que le montre le tableau 2, les élasticités croisées pour les fibres de viscose, d'une part, et pour le coton, le polyester et le polypropylène, d'autre part, sont proches de zéro. Ces produits ne peuvent donc pas être considérés comme des substituts des fibres de viscose.

EMPLACEMENT TABLEAU

Analyse de corrélation entre les prix : fibres de viscose et lyocell

(77) Les coefficients de corrélation entre les fibres de viscose et le lyocell sont faibles, tant sur le segment (ou sous-marché) des applications textiles du lyocell que sur celui des applications non tissées. Quel que soit le segment (ou sous-marché) des fibres de viscose examiné, la corrélation entre le lyocell et les fibres de viscose est faible, puisqu'elle se situe entre 0,08 et 0,47 seulement. De même, l'analyse de corrélation entre le lyocell et le polyester et entre le lyocell et le coton produit des coefficients de 0,23 à 0,6. Or, de telles valeurs indiquent, elles aussi, l'existence de marchés de produits distincts (63).

Réponse des parties

(78) Dans leur réponse (64), les parties affirment que la Commission a accordé un poids excessif à l'importance et à la fiabilité de l'analyse de corrélation, alors qu'elle aurait plutôt dû étudier en détail les exemples effectifs de passage à d'autres fibres.

(79) Après avoir examiné ces arguments, la Commission ne les juge pas convaincants. Le recours à des tests économétriques et statistiques est conforme à la pratique de la Commission telle qu'elle est définie dans la communication sur la définition des marchés en cause (65). En outre, la définition que la Commission donne du marché de produits dans la présente affaire ne s'appuie pas en premier lieu sur l'analyse de corrélation entre les prix et des élasticités-prix croisées. Ainsi qu'elle l'a expliqué ci-dessus (considérant 72), les résultats de cette analyse ont été simplement calculés afin de corroborer les conclusions de la Commission sur l'existence de marchés de produits distincts, elles-mêmes basées sur des considérations relatives à la substituabilité sur le plan de la demande et de l'offre et donc sur l'absence d'un nombre suffisant d'exemples de passage à d'autres fibres (considérants 32 à 71).

d) Conclusion

(80) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est parvenue à la conclusion que les fibres de viscose et le lyocell n'appartiennent pas au même marché de produits (66), et qu'ils n'appartiennent pas non plus à un marché global des fibres discontinues comprenant, outre les fibres de viscose et le lyocell, également le coton, le polyester et le polypropylène.

4. Les marchés de produits en cause dans le secteur des fibres de viscose : produits courants et produits de spécialité

(81) L'enquête réalisée par la Commission a également révélé que le secteur des fibres de viscose se subdivisait en plusieurs marchés, qui sont fonction de différences dans les propriétés des fibres et dans leurs applications. Il est notamment nécessaire d'opérer une distinction entre les fibres de viscose courantes et les fibres spéciales, parmi lesquelles les fibres de viscose teintées dans la masse et les fibres de viscose pour tampons.

a) Fibres de viscose de qualité courante

Du côté de la demande : deux grands groupes de clients

(82) Les fibres de viscose de qualité courante sont utilisées à la fois pour des applications textiles (filage) et des applications non tissées. Les fibres pour applications textiles sont achetées par des filatures (67), alors que les fibres pour non tissés sont généralement vendues à des fabricants de produits en rouleaux (68).

(83) En ce qui concerne la demande, l'enquête de la Commission a montré qu'il existait certaines différences entre les besoins de ces deux groupes de clients. Les fibres utilisées pour les applications textiles sont physiquement quelque peu différentes des fibres destinées aux non tissés. En raison d'exigences spécifiques des processus de production en aval, les clients textiles ne peuvent que très exceptionnellement utiliser des fibres faites pour les non tissés, et inversement. Pour des raisons esthétiques, les fibres de qualité courante pour applications textiles sont généralement fournies dans des qualités brillantes, alors que celles destinées aux applications non tissées sont la plupart du temps vendues dans des qualités mates.

Substituabilité suffisante sur le plan de l'offre

(84) Les résultats de l'enquête de la Commission montrent néanmoins qu'il existe un degré de substituabilité suffisant sur le plan de l'offre pour que les deux types de fibres de viscose soient inclus dans le même marché en cause. Les fibres pour applications textiles et non tissées peuvent être fabriquées sur les mêmes lignes de production. Les cinq producteurs de fibres de qualité courante qui opèrent actuellement dans l'EEE (69) produisent des fibres pour ces deux types d'application et peuvent facilement passer de la production de fibres courantes pour applications textiles à la production de fibres pour applications non tissées, sans être confrontés à des coûts, des risques ou des délais d'adaptation importants.

Conclusion

(85) En dépit des différences qui existent au niveau de la demande et qui révèlent l'existence de plusieurs segments de marché, la Commission considère donc le marché de produits en cause comme correspondant au marché des fibres de viscose de qualité courante (70).

b) Fibres de viscose teintées dans la masse

(86) Alors que les fibres de qualité courante sont vendues à l'état blanchi ou écru, les fibres teintées dans la masse ont pour caractéristique d'avoir déjà été teintes dans le bain dissolvant, c'est-à-dire avant d'être formées par pression de la masse à travers des filières.

(87) La partie notifiante affirme que les fibres de viscose teintées dans la masse peuvent être remplacées par des fibres écrues de qualité courante, dans la mesure où celles-ci peuvent également être teintes à un stade ultérieur du processus de production. Toutefois, l'enquête de la Commission n'a pas confirmé cette affirmation. Ses résultats permettent au contraire de penser qu'il convient d'opérer une distinction entre les fibres de viscose de qualité courante et les fibres de viscose teintées dans la masse.

Faible substituabilité sur le plan de la demande

(88) Du point de vue de la demande, il convient de noter que la grande majorité des clients qui ont répondu au questionnaire de la Commission et qui utilisent des fibres teintées dans la masse ont déclaré qu'ils ne les remplaceraient pas par des fibres écrues de qualité courante au cas où les premières subiraient une augmentation de prix faible, mais permanente, de 5 à 10 %. Ce sont essentiellement des considérations liées au prix et à la qualité qui sont à l'origine de la réticence des clients achetant des fibres colorées dans la masse à changer de produit.

(89) Les clients interrogés par la Commission ont déclaré que par rapport aux fibres teintes à un stade ultérieur du processus de production, les fibres teintées dans la masse présentent une plus grande solidité des couleurs, notamment lorsqu'elles sont exposées à la lumière (solidité à la lumière). En outre, ils ont mentionné le fait que les investissements nécessaires pour teindre les fibres à un stade ultérieur de la production étaient considérables (71). Ils ont également souligné que le recours à des fibres colorées dans la masse était absolument nécessaire pour certaines applications, notamment pour les chiffons de nettoyage colorés et pour certains types de fils fantaisie (fils bicolores).

(90) Un grand nombre des clients ayant répondu au questionnaire de la Commission ont également évoqué des considérations de prix. Le niveau de prix moyen des fibres de viscose teintées dans la masse est certes supérieur d'environ [...]* % (72) à celui des fibres de qualité courante non colorées pour applications textiles ou non tissées, dans la mesure où la production de fibres teintées dans la masse nécessite plus de main-d'œuvre, ainsi que des opérations de nettoyage particulières lorsque l'on passe d'une couleur à une autre. Néanmoins, les fibres teintées dans la masse sont toujours considérées comme un produit moins cher que les fibres de qualité courante colorées ultérieurement, même en cas d'une augmentation de prix hypothétique des fibres colorées dans la masse de 5 à 10 %.

(91) Dans leur réponse (73), les parties font valoir que les écarts de prix corrigés après coloration entre les fibres colorées dans la masse et les fibres écrues sont inférieurs aux valeurs indiquées par la Commission. D'après les parties, ces chiffres se situent entre [...]*.

(92) Après avoir examiné ces arguments, la Commission maintient qu'il existe un écart de prix important entre les fibres colorées dans la masse et les fibres écrues de qualité courante. Outre les considérations liées au coût des colorants, l'écart entre les chiffres indiqués par les parties dans leur réponse et les chiffres cités par la Commission dans sa communication des griefs s'explique par le fait que les parties déduisent également des coûts salariaux et des coûts d'élimination des déchets plus élevés pour les fibres colorées dans la masse. Toutefois, l'argument avancé par la Commission ne repose pas sur les structures de coût différentes des deux produits du point de vue de l'offre, mais plutôt sur le fait que du côté de la demande, les clients ont l'impression que les fibres colorées à un stade ultérieur sont plus coûteuses, un élément que les parties n'ont pas remis en cause dans leur réponse.

Faible substituabilité sur le plan de l'offre

(93) Il existe également des barrières à un changement de produits du côté de l'offre. Deux fournisseurs qui ne produisent pas actuellement de fibres teintées dans la masse ont indiqué qu'une augmentation du prix de ces produits faible, mais permanente, de 5 à 10 % ne suffirait pas à les inciter à démarrer la production de fibres teintées dans la masse.Des investissements supplémentaires dans une technologie spéciale pour le mélange, l'essai et l'injection des colorants, le traitement ultérieur et le séchage sont également nécessaires (74). En outre, certains concurrents ont déclaré que pour eux, la production de fibres colorées dans la masse, qui se caractérise par des petites séries, ne serait pas rentable, même en cas d'augmentation des prix de 5 à 10 %.

Analyse de corrélation entre les prix

(94) L'analyse de corrélation entre les prix effectuée par la Commission (voir considérants 107 à 109 et tableau 3) confirme l'existence d'un marché distinct pour les fibres de viscose teintées dans la masse.

Conclusion

(95) On peut donc en conclure que les fibres de viscose de qualité courante et les fibres de viscose teintées dans la masse appartiennent à des marchés de produits distincts.

c) Fibres de viscose pour tampons

(96) En plus de la distinction entre les fibres de qualité courante et les fibres colorées dans la masse, il convient également de considérer séparément les fibres de viscose pour tampons. En effet, elles sont destinées à un groupe de clients différent, dans la mesure où elles sont vendues directement aux fabricants des produits finis, alors que les fibres de qualité courante, tant pour les applications textiles que non tissées (75), sont généralement vendues à des producteurs intermédiaires, c'est-à-dire à des filatures pour les applications textiles et à des fabricants de produits en rouleaux pour les non-tissés (76).

Caractéristiques distinctives des produits

(97) Premièrement, les résultats de l'enquête de la Commission ont montré que les propriétés physiques et anti-bactériologiques des fibres de viscose pour tampons étaient sensiblement différentes de celles des autres types de fibres de viscose, en raison des exigences plus élevées auxquelles elles doivent répondre du point de vue de la sécurité, de la qualité et de la réglementation. Les producteurs doivent garantir la pureté microbiologique. Ces fibres doivent avoir une meilleure consistance, une meilleure capacité d'absorption et une meilleure capacité de rétention des liquides. Les producteurs de tampons s'accordent tous à dire qu'il leur est impossible d'utiliser d'autres types de fibres de viscose, telles que les fibres de qualité courante pour applications textiles ou non tissées ou les fibres colorées dans la masse (voir considérants 82 à 85 et 86 à 95).

Faible substituabilité avec le coton sur le plan de la demande

(98) Deuxièmement, bien que les parties à la concentration fassent valoir que le coton peut être utilisé comme substitut des fibres de viscose, soit pour produire des tampons 100 % coton ou des tampons avec un mélange de coton et de viscose, l'enquête menée par la Commission montre que ce n'est pas le cas. Les producteurs de tampons ont tous déclaré que le contenu de leurs produits en fibres de viscose ne peut être réduit que dans des proportions limitées si l'on ne veut pas que la qualité du produit en soit affectée, et ce parce que les fibres de viscose possèdent une meilleure capacité d'absorption et de rétention des liquides. La production d'un tampon 100 % coton a même été interrompue pour des raisons de qualité. En cas d'une augmentation de prix faible, mais permanente, de 5 %, aucun fabricant de tampon n'augmentera la teneur en coton de ses produits; si les prix des fibres de viscose pour tampons devaient augmenter de 10 %, un seul client a déclaré qu'il réduirait légèrement la teneur en viscose de son mélange, de 5 à 10 %, alors qu'aucun autre ne modifierait son mélange à court ou à moyen terme. L'un des clients interrogés a même indiqué que quelle que soit l'évolution des prix, il envisageait de réduire, et non d'augmenter, la teneur en coton de ses tampons.

(99) Les barrières au changement de produits sont considérées comme élevées par les fabricants de tampons, dans la mesure où les fibres qu'ils utilisent doivent répondre aux critères de qualité mentionnés ci-dessus; dans certains cas, une autorisation officielle est même nécessaire. Les délais et les coûts d'un changement, les pertes de production qui en résulteraient ainsi que le risque d'insuffisance sur le plan de la qualité sont également importants.En outre, il apparaît que les acheteurs de tampons deviennent de plus en plus réticents à l'égard des produits génétiquement modifiés, y compris le coton génétiquement modifié, ce qui réduit encore plus les possibilités de remplacement de la viscose par le coton dans la production de tampons. Il ressort donc des résultats de l'enquête de la Commission que les fibres de viscose pour tampons n'appartiennent pas au même marché de produits que le coton. Cette conclusion est d'ailleurs confirmée par l'analyse de la corrélation entre les prix effectuée par la Commission (voir considérants 107 et 109 et tableau 3).

Faible substituabilité, sur le plan de la demande, avec les fibres de viscose utilisées pour la production d'ouate

(100) Troisièmement, l'une des parties à la concentration affirme que les fibres de viscose pour tampons sont substituables aux fibres de viscose utilisées pour la production d'ouate; elle cite l'exemple d'un producteur de tampons qui aurait utilisé le même type de fibres de viscose pour la fabrication de tampons et d'ouate (77).

(101) S'il est possible d'utiliser des fibres de viscose pour tampons pour produire de l'ouate destinée à des produits d'hygiène personnelle, la substituabilité de ces produits en sens inverse ne s'est pas avérée être suffisante pour que les deux types de fibres soient inclus dans le même marché en cause. Au contraire, l'enquête a révélé qu'un seul producteur de tampons utiliserait des fibres destinées à la production d'ouate pour fabriquer des tampons, les autres y renonçant en raison des caractéristiques différentes des produits et des critères cliniques microbiologiques plus stricts imposés pour les tampons. Les fibres destinées à la production d'ouate, qu'elles soient en coton ou en viscose, n'appartiennent donc pas au même marché de produits que les fibres de viscose pour tampons.

Faible substituabilité sur le plan de l'offre avec d'autres types de fibres de viscose

(102) Quatrièmement, les parties font également valoir qu'il existe une substituabilité suffisante sur le plan de l'offre avec d'autres types de fibres de viscose, ce qui permet aux producteurs de ces fibres de passer facilement à la production de fibres pour tampons. Cette opinion n'a pas été confirmée par l'enquête de la Commission. Si pour l'un des concurrents européens des parties, qui produit déjà une certaine quantité de fibres de viscose pour tampons, le changement serait faisable (78), les deux autres producteurs européens de fibres de viscose qui ne produisent actuellement pas de fibres pour tampons ont déclaré sans équivoque qu'ils ne changeraient pas leur production pour passer à ce type de fibres, même en cas d'une augmentation permanente des prix de 5 à 10 %. L'un des producteurs a mentionné les investissements considérables qu'un tel changement impliquerait (79), l'autre a cité des raisons commerciales.

Conclusion

(103) La Commission en conclut donc que les fibres de viscose pour tampons constituent un marché de produits distinct.

d) Fibres de viscose pour la production d'ouate pour produits d'hygiène personnelle

(104) Les termes anglais "cotton wool" et "wadding" sont parfois utilisés indifféremment; parfois aussi, le terme "cotton wool" désigne l'ouate utilisée pour les produits d'hygiène personnelle et le terme "wadding" l'ouate utilisée pour le matelassage des anoraks, sacs de couchage, sièges de voitures, etc. Les fibres utilisées pour le matelassage ont été incluses dans les chiffres relatifs aux fibres de viscose de qualité courante pour non tissés, ainsi que l'a suggéré la partie notifiante (80). La question de savoir si les fibres de viscose utilisées pour produire de l'ouate pour produits d'hygiène personnelle constituent un marché de produits en cause distinct ou appartiennent à un marché plus vaste peut être laissée en suspens. Compte tenu de la petite taille de ce secteur, l'addition éventuelle des fibres de viscose destinée à la production d'ouate pour produits d'hygiène personnelle au marché des fibres de viscose de qualité courante ne modifierait pas sensiblement l'appréciation de ce dernier marché aux fins de la concurrence, dans la mesure où les ventes d'ouate pour produits d'hygiène personnelle dans l'EEE représentent moins de [1-5]* % (en volume) du marché des fibres de viscose de qualité courante (environ [< 10]* kilotonnes). De même, l'opération notifiée ne soulèverait aucun problème de concurrence si un marché distinct était défini pour les fibres de viscose destinées à la production d'ouate pour produits d'hygiène personnelle. Dans la mesure où la part de marché cumulée des parties sur un tel marché ne dépasserait pas 15 %, il ne constituerait même pas un marché en cause.

e) Autres fibres de viscose spéciales et câble de viscose

(105) Lenzing et Acordis produisent toutes deux d'autres fibres de viscose spéciales qui ne peuvent se substituer à aucun des produits en cause définis. Le Modal de Lenzing, une fibre textile à haut module d'élasticité à l'état mouillé avec d'excellentes performances dans le domaine textile, appartient à un marché distinct (81), et le câble de viscose d'Acordis (qu'elle produit en trois types différents : produit floqué, produit court et produit fabriqué par voie humide) appartient à au moins un marché de produits distinct (82). Des considérations liées tant à la demande (les produits sont totalement distincts à la fois par leurs propriétés et par la perception qu'en ont les clients) qu'à l'offre (les produits nécessitent des lignes de production spéciales, de telle sorte que les producteurs ne peuvent pas changer leur production pour passer d'un produit à un autre ou à d'autres produits en viscose) corroborent cette opinion. La définition du marché de produits peut également rester en suspens en ce qui concerne une autre fibre spéciale de Lenzing, la fibre de viscose ignifuge, dans la mesure où elle est produite en faibles quantités et où son inclusion dans le marché des fibres de viscose de qualité courante (le seul produit auquel elle pourrait se substituer du point de vue de l'offre) ne modifierait en rien l'appréciation de la concentration notifiée. Cela vaut également pour plusieurs autres produits spéciaux fabriqués par Acordis qui sont vendus en quantités encore plus faibles.

(106) S'ils étaient considérés comme appartenant à des marchés distincts, aucun de ces produits spéciaux ne constituerait un marché en cause, puisqu'il n'y a aucun chevauchement des activités des parties pour aucun d'entre eux.

f) Analyse de la corrélation entre les prix

(107) L'analyse de la corrélation entre les prix réalisée par la Commission confirme les résultats ci-dessus relatifs aux marchés de produits en cause dans le secteur des fibres de viscose (voir tableau 3).

EMPLACEMENT TABLEAU

(108) En ce qui concerne les corrélations entre les différents types de fibres de viscose (qualité courante et teintées dans la masse), le coefficient le plus élevé est de l'ordre de 0,7. L'analyse de la Commission a montré que ce coefficient était gonflé, du fait qu'il est dû à des coûts communs et, dans une certaine mesure, à une tendance commune. De fait, si l'on se base sur les données fournies par les parties pour l'année 2000, les coûts communs aux fibres de viscose teintées dans la masse et aux fibres de viscose de qualité courante sont [en moyenne >75 %]*. Les séries de prix des deux produits sont largement prédéterminées par ces coûts communs, dans la mesure où les coûts représentent plus de [>75 %]* du prix net pour les deux produits. Le coefficient de corrélation calculé n'est donc pas dû à une interaction concurrentielle entre les deux produits mais plutôt à des influences communes (83).

(109) En ce qui concerne les corrélations entre les fibres de viscose de qualité courante et le polyester (jusqu'à 0,76), les coefficients demeurent inférieurs au niveau qui a généralement été considéré comme indiquant l'existence d'un marché de produits plus vaste (84). Toutefois, comme il a été expliqué, il peut exister une corrélation élevée fausse si les deux produits sont soumis à des influences communes. Dans ce cas particulier, l'analyse de la Commission a montré que ces coefficients de corrélation étaient gonflés, dans la mesure où ils sont dus à une tendance commune et non à une interaction concurrentielle entre les deux produits (85).

(110) Dans leur réponse (86), les parties estiment qu'il faudrait accorder plus d'importance aux preuves effectives d'un passage à d'autres fibres qu'aux données sur la corrélation entre les prix. En outre, elles font état de soi-disant incohérences et faiblesses dans l'analyse de corrélation de la Commission. Elles soulignent notamment les éléments suivants :

- la Commission établit la corrélation entre la viscose et le polyester (PE) à 0,44 dans une partie de la communication des griefs et à 0,76 dans une autre partie (87),

- l'analyse de corrélation entre les prix devrait utiliser des données sur les transactions (88),

- la périodicité des données est inadéquate (89), et

- il faut examiner à la fois les évolutions de prix transitoires et les évolutions non transitoires (90).

(111) Après avoir examiné ces arguments, la Commission estime que l'analyse des corrélations entre les prix et des élasticités-prix croisées qu'elle a réalisée dans la présente affaire constitue un moyen fiable de corroborer ses conclusions sur la définition des marchés de produits en cause.

(112) Premièrement, en ce qui concerne la critique d'ordre général adressée à la Commission d'avoir utilisé de telles analyses pour sa définition des marchés, il convient de préciser ce qui suit :

- ainsi qu'il a été dit ci-dessus (voir considérant 79), la Commission ne s'est jamais appuyée exclusivement sur l'analyse de la corrélation entre les prix et des élasticités-prix croisées, mais elle a utilisé ces analyses comme éléments de confirmation des résultats de son enquête,

- la Commission a toujours indiqué clairement qu'un degré élevé de corrélation entre deux séries de prix ne constituait ni une condition nécessaire ni une condition suffisante pour que deux produits appartiennent au même marché. Elle considère plutôt les corrélations comme un indicateur du degré de concurrence qui s'exerce sur des marchés donnés. En outre, elle est d'accord avec les parties sur le fait qu'une analyse de corrélation doit être examinée avec prudence. Elle considère notamment qu'il peut y avoir des corrélations exagérément élevées (corrélations positives fausses ou corrélations fallacieuses) si les prix de deux produits sont basés sur un intrant commun (c'est-à-dire des coûts communs) et/ou une tendance commune. De même, des corrélations peuvent être exagérément faibles, par exemple s'il y a un déphasage important dans les réponses. Toutefois, on peut éviter des inconvénients de cet ordre en utilisant un test de co-intégration ou un test de racine-unité. Or, ces tests ont été effectués par la Commission dans la présente affaire (91).

(113) Deuxièmement, la Commission ne relève aucune incohérence dans les résultats de son analyse.

- Il convient de souligner que les tests ont été réalisés à partir de données fournies par les parties elles-mêmes (92).

- D'une manière générale, le prix des fibres de viscose, tel qu'il a été communiqué par les parties, est nécessairement un prix artificiel issu de l'agrégation des prix des différents sous-segments du marché des fibres de viscose.

- Les résultats de l'enquête ayant clairement montré que la Commission devait subdiviser le marché en différents sous-segments, le prix des fibres de viscose utilisé est égal à la somme des valeurs des différents sous-segments (c'est-à-dire les prix sur ces sous-segments multipliés par leurs quantités respectives) divisée par la quantité agrégée.

- La Commission a mis en évidence un niveau de corrélation non négligeable entre les fibres de viscose de qualité courante et le polyester, mais pas entre les fibres de viscose teintées dans la masse, les fibres de viscose pour tampons et le polyester. Indépendamment de cela, et en se basant sur des données sur les prix différentes, mais également communiqués par les parties, la Commission a vérifié sa conclusion selon laquelle les fibres de viscose constituaient au moins un marché de produits distinct.

- Le fait que la Commission ait utilisé deux ensembles de séries de prix (à la fois les séries de prix agrégées des fibres de viscose et des données spécifiques sur les prix des parties pour trois sous-marchés différents des fibres de viscose) et qu'elle les ait prises chacune en considération ne constitue pas une incohérence. De même, le fait que les corrélations entre les séries de prix agrégés ne sont pas des moyennes arithmétiques des corrélations entre les séries de prix des composants individuels, ne constitue pas non plus une incohérence. Dans la mesure où le niveau comparativement plus élevé de corrélation entre le polyester (PE) et les fibres de viscose de qualité courante est dû à des tendances communes, la Commission ne juge pas surprenant que ces tendances communes perdent de leur importance lorsque d'autres produits à base de fibres de viscose (qui ne sont peut-être pas soumis à ces mêmes tendances communes) sont inclus dans l'analyse de corrélation (93).

(114) Enfin, en ce qui concerne les observations des parties sur les données relatives aux transactions, la périodicité et les évolutions de prix transitoires et non transitoires, il convient de rappeler ce qui suit :

- les parties n'ont pas été mesure de fournir des données sur les transactions pour le coton, le polyester et le polypropylène, bien que la Commission les ait réclamées. Néanmoins, la Commission estime que les données sur les ventes fournies par les parties reflètent de façon adéquate la valeur moyenne des prix des transactions. Pour le polyester notamment, les données fournies reflètent la situation tant des gros clients que des petits et peuvent être considérées comme une mesure significative des transactions effectives,

- afin de confirmer que la périodicité des données est adéquate, la Commission a testé l'analyse de corrélation à travers différents temps de réponse; toutefois, les variations des résultats des tests se sont avérées insignifiantes,

- en ce qui concerne les observations des parties sur les évolutions de prix transitoires ou non transitoires, les tests racine-unité réalisés par la Commission ont dûment couvert cet aspect des choses.

g) Conclusion

(115) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est parvenue à la conclusion que les fibres de viscose de qualité courante, les fibres de viscose teintées dans la masse et les fibres de viscose pour tampons appartenaient chacune à des marchés de produits distincts.

5. Les marchés de produits en cause dans le domaine du lyocell

(116) Il n'est pas nécessaire de déterminer si le marché du lyocell doit être subdivisé en plusieurs marchés, dans la mesure où cela ne modifierait en rien l'appréciation de l'opération notifiée sur le plan de la concurrence (voir considérants 230 à 245).

6. Le marché de produits en cause pour les techniques de production et de transformation du lyocell

(117) Les techniques de production et de transformation pour les fibres discontinues et les fils continus de lyocell sont entièrement différentes de celles des autres fibres (94). Alors que la technique relative à la viscose (y compris sa compatibilité avec l'environnement) est bien établie et facilement accessible, la technique de production du lyocell est plutôt neuve; son développement a commencé dans les années 70 et sa première application commerciale remonte aux années 90. Elle est caractérisée par l'existence d'un grand nombre de brevets. Si certains des premiers brevets sont déjà parvenus à expiration, ce n'est pas le cas d'autres, dont la plupart sont liés au processus de production et au traitement du lyocell (voir considérants 246 et 247).

(118) Acordis et Lenzing figurent toutes deux parmi les principaux opérateurs de ce secteur, sur lequel opèrent également certaines sociétés d'Extrême-Orient ainsi que la société d'ingénierie allemande Zimmer AG, en partie en coopération avec des organismes de recherche. Si certaines de ces entreprises produisent également du lyocell, d'autres, parmi lesquelles Zimmer AG, n'en produisent pas. Acordis et Lenzing ont accordé des licences croisées pour leurs techniques de production du lyocell en 1997. [...]*. Il ressort de cet accord de licences croisées que Lenzing et Acordis opèrent déjà en tant que donneur et bénéficiaire de sous-licences sur ce marché et qu'il y a donc échange de licences (95). Ce même accord montre également que ce marché ne comprend pas seulement les techniques relatives à la production et à la transformation de fibres discontinues, mais également d'autres produits à base de lyocell, tels que des films extrudés, des membranes et des fils. Du fait que les techniques relatives à ces autres domaines sont liées aux techniques de production et de transformation des fibres discontinues de lyocell par certains brevets communs à l'ensemble de ce secteur, les techniques de production et de transformation du lyocell appartiennent au même marché de produits. En outre, la technique de production de fils continus de lyocell n'en est pas encore au stade de la production commerciale et la concurrence dans ce domaine ne peut donc se faire qu'au niveau des techniques de production et de transformation. Par ailleurs, l'enquête de la Commission a montré qu'il existait une demande pour des licences relatives aux techniques de production de lyocell.

(119) Dans leur réponse (96), les parties font valoir qu'il n'existe pas de marché pour les techniques de production du lyocell, en ce sens qu'il n'y a actuellement guère d'octrois de licences pour ces techniques ni de droits de brevet, et qu'il est tout à fait inhabituel de distinguer un marché distinct pour les techniques de production. Deuxièmement, elles affirment qu'elles-mêmes n'octroient pas de sous-licences et que Zimmer AG est à l'heure actuelle le seul fournisseur de quelque importance.

(120) Après avoir examiné ces arguments, la Commission maintient sa définition d'un marché de produits distinct pour les techniques de production et de transformation du lyocell (à la fois pour les fils continus et les fibres discontinues). Premièrement, il convient de noter que, contrairement à ce qu'affirment les parties, la définition d'un marché distinct pour les techniques de production est tout à fait conforme à la pratique de la Commission en la matière et ne peut donc être considérée comme "tout à fait inhabituelle" (97).

(121) Deuxièmement, la Commission considère que l'activité actuelle dans ce domaine est suffisante pour qu'il constitue un marché distinct. De fait, il semble y avoir une demande assez importante pour les techniques de production et de transformation du lyocell, qui émane de producteurs potentiels de lyocell; les parties elles-mêmes fournissent une série d'exemples dans leur réponse et soulignent également que Zimmer AG commercialise sa technologie depuis deux ans (98). En outre, les parties elles-mêmes ont déjà octroyé un certain nombre de licences (99); les circonstances dans lesquelles ces licences ont été accordées ("tout à fait exceptionnelles") et les fins auxquelles elles sont utilisées ("non liées à la production de fibres de lyocell") (100) ne peuvent être décisives pour la définition des marchés de produits. Au contraire, le fait même que des licences aient été octroyées dans des circonstances exceptionnelles qui n'étaient pas liées à la production de fibres de lyocell prouve, de l'avis de la Commission, que les techniques de production et de transformation du lyocell, d'une part, et la production de fibres de lyocell, d'autre part, ne sont pas inextricablement liées entre elles et doivent donc être appréciées séparément (101).

(122) Troisièmement, les sociétés et les instituts qui développent des techniques de production et de transformation de lyocell n'opèrent pas tous également dans le domaine de la production de lyocell. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus (voir considérant 118) et confirmé par les parties dans leur réponse (102), l'entreprise allemande Zimmer AG opère dans le secteur du développement et de la vente de techniques de production du lyocell, mais ne produit pas de lyocell; c'est également le cas de l'institut de recherche Thüringisches Institut für Textil- und Kunststoff-Forschung e.V. (TITK) (103). Le fait que ce ne soient pas les mêmes acteurs qui opèrent dans le secteur de la production du lyocell et dans celui des techniques de production et de transformation de lyocell milite fortement en faveur de l'existence d'un marché distinct pour les techniques de production.

(123) La Commission est donc parvenue à la conclusion qu'il existe un marché des techniques de production et de transformation du lyocell qui est distinct du marché en aval de la production et de la vente de lyocell.

7. Conclusion

(124) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est parvenue à la conclusion que les catégories suivantes constituaient des marchés de produits en cause qui devront être pris en considération pour l'appréciation de l'opération notifiée du point de vue de la concurrence :

- fibres discontinues de viscose de qualité courante,

- fibres discontinues de viscoses teintées dans la masse,

- fibres discontinues de viscose pour tampons,

- lyocell,

- techniques de production et de transformation du lyocell.

B. Les marchés géographiques en cause

(125) Sur la base de leur propre définition des marchés de produits (voir considérant 19), les parties estiment que la dimension géographique du marché, qui comprend l'ensemble des marchés de produits mentionnés ci-dessus, est mondiale. Toutefois, cela n'a pas été confirmé par les résultats de l'enquête de la Commission pour les trois marchés de produits en cause des fibres de viscose ni pour le lyocell.

1. Fibres discontinues de viscose (fibres de qualité courante, fibres teintées dans la masse et fibres pour tampons)

(126) En ce qui concerne les fibres de viscose, les importations ont été très faibles; en 2000, environ [< 10 %]* de la consommation de fibres de viscose dans l'EEE ont été importés de pays tiers.Au cours des six dernières années, le niveau des importations n'a pas sensiblement augmenté (104). L'enquête de la Commission a révélé qu'une large majorité des tiers ayant répondu aux questions de la Commission n'utilisaient pas de fibres de viscose importées de pays non EEE, essentiellement pour des raisons de qualité. Ils ont expliqué que la qualité des produits susceptibles d'être importés de pays extérieurs à l'EEE était trop différente de celle des fibres produites dans l'EEE, et qu'elle n'était notamment pas adaptée à la qualité des produits des parties (105). Un grand nombre des personnes interrogées estiment qu'elles ne pourraient pas satisfaire la demande et les exigences de leur clientèle si elles devaient utiliser des fibres de viscose importées. Une grande partie des clients ayant répondu au questionnaire de la Commission ne savaient même pas qu'il existait des producteurs de fibres de viscose dans des pays extérieurs à l'EEE. En outre, la plupart d'entre eux ont exprimé des doutes quant à la fiabilité et à la souplesse de fourniture des producteurs tiers. Des coûts de transport de [1-10 %]* et des droits de douane de 5,2 % (qui viendront à expiration en 2004) jouent également un rôle certain, mais néanmoins secondaire, comme barrières géographiques à l'entrée.

(127) Il convient de noter que les importations ont été faibles en dépit du fait que les prix des fibres de viscose fabriquées dans l'EEE sont considérés comme étant plus élevés que ceux des fibres fabriquées dans d'autres zones géographiques, notamment en Extrême-Orient, où sont implantés et où opèrent la plupart des producteurs de viscose non européens. De fait, même la minorité des clients qui seraient prêts à transférer leurs commandes à des pays tiers ont déclaré que les prix devraient continuer à baisser, d'après la plupart d'entre eux de plus de 15 %, et que la qualité devrait être au moins égale à celle des normes européennes ou américaines. Cette réticence des clients européens à passer à des fournisseurs de fibres de viscose extérieurs à l'EEE a également été confirmée par les déclarations des concurrents des parties, qui estiment que les importations dans l'EEE augmenteraient au mieux légèrement en cas d'une augmentation de prix permanente dans l'EEE de 5 à 10 %.

(128) Dans leur réponse (106), les parties font valoir que l'appréciation de la Commission sous-évalue fortement l'importance de la concurrence émanant des importations.

(129) Après avoir examiné cet argument, la Commission ne le trouve pas convaincant et maintient son analyse pour les raisons évoquées aux points 149 à 154.

(130) Ces considérations, qui s'appliquent intégralement aux fibres de viscose de qualité courante, valent encore plus pour les fibres de viscose colorées dans la masse et les fibres pour tampons. Les importations de fibres colorées dans la masse sont estimées à [< 10 %]*, voire moins. Les barrières à l'importation sont plus élevées que pour les fibres de qualité courante, dans la mesure où les couleurs qui ont le plus de succès dépendent des préférences culturelles et qualitatives des clients, la qualité des couleurs utilisées dans les pays asiatiques, qui constitueraient la source principale d'importation potentielle, différant des normes européennes. En outre, la fiabilité des livraisons et la qualité des produits sont encore plus importantes que pour les fibres de qualité courante; c'est ainsi que des livraisons successives de fibres doivent souvent être de la même couleur et correspondre exactement aux spécifications du client. En ce qui concerne les fibres de viscose pour tampons, les importations semblent être inexistantes, et tous les clients interrogés ont indiqué que les critères de qualité constituaient des entraves importantes aux importations en provenance des pays asiatiques.

(131) La Commission est donc parvenue à la conclusion que les marchés de produits en cause pour les fibres de viscose (fibres de qualité courante, fibres teintées dans la masse et fibres pour tampons) s'étendent à l'EEE, mais ne sont pas de dimension mondiale.L'enquête réalisée par la Commission n'a pas permis de mettre en évidence l'existence de marchés géographiques nationaux ou régionaux.

2. Lyocell

(132) En ce qui concerne le lyocell, [...]*, mais aussi une comparaison des différents schémas de fluctuation de la demande à l'intérieur et à l'extérieur de l'EEE, ainsi que l'examen des ventes des parties (107), permettent de penser que le marché géographique en cause pourrait également s'étendre à l'EEE et ne pas être de dimension mondiale. Toutefois, il n'est pas nécessaire de le définir de façon précise aux fins de la présente affaire, dans la mesure où la dimension géographique du marché du lyocell ne modifierait en rien l'appréciation de l'opération notifiée sur le plan de la concurrence (voir considérants 230 à 245).

3. Techniques de production et de transformation du lyocell

(133) Le marché des techniques de production et de transformation du lyocell peut être considéré comme étant de dimension mondiale. L'enquête de la Commission n'a pas permis de mettre en évidence l'existence de marchés géographiques nationaux ou régionaux.

4. Conclusion

(134) Compte tenu de ce qui précède, la Commission estime que les marchés des fibres de viscose de qualité courante, des fibres de viscose teintées dans la masse et des fibres de viscose pour tampons s'étendent à l'EEE, alors que le marché des techniques de production du lyocell est de dimension mondiale.En ce qui concerne le lyocell, le marché géographique s'étend au moins à l'EEE, mais il n'est pas nécessaire de le définir de façon précise.

C. Appréciation du point de vue de la concurrence

(135) Conformément à l'article 2, paragraphe 3, du règlement sur les concentrations, une opération de concentration qui créée ou renforce une position dominante ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun ou une partie substantielle de celui-ci doit être déclarée incompatible avec le Marché commun.

(136) La Cour de justice des Communautés européennes (108) a défini la notion de position dominante comme une situation de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des consommateurs. Une telle position n'exclut pas l'existence d'une certaine concurrence, mais met l'entreprise qui en bénéficie en mesure sinon de décider, tout au moins d'influencer notablement les conditions dans lesquelles cette concurrence se développera et, en tout cas, de se comporter dans une large mesure sans devoir en tenir compte et sans pour autant que cette attitude lui porte préjudice.

(137) L'existence d'une position dominante peut résulter de plusieurs facteurs qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants. Parmi ces facteurs, l'existence de parts de marché d'une grande ampleur est hautement significative. En outre, le rapport entre les parts de marché détenues par les entreprises parties à la concentration et par leurs concurrents, en particulier ceux qui les suivent immédiatement, constitue un indice valable de l'existence d'une position dominante (109).

(138) Les éléments qui permettent de conclure que l'opération notifiée créera ou renforcera des positions dominantes sur les marchés des fibres de viscose de qualité courante, des fibres de viscose teintées dans la masse, des fibres de viscose pour tampons, du lyocell, et des techniques de production du lyocell sont les suivants.

1. Les marchés des fibres de viscose

a) Les conditions générales du marché

(139) L'opération notifiée entraînerait la création du numéro un mondial des fibres de viscose, qui détiendrait alors [25-35 %]* environ de part de marché dans le monde. Au niveau de l'EEE, la part de marché cumulée de la nouvelle entité s'élèverait à quelque [60-70 %]* (Lenzing : [35-45 %]*, Acordis : [20-30 %]*), ses concurrents européens étant de taille beaucoup plus réduite (Säteri, en Finlande, détient [10-20 %]* de part de marché, Svenska Rayon, en Suède, et Sniace, en Espagne, en totalisent chacune [0-10 %]*).

Une succession de fermetures d'usines

(140) En Europe, l'histoire industrielle de ce secteur est caractérisée ces vingt-cinq dernières années par des réductions de capacité et des fermetures d'usines. Si, dans les années 80, les fermetures se sont produites en Europe occidentale, dans les années 90, elles ont essentiellement affecté des installations situées en Europe de l'Est. Les réductions de capacité au sein de l'EEE ont été quasi exclusivement limitées à la partie orientale de l'Allemagne dans les années 90. Parallèlement, Lenzing a sensiblement renforcé sa capacité, de plus de 20 %. Toutefois, les fermetures d'usines opérées par les producteurs est-allemands ont été trois fois plus importantes que l'augmentation de la capacité de Lenzing, de sorte que les capacités ont été au total réduites de quelque 19 % au sein de l'EEE au cours des années 90.

(141) En 2000, les cinq producteurs européens de fibres de viscose, qui exploitent six usines dans l'EEE, disposaient des capacités de production suivantes (voir tableau 4) :

EMPLACEMENT TABLEAU

(142) Acordis a réduit récemment sa capacité en fermant son usine de Grimsby (Royaume-Uni), dotée d'une capacité théorique de [15-35]* kilotonnes, mais dont la production annuelle réelle a atteint [15-30]* kilotonnes l'an dernier, diminuant ainsi sa capacité de production de fibres de viscose de [15-35]* kilotonnes. Chez Lenzing, inversement, des projets destinés à accroître sa capacité de [130-160]* à [140-180]* kilotonnes ont été mis en œuvre en juillet 2001. Lenzing envisage en outre de porter sa capacité à quelque [150-200]* kilotonnes d'ici 2004 (110). L'opération notifiée aurait donc pour effet de faire disparaître le seul acteur du marché des fibres de viscose qui a sensiblement augmenté sa capacité ces dernières années.Aucune tierce partie n'a informé la Commission qu'elle prévoyait de renforcer de manière significative sa capacité en Europe dans un avenir prévisible (111). Des concurrents pourraient toutefois envisager des augmentations au moyen de programmes de "dégoulottage" (112). D'après les indications fournies, il serait ainsi possible d'accroître les capacités de 15 à 20 kilotonnes au total dans un délai de deux ans (113).

(143) Certains opérateurs considèrent que des usines d'une capacité de 30 kilotonnes pourraient être construites dans deux pays du Moyen-Orient. Excepté le fait que ceci serait susceptible d'affecter dans une certaine mesure les exportations de Lenzing et d'Acordis vers cette région, la Commission estime que cette augmentation des capacités dans des pays tiers situés loin du territoire de l'EEE, aura peu d'incidence sur la situation de l'offre dans l'EEE, étant donné la réticence des clients européens à acheter des produits en provenance de fabricants hors EEE (voir considérants 126 et 127). On peut donc en conclure que la situation de l'offre dans l'EEE restera probablement tendue, notamment lors des phases de reprise conjoncturelle de la demande, à l'instar de ce qui s'est produit en 2000.

La demande

(144) Depuis 1990, la demande de fibres de viscose en Europe occidentale est plutôt stable (voir tableau

EMPLACEMENT TABLEAU

(145) Au cours de cette même période, la demande a été caractérisée dans l'EEE par un déplacement sensible des applications textiles vers les applications non tissées. Alors que les fibres de viscose destinées aux applications textiles représentaient [60-70 %]* de la consommation en 1991, ce pourcentage est tombé à [50-60 %]* l'année dernière, tandis que les applications non tissées absorbaient [40-50 %]* de la demande.

(146) La demande de fibres de viscose destinées aux applications textiles est non seulement en baisse depuis les années 70, mais elle a aussi enregistré des variations cycliques importantes et irrégulières qui ont pu atteindre jusqu'à [20-30 %]* en un an (114). Alors que la phase ascendante d'un tel cycle durait entre [...]*, la totalité du cycle prenait entre [...]* (avec des pics en [...]*) (115). De plus, il est important de noter que la demande ne diminue pas dans tous les segments de fibres de viscose pour applications textiles. [...]* (116).

(147) À l'inverse, la courbe de la demande de fibres de viscose pour non tissés n'est pas cyclique. Après une certaine baisse au début des années 90, la demande est en hausse continue depuis 1993, avec des taux annuels compris entre [1-5 %]* et [10-20 %]*. Au sein du secteur non tissé, cette croissance n'est pas homogène. Si certaines applications, telles que les chaussures et le cuir, stagnent, d'autres sont en plein essor (117). En ce qui concerne les applications médicales (118), la consommation de fibres de viscose a augmenté [de >100 %]* entre 1986 et 1997 dans l'EEE et son utilisation dans les lingettes (119) s'est accrue de [>70 %]* au cours de ces années; au total, la demande de fibres de viscose destinées aux applications non tissées a progressé de [30-40 %]* pendant cette période.

(148) D'une manière générale, ces orientations actuelles de la demande devraient persister : la hausse de la consommation de fibres de viscose aux fins d'applications non tissées devrait compenser une certaine réduction de la consommation dans le secteur des applications textiles (120), et la consommation de textiles restera cyclique (121).

Les échanges avec les pays tiers : les exportations dépassent les importations

(149) D'après les estimations, [70-90]* kilotonnes de fibres de viscose ont été exportées vers des pays tiers en 2000, soit le montant le plus faible depuis de nombreuses années, tandis que cette même année, les importations dans l'EEE n'atteignaient qu'environ [15-30]* kilotonnes ([5-20]* kilotonnes en 1999) (122), bien que l'année 2000 ait été caractérisée en Europe par une utilisation très forte des capacités, une situation qui aurait pu déclencher des importations dans l'EEE en provenance de pays tiers. Une partie non négligeable des importations avait même pour origine les propres filiales de Lenzing et d'Acordis situées aux États-Unis et en Indonésie; [...]* (123).

(150) En ce qui concerne l'origine de ces importations, l'annuaire statistique du comité international de la rayonne et des fibres synthétiques (CIRFS), un organisme commercial regroupant les producteurs européens de fibres de cellulose synthétiques et artificielles, fournit quelques éléments d'information. Ces chiffres couvrent la totalité des fibres et des câbles de cellulose et comprennent donc également des produits autres que les fibres de viscose, essentiellement des fibres et des câbles de lyocell et d'acétate. Les importations de fibres de viscose seront par conséquent égales ou inférieures aux quantités indiquées. D'après le CIRFS, seule une petite partie des importations de fibres et de câbles cellulosiques provenaient en 1999 des pays d'Extrême-Orient ([< 5]* kilotonnes environ) (124). L'Indonésie était le principal exportateur asiatique; il convient toutefois de noter que Lenzing contrôle SPV, le producteur indonésien de fibres de viscose, qui détient les plus grosses capacités de production. Les importations d'Inde, où est situé le groupe Birla-Grasim, le premier producteur mondial de viscose, n'ont atteint que [< 2]* kilotonnes; de même, le volume importé de Taïwan, où est installée la société FCFC, le troisième producteur mondial, a été aussi faible. Ces producteurs d'Extrême-Orient ne semblent actuellement pas en mesure d'exporter des quantités importantes de fibres de viscose vers l'EEE, les clients européens restant méfiants à leur égard (voir considérants 126 et 127). Les concurrents européens ne prévoient pas de hausse sensible des importations en provenance de cette région, même en cas d'augmentation des prix de 5 à 10 % (125).

(151) Les importations avaient pour principale origine les États-Unis ([< 20]* kilotonnes environ), où Lenzing et Acordis elles-mêmes étaient les seuls producteurs de fibres de viscose, et l'Europe de l'Est, y compris la Russie ([< 10]* kilotonnes) (126). Il convient de noter que tant les concurrents que les clients considèrent que les importations d'Europe de l'Est ne sont ni fiables ni compétitives en termes de qualité. L'entreprise tchèque Spolana, citée par des clients dans l'étude de marché de la Commission comme source d'approvisionnement au cours des années précédentes, a cessé de produire des fibres de viscose au début de 2000. Dans cette même étude, le seul client ayant indiqué avoir importé des fibres de viscose en provenance d'entreprises autres que Lenzing/Acordis en 2000 avait acheté une certaine quantité à un producteur serbe; il faut préciser que ce client n'avait pas besoin de fibres de première qualité.

(152) Dans leur réponse, les parties ont fourni des renseignements complémentaires sur les importations de fibres et de câbles de cellulose en Europe occidentale en 1999 et 2000 (à l'exclusion, par conséquent, d'autres fibres cellulosiques et en ajoutant des informations plus exhaustives pour l'année 2000) (127).

(153) Après avoir examiné ces renseignements complémentaires, la Commission maintient sa précédente analyse. De fait, les renseignements communiqués complètent plutôt que ne contredisent les informations mentionnées aux considérants 149 à 151 et confirment la conclusion que la Commission en a tirée. En effet, les données supplémentaires transmises montrent que non seulement les importations d'Europe de l'Est en Europe de l'Ouest n'ont pas augmenté en 2000 (une année caractérisée par une insuffisance de capacité en Europe occidentale), mais qu'elles ont légèrement diminué entre 1999 et 2000, et n'ont pas dépassé [< 5 %]* de la demande de l'Europe occidentale en 2000.

(154) Les importations d'Asie se sont maintenues en 2000 au même niveau environ, plus d'un tiers d'entre elles ayant comme origine l'Indonésie (voir les observations sur les échanges intragroupe et l'usine de Lenzing en Indonésie aux considérants 150 et 164). Les importations des États-Unis (Lenzing et Acordis étant elles-mêmes les seuls producteurs américains) ont dépassé celles provenant de Taïwan (FCFC). Dans leur réponse, les parties évaluent ces deux sources d'importations à environ [< 2 %]* de la demande totale (128). Les importations d'Inde ont été inférieures à [1 %]* de la demande de l'Europe de l'Ouest en 2000 (129). La hausse totale du volume des importations (compte non tenu des États-Unis et de l'Indonésie) dans une année caractérisée par une insuffisance de capacité n'a pas dépassé, d'après les parties, [< 5 %]* de la demande de l'Europe occidentale. Ceci confirme la conclusion de la Commission selon laquelle il est peu probable que les importations de fibres de viscose en Europe occidentale progressent sensiblement.

L'utilisation de la capacité

(155) D'après les renseignements communiqués à la Commission tant par les parties que par leurs concurrents, le taux d'utilisation des capacités dans le secteur des fibres de viscose est élevé; en 2000, il a atteint des niveaux proches de 100 % (130). Alors que les usines d'Acordis et de Lenzing ont quasiment fonctionné à pleine capacité, le taux d'utilisation des capacités des sites de production de leurs concurrents européens n'était que légèrement inférieur. Des taux théoriques d'utilisation des capacités de 85-95 %, tels qu'indiqués par des concurrents pour 2000, doivent être replacés dans le contexte des aspects techniques de la production de viscose. Ces taux doivent se situer en dessous de la capacité maximale théorique en raison de la durée nécessaire à la maintenance technique et du temps indispensable au passage de la production d'un type de fibres de viscose à un autre; ils sont donc indicatifs d'un taux d'utilisation effectif des capacités proche de 100 %. En 1999, l'utilisation des capacités a été moindre (131) au cours du premier semestre.

(156) L'utilisation des capacités est un facteur de rentabilité déterminant, puisque la production de viscose met en œuvre des processus chimiques assez complexes impliquant de nombreuses opérations de production. Étant donné qu'elle constitue également un processus potentiellement polluant, elle requiert des investissements considérables dans des techniques de protection de l'environnement, notamment dans des régions comme l'EEE, où les normes de protection dans ce domaine sont exigeantes; cette question prend encore plus de poids lorsqu'il s'agit de construire de nouvelles usines ou d'agrandir des installations existantes (132).

Les coûts d'investissement et de production

(157) Les investissements effectués dans les installations sont importants.La partie notifiante a chiffré le coût annuel d'une usine nouvelle d'une capacité de 20 kilotonnes/30 kilotonnes/40 kilotonnes dans l'EEE à environ [tous 80-150]* millions d'euros respectivement; ces chiffres ne prennent cependant pas en compte le coût de la lutte contre la pollution. On estime que pour doter une installation existante d'une capacité supplémentaire de 20 kilotonnes par an, il faut investir entre [< 25]* et [< 40]* millions d'euros. Néanmoins, le coût du "dégoulottage", c'est-à-dire du simple remplacement des parties des chaînes de production existantes qui empêchent l'augmentation de la production, a été estimé à moins de [< 15]* millions d'euros.

(158) En outre, les pourcentages de coûts fixes et variables dépendent dans une large mesure de facteurs tels que l'amortissement (qui prend en compte l'âge d'une usine et les investissements récents), les coûts de la main-d'œuvre et le prix des matières premières. Les coûts fixes s'élèvent à [... %]*-[... %]* du total des coûts de production pour les usines européennes d'Acordis. Ce pourcentage (du coût total) est beaucoup plus important pour Lenzing. Étant donné que l'usine de Lenzing dispose d'une installation de pâte de bois dissolvante intégrée qui la rend indépendante des prix très fluctuants de la pâte de bois dissolvante (133), la position de Lenzing diffère sensiblement de celle d'Acordis. Hormis les coûts de la pâte de bois, les éléments qui influencent les coûts variables (134) sont le prix de la soude caustique, qui devrait augmenter, car il constitue un sous-produit du PVC dont la fabrication diminue, ainsi que le prix du sulfure de carbone (135) et de l'énergie (136).

b) Les fibres de viscose de qualité courante

Parts de marché

(159) En ce qui concerne le marché des fibres de viscose de qualité courante, qui représente quelque [70-75 %]* de la demande totale de fibres de viscose dans l'EEE (taille estimée du marché des fibres de viscose de qualité courante en 2000 : [entre 205 et 215] kilotonnes) les parts de marché cumulées des parties dans l'EEE sont estimées à [50-60 %]* (Lenzing : [entre [35-45 %]*]; Acordis : [entre [15- 25 %]*]), les parts de marché de leurs trois seuls concurrents se situant loin derrière, [entre 19 et 21] % (Säteri, en Finlande), [entre 8 et 10] % (SNIACE, en Espagne) et [entre 5 et 7] % (Svenska Rayon, en Suède). Les importations ont représenté environ [5-10 %]* en 2000 (137).

(160) Malgré la part de marché élevée de Lenzing sur le marché, l'étude réalisée par la Commission a montré qu'une concurrence s'exerçait actuellement dans l'EEE sur le marché des fibres de viscose de qualité courante. Toutefois, celle-ci oppose en grande partie Lenzing et Acordis, les deux acteurs les plus puissants et les deux concurrents les plus proches sur ce marché dans l'EEE (138). Si l'opération de concentration notifiée se concrétise, cette concurrence disparaîtra. La nouvelle entité sera donc capable pour les raisons suivantes, de se comporter de manière indépendante.

La nouvelle entité sera en mesure de contrôler les capacités de production (et, en définitive, les prix)

(161) L'opération de concentration notifiée aura pour effet d'éliminer Lenzing, le seul producteur européen de fibres de viscose à avoir réellement renforcé ses capacités de production, allant ainsi à contre-courant de la tendance générale à la réduction des capacités (voir considérants 140-143).

(162) Des documents stratégiques internes présentés au conseil d'administration de CVC confirment que [...]* (139).

À l'issue de l'opération de concentration, la nouvelle entité contrôlera une partie substantielle de la capacité totale et sera incitée à créer une pénurie de l'offre afin de maintenir les prix à un niveau élevé. Cette stratégie de réduction des coûts au moyen d'une diminution de la capacité pourrait s'accompagner du maintien d'une capacité de réserve, ce qui laisserait aux parties la possibilité de contrecarrer d'éventuelles réactions de concurrents ou de nouveaux venus (140). Une très forte proportion d'entre eux ont répondu qu'ils s'attendaient, si l'opération de concentration se concrétisait, soit à des augmentations de prix soit, au mieux, à leur maintien au niveau élevé enregistré ces deux dernières années, cependant beaucoup ont répondu qu'ils prévoyaient une baisse même si cette opération n'avait pas lieu (141).

(163) Il convient cependant de noter que l'acquisition de l'usine de Lenzing œuvre pour CVC une autre perspective stratégique, qui pourra compléter, en cas de besoin, celle mentionnée ci-dessus. En effet, comme indiqué plus haut, Lenzing a été le seul producteur européen de fibres de viscose à augmenter réellement ses capacités de production, agissant ainsi à contre-courant de la tendance générale à la réduction des capacités. En période de faible demande, notamment, Lenzing a cassé les prix et accru ses parts de marché. Cette stratégie consistant à sacrifier la marge au profit du volume tient compte de la structure de coûts particulière de l'entreprise Lenzing. Étant donné que cette dernière est une usine intégrée produisant sa propre pâte de bois dissolvante, elle n'est pas sensible aux variations du coût de la pâte de bois, mais son ratio de coûts fixes est en contrepartie plus élevé que celui d'autres usines de fibres de viscose. En raison de l'importance des coûts fixes de l'entreprise, les volumes sont essentiels, plus que le prix. Lenzing peut accroître le volume de ses ventes à un coût marginal inférieur à celui de ses concurrents (142). Dans le cadre de ce scénario, on peut donc penser que la capacité de l'usine de Lenzing sera pleinement utilisée et que les autres installations, telles qu'Acordis/Kehlheim, dont les ratios de coûts variables sont plus importants, seront mises en réserve comme capacité d'appoint et ne seront mises à contribution que dans la mesure où cela s'avérera nécessaire.

(164) En outre, la nouvelle entité sera dotée d'une importante "capacité d'appoint", autrement dit, elle sera en mesure d'importer des fibres de viscose de qualité courante de la filiale indonésienne de Lenzing et de l'usine américaine de Lenzing, LFC, située à Lowland, Tennessee (ventes intragroupe).Cela s'est déjà produit en 2000, lorsque Lenzing a importé une quantité assez considérable de son usine américaine et de sa filiale indonésienne, tandis qu'en 1999, les chiffres avaient été nettement inférieurs (143). Il convient de relever que ces ventes intragroupe resteront possibles à partir de l'Indonésie. La nouvelle entité sera capable d'utiliser à plein la capacité de l'usine de Lenzing et de recourir à celle du site indonésien de Lenzing (et ultérieurement, également de nouveau à celle de son usine aux États-Unis) (144) en tant que capacité d'appoint principale. Si cela s'avérait insuffisant pour réduire l'offre pendant les périodes de faible demande, Acordis/Kelheim, dont le ratio de coûts variables est beaucoup plus élevé que celui de Lenzing, pourrait être utilisée comme "capacité d'appoint accessoire" pour la fabrication de fibres de viscose de qualité courante. En conséquence, la nouvelle entité aura la possibilité stratégique d'augmenter à tout moment les ventes au sein de l'EEE, afin de dissuader ses concurrents de s'écarter de sa stratégie en matière de prix et de ventes.

(165) La nouvelle entité pourra donc envisager deux stratégies : [...]* de diminution des capacités adoptée par CVC, pourra être complétée, en cas de besoin, par un transfert de la production vers l'usine de Lenzing, en procédant éventuellement à son extension. Cette seconde solution peut être mise en œuvre pour décourager les concurrents ou pour accroître les parts de marché. En cas de ralentissement conjoncturel, la nouvelle entité serait la mieux placée pour faire face à ce ralentissement. Elle pourrait décider soit de maintenir le volume de ses ventes à un niveau important, de diminuer ses marges et d'augmenter sa part de marché (stratégie poursuivie par Lenzing jusqu'ici), soit de diminuer ce volume et de maintenir les prix à un niveau élevé. Les concurrents ne seraient pas en mesure de rivaliser avec la première option et seraient encouragés à soutenir la seconde.

(166) Les parties vont valoir, dans leur réponse (145), que la communication des griefs de la Commission ne définit pas correctement les incitations économiques de la nouvelle unité. Les parties déclarent que les producteurs de fibres de viscose doivent fonctionner avec des taux d'utilisation des capacités élevés afin de couvrir leurs coûts fixes. CVC a l'intention, d'après la réponse, d'accroître la capacité tant de Lenzing que d'Acordis-Kelheim et de l'utiliser pleinement.

(167) Après les avoir examinés, la Commission considère que ces arguments ne sont pas convaincants et défend son analyse. En effet, il n'est pas décisif, pour apprécier la présente affaire du point de vue de la concurrence, de connaître les intentions réelles de la nouvelle entité relatives à la réduction ou à l'augmentation de sa capacité. De l'avis de la Commission, ce qui est déterminant réside dans le simple fait que la nouvelle entité aura le pouvoir économique de mettre en œuvre différentes options stratégiques, ce qui prouve sa capacité à agir indépendamment de ses concurrents et de ses clients.

(168) En ce qui concerne l'argument des parties selon lequel les producteurs de fibres de viscose n'ont d'autre choix que d'utiliser à plein les capacités de leurs usines pour couvrir leurs coûts fixes, la Commission remarque que la demande de fibres de viscose destinées aux applications textiles est caractérisée par de fortes variations cycliques (voir considérant 146). Dans un contexte de ralentissement conjoncturel de la demande, des capacités excédentaires apparaîtront presque inévitablement. De plus, les parties ont à maintes reprises répété qu'elles prévoyaient également une réduction à long terme de la demande en Europe occidentale, ce qui entraînera pareillement des capacités excédentaires. Dans une telle situation, les concurrents ne pourraient pas, en tout état de cause, contrecarrer utilement le pouvoir dont disposera la nouvelle entité de réduire la production pour maintenir les prix à un niveau élevé, cette diminution pouvant parallèlement alerter les concurrents (voir considérants 170 à 172). Ceci entre donc pour une part importante dans la capacité des parties à agir indépendamment de ses concurrents et de ses clients.

(169) La Commission estime donc que dans les deux cas exposés ci-dessus, la nouvelle entité aura la possibilité, pour les raisons suivantes, d'agir indépendamment de ses concurrents et de ses clients.

Les concurrents se comporteront probablement en "preneurs de prix"

(170) L'examen du marché a montré que, dans le meilleur des cas, les possibilités dont disposeront les concurrents pour accroître leurs capacités au cours des deux prochaines années étaient très limitées et correspondaient approximativement au total à l'augmentation des capacités de Lenzing cette année (voir considérants 140 à 143 et tableau 4). Même si cette hausse des capacités était effective, celle-ci serait à peu près égale, ou légèrement supérieure seulement, à la réduction occasionnée par la fermeture de l'usine britannique d'Acordis, à Grimsby. Un concurrent a de même indiqué qu'il espérait actuellement intensifier ses exportations vers la zone ALENA, à présent qu'Acordis a fermé son usine américaine (146). En conséquence, une partie de ces capacités supplémentaires seront absorbées par le vide créé par Acordis aux États-Unis et ne deviendront donc pas opérationnelles en Europe.

(171) Il ressort en outre des résultats de l'examen du marché que les concurrents européens d'Acordis et de Lenzing n'ont pas l'intention de concentrer leurs efforts sur le marché des fibres de viscose de qualité courante. Les concurrents de petite taille, par exemple, ne sont pas en mesure de fournir la gamme complète de produits à base de fibres de viscose de qualité courante. Un d'entre eux n'est présent que de manière très marginale sur le segment du filage de la laine (voir note 67 de bas de page), un autre est incapable de fabriquer les non tissés destinés aux produits d'hygiène et aux applications médicales; le troisième ne réalise que des ventes très réduites dans le segment des textiles et a reconnu qu'il ne pourrait concurrencer Acordis et Lenzing dans ce domaine. En ce qui concerne le segment du filage du coton, des clients ont exprimé des inquiétudes sur la qualité des produits des concurrents (147).

(172) Si la nouvelle entité diminue ses capacités de production, dans un premier temps, les concurrents obtiendront généralement de manière inattendue quelques parts de marché supplémentaires et soutiendront ensuite toute stratégie de prix élevés au lieu de la contester, se comportant ainsi en "preneurs de prix". Leurs capacités de réserve limitées ne leur permettront pas de livrer une concurrence efficace pour conquérir des parts de marché; par contre, cette situation les incitera à tirer profit de prix plus élevés.

Absence de nouvelle entrée sur le marché

(173) Pour les raisons exposées ci-dessus (voir considérant 157), l'entrée de nouveaux concurrents sur le marché des fibres de viscose de qualité courante nécessiterait des investissements importants et il n'y a guère de chances que cela se produise dans l'EEE à court ou moyen terme. Cette opinion est partagée par tous les concurrents comme par la partie notifiante.

Il est peu probable que les importations augmentent sensiblement

(174) D'après les estimations, les importations de fibres de viscose de qualité courante des pays tiers se sont élevées à quelque [< 10 %]*. Étant donné qu'une partie de ces importations avaient pour origine les propres filiales de Lenzing et d'Acordis aux États-Unis et en Indonésie, le taux réel des importations en provenance de tiers est même inférieur (voir considérants 140 à 143). Il est peu vraisemblable que les importations de tiers augmentent sensiblement. En effet, l'examen du marché par la Commission a révélé que les clients étaient très réticents à acheter de la viscose à des producteurs hors EEE (voir considérants 126 et 127). De même, aucun des concurrents des parties ne prévoit de hausse significative des importations.

(175) À l'inverse, les parties sont en mesure de dissuader les concurrents des pays tiers d'entrer sur le marché de l'EEE. [...]* (148). De plus, à long terme, les capacités asiatiques devraient, d'après les prévisions, rester stables, voire diminuer (149).

(176) Les pressions concurrentielles exercées par les importations ne peuvent donc être considérées comme suffisantes pour compenser la puissance de la nouvelle entité.

Les pressions concurrentielles dues à la concurrence interfibres sont insuffisantes

(177) Bien qu'il soit justifié de définir des marchés de produits distincts, il existe un certain degré de substituabilité entre les fibres appartenant à des marchés de produits voisins. Si la nouvelle entité devait imposer des hausses de prix sensibles pour les fibres de viscose de qualité courante, il y a lieu de penser que les acheteurs se tourneraient, dans une certaine mesure tout au moins, vers d'autres fibres, malgré leurs différences en matière de rendement et de caractéristiques esthétiques (150). La partie notifiante a donc fait valoir que cette concurrence interfibres limiterait de manière suffisante la puissance concurrentielle de la nouvelle entité.

(178) Il existe plusieurs domaines d'application où, sans être substituables entre elles, l'utilisation de viscose et celle d'autres fibres se superposent. Ces chevauchements se produisent essentiellement en ce qui concerne le polyester, mais également pour d'autres fibres, et sont plus importants dans le secteur des textiles que dans celui des produits non tissés. De même, il convient de noter que, tant dans le textile que dans le secteur non tissé, les fibres de viscose de qualité courante sont souvent utilisées, non pas sous une forme pure, mais dans des mélanges.

(179) L'examen du marché a toutefois montré que si les prix des fibres de viscose augmentaient de 5 à 10 %, seuls quelques clients réduiraient effectivement leur utilisation de fibres de viscose de plus de 10 % dans leurs applications ou secteurs d'activité, tandis que la majorité ont répondu qu'ils ne diminueraient pas leur consommation de fibres de viscose ou qu'ils le feraient dans une proportion inférieure à 10 %. Un document présenté au CIRFS, organisme professionnel européen, intitulé "Myths and Realities of Interfibre Competition" confirme, sous un angle différent, cette appréciation. Ce document conclut qu'"(I)l est peu probable que cette concurrence se fonde sur des prix relatifs, à moins de modifications très importantes (de 20 % au moins) du prix d'une fibre particulière par rapport à une fibre concurrente." (151) Par conséquent, La Commission ne considère pas que cette possibilité restreinte de changer de fibres, telle que les clients l'ont signalée, soit suffisante pour conclure que la capacité de la nouvelle entité d'agir indépendamment s'en trouverait sensiblement limitée.

(180) En outre, comme expliqué ci-dessus (aux considérants 161 à 165), la nouvelle entité serait en mesure d'adapter sa production et ses ventes de fibres de viscose de qualité courante dans l'EEE dans des conditions d'efficacité et de rentabilité plus grandes que ses concurrents. En cas d'augmentation du prix des fibres de viscose, elle serait moins affectée par les diminutions du volume des ventes. Premièrement, ses concurrents auraient des difficultés à livrer concurrence pour obtenir des parts de marché dans un marché qui se rétrécit, compte tenu notamment de l'importance des économies d'échelle sur le marché des fibres de viscose de qualité courante. Deuxièmement, la nouvelle entité serait le seul acteur du marché en mesure de contrôler ce processus par son pouvoir de fixation des prix. Elle pourrait donc choisir le moment qui serait le plus bénéfique pour adapter son activité à un rétrécissement du volume du marché.

(181) Enfin, étant donné qu'elle peut alimenter tous les segments du marché des fibres de viscose de qualité courante, la partie notifiante sera en mesure de pratiquer une discrimination par les prix à l'encontre de clients dans des segments particuliers, faciles à délimiter (tels que filatures de type coton, filatures de type laine, fabricants de rouleaux de tissu spécialisés dans les produits à usage médical ou hygiénique et autres fabricants qui n'alimentent pas ce segment du marché) ou à l'encontre de clients déterminés. [...]* (152). La crainte de représailles, soit sur des segments particuliers, soit sur des marchés de produits spéciaux à marge plus élevée, pourrait décourager les concurrents de contester la stratégie menée en matière de prix par la nouvelle entité. Comme indiqué précédemment, de telles représailles sont possibles, car la nouvelle entité disposerait d'une gamme de produits sans pareil sur les divers marchés des fibres de viscose et posséderait un plus grand potentiel en matière de technologie et d'innovation (153) (154).

Les pressions concurrentielles exercées par les importations en aval de produits finis en fibres de viscose sont insuffisantes

(182) La partie notifiante a en outre fait valoir que la menace d'une augmentation des importations en aval de produits finis en fibres de viscose (fil, tissu, vêtements, par exemple) ferait peser une contrainte concurrentielle réelle sur la nouvelle entité (155).

(183) Il convient tout d'abord de constater que l'EEE enregistre un excédent commercial en ce qui concerne la toile en viscose ou en mélanges de viscose (156), malgré le déficit important de sa balance commerciale dans la branche des vêtements (les importations nettes représentent 44 % de la consommation de vêtements dans l'EEE), et malgré un solde commercial négatif dans le secteur de la viscose pure et du filé mélangé (les importations nettes ont atteint 16 % de la consommation de filé dans l'EEE) (157). Ces chiffres montrent que les fibres de viscose (et le tissu en fibres de viscose) sont particulièrement importantes pour l'industrie européenne du textile dans sa phase de restructuration et qu'elles ne suivent pas nécessairement la tendance générale supposée en déclin de cette industrie (158). Même en supposant que, dans le prolongement de la désaffection en cours pour les applications textiles au profit des applications non tissées mentionnée au considérant 145, la demande de fibres de viscose textiles de qualité courante dans l'EEE pourrait diminuer, cette désaffection aurait pour seule conséquence de réduire davantage l'exposition des parties aux risques des exportations en aval de produits textiles, alors que ce même risque existe dans une mesure beaucoup moins grande pour les produits non tissés (159).

(184) Dans leur réponse (160), les parties affirment que la Commission surestime l'importance de l'excédent commercial dans l'EEE aux niveaux des fibres de viscose et de la toile.

(185) Après avoir examiné cet argument, la Commission maintient sa conclusion selon laquelle les fibres de viscose et les produits en fibres de viscose jouent un rôle important pour l'industrie textile européenne. Elle fait observer que la réponse des parties ne réfute pas cette conclusion en tant que telle. Même si les propres calculs des parties ne prennent pas en compte les échanges de fibres de viscose avec les pays tiers, ceci ne dément pas l'essentiel, à savoir que le déficit commercial net dans l'EEE en ce qui concerne les produits finis en fibres de viscose est beaucoup plus faible que le déficit commercial net dans le secteur des produits en coton et en polyester.

(186) Deuxièmement, une observation similaire à celle formulée pour la concurrence interfibres peut également être faite dans ce contexte. Comme expliqué ci-dessus (au considérant 180), une réduction du volume des ventes de fibres de viscose de qualité courante affecterait moins sensiblement la nouvelle entité que les autres producteurs et ne menacerait donc pas sa position de numéro un sur ce marché. En outre, la présence de la nouvelle entité sur plusieurs marchés géographiques explique aussi son avantage concurrentiel; ses filiales situées dans les pays tiers, notamment en Extrême-Orient (filiale de Lenzing en Indonésie) et dans les pays de l'ALENA (usine de Lenzing aux États-Unis) pourraient ainsi, dans une certaine mesure tout au moins, bénéficier financièrement d'un départ de l'EEE des industries en aval vers d'autres marchés, alors que, parallèlement, la nouvelle entité pourrait maintenir sa position dominante (et ses bénéfices), même sur un marché des fibres de viscose de qualité courante qui se rétrécissait au sein de l'EEE (161).

Les pressions concurrentielles dues à la concurrence interfibres en aval sont insuffisantes

(187) Dans leur réponse (162), les parties font valoir que la communication des griefs omet constamment d'accorder un poids quelconque aux pressions concurrentielles exercées par la concurrence en aval (imputable aussi bien aux autres fibres qu'à des fournisseurs extérieurs à l'Europe occidentale) et estiment qu'il est très important de constater que très peu de clients en aval ont répondu, ce qui donne à penser qu'ils ne se sentent pas très préoccupés ni même intéressés par cette opération. Dans sa lettre supplémentaire, la partie notifiante affirme que le fait que la Commission n'ait pas accordé le poids qui leur revient aux effets de la concurrence en aval sur le comportement des parties montre également qu'elle n'a pas pris en compte les clients qui ont répondu qu'ils diminueraient ou arrêteraient leur production en cas d'augmentation de 5 à 10 % du prix des fibres de viscose. D'après la partie notifiante, ces réductions du volume des achats ont une incidence directe sur la rentabilité des parties et, partant, sur leur incitation à relever les prix, de la même manière que lorsque les clients se tournent vers d'autres fibres pour certaines quantités.

(188) Après les avoir examinés, la Commission estime que ces arguments ne sont pas convaincants. Premièrement, la Commission rappelle qu'elle considère les pressions concurrentielles exercées par les fournisseurs situés en dehors de l'Europe occidentale comme négligeables (voir considérants 174 à 176).

(189) Deuxièmement, étant donné que ni les concurrents ni les clients directs ne sont en mesure d'évaluer l'effet de la concurrence interfibres en aval, celle-ci ne peut être considérée comme exerçant des pressions concurrentielles. Même les clients en aval eux-mêmes n'ont pas été capables de fournir une indication de l'importance de cette incidence. En outre, l'analyse de la Commission des élasticités-prix croisées (aux considérants 75 et 76) tient compte implicitement de la concurrence interfibres en aval dans le passé. En outre, le questionnaire de la phase I de la Commission demandait explicitement aux clients des parties si eux-mêmes ou leurs clients se tourneraient vers d'autres fibres en cas de hausse de prix limitée mais permanente de 5 à 10 %. Les réponses montrent que dans ce cas, les ventes de fibres de viscose affectées par ce changement de comportement n'atteindraient que 6 à 13 % (163) en volume environ.

(190) Troisièmement, en ce qui concerne l'évaluation des réponses des clients ayant déclaré qu'ils arrêteraient ou diminueraient la fabrication de produits à base de fibres de viscose en cas d'augmentation permanente, limitée mais significative, des prix, la Commission ne conteste pas que ce type de comportement puisse être considéré comme exerçant une pression concurrentielle sur un éventuel acteur en position dominante sur ce marché. Les clients suspendant (ou diminuant) leur fabrication de produits en fibres de viscose prendront également quelque peu en compte la réduction escomptée de la demande en aval imputable à ces hausses de prix. C'est pourquoi la Commission a demandé aux clients (dans son questionnaire de la phase II) s'ils mettraient fin à leur production (164). Ce sondage a révélé que, dans le cas d'une hausse de prix de 10 %, quelque 7 % seulement du volume des ventes de fibres de viscose de qualité courante réalisées par les parties seraient affectés. La Commission estime que cette incidence est largement insuffisante pour exercer une contrainte effective sur le comportement futur d'un acteur en position dominante sur le marché des fibres de viscose (165).

(191) Enfin, le fait que les clients en aval aient été moins nombreux à répondre au questionnaire de la Commission ne permet pas nécessairement de conclure que ceux qui se sont abstenus n'avaient pas de sérieuses inquiétudes concernant l'opération notifiée et pensaient que la concurrence interfibres en aval exercerait des pressions efficaces sur la position concurrentielle des parties. En effet, il convient de noter que les éventuelles hausses du prix des fibres de cellulose affectent ces clients en aval à un degré moindre que les clients directs des parties. L'incidence de ces augmentations de prix s'atténue davantage en aval, car la fibre représente moins de 5 % de la valeur d'un vêtement, d'après les estimations (166). Par conséquent, des pressions concurrentielles effectives ne sauraient vraisemblablement découler d'une hausse de prix hypothétique que si les modifications des prix relatifs sont importantes (de l'ordre de 20 %) (167).

La puissance d'achat compensatrice des clients exerce une pression concurrentielle insuffisante

(192) Enfin, les parties affirment que la puissance d'achat compensatrice des acheteurs limitera réellement le pouvoir de marché de la nouvelle entité.

(193) En se fondant sur les résultats de son examen du marché, la Commission conteste ce point de vue. Premièrement, le marché des fibres de viscose de qualité courante se caractérise par la présence d'un grand nombre de petits et moyens acheteurs (168) (filateurs et fabricants de produits en rouleaux) qui ne sont pas en mesure d'exercer une puissance d'achat significative. Deuxièmement, il convient de garder à l'esprit que la qualité, certaines caractéristiques des produits, ainsi que la fiabilité de l'offre, sont des critères particulièrement importants pour la plupart des clients (voir également considérant 36). Dans ces conditions, la disparition d'un des principaux fournisseurs indépendants de fibres de viscose de grande qualité dans l'EEE limite sensiblement le choix des clients, car le passage à des fournisseurs "inconnus" peut comporter de gros risques commerciaux, au cas où il impliquerait une baisse de la production. Troisièmement, dans ce secteur, il est courant d'entretenir des relations d'affaires durables, ce qui entrave la démarche des clients qui souhaiteraient se tourner vers d'autres fournisseurs (169). Enfin, dans un contexte d'insuffisance potentielle de l'offre (voir considérants 161 à 165), le fait que les clients travaillent généralement avec des délais de livraison courts et ne détiennent que des stocks limités peut restreindre l'exercice de leur puissance d'achat.

(194) Les réponses apportées par les tiers aux questionnaires de la Commission confirment cette conclusion. De fait, les clients des parties eux-mêmes ont déclaré qu'à l'issue de l'opération de concentration, leur position en qualité d'acheteurs se dégraderait de manière importante : alors qu'approximativement les deux tiers d'entre eux considèrent leur pouvoir de négociation actuel comme équilibré, la plupart s'attendent à ce qu'il s'affaiblisse sensiblement si l'opération notifiée voit le jour.

Conclusion sur les fibres de viscose de qualité courante

(195) L'opération notifiée éliminerait le principal concurrent d'Acordis au sein de l'EEE et seuls trois concurrents, de petite taille et moins performants, continueraient d'exister. La nouvelle entité serait ainsi en mesure d'agir indépendamment de ses concurrents et de ses clients.

(196) Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission est donc parvenue à la conclusion que l'opération envisagée créerait une position dominante de la nouvelle entité sur le marché des fibres de viscose de qualité courante dans l'EEE ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun et l'EEE.

c) Les fibres de viscose teintées dans la masse

Taille du marché et parts de marché

(197) Les fibres de viscose teintées dans la masse représentent quelque [< 20 %]* du volume total des ventes de fibres de viscose. La part de marché cumulée que détiendraient Acordis et Lenzing dans l'EEE serait encore plus élevée sur ce marché de produits et atteindrait [80-90 %]* (Lenzing [50- 60 %]*; Acordis : [25-35 %]*), Sniace se situant loin derrière, à [0-10 %]*.

(198) Malgré la part de marché élevée détenue par Lenzing, on a des raisons de penser, au vu de la faiblesse des marges bénéficiaires et du fait que les clients considèrent leur puissance d'achat actuelle comme équilibrée, qu'une certaine concurrence s'exerce actuellement dans l'EEE sur le marché des fibres de viscose colorées dans la masse. Toutefois, cette concurrence oppose surtout les deux parties et n'existera plus si l'opération de concentration notifiée voit le jour. La nouvelle entité sera donc capable pour les raisons suivantes, de se comporter de manière indépendante.

Concurrents et entrée sur le marché

(199) Sniace, le seul concurrent européen restant dans le secteur des fibres de viscose teintées dans la masse, représente [0-10 %]* du marché et ne peut offrir qu'une gamme très limitée de couleurs qui, pour des raisons économiques, ne peut être élargie, car ceci nécessiterait des investissements importants et limiterait la production en raison du temps nécessaire à ce réaménagement.

(200) Les deux autres producteurs européens de fibres de viscose qui, pour l'instant, ne produisent pas de fibres teintées dans la masse, ont indiqué que, même en cas d'augmentations de prix de l'ordre de 5 à 10 %, une entrée sur ce marché ne les intéresserait pas pour des raisons d'économies d'échelle.

(201) L'examen du marché a montré que les importations (inférieures à [< 10 %]* actuellement) étaient encore moins susceptibles d'augmenter sur ce marché que sur celui des fibres de viscose de qualité courante. Le producteur tchèque Spolana a fermé au début de 2000. Il existe un fabricant russe, qui n'est pas considéré comme fiable par les clients, et le groupe indien Birla-Grasim ne produit pas, en ce moment, la qualité et la gamme complète de couleurs nécessaires pour répondre aux besoins des clients de l'EEE; ses produits sont conçus pour le marché indien. Il n'y a qu'un autre producteur dans le monde, FCFC (Taïwan), qui ne devrait pas non plus exporter vers l'EEE.

(202) Dans leur réponse (170), les parties déclarent que Birla propose un équivalent exact de la palette de couleurs produite par Acordis à Kelheim.

(203) Après avoir examiné cet argument, la Commission maintient son point de vue initial. Birla l'a confirmé (171), les préférences des marchés européens en termes de nuances et de tonalités de la gamme de couleurs, ainsi que de lustre, diffèrent de celles du marché national de Birla. Pour fabriquer des fibres de viscose teintées dans la masse en Inde, Birla utilise de la pâte et des pigments produits dans ce pays. Ces pigments nationaux sont conformes aux exigences fixées par son marché intérieur au niveau de la gamme de couleurs et du lustre. Afin de répondre aux spécifications du marché de l'EEE, Birla devrait recourir à des pigments appropriés qui, d'après cette société, ne sont pas disponibles en Inde. D'un point de vue technique, Birla pense qu'elle pourrait produire des fibres de viscose teintées dans la masse comparables à celles exigées par les marchés européens en utilisant des pigments importés. Toutefois, Birla réaffirme que la production de petits lots et la nécessité d'une livraison rapide, comme le souhaitent les clients européens pour pouvoir répondre aux exigences d'un marché fluctuant axé sur la mode, lui pose des problèmes pratiques. Les déclarations de Birla correspondent aux réponses faites par les clients dans le cadre de l'enquête de la Commission. La Commission ne peut donc considérer que Birla est un concurrent réel ou potentiel effectif sur le marché de l'EEE des fibres de viscose teintées dans la masse.

Rigidité de la demande

(204) L'examen du marché a montré que le recours à d'autres produits (ou à des fibres de viscose de qualité courante teintées à un stade ultérieur du processus de production) ne devrait pas être important. Premièrement, les fibres colorées dans la masse sont considérées comme étant moins chères et de meilleure qualité (en ce qui concerne la stabilité de la couleur) que les fibres teintées plus en aval. Deuxièmement, les clients sont d'avis que, pour certaines applications (fils bicolores, lingettes colorées, par exemple), l'utilisation de fibres colorées dans la masse constitue une spécification fonctionnelle.

(205) De même, l'effet cumulé du recours à d'autres fibres et de la réduction ou de l'arrêt de la production (172) - l'enquête de la Commission menée pendant la phase II conclut que cet effet se situe autour de 13-14 % - ne saurait être considéré comme assez marqué pour exercer des pressions suffisantes sur les parties. Une entreprise en position dominante sur ce marché pourrait décider d'augmenter ses prix, s'exposant ainsi à des pertes au niveau des ventes, tout en augmentant parallèlement la productivité du reste de sa production.

Conclusion sur les fibres de viscose teintées dans la masse

(206) L'opération notifiée éliminerait le principal concurrent d'Acordis au sein de l'EEE et un seul concurrent, de petite taille et moins performant, continuerait d'exister. La nouvelle entité serait ainsi en mesure d'agir indépendamment de ses concurrents et de ses clients.

(207) Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission est donc parvenue à la conclusion que l'opération envisagée créerait une position dominante de la nouvelle entité sur le marché EEE des fibres de viscose teintées dans la masse ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun et l'EEE.

d) Fibres discontinues de viscose pour tampons

Taille du marché et parts de marché; position dominante d'Acordis

(208) Au sein de l'EEE, le marché des fibres de viscose pour tampons représente environ [< 15 %]* des ventes totales de fibres de viscose. Dans cette zone géographique, la part de marché cumulée des parties s'élèverait à [80-90 %]* (Acordis : [70-80 %]*, Lenzing : [10-20 %]*). Il n'existe qu'un seul concurrent, Svenska Rayon, qui absorbe les [< 20 %]* restants. Les deux autres producteurs européens de fibres de viscose (Säteri et Sniace) ne produisent pas de fibres de viscose pour tampons, pour des raisons soit techniques soit économiques, et n'envisagent pas de le faire à l'avenir. Il n'est pas réaliste de penser que des importations pourraient avoir lieu.

(209) Compte tenu de ces caractéristiques du marché, Acordis peut déjà être considérée comme étant en position dominante sur le marché des fibres de viscose pour tampons, car non seulement elle détient la part de marché de loin la plus considérable ([70-80 %]*), mais elle fabrique et commercialise aussi la meilleure qualité de fibre pour tampons, dénommée "Galaxy", qui est protégée par des brevets.

(210) L'opération de concentration notifiée aura pour effet d'éliminer Lenzing, un des deux seuls concurrents actuels d'Acordis, et renforcera, pour les raisons suivantes, la capacité de la nouvelle entité de se comporter de manière indépendante.

Les pressions concurrentielles exercées par des entrées potentielles sur le marché ou par le concurrent restant sont insuffisantes

(211) Svenska Rayon, le seul producteur restant de fibres de viscose pour tampons dans l'EEE, est une petite entreprise aux capacités restreintes. Bien que cette société concentre sa production sur les produits de spécialité (173) et soit éventuellement en mesure d'augmenter ses capacités dans une mesure limitée, elle ne peut réellement concurrencer Acordis et Lenzing, car pour une majorité de clients, elle n'est pas assez grande pour être considérée comme une alternative rentable à la nouvelle entité. Des clients ont également fait part de leurs inquiétudes sur la stabilité économique de Svenska Rayon, qui n'a pas la réputation d'être une entreprise innovante.

(212) Il est très peu probable que des producteurs d'Extrême-Orient pénètrent sur ce marché en y important leurs produits. Ils produisent en général des fibres de viscose de qualité courante destinées aux applications textiles et ont un savoir-faire peu développé dans les applications non tissées, et encore moindre dans les produits hygiéniquement sensibles, tels que les fibres de viscose pour tampons. Aucun acheteur de fibres de viscose pour tampons n'a signalé qu'il s'approvisionne actuellement auprès de fournisseurs hors EEE et aucun d'eux n'envisage non plus de le faire à l'avenir (174).

La puissance d'achat compensatrice des clients exerce une pression concurrentielle insuffisante

(213) Les parties ont fait valoir que la puissance d'achat importante de leur nombre restreint de clients et la capacité de ces derniers à poursuivre une stratégie de double approvisionnement représenteraient une contrainte concurrentielle suffisante. En effet, quelques gros clients tels que [...]* génèrent un pourcentage élevé du chiffre d'affaires réalisé par les parties dans le secteur des fibres de viscose pour tampons. Il convient toutefois de remarquer que seuls quelques-uns de ces clients mènent actuellement une politique de double approvisionnement. En outre, l'opération notifiée diminuerait sensiblement les possibilités offertes aux clients de poursuivre ce type de stratégie, puisque la fusion ferait disparaître Lenzing, le principal concurrent d'Acordis; comme expliqué ci-dessus, Svenska Rayon à elle seule ne peut être considérée comme une solution de remplacement suffisante au niveau de l'offre (voir considérant 211). Enfin, les clients ne peuvent changer de fournisseur à court terme, du fait de l'adaptation des machines qui peut s'avérer nécessaire et du processus de qualification rigoureux auquel les fournisseurs et leurs produits doivent se soumettre.

(214) Ces constatations ont été confirmées par le point de vue des clients eux-mêmes, dont la grande majorité se sont déclarés très inquiets de l'absorption envisagée de Lenzing. Alors que la plupart d'entre eux considèrent leur pouvoir de négociation actuel comme équilibré, la majeure partie s'attend à ce qu'il s'affaiblisse sensiblement si l'opération notifiée voit le jour.

(215) De plus, le niveau des prix des fibres de viscose pour tampons (notamment de Galaxy, la fibre spéciale d'Acordis, mais également des fibres standard pour tampons) est supérieur à celui des fibres de viscose de qualité courante, [...]*. Un tel écart de prix serait peu concevable si les clients disposaient réellement d'une puissance d'achat compensatrice suffisante.

(216) Les parties affirment dans leur réponse (175) que la communication des griefs ne tient absolument pas compte des observations formulées par les fabricants de tampons, qui déclarent en général que la substitution interfibres et l'exercice d'une puissance compensatrice dans le segment des tampons sont possibles, et que la Commission en sous-estime par conséquent l'importance. De plus, elles font remarquer qu'il n'a fallu que quatre mois aux acheteurs de fibres pour tampons pour passer de l'usine d'Acordis à Mobile à celle de Kelheim en Allemagne, et que cela montre que la position de la Commission selon laquelle il est impossible de changer de fournisseurs à court terme est erronée. Enfin, les parties rappellent que les fabricants de tampons sont capables de "discipliner" leurs fournisseurs de viscose pour toute une gamme de produits.

(217) Après examen de ces arguments, la Commission défend son analyse. Premièrement, les extraits des déclarations de tiers cités par les parties dans leur réponse ne sont pas probants. Une réponse rappelle explicitement que sa remarque n'est valable qu'"à plus long terme". Une autre réponse d'un client mentionnée par les parties (176), tout en évoquant une possible réduction de 10 % en deux mois de sa consommation de fibres de viscose, indique également qu'un tel changement entraînerait des problèmes d'efficacité dans la production. Elle précise que les caractéristiques des fibres utilisées pour le produit, les difficultés techniques posées par l'adaptation du processus de production, ainsi que le temps nécessaire à cette adaptation et son coût, sont autant de raisons pour lesquelles un tel passage n'est pas possible dans une mesure suffisante pour compenser les hausses de prix des fibres de viscose. En définitive, ce producteur considère que sa propre position sera plutôt faible après l'opération de concentration.

(218) En ce qui concerne les réponses des deux fabricants de tampons au questionnaire adressé par la Commission lors de la phase I, citées dans la réponse, il convient de relever qu'un de ces clients estime que le recours à d'autres fibres n'est envisageable que moyennant des coûts élevés et considère donc que ce n'est pas économiquement envisageable. Ce client n'abandonnerait pas les fibres de viscose au profit d'autres fibres en cas d'augmentation limitée mais permanente de 5 à 10 %. S'il est exact que ce client indique aussi qu'il pourrait remplacer 50 % de sa consommation de fibres de viscose par du lyocell, ceci ne peut guère être considéré comme une pression concurrentielle s'exerçant sur les parties, puisque ces dernières sont les seules à produire du lyocell dans le monde. De plus, ce client déclare que les exigences réglementaires en matière de santé et les normes de sécurité font qu'un tel changement prendrait au moins douze mois. L'autre client cité par les parties dans leur réponse signale que s'il peut, "en théorie", substituer d'autres fibres et mélanges à 100 % des fibres de viscose, sa société avait décidé de renoncer à cette solution, car les fibres de viscose donnent le meilleur résultat. Aucun de ces deux clients n'estime que la position de sa société sera forte après l'opération de concentration (le premier pense qu'elle sera "plus faible" et le deuxième, qui la juge forte actuellement considère qu'elle sera "équilibrée" après l'opération). Les avis exprimés dans ces réponses confortent donc pleinement l'analyse de la Commission.

(219) D'autres passages cités extraits des réponses des fabricants de tampons au cours de la phase II sont pareillement peu convaincants. Si un producteur a fait savoir qu'en cas de hausse de prix permanente de 5 à 10 % des fibres de viscose, il les remplacerait par d'autres fibres à hauteur respectivement de 25 % à 75 % et de 25 % à 100 %, ce même producteur a ajouté que la phase de développement nécessaire durerait vingt-quatre mois au minimum et que ce changement aurait un coût très important en termes de ressources en raison de l'investissement en capital, des essais et des qualifications, ainsi que des pertes de production; il en conclut donc qu'il est très peu probable que cette possibilité de passage à d'autres fibres exerce des pressions concurrentielles suffisantes sur les parties.

(220) De même, le fait qu'un client ne prévoit qu'une augmentation de prix limitée après la réalisation de l'opération envisagée et qu'un autre pense que l'entité combinée sera économiquement plus solide ne contredit pas l'analyse de la Commission. Ni l'anticipation de hausses de prix limitées ni la perspective que l'opération de concentration débouche sur une entité économiquement rentable n'excluent que les parties seront en mesure d'agir indépendamment de leurs concurrents et de leurs clients à l'issue de l'opération de concentration.

(221) La Commission est également d'avis que le transfert de clients d'un site Acordis (Mobile, Alabama) à un autre (Kelheim, Allemagne) n'est pas une preuve suffisante pour conclure que l'obstacle au passage d'un fournisseur de fibres de viscose à un autre est négligeable (voir considérant 213). Que ces clients soient approvisionnés en fibres de viscose par l'usine américaine d'Acordis ou par son site situé en Allemagne, il s'agit d'un seul et même fournisseur et non pas de différents producteurs.

(222) S'il peut paraître surprenant de constater que même les gros fabricants de tampons ne disposent que d'une puissance d'achat compensatrice insuffisante pour limiter l'indépendance du comportement concurrentiel de l'entité issue de la concentration, il faut prendre en compte le fait que ces sociétés sont dans une large mesure "prisonnières" des coûts élevés occasionnés par tout changement. Même s'ils appartiennent à des groupes industriels bien plus importants que les producteurs de viscose, les gros fabricants de tampons n'auront d'autre choix que de s'approvisionner auprès de l'entité issue de l'opération de concentration, à laquelle les principaux clients en fibres destinées aux applications textiles et non tissés achètent des quantités comparables ou même supérieures à celles achetées par les fabricants de tampons et qui sont, de fait, moins dépendants par rapport aux fabricants de tampons que les fabricants de tampons ne le sont par rapport à eux (177). Cet argument est encore plus fondé pour les petits fabricants de tampons commercialisés sous une marque de distributeur.

(223) Enfin, l'idée selon laquelle la capacité des fabricants de tampons à "discipliner leurs fournisseurs pour toute une gamme de produits" exerce des pressions concurrentielles suffisantes ne saurait être acceptée, car ces producteurs n'achètent généralement pas de fibres de viscose pour des produits autres que des tampons(par exemple pour des lingettes pour bébés); pour ces produits, ils achètent des rouleaux de fibres de viscose à des fabricants de produits en rouleaux. Ce sont ces fabricants de produits en rouleaux qui achètent des fibres de viscose (de qualité courante) aux producteurs de fibres en viscose. Les possibilités dont disposent les fabricants de tampons pour influencer la décision d'achat du fabricant de produits en rouleaux vis-à-vis des parties ne sont donc que limitées.

Les pressions concurrentielles dues à la concurrence interfibres sont insuffisantes

(224) Les seules pressions concurrentielles que les marchés de produits voisins (concurrence interfibres) pourraient exercer proviendraient du coton et ne sauraient être considérées comme suffisantes pour ébranler la position solide qui sera celle de la nouvelle entité. En effet, un des plus gros fabricants de tampons a exclu l'utilisation du coton et un autre a estimé que le passage à une autre fibre occasionnerait des coûts extrêmement élevés.

(225) De même, les pressions qu'exercent les clients qui changent de fournisseurs, arrêtent leur production ou diminuent le volume de leur consommation de fibres de viscose pour tampons sont faibles (inférieures à 6 % en cas de hausse de prix durable de 10 %).

Conclusion sur les fibres de viscose pour tampons

(226) L'opération notifiée éliminerait le concurrent le plus puissant d'Acordis au sein de l'EEE et priverait les clients de solutions de rechange suffisantes, renforçant ainsi la capacité dont dispose déjà Acordis d'agir indépendamment de ses concurrents et de ses clients.

(227) Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission est donc parvenue à la conclusion que l'opération envisagée créerait une position dominante d'Acordis sur le marché des fibres de viscose pour tampons dans l'EEE ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun et l'EEE.

e) Conclusion sur les fibres de viscose

(228) Pour les raisons susmentionnées, la Commission a donc conclu que l'opération envisagée créerait, au sein de l'EEE, une position dominante de la nouvelle entité sur le marché des fibres de viscose de qualité courante et des fibres de viscose teintées dans la masse et renforcerait la position dominante d'Acordis sur le marché des fibres de viscose pour tampons dans l'EEE ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun et l'EEE.

(229) La Commission constate que même si, contrairement à sa définition du marché (voir considérants 82 à 115), le marché de produits en cause devait comprendre la totalité des fibres de viscose, l'opération notifiée éliminerait le principal concurrent d'Acordis dans l'EEE, créerait une société qui détiendrait [60-70 %]* de parts de marché dans l'EEE (voir considérant 139) et ne laisserait derrière elle que trois concurrents plus petits et moins performants. La situation sur un marché comprenant l'ensemble des fibres de viscose serait comparable aux conditions générales du marché des fibres de viscose (voir considérants 140 à 158) et à celles prévalant sur le marché des fibres de viscose de qualité courante (voir considérants 159 à 194), qui représentent quelque [70-75 %]* des ventes totales de fibres de viscose dans l'EEE. Il faudrait donc appliquer le même raisonnement que celui décrit ci-dessus pour les fibres de viscose de qualité courante. L'opération de concentration serait par conséquent de nature à créer une position dominante de la nouvelle entité ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun et l'EEE.

2. Lyocell

Parts de marché

(230) Lenzing et Acordis sont actuellement les seuls producteurs de lyocell dans le monde. Lenzing détient environ [< 25 %]* de part de marché, tandis que "Tencel", le produit de marque d'Acordis, absorbe environ [>75 %]* des ventes totales de lyocell. Dans l'EEE, la différence de parts de marché entre les parties est plus faible.

Élimination du seul concurrent d'Acordis

(231) Jusqu'à présent, Acordis et Lenzing se sont affrontées sur le marché du lyocell, notamment dans l'EEE, Lenzing pratiquant des prix sensiblement moins élevés qu'Acordis. L'opération notifiée créera un monopole mondial sur le marché du lyocell et fera ainsi disparaître la concurrence existant entre les parties. La nouvelle entité sera capable, pour les raisons suivantes, d'agir de manière indépendante.

Aucune entrée sur le marché n'est prévue dans un proche avenir

(232) Alors que les parties ont prévu l'entrée sur le marché de deux producteurs, un Chinois et un Coréen, à l'horizon 2003 environ, ainsi que l'arrivée de nouveaux venus à une date ultérieure, l'examen du marché réalisé par la Commission a montré qu'aucune partie tierce ne serait susceptible d'entrer sur le marché à court terme. Au contraire, les nouveaux venus potentiels qui ont répondu au questionnaire de la Commission ont déclaré qu'il leur faudrait plusieurs années avant d'être opérationnels et de pouvoir concurrencer efficacement les parties sur le marché du lyocell.

(233) Lenzing et Acordis affirment que leurs brevets technologiques ne constituent pas un obstacle et que ces droits de propriété intellectuelle peuvent être difficiles à faire respecter. Les tiers souhaitant entrer sur le marché ont vivement contesté ce point de vue. L'enquête de la Commission a révélé l'existence d'une barrière technologique élevée à l'entrée sur le marché, puisque les parties sont propriétaires d'un nombre important de droits de brevet portant sur les techniques de production du lyocell (voir considérants 246 à 247).

(234) Les parties affirment dans leur réponse que la communication des griefs de la Commission sous-estime la probabilité de nouvelles entrées sur le marché (178). Elles ont présenté une liste de nouveaux venus potentiels, établie à partir des réponses des concurrents aux questionnaires de la Commission.

(235) Après les avoir examinés, la Commission considère que ces arguments ne sont pas convaincants. En effet, parmi les nouveaux venus potentiels cités par les parties, plusieurs sont en réalité des organismes de recherche engagés dans le développement des techniques de production et de transformation du lyocell qui ne peuvent en aucun cas être considérés comme des producteurs potentiels de fibres de lyocell.

(236) De plus, la réponse des parties ne précise pas la date à laquelle celles-ci prévoient l'entrée vraisemblable de la plupart de ces tiers sur le marché. En ce qui concerne l'entrée sur le marché du groupe indien Birla Grasim, qui est envisagée "au cours des deux prochaines années", la réponse passe sous silence le fait que ce calendrier est remis en question, car "certains équipements essentiels ne sont pas disponibles du fait de restrictions en matière de brevets imposées par Lenzing/Acordis au niveau de la conception, et cette entrée pourrait donc demander davantage d'efforts et plus de temps" (179). De surcroît, tout nouveau venu potentiel sur le marché risque un litige avec Acordis et Lenzing en matière de brevets (voir considérant 248). En ce qui concerne la référence faite à l'entrée sur le marché d'une entreprise chinoise, dont le nom ne figure pas dans la réponse, celle-ci n'a pas été confirmée par les conclusions globales de l'examen du marché; au cours de son examen du marché, la Commission n'a en particulier pas pu entrer en contact avec cette société afin d'obtenir confirmation de la part de ce nouveau venu potentiel lui-même sur sa future stratégie. De même, la société coréenne Hanil n'a pas confirmé à la Commission dans quelle mesure elle est déjà active sur le marché des fibres de lyocell, ou envisage de l'être (180). La probabilité d'une entrée sur le marché dans un avenir proche, fondée exclusivement sur de vagues déclarations concernant des tiers, n'est pas suffisamment grande pour que la Commission en conclue que d'importantes pressions concurrentielles s'exerceront à court terme sur les parties (181).

(237) Dans ces conditions, la concurrence potentielle ne saurait être considérée comme une source de pressions concurrentielles capable de peser suffisamment sur les parties et de compenser les effets de l'opération notifiée (182).

Incitation à augmenter les prix

(238) L'examen du marché a en outre montré que le marché du lyocell était actuellement caractérisé par la présence de capacités excédentaires.Par conséquent, la nouvelle entité sera incitée à restreindre sa production de lyocell afin d'obtenir des prix plus élevés (par l'intégration de Lenzing dans la stratégie d'Acordis fondée sur son produit de marque Tencel, vendu à un prix élevé), en vue notamment de récupérer les investissements importants consentis dans les techniques du lyocell. Il est à noter que les clients pensent, en majorité, que les prix augmenteront ou resteront tout au moins stables en cas de fusion entre Acordis et Lenzing, tandis qu'ils prévoient leur baisse si celle-ci n'a pas lieu. Alors que la plupart des clients considèrent que leur pouvoir de négociation actuel est équilibré, l'écrasante majorité d'entre eux s'attendent à ce qu'il s'affaiblisse sensiblement si l'opération notifiée voit le jour.

Arguments complémentaires figurant dans la réponse des parties

(239) Dans leur réponse, les parties soutiennent, en ce qui concerne l'appréciation sous l'angle de la concurrence, que l'évaluation du lyocell par la Commission ne tient pas compte du contexte plus large du marché et qu'elle sous-estime les menaces qui pèsent sur le lyocell (183). Elles signalent notamment que la communication des griefs ne prend pas en considération les pressions concurrentielles résultant de la capacité des clients en aval à passer d'une fibre à une autre (184). D'après les parties, du point de vue des clients en aval, les produits fabriqués à partir de fibres différentes sont presque totalement interchangeables. Dans sa lettre supplémentaire, la partie notifiante déclare en outre que les propres données de la Commission démontrent qu'en cas de hausse de 5 à 10 % du prix du lyocell, le volume des ventes de lyocell diminuerait de 15 % car les clients se tourneraient vers d'autres fibres (185) et que, de même, si on prend en compte la réduction de la consommation des clients ou leur passage à d'autres fibres, cet effet sur les ventes atteindrait 30 %.

(240) Après avoir examiné ces arguments, la Commission considère que le raisonnement des parties est contradictoire. D'une part, elles précisent, dans leur réponse, que le secteur du lyocell connaît de grandes difficultés pour trouver des débouchés, que les ventes ont baissé et qu'Acordis comme Lenzing sont confrontées à d'importants problèmes financiers dans leurs branches respectives concernant le lyocell (186). D'autre part, les parties prévoient l'arrivée de tiers sur le marché dans un avenir proche, ce qui donne à penser que le lyocell est un marché intéressant où il est possible de réaliser des bénéfices (187). [...]* (188).

(241) En ce qui concerne la distinction entre le passage à d'autres fibres, d'une part, et l'arrêt de la fabrication de produits à base de lyocell ou la réduction de la consommation de lyocell de l'autre, la Commission renvoie aux arguments développés aux considérants 42 et 190. Elle attire en outre l'attention sur l'analyse exposée aux considérants 67 et 68 qui montre que des baisses de production supérieures à la hausse du prix du lyocell (en pourcentage) sont comparativement peu significatives. Comme il y est indiqué, même des réductions plus importantes de la production consécutives à des augmentations de prix peuvent être rentables si elles s'accompagnent d'une fermeture d'usine. Ceci peut pareillement s'appliquer à un recul des ventes de 15 % et à des diminutions allant jusqu'à 30 %.

(242) En ce qui concerne la question du passage des clients en aval à d'autres fibres, la Commission constate en définitive que dans son questionnaire de la phase I, elle demandait explicitement aux clients si eux-mêmes ou leurs clients se tourneraient vers d'autres fibres en cas de hausse de prix limitée mais permanente de 5 à 10 %. Les réponses montrent, que dans ce cas, les ventes de lyocell affectées par ce changement de comportement n'atteindraient que 4 à 5 % environ (189) en volume. Si, à première vue, les réponses du questionnaire de la phase I peuvent sembler contradictoires avec celles apportées au questionnaire de la phase II (dont les réponses sont examinées aux considérants 67 et 68, en ce qui concerne le passage à d'autres fibres, et au considérant 241, pour le passage à d'autres fibres et l'arrêt/la diminution de la production), il convient de noter que les clients ayant répondu dans la phase I représentent un volume de ventes plus élevé dans l'EEE que ceux qui se sont prononcés dans la phase II, ce qui rend le résultat de la phase I plus fiable.

(243) En outre, la Commission renvoie à son argument sur la concurrence interfibres en aval exposé au considérant 190, (première et deuxième phrases), qui vaut également pour le lyocell.

Conclusion

(244) L'opération notifiée aura pour effet de créer un monopole mondial sur le marché du lyocell et, partant, fera disparaître la concurrence existant dans ce secteur, ce qui permettra aux parties de se comporter de manière indépendante des concurrents potentiels et de leurs clients.

(245) Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission est donc parvenue à la conclusion que l'opération envisagée créerait une position dominante de la nouvelle entité sur le marché du lyocell, tant au niveau mondial que dans l'EEE, ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun et l'EEE.

3. Les techniques de production et de transformation du lyocell

Combinaison de droit de brevets

(246) Acordis et Lenzing sont les deux seules entreprises présentes actuellement sur le marché des combinaisons de techniques de production et de transformation du lyocell "prêtes à l'emploi". Chacune d'elle produit du lyocell à partir de sa propre technologie. Le 22 décembre 1997, elles ont conclu entre elles un accord de concession réciproque de licences afin de régler un litige qui les opposait sur les droits de propriété intellectuelle; conformément à cet accord, chaque partie octroie à l'autre une licence mondiale non exclusive, libre de toute redevance, lui donnant le droit de produire, d'utiliser et de vendre du lyocell et des produits à base de lyocell pendant la durée de vie des brevets respectifs. En conséquence, depuis décembre 1997, chacune des parties a totalement accès aux techniques de production du lyocell de l'autre partie.

(247) Les parties détiennent à elles deux la grande majorité de tous les brevets existants pour la production et la transformation du lyocell.

Capacité à bloquer réellement l'entrée de tiers sur le marché

(248) Leurs droits de brevets respectifs permettent à Acordis et Lenzing de bloquer ou de retarder sensiblement l'entrée de tiers sur le marché de la production du lyocell. Les tiers qui envisageraient de commercialiser des techniques de production et de transformation du lyocell ou de vendre des chaînes de production à des producteurs potentiels de lyocell sont systématiquement confrontés au risque de violation de ces brevets et de litige ultérieur avec les parties. Pour ces mêmes raisons, les parties tierces qui pourraient être considérées comme des producteurs potentiels de lyocell hésitent à acheter des techniques de production et de transformation développées par des fournisseurs autres qu'Acordis ou Lenzing.

(249) L'opération notifiée augmentera les difficultés rencontrées par des tiers pour obtenir des ensembles de licences pour les techniques de production et de transformation du lyocell d'Acordis et de Lenzing. Premièrement, le nombre de concédants potentiels tombera de deux à un; alors que l'on recense actuellement deux concédants possibles - [...]* - à l'issue de la fusion, il ne restera plus qu'un concédant potentiel. Deuxièmement, les raisons d'accorder des ensembles de licences "prêtes à l'emploi" à des tiers diminueront sensiblement après l'opération de concentration; comme indiqué ci-dessus (voir considérants 230 à 245), la nouvelle entité détiendra un monopole sur le marché en aval des fibres de lyocell et n'aura donc pas intérêt à ce qu'un éventuel nouveau venu remette ce monopole en cause en acquérant une licence sur sa propre technologie. Du fait de ces répercussions, la concurrence s'exerçant en matière de développement de brevets de production et de transformation indépendants sur ce marché disparaîtra également, étant donné la diminution du nombre d'acheteurs potentiels.

De nouvelles entrées sur le marché sont peu probables à moyen terme

(250) L'examen du marché réalisé par la Commission a montré que dans les conditions exposées ci-dessus, aucune partie tierce ne devrait entrer sur le marché et proposer des ensembles de licences "prêtes à l'emploi" dans un avenir proche (c'est-à-dire dans un délai maximal de deux ans). Si les entreprises d'Extrême-Orient et la société d'ingénierie allemande Sinter AG ont commencé à développer leurs propres techniques de production et de transformation du lyocell, il faudrait, à ce stade, que l'une d'elles obtienne des licences sur au moins une partie des techniques de production et de transformation du lyocell pour entrer à court terme sur le marché, afin d'écarter tout risque de litige lié à la propriété intellectuelle. La position dominante des parties ne peut donc être remise en cause à court et moyen terme.

La réponse des parties

(251) Dans leur réponse, les parties n'abordent pas ces questions (190). Elles se contentent d'affirmer qu'une des parties tierces interrogées par la Commission a formulé des observations "totalement intéressées " et a essayé de "profiter sans contrepartie des investissements substantiels" réalisés par les parties. En outre, elles soulignent que sans l'accord de concession réciproque de licences conclu entre les parties, aucune d'elles n'aurait probablement produit le lyocell et estiment qu'il est "de toute évidence disproportionné d'exiger la remise en question brutale d'importants investissements et travaux de recherche et développement pour éviter ce qui est, au pire, une vague réduction supposée de la concurrence entre les parties concernant l'offre de services technologiques".

(252) Après avoir examiné ces déclarations, la Commission fait observer qu'elle n'a jamais fondé son appréciation de la situation concurrentielle sur le marché des techniques de production et de transformation du lyocell uniquement sur les déclarations d'une seule partie tierce, mais qu'elle a pris en compte toute une série d'éléments factuels, y compris des renseignements fournis par les parties elles-mêmes (voir considérants 246 à 250). En outre, le risque allégué de "resquillage" et l'intérêt des parties à protéger leurs investissements et leurs activités de recherche et développement dans ce secteur ne change rien au fait que les parties détiennent actuellement la grande majorité de tous les brevets existants en matière de production et de transformation du lyocell, qu'elles sont en mesure de bloquer ou de retarder sensiblement l'entrée de tiers sur le marché de la production de lyocell et qu'une entrée sur le marché est peu probable dans un avenir prévisible. Ces faits sur lesquels la Commission a fondé son appréciation du marché des techniques de production et de transformation du lyocell n'ont pas été contestés par les parties et ils continuent à servir de base à la conclusion de la Commission.

Conclusion

(253) L'opération notifiée créera un quasi-monopole mondial sur le marché des techniques de production et de transformation du lyocell et, par conséquent, éliminera ou limitera gravement toute concurrence restante dans ce secteur, en fournissant aux parties des possibilités de comportements indépendants de leurs concurrents potentiels et de leurs clients. Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission est donc parvenue à la conclusion que l'opération envisagée créerait une position dominante des parties sur le marché des techniques de production et de transformation du lyocell ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun et l'EEE.

D. Engagements

(254) Le 25 septembre 2001, CVC a présenté des engagements phase II destinés à écarter les doutes quant aux problèmes de concurrence recensés par la Commission dans sa communication des griefs. Ces propositions reprennent pour l'essentiel ceux soumis à la Commission le 30 mai au cours de la phase I de la procédure.

1. Description des engagements

a) Fibres de viscose

(255) Acordis propose de concéder à une partie tierce indépendante une licence non exclusive sur les brevets de Galaxy en vue de produire, d'utiliser et/ou de vendre des fibres de viscose Galaxy (191) pour tampons dans l'ensemble des zones de l'EEE et de l'ALENA (192).

b) Lyocell

(256) Une licence non exclusive d'exploitation des brevets détenus par Lenzing et Acordis sur le lyocell sera accordée à un tiers licencié indépendant agréé par la Commission. Ce contrat de licence n'autorisera pas la concession de sous-licences. Il inclura la mise à disposition de toute l'assistance technique nécessaire (y compris des techniques de production et de transformation). Le champ d'application géographique de la licence couvrira au moins la totalité du territoire de l'EEE.

(257) Les mesures correctives prévoient également des contrats de production en sous-traitance pendant une période maximale de cinq ans, à concurrence d'un montant total de [...]* tonnes de lyocell par an, par lesquels le tiers licencié aura accès à l'infrastructure de production du groupe issu de l'opération de concentration.

2. Appréciation des engagements

a) Fibres de viscose de qualité courante

(258) Les engagements envisagés ne s'attaquent pas aux problèmes de concurrence soulevés sur le marché des fibres de viscose de qualité courante. En effet, la licence que les parties proposent de concéder sur les fibres Galaxy ne concerne que le marché des fibres de qualité de viscose pour tampons.

b) Fibres de viscose teintées dans la masse

(259) Les engagements ne traitent pas non plus des problèmes de concurrence soulevés sur le marché des fibres de viscose teintées dans la masse. Il convient là encore de noter que la licence proposée pour les fibres Galaxy ne porte que sur le marché des fibres de viscose pour tampons.

c) Fibres de viscose pour tampons

(260) Les engagements ne s'attachent pas à résoudre totalement les problèmes de concurrence liés au marché des fibres de viscose pour tampons. L'octroi envisagé d'une licence sur les brevets de Galaxy ne compenserait pas suffisamment le renforcement d'une position dominante consécutif à la disparition de Lenzing, la seule société concurrente qui puisse pleinement contester la position dominante d'Acordis (193). Étant donné les coûts élevés d'un changement, également en faveur d'autres fournisseurs de fibres de viscose qui doivent encore éventuellement se soumettre aux processus de qualification internes rigoureux des fabricants de tampons et aux procédures d'autorisation réglementaire au niveau sanitaire (voir également considérants 213 et 221) (194), on peut s'attendre à des réticences de la part des clients pour s'approvisionner auprès de ce licencié de Galaxy. Cette réticence serait encore plus forte chez les fabricants de tampons présents tant aux États-Unis que dans l'EEE, étant donné que la nouvelle entité serait la seule entreprise à pouvoir approvisionner l'EEE comme les États-Unis sans recourir à des expéditions par voie maritime.

d) Lyocell

(261) La Commission estime, pour les raisons suivantes, que les engagements proposés ne sont pas suffisants pour résoudre les problèmes de concurrence soulevés dans sa communication des griefs en ce qui concerne le lyocell.

(262) Le licencié ne serait pas en mesure de livrer une concurrence effective à partir d'un site de production qui, dans l'immédiat, ne serait pas rattaché aux parties. La capacité d'un tel site de production indépendant à être opérationnel à moyen terme (dans un délai de deux à trois ans) dépend, entre autres, de l'assistance technique fournie par la nouvelle entité au licencié et de la perception de la rentabilité économique d'un tel investissement. Les parties pourraient dissuader efficacement une entrée rapide par une stratégie de prix élevés et une utilisation de leur capacité inférieure à 100 %. Le maintien d'une certaine capacité excédentaire et la poursuite d'une stratégie de marque, telle que celle mise en œuvre par Acordis dans le passé, auraient pour effet d'élever des obstacles à l'entrée sur le marché.

(263) Le contrat de production à façon (toll-manufacturing agreement) n'exercerait pas, tel qu'il est proposé, de pressions concurrentielles suffisantes à court et moyen terme sur la puissance monopolistique des parties. Les clauses de ce contrat de production à façon et sa nature même font que le licencié et sous-traitant à façon (ci-après dénommé "licencié/contractant") serait désavantagé d'un point de vue commercial, car la nouvelle entité aurait une connaissance très large de la stratégie commerciale du licencié, de ses coûts, de ses ventes et de sa clientèle.

(264) En raison de son manque d'expertise technique, le licencié/contractant ne pourrait concurrencer la nouvelle entité au niveau de la qualité de son service technique. Étant donné qu'il serait probablement dépendant de la nouvelle entité en ce qui concerne la distribution et l'assistance technique, il ne serait pas non plus en mesure d'être concurrentiel quant à la qualité de son service de distribution. De même, le licencié/contractant ne serait pas davantage capable de livrer une concurrence efficace sur les prix, étant donné que le barème de prix prévu dans le contrat de production à façon proposé par les parties (coûts de production plus redevance de fabrication) rendrait ses coûts supérieurs à ceux supportés par la nouvelle entité. Cette dernière aurait donc à tout moment la possibilité de déclarer une guerre des prix. De toute évidence, le licencié n'aurait pas intérêt, d'un point de vue commercial, à prendre ce risque et il alignerait sa stratégie de prix sur celle de la nouvelle entité ou - dans le cas où ladite entité décidait de faire porter tous ses efforts sur le segment de marque - adapterait son comportement de manière à fixer le prix de son produit sans marque (ou dont la marque est peu diffusée) à un niveau qui ne ferait pas une concurrence effective au produit de marque de la nouvelle entité.

(265) N'étant pas capable d'exploiter et de tester les développements technologiques pendant la période de production à façon, le licencié/contractant verrait en outre sa crédibilité technologique affaiblie auprès des clients qui souhaiteraient rester à la pointe de ces nouveaux développements. En outre, les clients ne pourraient pas être certains que le licencié s'engagerait à les approvisionner à long terme tant que celui-ci n'aurait pas commencé à construire sa propre usine. Sa crédibilité à long terme en matière d'offre serait en outre nécessairement limitée, même une fois que cette construction aurait commencé, tant que l'usine ne serait pas totalement opérationnelle et n'aurait pas démontré sa capacité à garantir des approvisionnements réguliers à long terme de la qualité requise.

(266) Le licencié/contractant ne pourrait donc pas exercer de pressions effectives sur la position concurrentielle de la nouvelle entité à court et moyen terme.

e) Techniques de production et de transformation du lyocell

(267) Les engagements proposés sont insuffisants en ce qui concerne les techniques de production et de transformation du lyocell. La nouvelle entité resterait le seul acteur au niveau mondial à pouvoir concéder des licences dans ce domaine, en ce qui concerne les techniques prêtes à l'emploi. Aucun autre producteur ne serait par conséquent capable de se lancer dans la production de lyocell sans conclure un contrat de concession de licence avec la nouvelle entité ou courir le risque d'un litige en matière de brevet. La concurrence sur le marché des techniques de production et de transformation du lyocell disparaîtrait donc pour autant qu'il s'agisse des techniques prêtes à l'emploi. Non seulement cette situation aurait pour effet de ralentir le développement technologique (195), mais elle aurait aussi pour conséquence un alignement probable du comportement de tout nouvel entrant sur le marché de la production de fibres de lyocell sur le comportement de la nouvelle entité, ce qui placerait en outre tout nouveau venu dans l'impossibilité de contester effectivement la position dominante de la nouvelle entité dans le secteur des fibres de lyocell.

f) Conclusion sur les engagements

(268) Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission est parvenue à la conclusion que les engagements proposés ne supprimeraient pas les problèmes de concurrence recensés dans sa communication des griefs et ne sauraient constituer une base pour une décision d'autorisation.

VII. Conclusion générale

(269) Pour l'ensemble des raisons exposées ci-dessus, la Commission a conclu que l'opération de concentration entraînerait la création d'une position dominante sur les marchés des fibres de viscose de qualité courante, des fibres de viscose teintées dans la masse, du lyocell et des techniques de production et de transformation du lyocell dans l'EEE, ainsi que le renforcement d'une position dominante sur le marché des fibres de viscose pour tampons dans l'EEE, ayant comme conséquence qu'une concurrence effective dans le Marché commun et le bon fonctionnement de l'accord EEE seraient entravés de manière significative,

A arrêté la présente décision :

Article premier

L'opération notifiée par laquelle Zellulosefaser Beteiligungs-Gesellschaft mbH acquerrait le contrôle exclusif de Lenzing AG au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement (CEE) n° 4064-89, est, par la présente, déclarée incompatible avec le Marché commun et le bon fonctionnement de l'accord EEE.

Article 2

Zellulosefaser Beteiligungs-Gesellschaft mbH Schillerstraße A-4020 Linz est destinataire de la présente décision.

(1) JO L 395 du 30.12.1989, p. 1. Rectificatif : JO L 257 du 21.9.1990, p. 13.

(2) JO L 180 du 9.7.1997, p. 1.

(3) JO C 69 du 19.3.2004.

(4) JO C 69 du 19.3.2004.

(*) Certaines parties du présent document ont été rédigées de façon à ce que d'éventuelles informations confidentielles ne soient pas divulguées; ces parties sont indiquées entre crochets et suivies d'un astérisque.

(5) Voir décisions de la Commission du 20 décembre 1999 dans l'affaire COMP-M.1755 - CVC-Acordis (JO C 30 du 2.2.2000, p. 7; vendeur : Akzo Nobel), du 30 juin 1998 dans l'affaire IV-M.1182 - Akzo Nobel/Courtaulds (JO C 265 du 22.8.1998, p. 28) et du 19 décembre 1991 dans l'affaire IV-M.113 - Courtaulds/Snia (JO C 333 du 24.12.1991, p. 16).

(6) Chiffre d'affaires calculé conformément à l'article 5, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations et à la communication de la Commission sur le calcul du chiffre d'affaires (JO C 66 du 2.3.1998, p. 25).

(7) Les principaux secteurs d'activité d'Acordis sont les suivants : fils textiles de viscose, fils industriels de viscose, fils textiles d'acétate, fils industriels de polyester et fils industriels de polyamide. Acordis opère également dans le secteur des fibres acryliques discontinues et des fibres de carbone industrielles. Ces produits ne soulevant pas de préoccupations sur le plan de la concurrence, ils ne seront pas pris en considération dans la présente décision.

(8) À titre d'illustration, voir la citation suivante d'un document interne des parties : [...]*.

(9) Voir décision de la Commission dans l'affaire IV-M.1182 - Akzo Nobel/Courtaulds (cité ci-dessus) et al.

(10) Voir décision 93-9-CEE de la Commission du 30 septembre 1992 dans l'affaire IV-M.214 - DuPont/ICI (JO L 7 du 13.1.1993, p. 13).

(11) Par exemple, sur les marchés des fils continus textiles : la viscose et l'acétate (décision de la Commission du 19 décembre 1991 dans l'affaire IV-M.113 - Courtaulds/Snia et décision de la Commission du 30 juin 1998 dans l'affaire IV-M.1182 - Akzo Nobel/Courtaulds), le polyester et le polyamide (décision de la Commission du 3 février 1994 dans l'affaire IV-M.399 - Rhône-Poulenc-Snia/Nordfaser, JO C 42 du 12.2.1994), le polyester et la viscose (décision de la Commission du 10 février 1995 dans l'affaire IV-M.533 - TWD/Akzo Nobel/Kuagtextil, JO C 46 du 23.2.1995, p. 5); sur les marchés des fibres pour tapis : les fibres polyamide (nylon) et polypropylène (décision de la Commission dans l'affaire IV-M.214 - DuPont/ICI, citée ci-dessus).

(12) JO C 94 du 30.3.1996; communication de la Commission relative à la prolongation de la durée de validité de l'encadrement des aides à l'industrie des fibres synthétiques (JO C 24 du 29.1.1999, p. 18).

(13) Au paragraphe 2.4. Cette observation figure aussi dans la lettre des parties (à la page 3), dans laquelle la partie notifiante souligne également un soi-disant "double comptage". La Commission maintient que l'évaluation de l'enquête qu'elle a réalisée n'est pas gonflée par un double comptage.

(14) Il convient de noter qu'une partie importante des coordonnées de clients fournies par les parties (dans leur réponse, elles affirment qu'il y en a plus de 300) n'a pas pu être utilisée pour l'enquête de la Commission, parce que ces coordonnées, notamment les numéros de télécopieur, étaient inexactes. Bien que la Commission ait attiré très tôt l'attention des parties sur ce problème, celles-ci n'ont pas fourni les coordonnées correctes.

(15) Paragraphes 2.2 (troisième point), 2.16 et suivants et 3.11.

(16) Note sans objet dans la version française.

(17) La question 8 du questionnaire phase II adressé aux clients est la suivante : "8. (1) En ce qui concerne la production de chacun de vos (groupes de) produits en fibres de viscose, au cas où le prix des fibres de viscose augmenterait de façon permanente de 5 % :

a) utiliseriez-vous à 100 % d'autres types de fibres à la place des fibres de viscose;

b) réduiriez-vous le pourcentage de fibres de viscose dans votre mélange;

c) cesseriez-vous de fabriquer ce produit, ou

d) ne changeriez-vous rien?

(2) Dans quelle mesure cela réduirait-il votre consommation de fibres de viscose?

(3) Au cas où vous n'utiliseriez pas d'autres types de fibres, au cas où vous ne réduiriez pas le pourcentage de fibres de viscose ou au cas où vous ne cesseriez pas de produire, quelles seraient les augmentations de prix que subiraient vos produits en fibres de viscose ? " La question 9 reprend la question 8, mais avec une augmentation de prix de 10 %. La question 10 reprend la question 8, mais à propos de produits ou groupes de produits en lyocell. La question 11 reprend la question 10, mais avec une augmentation de prix de 10 %. La question 15 est la suivante : "D'une manière générale et en cas d'une augmentation de prix permanente de 5 à 10 %, passeriez-vous (entièrement ou en partie) des fibres de viscose ou de lyocell à un autre type de fibres et dans quelle mesure ce passage à un autre type de fibres réduirait-il votre consommation de fibres de viscose ou de lyocell ? ".

(18) Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO C 372 du 9.12.1997, p. 5) (point 17).

(19) Voir note 17 de bas de page. Il convient de noter que la question 15 donnait même au destinataire du questionnaire des possibilités concrètes, par exemple "passer des fibres de viscose au lyocell" ou "du lyocell aux fibres de viscose".

(20) Questions 8(2), 9(2), 10(2) et 11(2) du questionnaire phase II (voir note 17 de bas de page).

(21) Paragraphes 2.2 (troisième point), 2.16 et suivants et 3.11.

(22) Voir décision de la Commission 93-9-CEE du 30 septembre 1992 dans l'affaire IV-M.214 - DuPont/ICI (JO L 7 du 13.1.1993, p. 13) (considérant 23); voir également la communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO C 372 du 9.12.1997, p. 5) (points 15 et 17).

(23) Cela est confirmé par la citation suivante extraite d'un document interne remis par CVC : [...]*.

(24) Cela est confirmé par la citation suivante extraite d'un document interne remis par CVC : [...]*.

(25) [...]*.

(26) Aux paragraphes 2.5 et suivants, notamment au paragraphe 2.7.

(27) Paragraphe 2.18 et annexes 6 et 7.

(28) L'évaluation de ces questionnaires est évoquée aux points 40 et 188, et ailleurs.

(29) Les exemples cités par les parties dans leur réponse (annexes 6 et 7) représentent moins de 10 % de leur clientèle totale.

(30) Informations communiquées aux parties le 11 septembre 2001 (voir point 10).

(31) Ce chiffre indique le volume des ventes qui seraient perdues, en raison d'un passage à d'autres fibres, par rapport au volume total des ventes aux clients ayant répondu à cette question. L'échantillon des clients qui ont répondu est très représentatif, dans la mesure où il représente nettement plus de 50 % des ventes totales des parties dans l'EEE. La Commission a également posé une question différente sur le passage à d'autres fibres au cours de la phase I de l'enquête qui, dans la mesure où elle comprend une estimation des réactions des clients en aval, sera examinée aux considérants 187 à 190, dans la section relative à l'appréciation des pressions concurrentielles. C'est dans cette section également que sera évoquée la question des réductions de volumes dues à un arrêt de la production.

(32) À l'heure actuelle, la viscose représente environ [< 5 %]* de la consommation mondiale totale de fibres discontinues (avec le lyocell : [1 500-1 700]* kilotonnes par an, [...]*, mais son importance relative est deux fois supérieure dans l'EEE [< 10 %]* où le coton est beaucoup moins utilisé que dans d'autres zones géographiques ([< 40 %]* dans l'EEE, [< 60 %]* dans le monde). Ces mêmes chiffres sont respectivement pour le polyester de [< 25 %]* dans l'EEE et [< 25 %]* dans le monde, et pour le polypropylène de [< 15 %]* dans l'EEE et [< 10 %]* dans le monde.

(33) Cette baisse est due en grande partie à une baisse de la consommation des fibres de viscose pour les applications textiles (qui est elle-même liée à la baisse générale de la production textile en Europe). En ce qui concerne l'évolution des pourcentages de la consommation pour les applications textiles et non tissées, voir considérants 145 à 148.

(34) Il convient par exemple de noter l'utilisation croissante des fibres de viscose pour les non tissés jetables (lingettes, gants chirurgicaux, compresses, pansements), où les fibres de viscose ont elles-mêmes remplacé les tissus en coton et les gazes (généralement non jetables).

(35) Voir note 25 de bas de page.

(36) Voir également les résultats de l'analyse de la corrélation entre les prix réalisée par la Commission (tableau 1/ considérants 72 à 74).

(37) Au paragraphe 2.27.

(38) On pourra trouver une preuve de l'évolution technologique dans le secteur des filatures sur les sites internet suivants des grandes sociétés de filature rotor :

1) http ://www.suessen.com/htmls/foemi.htm D'après le site de Suessen, la technologie de la filature rotor, qui repose sur les développements intervenus dans les années 60 et 70, a connu sa percée commerciale dans les années 80 et a été considérablement améliorée depuis lors, notamment grâce à une amélioration de la vitesse de filature de 50 % entre 1983 et 1995. Le site Suessen indique également que cette évolution n'est pas entièrement neutre en ce qui concerne les fibres, puisqu'il dit ceci : "Le polyester et d'autres fibres synthétiques tendent à présenter des défauts thermiques et mécaniques, notamment à des vitesses de production élevées". (http ://www.suessen.com/htmls/foepp5.htm).

2) http ://www.elitex-saurer.cz/indexger.htm Le site internet Elitex-Saurer contient également des données sur la spécificité de chaque fibre ou au moins sur le nombre réduit de fibres adaptées à une utilisation avec certains composants des machines de filature, notamment les rouleaux ouvreurs.

(39) Au paragraphe 2.27.

(40) [...]*. Toutefois, un des trois seuls clients cités pour confirmer cette hypothèse déclare explicitement ceci : "Tant que les travaux de développement n'auront pas abouti, il est impossible de répondre de façon détaillée à votre question 16" (dossier de la Commission, p. 3217. La question 16 à laquelle se réfère ce client est la suivante : "Si vous n'avez pas la possibilité de passer à d'autres types ou mélanges ou si ce passage n'est pas possible à un degré suffisant pour contrebalancer des augmentations du prix des fibres de viscose ou de lyocell, veuillez indiquer les raisons de l'impossibilité de passer à d'autres fibres ou de l'impossibilité de passer à d'autres fibres à un degré suffisant..."). Le passage d'un autre client au polyester n'a apparemment rien à voir avec ces développements potentiels, dans la mesure où il est intervenu précédemment. Le troisième client cité "prévoit deux possibilités différentes", l'une d'entre elles étant l'utilisation accrue de la pulpe de bois et l'autre l'utilisation accrue de polypropylène et de polyester pour remplacer "certaines quantités de viscose" (dossier de la Commission, p. 572). S'il n'est pas certain que ce client parle du même développement technologique que celui mentionné précédemment, il est en revanche clair qu'il parle d'un développement qui ne supplanterait pas entièrement les fibres de viscose. En outre, les références des parties doivent être complétées par les déclarations de la majorité des fabricants de lingettes qui, de toute évidence, ne s'attendent pas à ce que de tels changements interviennent à court ou à moyen terme. Des déclarations telles que celles qui suivent sont caractéristiques du fait que la grande majorité des fabricants de lingettes n'a pas connaissance d'une évolution technologique majeure susceptible de supplanter les fibres de viscose pour les lingettes dans un proche avenir : "L'absorption de l'humidité est l'une des plus importantes fonctions des produits de nettoyage ménagers. Or, cette fonction n'est possible qu'avec des fibres de viscose" (dossier de la Commission, p. 4768). "Nous ne pourrions pas passer à d'autres fibres en raison des exigences auxquelles doivent répondre nos produits et des rapports que celles-ci ont avec la viscose. Il n'existe aucune fibre commercialement viable susceptible de remplacer la viscose en fournissant les mêmes propriétés... Le fait d'augmenter la part des fibres synthétiques, telles que le polyester ou le polypropylène, modifierait les caractéristiques du tissu de façon inacceptable..." (Dossier de la Commission, p. 4332).

(41) Voir également D. Morris, Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques : Myths and Realities of Interfibre Competition, exposé présenté lors de la soixante-cinquième conférence internationale sur la laine, organisée par l'International Wool Textile Organisation, Le Cap, République d'Afrique du Sud, avril 1996 : "La consommation de fibres discontinues de viscose a augmenté vers la fin des années 80, à cause de la mode".

(42) Paragraphe 2.17.

(43) Paragraphe 2.17 de la réponse.

(44) Voir également D. Morris, Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques : Myths and Realities of Interfibre Competition, exposé présenté lors de la soixante-cinquième conférence internationale sur la laine, organisée par l'International Wool Textile Organisation, Le Cap, République d'Afrique du Sud, avril 1996 : "En effet, il semblerait que les modifications de l'utilisation finale, l'innovation et les préférences des consommateurs soient les principales raisons à l'origine des changements de fibres, et non les prix relatifs. (...) Toutefois, il serait exagéré de prétendre que la concurrence par les prix n'existe pas, mais elle n'intervient que lorsqu'il y a de très gros mouvements de prix et des modifications des prix relatifs de l'ordre de 20 %."

(45) Les fils continus de lyocell ne sont actuellement pas produits à l'échelle commerciale. Dans le présent document, le terme "lyocell" désignera donc exclusivement les fibres discontinues de lyocell, sauf dans l'expression "techniques de production du lyocell" (voir points 246 à 247) qui désigne les techniques de production tant des fibres discontinues que des fils continus de lyocell.

(46) Il convient toutefois de noter que ces mêmes caractéristiques rendent le lyocell adapté à la fabrication de certains produits non tissés, tels que les filtres et les lingettes. Pour ces applications tout comme dans le secteur textile, la résistance plus élevée à l'humidité et le rétrécissement plus faible du lyocell peut lui conférer des avantages spécifiques par rapport aux fibres de viscose.

(47) Cela est particulièrement vrai pour les applications textiles, qui représentent [...]* % des ventes de lyocell (source : [...]*).

(48) C'est-à-dire que de petites particules longitudinales, ou fibrilles, se détachent en partie du corps principal de la fibre.

(49) Aux paragraphes 3.12 et suivants; voir également annexes 5 et 9.

(50) Cela est confirmé par la déclaration suivante, extraite d'un document interne remis par CVC : [...]*.

(51) Aux paragraphes 3.2 et suivants.

(52) Aux paragraphes 3.3 et 3.4 de la réponse. Par exemple, en ce qui concerne les deux groupes "passeraient à 100 % à une autre fibre où cesseraient toute production" et "réduiraient les achats de lyocell de >5 %" figurant dans l'évaluation des parties, on peut faire les commentaires suivants :

- Le document figurant aux pages 3860/3875 du dossier de la Commission n'indique pas si ce client passerait à une autre fibre ou cesserait toute production.

- Au moins deux des trois documents (p. 2194/2997; 3163; 3224/3225) recensés dans ces deux groupes sont des réponses fournies par le même client au même questionnaire et ne devraient pas être comptabilisés deux ou trois fois.

- Les parties ont mal interprété la réponse figurant aux pages 3309/3314 : le client se réfère à différents groupes de produits, mais il ne passerait partiellement (pour 10 %) à une autre fibre que pour certains d'entre eux seulement. Le groupe de produits pour lequel il ne passerait notamment pas à une autre fibre est celui pour lequel il utilise du lyocell.

- Les parties considèrent de la même façon les passages à une autre fibre qui se font à partir d'une augmentation de prix de 5 % et ceux qui se font à partir d'une augmentation de 10 %, bien que plusieurs clients opèrent, dans leurs réponses (p. 630/638; 723/733; 758/768; 4788/4800), une distinction entre ces deux catégories hypothétiques d'augmentation de prix.

- Deux réponses sont interprétées comme représentant un passage à une autre fibre pour plus de 5 % des quantités commandées, bien que la réponse ne mentionne aucunement l'ampleur du passage (p. 676/684; 485/494).

- L'analyse des parties repose également sur une autre réponse qui ne constitue en fait qu'une réponse générale et ne précise pas quand ce client passerait à une autre fibre ni dans quelle mesure (p. 668/675).

(53) Les exemples cités par les parties dans leur réponse (annexes 6 et 7) représentent de toute évidence moins de 10 % de leur clientèle totale.

(54) Informations transmises aux parties le 11 septembre 2001 (voir point 10).

(55) Ce chiffre indique le volume de ventes perdu en raison du passage des clients à d'autres fibres par rapport au volume total des ventes aux clients ayant répondu à cette question. L'échantillon des clients ayant répondu est représentatif, puisqu'il représente environ 50 % des ventes totales des parties dans l'EEE. La Commission a également posé une question similaire lors de la phase I de l'enquête qui, dans la mesure où elle inclut explicitement une estimation des réactions des clients en aval, sera discutée dans l'appréciation des contraintes sur le plan de la concurrence aux points 239/242.

(56) On peut illustrer cela à l'aide d'une situation hypothétique après la concentration basée sur des chiffres de production pour l'année 2000. Si Acordis avait décidé de réduire la production de Mobile et de Grimsby de 15 % et de ne plus opérer qu'à partir d'une seule installation, les coûts de fabrication dans cette installation auraient considérablement baissé. Cette réduction moyenne des coûts de fabrication aurait alors été ajoutée à tout calcul mettant en balance les profits supplémentaires par tonne de produits vendues réalisés par Acordis à la suite d'une augmentation de prix de 10 % et ses pertes de profits consécutives à une réduction du volume des ventes de 15 %. Comme on peut supposer que les marges bénéficiaires d'Acordis auraient augmenté de bien plus de 10 % à la suite d'une augmentation de prix de 10 %, l'augmentation en question aurait donc été très profitable pour Acordis après la concentration, puisqu'à ce moment-là, elle ne devrait plus faire face à la concurrence effective de Lenzing. (Mis à part le fait de ne pas prendre Lenzing explicitement en considération, une autre hypothèse simplificatrice à cet égard serait de considérer que les frais de fermeture sont nuls.) On aura observé l'augmentation disproportionnée des marges bénéficiaires à la suite d'une augmentation des prix de vente nets de 10 %. Pour cela, il convient de considérer que la Commission n'est pas en mesure de donner une estimation précise des marges bénéficiaires réalisées par Acordis dans le secteur du lyocell en 2000, dans la mesure où les coûts de production fixes et les coûts de production variables indiqués par Acordis ne comprennent apparemment pas les coûts de marketing, de distribution ou de recherche et développement (R & D). Les marges entre les coûts moyens de fabrication et les prix de vente étaient d'environ [...]* % des prix de vente. Une augmentation des prix de 10 % aurait fait monter ces marges sur les coûts de fabrication de plus de [...]* % et les marges bénéficiaires fort probablement de beaucoup plus encore. (En fermant Heiligenkreuz, il serait également possible de parvenir à une maximisation des profits similaire grâce à une réduction des capacités par la fermeture d'installations et à un taux plus élevé d'utilisation des capacités dans les installations restantes.) Il convient de noter que l'exemple de la Commission n'a pas pour objet de fournir un calcul exact ni une projection particulière. Son but est simplement d'illustrer le fait que dans le secteur du lyocell, des pertes de ventes inférieures à 10 % n'empêcheraient pas nécessairement un monopoleur éventuel de maximiser ses profits. Selon la courbe de la demande, même des pertes encore plus importantes peuvent rester profitables pour un monopoleur éventuel.

(57) Toutefois, tant les concurrents que les clients supposent que ces coûts de production pourraient baisser sensiblement dès lors que les investissements considérables dans la recherche et le développement de cette technologie relativement nouvelle auront été amortis, dans la mesure où le processus de production du lyocell comprend un nombre d'étapes moindre que le processus de production de la viscose.

(58) Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO C 372 du 9.12.1997, p. 5) (point 39).

(59) Cette conclusion est conforme à la pratique de la Commission. Des corrélations supérieures à celles indiquées au tableau 1 ont été jugées insuffisantes dans des décisions antérieures, la Commission ayant considéré des corrélations supérieures à 0,80 comme étant élevées et des corrélations inférieures à 0,65 comme étant faibles. Voir par exemple la décision de la Commission du 19 juillet 2000 dans l'affaire COMP-M.1939 - Rexam (PLM)/American National Can (point 12).

(63) La Commission n'a pas été en mesure de calculer les élasticités-prix croisées pour le lyocell, en l'absence de données cohérentes.

(64) Aux paragraphes 2.2 (troisième point), 2.16 et suivants et 3.11.

(65) Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO C 372 du 9.12.1997, p. 5) (point 39).

(66) Cette conclusion est conforme à la décision de la Commission 2001-102-CE du 19 juillet 2000 concernant l'aide d'État de l'Autriche en faveur de Lenzing Lyocell GmbH & Co KG (JO L 38 du 8.2.2001, p. 33) (point 52). La Commission dispose de preuves montrant qu'à l'époque, Lenzing partageait et soutenait l'opinion de la Commission sur la séparation entre le marché du lyocell et celui des fibres de viscose.

(67) Il convient de noter à cet égard que les filatures de type coton ont besoin de longueurs de fibres courtes, alors que les filatures de type laine utilisent des fibres plus longues.

(68) Les fabricants de produits en rouleaux produisent des rouleaux de fibres traitées qui sont ensuite vendus pour être transformés en différents produits finis, par exemple des lingettes, des produits médicaux (compresses ou blouses de chirurgien) ou utilisés pour des applications techniques (filtres, sous-couches enduites pour chaussures et pour sacs à main ou produits pour l'industrie automobile, par exemple). Il existe certaines différences entre les fabricants de produits en rouleaux, selon la technologie de production utilisée et l'utilisation finale de leurs produits.

(69) Acordis, la société finlandaise Lenzing Säteri Oy, la société suédoise Svenska Rayon et la société espagnole Sniace.

(70) Toutefois, même si les marchés étaient définis de façon plus étroite, l'analyse de la concurrence effectuée par la Commission ne s'en trouverait pas sensiblement modifiée.

(71) Le montant jugé nécessaire est d'environ 1 million d'euros.

(72) Sur la base des prix de vente nets indiqués par Lenzing et Acordis pour l'année 2000. La Commission reconnaît ainsi que la valeur indiquée dans la communication des griefs [...]* % peut avoir été légèrement surestimée. [...]*. La Commission reconnaît également que ces chiffres ne tiennent pas compte des coûts additionnels liés aux colorants.

(73) Au point 2.29.

(74) La partie notifiante estime que les investissements nécessaires pour équiper une usine de fibres de viscose pour la production de fibres colorées dans la masse s'élèvent à environ [...]* euros, pour une capacité de 10 000 tonnes par an.

(75) À l'exception éventuellement des fibres de laine de coton (matelassage) (voir considérant 104) qui peuvent également être vendues directement aux fabricants de produits finis.

(76) Cela vaut même dans le cas où les sociétés produisent à la fois des tampons et d'autres produits en viscose tels que les produits d'hygiène personnelle ou les lingettes pour bébés. Dans ce cas, elles achètent des fibres de viscose pour tampons directement aux producteurs, alors que la matière première pour leurs autres produits leur est fournie par les fabricants de produits en rouleaux (voir considérant 82 et note 71 de bas de page).

(77) De même, un petit producteur européen de fibres de viscose pour tampons ne fait aucune distinction entre les fibres qu'il vend pour la production d'ouate et de tampons.

(78) Dans le cas de cette société, ce changement n'impliquerait une augmentation de la capacité de production de fibres de viscose pour tampons, et non une entrée sur le marché. Néanmoins, même la possibilité d'une telle modification de capacité de production n'a pas été confirmée par ce producteur.

(79) De même, la partie notifiante déclare que la production de fibres de viscose pour tampons exige le respect de certains critères de qualité et de pureté et que ces contrôles nécessitent des équipements spéciaux et des locaux de stockage propres, afin d'éviter toute contamination des fibres. Les producteurs devraient tenir compte du code de bonne pratique volontaire de l'EDANA (Association européenne des produits non tissés) - Réponse d'Acordis à la demande d'informations de la Commission du 15 mai 2001.

(80) Le matelassage pour produits non hygiéniques ne diffère pas sensiblement des autres produits non tissés (il y a une petite différence dans les additifs utilisés, mais le passage d'un produit à l'autre est facilement réalisable).

(81) Ses concurrents ayant fermé des installations de production, Lenzing est devenu le seul fabricant de ce produit dans le monde.

(82) Le câble n'est à proprement parler pas une fibre discontinue, dans la mesure où la fibre extrudée n'est pas coupée en fibres discontinues; toutefois, en raison de similitudes au cours des premières phases du processus de production, il est généralement considéré comme appartenant au même groupe de produits que les fibres de viscose.

(83) L'analyse de corrélation entre les prix peut surestimer l'étendue du marché en cause lorsqu'il y a corrélation fallacieuse. Il y a corrélation fallacieuse lorsque des coefficients de corrélation élevés (0,72 entre les fibres de viscose de qualité courante et les fibres de viscose teintées dans la masse) sont dus à des facteurs communs tels que des coûts ou des tendances communs, plutôt qu'à une interaction concurrentielle entre les deux produits.

Tendances communes. À cet effet, la Commission a réalisé un test de co-intégration. D'une manière générale, un test de co-intégration repose sur l'hypothèse que deux séries de données ne devraient pas diverger à long terme si les produits concernés appartiennent au même marché. Dans ce cas, ces séries sont appelées stationnaires en jargon économétrique. En revanche, si les fibres de viscose de qualité courante et les fibres de viscose teintées dans la masse appartiennent à deux marchés différents, le prix relatif entre les deux séries chronologiques sera obligatoirement non stationnaire, c'est-à-dire que tout degré élevé de corrélation entre les deux séries chronologiques sera dû à une tendance commune. Or, dans la présente affaire, les résultats des tests statistiques (voir explications relatives au test de racine unité ci-dessous) sont toujours restés inférieurs aux valeurs critiques. Il est donc justifié de conclure que les fibres de viscose de qualité courante et les fibres de viscose teintées dans la masse n'appartiennent pas au même marché.

Test de racine unité. La Commission a utilisé un test ADF et examiné l'hypothèse nulle selon laquelle les prix relatifs entre les fibres de viscose de qualité courante et les fibres de viscose teintées dans la masse sont non stationnaires. Si le résultat du test est inférieur à la valeur critique, il ne rejette pas l'hypothèse nulle, ce qui veut dire que les prix relatifs ne reviennent pas à un quelconque équilibre à long terme et que les deux produits n'appartiennent pas au même marché en cause.

(84) Des corrélations supérieures à celles indiquées au tableau 1 ont été jugées insuffisantes dans des décisions antérieures, la Commission ayant considéré comme élevées des corrélations supérieures à 0,80 et comme faibles des corrélations inférieures à 0,65. Voir par exemple la décision de la Commission du 19 juillet 2000 dans l'affaire COMP-M.1939 - Rexam (PLM)/American National Can (point 12).

(85) Des tests de co-intégration ont été réalisés par la Commission à cet effet (voir note 83 de bas de page). Ces tests révèlent que le niveau de corrélation élevé entre les deux produits est dû à une tendance commune et non à une interaction concurrentielle entre les fibres de viscose de qualité courante et le polyester.

(86) Aux paragraphes 2.2 (troisième point), 2.16 et suivants et 3.11.

(87) Voir paragraphe 2.19 de la réponse.

(88) Voir paragraphe 2.16 de la réponse, qui se réfère à l'annexe 4 ("document NERA", notamment le paragraphe 3.1).

(89) Voir paragraphe 2.16 de la réponse, qui se réfère à l'annexe 4 ("document NERA", notamment le paragraphe 3.2).

(90) Voir paragraphe 2.16 de la réponse, qui se réfère à l'annexe 4 ("document NERA", notamment le paragraphe 3.4).

(91) Voir note 83 de bas de page.

(92) Voir point 76 de bas de page.

(93) Il convient également de noter que les trois marchés de produits du secteur des fibres de viscose dont les corrélations avec d'autres fibres (et entre eux) sont analysés ne sont pas les seuls sous-segments du marché des fibres de viscose (voir considérants 104 et 105) et que l'on peut supposer que les prix de ces autres produits ont un certain impact sur les séries de prix agrégées indiquées pour les fibres de viscose.

(94) Pour de plus amples détails, voir considérant 70.

(95) [...]*.

(96) Au paragraphe 4.2.

(97) Voir décision de la Commission 94-811-CE du 8 juin 1994 dans l'affaire IV-M.269 - Shell/Montecatini (JO L 332 du 22.12.1994, p. 48) (point 44); décision de la Commission du 13 mars 1995 dans l'affaire IV-M.550 - Union Carbide/Enichem (JO C 123 du 19.5.1995, p. 3) (point 36); décision de la Commission du 23 octobre 1997 dans l'affaire IV-M-1007 - Shell/Montell (JO C 40 du 7.2.1998, p. 10) (point 7); décision de la Commission du 29 mars 2000 dans l'affaire COMP-M.1751 - Shell/BASF/JV-Projet Nicole (point 15).

(98) Au paragraphe 4.2, troisième point.

(99) [Références à la réponse et à des documents internes]*.

(100) Voir la réponse des parties, paragraphe 4.2, deuxième point.

(101) [Référence à un document interne]*.

(102) Au paragraphe 4.2, deuxième et troisième points.

(103) Cela a été confirmé par les parties dans leur réponse, au paragraphe 4.2.

(104) Le projet de notification (p. 44) du 20 mars 2001 propose les chiffres suivants pour 1995-2000 : [tous < 10 %]*.

(105) [Référence à un document interne]*.

(106) Aux paragraphes 2.21 et suivants.

(107) [Référence à un document interne]*.

(108) Affaire 85-76 - Hoffmann-La Roche, Rec. 1979, p. 461, points 38 et 39 des motifs; voir également Tribunal de première instance, affaire T-102-96 - Gencor. Rec. 1999, p. 753, point 200 des motifs.

(109) Affaire 85-76 - Hoffmann-La Roche, (citée ci-dessus), point 39 des motifs; voir également affaire T-102-96 - Gencor, (citée ci-dessus), points 201 et 202 des motifs.

(110) [Référence à un document interne]*.

(111) Voir également la propre position de la partie notifiante, telle qu'elle est exprimée dans la notification (p. 60) : "Les seules entreprises susceptibles de construire de nouvelles installations de fibres de viscose sont situées en Chine et en Extrême-Orient."

(112) On entend par "dégoulottage" le fait de ne remplacer que les parties des chaînes de production existantes qui empêchent l'augmentation de la production.

(113) [...]*.

(114) [...]*.

(115) [Référence à un document interne]*. La tendance à la baisse des textiles en fibres de viscose pendant cette période explique, entre autres, la longueur des ralentissements conjoncturels.

(116) [Référence à un document interne]*.

(117) Les fibres de viscose sont souvent utilisées comme support de revêtements en similicuir.

(118) Destinées à une large gamme de produits comprenant les feuilles cliniques et champs opératoires, les tampons, les pansements, les compresses, les masques faciaux, les alèses, les enveloppes de protection, les blouses/chemises d'hôpital, les bonnets, les tabliers, les bavettes, les couvre chaussures et autres vêtements médicaux/chirurgicaux.

(119) Produits d'hygiène personnelle, comme les lingettes pour bébés et les lingettes à usage domestique et industriel.

(120) Cela est confirmé par un document stratégique interne préparé pour CVC : [...]*.

(121) Voir, par exemple, le passage suivant tiré d'un document stratégique interne préparé pour CVC : [...]*.

(122) Estimations de la partie notifiante. Un concurrent estime qu'en 2000, les importations ont été légèrement inférieures à 17 kilotonnes. Comme indiqué ci-dessus, le projet de notification (p. 44), daté du 20 mars 2001, faisait état des pourcentages d'importations suivants pour la période 1995/2000 : [tous < 10 %]*.

(123) [Référence à un document interne]*.

(124) CIRFS : Information sur les fibres synthétiques et cellulosiques, trente-septième année, édition 2000 (ci-après dénommé "annuaire 2000 du CIRFS"), p. 118. Il convient de noter que l'annuaire 2000 du CIRFS contient des chiffres concernant toutes les fibres et câbles cellulosiques, y compris donc le lyocell.

(125) En Asie, le taux d'utilisation de la capacité, comme indiqué dans la notification (p. 53), a atteint [...]* % en 2000. Contrairement à l'opinion de la partie notifiante, la Commission ne considère pas ce chiffre comme une indication de l'existence d'importantes capacités de réserve.

(126) Annuaire 2000 du CIRFS, p. 118 et suivantes.

(127) Au paragraphe 2.21.

(128) La Commission estime que la quantité indiquée dans la réponse des parties en ce qui concerne les importations des États-Unis est néanmoins sous-estimée. Elle ne correspond pas aux informations précédentes communiquées par les parties sur les chiffres des exportations de leurs usines américaines vers l'Europe occidentale (réponse à la demande d'informations de la Commission du 7 juin 2001).

(129) En ce qui concerne la remarque formulée par les parties dans leur réponse (au paragraphe 2.25) et par Bank Austria dans sa réponse à la communication des griefs sur la hausse des importations en Turquie en 2000 provenant du groupe indien Birla Grasim, voir les remarques de la Commission sur les stratégies de représailles de Birla et de Lenzing au considérant 175.

(130) [Référence à une information confidentielle et à des documents internes]*.

(131) Des concurrents ont fait état de taux compris entre 74 % et 88 %, les données du CIRFS communiquées avec la notification indiquent une moyenne de [>80 %]* dans le secteur.

(132) Les préoccupations liées à la protection de l'environnement ne sont toutefois pas limitées à l'Europe. En mai 2000, PT Inti Indorayon, la société mère indonésienne de l'entreprise finlandaise Säteri Oy, a dû fermer une usine (de construction récente) en Indonésie sur ordre du Gouvernement, en raison de problèmes écologiques non résolus. L'usine en question est toujours fermée.

(133) En 2000, les prix de la pâte ont représenté entre [...]* % du coût de production total d'Acordis dans ses usines européennes.

(134) [...]* % d'après Acordis.

(135) [...]* % d'après Acordis.

(136) [...]* % d'après Acordis.

(137) L'estimation se fonde sur des données relatives à leur propre production et à leurs propres ventes transmises par les parties et les concurrents. Afin de préserver une confidentialité mutuelle, également entre les parties à l'opération de concentration elles-mêmes, le pourcentage exact qui en découle n'est pas divulgué.

(138) Cela est vrai même si Säteri détient une part de marché plus importante qu'Acordis sur le marché des fibres de viscose de qualité courante, car les clients ont souligné que Lenzing et Acordis offraient les normes de qualité les plus élevées et étaient pareillement présentes dans tous les segments du marché des fibres de viscose de qualité courante (voir considérant 171).

(139) [Référence à un document interne]*.

(140) Le même effet peut être obtenu à court terme en limitant la production sans opérer de restriction de capacité. Toutefois, en raison de la persistance des coûts fixes, il pourrait s'avérer impossible de maintenir cette ligne de conduite à moyen et long terme.

(141) Ceci pourrait s'expliquer par le caractère cyclique de la consommation de fibres de viscose pour applications textiles, qui a atteint un niveau record en 2000 (voir considérants 144 et 146).

(142) [Référence à un document interne]*.

(143) Ceci est confirmé pour 2000 par un document stratégique interne préparé à l'intention de CVC : [...]*

(144) La situation de l'offre aux États-Unis est la suivante : le taux d'utilisation des capacités dans les usines américaines tant d'Acordis que de Lenzing était très faible ([...]* % globalement en 1999).[...]*. La nouvelle entité envisagerait d'augmenter la capacité à Lowland, Tennessee, de [...]* % (de quelque [...]* kilotonnes à [...]* kilotonnes). Par conséquent, l'usine de Lenzing à Lowland serait en mesure de satisfaire la totalité de la demande américaine en 2002, moyennant simplement une légère augmentation des importations. Ainsi, malgré la fermeture récente de l'usine d'Acordis à Mobile, en Alabama, la capacité d'appoint de l'usine américaine de Lenzing serait néanmoins à nouveau disponible à partir de 2003, en cas de diminution supplémentaire de la consommation dans ce pays, ou d'augmentation des importations vers les États-Unis [...]*.

(145) Aux paragraphes 2.31 et suivants.

(146) Voir note 144 de bas de page.

(147) Par exemple, les filateurs utilisant la technique à fibres libérées ont indiqué qu'ils avaient besoin d'une qualité de fibre à forte ténacité, que tous les producteurs présents sur le marché ne peuvent offrir.

(148) [Référence à un document interne]*.

(149) Ceci est confirmé par un document stratégique interne préparé pour CVC : [...]*.

(150) Voir décision de la Commission du 19 décembre 1991 dans l'affaire IV-M.113 - Courtaulds/Snia (cité ci-dessus, considérants 14 et 26).

(151) D. Morris, Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques : Myths and Realities of Interfibre Competition, exposé présenté lors de la 65e conférence internationale sur la laine, organisée par l'International Wool Textile Organisation, Le Cap, République d'Afrique du Sud, avril 1996 : En ce qui concerne les éléments déterminants pour la concurrence interfibres, ce document indique : "Il apparaît en réalité que ce sont les changements dans les utilisations finales, l'innovation au niveau des produits et les préférences des consommateurs qui expliquent pour l'essentiel le remplacement de certaines fibres par d'autres et non les écarts relatifs entre les prix."

(152) [...]*.

(153) Notons que Lenzing est actuellement l'entreprise qui consacre le plus d'argent à la recherche et développement (R & D) dans le domaine des fibres de viscose [...]*.

(154) Pour les raisons précisées dans le présent point et au point 171, la puissance concurrentielle de l'entité combinée ne serait pas amoindrie si la définition des marchés de produits était plus étroite que les fibres de viscose de qualité courante.

(155) Voir également la décision 93-9-CEE dans l'affaire IV-M.214 - DuPont/ICI, citée ci-dessus, aux points 45 et suivants.

(156) La partie notifiante annonce qu'elle a enregistré en 2000 un excédent commercial net de 5 % en ce qui concerne la viscose pure ou le tissu mixte.

(157) L'annuaire du CIRFS confirme ces chiffres : il fait état d'un excédent commercial de [< 20]* kilotonnes en 1999 pour les fibres et les câbles de viscose, cependant que la même balance commerciale enregistre un déficit de [600-700]* kilotonnes si l'on considère la totalité des fibres artificielles.

(158) Un document du CIRFS indique même que la croissance de la demande globale de produits textiles dans l'EEE pourrait compenser l'effet négatif produit par la hausse des importations nettes de textiles et de vêtements sur la consommation industrielle de fibres au sein de l'EEE. (D. Morris, Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques : Myths and Realities of Interfibre Competition, avril 1996, tableau 4).

(159) En 1999, pas moins de 33,8 % des produits non tissés produits dans le monde étaient fabriqués en Europe occidentale, tandis que moins de 30 % seulement provenaient de régions autres que les États-Unis (où Lenzing est à présent le seul producteur de fibres de viscose) et l'Europe occidentale. (source : EDANA, http ://www.vliesstoffe.org/ nonwovens/statistics.html)

(160) Au paragraphe 2.23.

(161) Dans une certaine mesure, le départ de ces industries affecterait aussi des régions telles que l'Europe de l'Est, la Turquie et d'autres pays méditerranéens extérieurs à l'EEE, dont Acordis et Lenzing sont les principaux fournisseurs de fibres de viscose de qualité courante par l'intermédiaire des exportations en provenance de leurs usines situées dans l'EEE.

(162) Au paragraphe 2.13.

(163) 6,6 % en cas d'augmentation de prix de 5 %, 12,7 % en cas de hausse de 10 %. Il faut observer que le taux de réponse à ce questionnaire a été particulièrement élevé et que les clients qui y ont répondu représentaient plus des deux tiers du volume des ventes des parties dans l'EEE.

(164) Même si la question n'a pas été posée explicitement, les clients qui ont estimé qu'ils suspendraient seulement partiellement leur production n'ont pas hésité à l'indiquer et ont été considérés comme des clients qui réduisent leur volume d'achat.

(165) On ne peut, en tout état de cause, considérer que des clients indiquant que leur comportement hypothétique "dépend des conditions du marché" exercent des pressions concurrentielles. Leur réaction est fondée sur des conditions indéterminées qui pourraient tout aussi bien entraîner la réduction du volume des ventes que le maintien du volume actuel.

(166) Voir D. Morris, Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques : Myths and Realities of Interfibre Competition, exposé présenté lors de la soixante-cinquième conférence internationale sur la laine, organisée par l'International Wool Textile Organisation, Le Cap, République d'Afrique du Sud, avril 1996 : "Le prix, contrairement à une opinion souvent entendue, ne constitue pas un élément de poids dans la concurrence interfibres, en raison de la longueur de la filière textile, de la nature conservatrice du secteur textile et des prix de la matière première qui entrent comme composante dans le coût final du produit (...). (On) peut citer l'exemple bien connu d'une paire de collants. Le coût du fil de polyamide partiellement étiré utilisé dans les collants représente moins de 2 % du prix de vente au détail. Autre exemple, le coût de la fibre contenue dans une chemise en coton vendue au détail est d'environ 3 %".

(167) Voir D. Morris, Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques : Myths and Realities of Interfibre Competition, exposé présenté lors de la soixante-cinquième conférence internationale sur la laine, organisée par l'International Wool Textile Organisation, Le Cap, République d'Afrique du Sud, avril 1996 : "(...) Toutefois, il serait exagéré de prétendre que la concurrence par les prix n'existe pas, mais elle n'intervient que lorsqu'il y a de très gros mouvements de prix et des modifications des prix relatifs de l'ordre de 20 %."

(168) Ceci est confirmé par un document interne préparé pour CVC. [...]*.

(169) [Référence à un document interne]*.

(170) Au paragraphe 2.30.

(171) Les conseillers juridiques du groupe Birla Grasim ont fait des observations sur ce point dans une lettre datée du 10 septembre 2001 (pages 7232/7234 du dossier de la Commission), dont une copie à été mise à la disposition de la partie notifiante. Cette lettre reprend une déclaration faite précédemment au nom du groupe Birla Grasim (pages 4862 et 4863 du dossier de la Commission).

(172) En ce qui concerne cette distinction, voir considérant 42.

(173) Svenska Rayon produit aussi des câbles en viscose (voir point 105).

(174) [Référence à un document interne]*.

(175) Aux paragraphes 2.8. et suivants.

(176) Pages 3089 à 3098, identiques aux pages 4124 à 4134 du dossier de la Commission.

(177) Notons la taille comparativement limitée du marché des fibres de viscose destinées aux tampons, précisée au considérant 208. Notons également que le seul autre producteur européen de fibres de viscose est considéré comme trop petit pour être un concurrent pleinement viable.

(178) Aux paragraphes 3.18. et suivants.

(179) Voir la déclaration de Birla à la page 2077 du dossier de la Commission.

(180) Le renvoi à de simples annonces sur des sites internet signalées à l'attention de la Commission ne saurait remplacer ou compenser suffisamment cette insuffisance de renseignements factuels.

(181) [Référence à un document stratégique interne]*.

(182) [Référence à un document stratégique interne]*.

(183) Aux paragraphes 3.1, 3.7 et suivants, 3.16 et 3.17.

(184) Aux paragraphes 3.7 et suivants.

(185) En ce qui concerne uniquement le passage des clients à d'autres fibres, voir points 67 et 68.

(186) Au paragraphe 3.16.

(187) Voir la réponse des parties aux paragraphes 3.18 et suivants.

(188) [Référence à des documents internes]*.

(189) 3,9 % en cas d'augmentation de prix de 5 %, 5,3 % en cas de hausse de 10 %.

(190) Aux paragraphes 4.1. et suivants.

(191) Galaxy, la meilleure qualité de fibres de viscose pour tampons, est protégée par des brevets dans quelques juridictions clé (notamment au Royaume-Uni et aux États-Unis).

(192) Accord de libre-échange nord-américain.

(193) En fait, il n'existe que deux sociétés pouvant être considérées comme des acheteurs potentiels de ces licences. L'entreprise suédoise Svenska Rayon doit être tenue pour trop petite, même avec une licence d'exploitation de Galaxy, pour faire peser sur l'entreprise en position dominante des pressions concurrentielles de même intensité que celles exercées actuellement par Lenzing et Svenska Rayon ensemble. L'autre acquéreur potentiel, l'entreprise finlandaise Säteri Oy, serait désavantagé, car elle devrait entrer sur ce marché où elle n'était pas présente auparavant.

(194) Ceci est vrai indépendamment de la technique d'extrusion (sur laquelle portent les brevets concernant Galaxy) utilisée, étant donné que le processus de qualification porte sur l'ensemble du procédé de fabrication, notamment au niveau des conditions d'hygiène.

(195) Ce ralentissement du développement technologique se produirait sous l'effet de deux facteurs : premièrement, le problème du "profiteur", auquel la nouvelle entité pourrait se trouver confrontée du fait du licencié, diminuerait l'incitation immédiate de cette dernière à investir dans les développements technologiques et, partant, à réduire les barrières à l'entrée. Alors que ce problème de "profiteur" existe également en ce qui concerne la situation concurrentielle actuelle entre Acordis et Lenzing, il est compensé efficacement par la rivalité technologique entre les deux entreprises, qui les incitent à innover. Après l'opération de concentration, cette incitation à innover se trouverait dès lors affaiblie.