CA Pau, 1re ch. corr., 9 juin 1999, n° 99-00210
PAU
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lacroix
Conseillers :
M. Faissolle, Mme Del Arco
Avocat :
Me Blanco.
Rappel de la procédure :
Le jugement :
Le Tribunal correctionnel de Pau, par jugement contradictoire en date du 14 janvier 1999, a :
- déclaré M Christian Claude Fernand coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, le 13 janvier 1998, à Jurançon,
Infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation
et, en application de ces articles,
- l'a condamné à 4 000 F d'amende.
Les appels :
Appel a été interjeté par :
M Christian Claude Fernand, le 21 janvier 1999
M. le Procureur de la République, le 21 janvier 1999
M Christian, prévenu, fut assigné à la requête de Monsieur le Procureur général, par acte en date du 9 avril 1999, d'avoir à comparaître devant la cour à l'audience publique du 12 mai 1999 ;
La Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes fut avisée à la requête de Monsieur le Procureur général, par courrier en date du 2 avril 1999, d'avoir à comparaître devant la cour à l'audience publique du 12 mai 1999.
Décision :
Vu les appels réguliers interjetés par :
- M Christian Claude Fernand, le 21 janvier 1999
- M. le Procureur de la République, le 21 janvier 1999
d'un jugement contradictoirement rendu par le Tribunal correctionnel de Pau le 14 janvier 1999.
Il est fait grief au prévenu - Christian M - d'avoir à Jurançon, le 13 janvier 1998 :
- commis une tromperie sur la nature, l'espèce et l'origine des denrées, en proposant à la carte des menus un mets " aux truffes fraîches " sans aucune autre précision,
Infraction prévue et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation
Les faits
Le 13 janvier 1998, un inspecteur et un contrôleur de la DGCCRF se présentaient au Restaurant "X" à Jurançon et examinaient les menus présentés à la clientèle.
Au menu à thème "l'hiver" proposé à 368 F, figuraient des "raviolines de foie frais de canard aux truffes fraîches".
Le responsable de l'établissement, Monsieur M, présentait aux fonctionnaires la facture afférente aux truffes fraîches utilisées dans la préparation du plat. Ces derniers constataient qu'il s'agissait de "truffes fraîches de Chine" (Tuber Indicum) achetées au prix HT de 430 F le kilo.
Or, à la même époque, la "truffe noire du Périgord" (Tuber Mélanosporum) se négociait sur les marchés locaux à 1 880 F HT le kilo.
Les prétentions des parties
Le prévenu soulève tout d'abord, in limine litis, l'absence de validité de la saisie des documents par les représentants des services de la Répression des Fraudes en se prévalant des dispositions des articles L. 215-5 et L. 215-6 du Code de la consommation.
Il demande, par suite, à la cour d'annuler la saisie des documents du 13 janvier 1998, le procès-verbal d'infraction clôturé le 10 mars 1998 et la procédure subséquente.
Subsidiairement, sur le fond, il conclut à sa relaxe par application de l'article 2 de la directive communautaire n° 84-450 du 10 septembre 1984, de l'article 121-1 du Code de la consommation et des articles 111-4 et 121-3 du nouveau Code pénal.
Le Ministère public requiert la confirmation de la décision entreprise.
Sur quoi
- Sur la nullité soulevée :
Attendu que le prévenu doit être débouté de son exception de nullité, les agents du service de la Répression des Fraudes ayant procédé aux saisies critiquées, en vertu de l'article L. 215-3 du Code de la consommation qui les autorise à de telles mesures dans le cadre de la recherche et de la constatation des infractions (Section II) et non dans celui des mesures d'urgence faisant l'objet d'une section III, distincte, au sein de laquelle figurent les articles 215-5 et 215-6 invoqués à tort ;
Au fond :
Attendu qu'il y a lieu d'admettre que le prévenu a trompé sa clientèle, à tout le moins potentielle, en ne mentionnant pas sur le menu sus-mentionné la "qualité" de la truffe fraîche proposée qui était une "truffe de Chine" alors qu'il existe une différence essentielle entre ce type de truffe et celle dite "du Périgord" tant sur le plan gustatif qu'olfactif que sur celui de la valeur marchande et alors que le consommateur moyen peut normalement croire qu'il va déguster, dans un établissement gastronomique, un plat comportant de la truffe du Périgord, qui est la plus connue et la plus recherchée,
Que, plus précisément, le restaurateur, dès lors qu'il avait mis en œuvre la variété de truffe la moins noble et indépendamment de toute notion de provenance géographique, se devait de présenter le produit sous sa dénomination exacte pour permettre une information correcte et objective de la clientèle, ce qui ne l'obligeait pas, pour autant, à transformer son menu en fiche technique,
Que, manifestement, ce défaut de précision ne peut s'analyser, en l'occurrence, que comme une présentation de nature à induire en erreur ;
Attendu, par ailleurs, que l'élément intentionnel du délit découle de ce que le prévenu, en tant que responsable d'un restaurant gastronomique, avait une parfaite connaissance de la valeur du produit mis en œuvre très différent de la Tuber Mélanosporum qui, dans l'esprit du consommateur, est associée au terme générique de truffe ;
Attendu, on conséquence, qu'il convient de retenir Monsieur M Christian dans les liens de la prévention,la peine de 4 000 F d'amende telle que prononcée par le premier juge étant maintenue comme étant adaptée aux faits de la cause et à la personnalité de Monsieur Christian M, délinquant primaire ;
Attendu, en outre, qu'il y a lieu d'exclure la mention de la condamnation prononcée du Bulletin n° 2 du casier judiciaire de Christian M ;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement Reçoit les appels comme réguliers on la forme. Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris. Exclut du Bulletin n° 2 du casier judiciaire de Christian M la mention de la condamnation prononcée par le jugement du Tribunal correctionnel de Pau du 14 janvier 1999, confirmée par le présent arrêt. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable le condamné Fixe la contrainte par corps conformément à la loi. Le tout par application du titre XI de la loi du 4 janvier 1993, les articles 749 et suivants, 775-1 du Code de procédure pénale, L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation.