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Décisions

CA Paris, 13e ch. A, 22 juin 1999, n° 97-07056

PARIS

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guilbaud

Avocat général :

M. Blanc

Conseillers :

MM. Seltensperger, Buisson

Avocat :

Me Perrin.

TGI Créteil, 17e ch., du 16 janv. 1997

16 janvier 1997

Rappel de la procédure:

X Françoise est poursuivie pour avoir à Fontenay-sous-Bois (94) courant 1992-1993, effectué une publicité mensongère annonçant à M. Nicolas Henry qu'il avait gagné un prix au "tirage audio vidéo" mettant au regard de son nom un téléviseur Sony d'une valeur de 4 490 F alors que la liste était établie par ordre de valeurs de prix, sans corrélation avec les noms des gagnants en regard.

Le jugement:

Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré X Françoise

Coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, faits commis courant 1992 et 1993, à Fontenay-sous-Bois (94), infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-3 du Code de la consommation

Et, en application de ces articles,

L'a condamnée à 15 000 F d'amende

A ordonné la publication du jugement dans la revue 50 millions de consommateurs et Que choisir à concurrence de 10 000 F pour les deux insertions

A dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable la condamnée.

Les appels:

Appel a été interjeté par:

- Madame X Françoise, le 21 janvier 1997

- Monsieur le Procureur de la République, le 21 janvier contre Madame X Françoise

Opposition à arrêt par défaut:

Par arrêt rendu par défaut le 23 juin 1998, cette chambre de la cour a confirmé le jugement déféré dans toutes ses dispositions

A dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable la condamnée.

Madame X a formé opposition le 6 janvier 1999.

Décision:

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur l'opposition formée par Françoise X à l'exécution de l'arrêt de cette chambre de la cour du 23 juin 1998;

Ce recours étant régulier, il y a lieu de mettre à néant ledit arrêt et de statuer à nouveau sur les appels relevés par la prévenue et le Ministère public à l'encontre du jugement précité auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits et de la prévention;

Par voie de conclusions, Madame Françoise X soulève l'exception "non bis in idem";

Elle soutient que pour le même message publicitaire faisant aujourd'hui l'objet de la citation, elle a été poursuivie pour les mêmes faits devant le TGI de Grenoble et celui de Grasse qui ont prononcé sa relaxe et que ces décisions ont été confirmées par les Cours d'appel de Grenoble et d'Aix-en-Provence;

Par voie de conclusions au fond, Françoise X demande, subsidiairement, à la cour de la relaxer des fins de la poursuite;

Elle fait valoir qu'il est clairement indiqué que:

- la liste des gagnants et la liste des prix correspondent à un ordre aléatoire,

- il n'existe aucune corrélation entre la liste des gagnants et la liste des prix,

- le règlement fixe expressément les conditions de jeu auxquelles les plaignants ont adhéré et dont ils ne veulent plus respecter les règles.

Elle fait observer que la jurisprudence a, à de nombreuses reprises, souligné qu'il convenait de ne pas sous-estimer l'intelligence et la perspicacité du consommateur moyen, parfaitement familiarisé avec ce type de promotion publicitaire;

Monsieur l'Avocat général fait observer pour sa part que l'exception "non bis in idem" devrait pouvoir s'appliquer en l'espèce. Subsidiairement au fond, il souligne qu'il y a bien eu publicité trompeuse et il s'en remet à l'appréciation de la cour sur le montant de l'amende, qui ne devrait pas toutefois être inférieure à 6 000 F et sur la mesure de publication de la décision;

Sur l'exception "non bis in idem"

Considérant que vainement Françoise X soulève l'exception "non bis in idem;

Considérant en effet que les faits visés à la prévention portent sur une publicité spécifique annonçant mensongèrement à M. Nicolas Henry qu'il avait gagné un téléviseur Sony;

Que cette publicité illicite, clairement individualisée à l'égard de M. Nicolas Henry, non seulement par l'exposé de son nom, de son adresse mais également d'un numéro de participation n'a été jugée ni par la Cour d'appel de Grenoble ni par celle d'Aix-en-Provence, qui se sont prononcées sur des faits similaires, mais non identiques, étant observé qu'en l'espèce, l'effet d'accroche recherché par l'individualisation de l'annonce (grâce à votre numéro personnel) est particulièrement déterminant;

Que la cour dès lors rejettera l'exception soulevée et statuera sur le fond;

Sur le fond:

Considérant que la cour ne saurait suivre Françoise X en ses explications;

Considérant en effet que c'est par des motifs pertinents que la cour fait siens et par une juste appréciation des faits et circonstances particulières de la cause exactement rapportée dans la décision attaquée, que les premiers juges ont, à bon droit, retenu Françoise X dans les liens de la prévention;

Que la cour observe pour sa part que malgré les arguties de Françoise X, il apparaît clairement que tout était calculé dans la publicité litigieuse pour donner l'illusion à M. Nicolas qu'il avait gagné un prix important (une télévision couleur) alors qu'en réalité, il ne lui était octroyé qu'un "compact disc" sans réelle valeur;

Considérant que la cour confirmera le jugement critiqué sur la déclaration de culpabilité ainsi que sur la peine d'amende prononcée qui constitue une juste application de la loi pénale;

Que la cour par ailleurs ordonnera la publication par extrait de l'arrêt à intervenir, aux frais de la condamnée, dans les revues 50 millions de consommateurs et Que choisir ?;

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges qu'elle adopte expressément, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit Françoise X en son opposition, Met à néant l'arrêt du 23 juin 1998, Statuant à nouveau, Rejette l'exception "non bis in idem" soulevée par Françoise X, Confirme le jugement critiqué sur la déclaration de culpabilité et sur la peine d'amende prononcée, Le modifiant pour le surplus, Ordonne la publication par extraits du présent arrêt, aux frais de la condamnée, dans les revues "50 millions de consommateurs" et "Que choisir ?", Rejette toutes conclusions plus amples ou contraires, Dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable la condamnée.