CA Paris, 5e ch. B, 19 juin 2003, n° 2000-03043
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Ital Auto (SA), Golivet, Philippe Golivet (SARL), Frontil (ès qual.)
Défendeur :
Fiat Auto France (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Main
Conseillers :
MM. Faucher, Remenieras
Avoués :
SCP Fisselier-Chiloux-Boulay, SCP Bernabe-Chardin-Cheviller
Avocats :
Mes Bourgeon, Lagrange.
LA COUR statue sur l'appel interjeté par la société Ital Auto, par Monsieur Philippe Golivet et par la société Philippe Golivet contre un jugement contradictoire du Tribunal de commerce de Paris du 10 janvier 2000 qui a:
- condamné la société Fiat Auto (France) à payer à la société Ital Auto la somme de trente mille francs à titre de dommages et intérêts ainsi qu'une indemnité de dix mille francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- a débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
- a ordonné l'exécution provisoire,
- a, enfin, condamné la société Fiat Auto (France) aux dépens.
La société Ital Auto, la société Golivet et Monsieur Philippe Golivet ont assigné la société Fiat Auto (France) notamment afin:
- d'obtenir la résiliation à ses torts exclusifs des contrats de concession automobile consentis à Ital Auto
- de condamner Fiat Auto (France) à payer à Ital Auto, à titre de dommages et intérêts les sommes de 200 049 F et 4 500 000 F
- de dire que Fiat Auto (France) devra reprendre l'intégralité du stock de pièces détachées,
- de condamner cette société à payer à la société Golivet la somme de 400 000 F à titre de dommages et intérêts,
- d'obtenir également la condamnation de Fiat Auto (France) au paiement au profit de Philippe Golivet de la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts,
- de condamner, enfin, la société défenderesse au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société Fiat Auto (France) a, par lettre du 6 janvier 1994, confirmé à Monsieur Philippe Golivet, ancien concessionnaire de la marque Iveco, son agrément sous certaines conditions (rachat du capital par l'intermédiaire d'une société qu'il contrôlait majoritairement, mise en place d'un fonds de roulement de 1600 000 F, constitution d'une caution bancaire de 1 500 000 F), pour la poursuite des contrats de concession des marques Fiat et Lancia précédemment consentis à la société Ital Auto, établie à Carcassonne. Fiat Auto s'engageait, en contrepartie, à verser à son concessionnaire une aide à l'aménagement ainsi qu'une aide publicitaire de "relance".
C'est ainsi que Monsieur Philippe Golivet a constitué la société Philippe Golivet qui a procédé à l'acquisition du capital d'Ital Auto moyennant le paiement d'une somme de 2 850 000 F. Selon Monsieur Golivet, ce paiement est intervenu à hauteur de 1 300 000 F à l'aide d'un apport personnel et à hauteur de 150 000 F à l'aide d'un emprunt.
De 1994 à 1996, la société Ital Auto a poursuivi l'exécution des contrats de concession Fiat et Lancia en cours, conclus dans le cadre du règlement d'exemption CEE-123-85 applicable du 1er juillet 1985 au 30 juin 1995.
En 1996, Fiat Auto France a proposé à Ital Auto trois nouveaux contrats de concession à durée indéterminée (deux contrats de concession de la marque Fiat pour les véhicules utilitaires et les véhicules particuliers d'une part, et un contrat de concession Lancia pour les véhicules particuliers, d'autre part) qui ont été conclus conformément au nouveau Règlement d'exemption CEE-1475-95 du 28 juin 1995;
Par lettre du 6 novembre 1998, la société concédante informait son concessionnaire de son intention de procéder à la résiliation des contrats de concession à la date du 7 novembre 1999;
Après avoir demandé le 19 avril 1999 le versement d'une prime "MOS" (Minimum operating, Standard), Monsieur Golivet a finalement fait parvenir à Fiat Auto France un courrier du 12 mai 1999 ainsi libellé:
Par courrier en date du 6 novembre 1998 vous m'avez notifié la résiliation de mon contrat de concession en me précisant qu'en application des dispositions de l'article 6-1 dudit contrat celui-ci prendra donc fin le 7 novembre 1999.
Je me réserve le droit de contester judiciairement cette décision intervenue en violation du principe de bonne foi contractuel édicté par l'article 1134 alinéa 3 du Code civil.
Par cette résiliation s'inscrivant dans le contexte de la restructuration de votre réseau vous m'avez mis en effet dans l'impossibilité de continuer à négocier la cession de mon fonds de commerce ou un accord de substitution avec le repreneur de votre marque, en l'espèce votre concessionnaire actuel de Narbonne, la société International Auto qui doit être majoritairement détenue par un autre de vos concessionnaires Perpignan Automobile SA dirigée par votre opérateur M. Burguière.
Celui-ci est depuis lors assuré de disposer de mon territoire et je comprends alors qu'il n'ait donné à sa visite du 21 octobre 1998 lors de laquelle et du fait de la restructuration du réseau il m'avait fait part de son souhait de racheter mon entreprise. (...)
Si celui-ci ne se manifestait pas et ne répondait pas favorablement à mes légitimes demandes, ce sous 8 jours, je serais alors contraint d'en tirer toutes conséquences que de droit quant à une résiliation intervenue en même temps que vous négociez avec votre opérateur susnommé les conditions de reprise de mon territoire, ce qui a sciemment compromis mes propres négociations (...)".
Monsieur Golivet, qui avait été informé par l'intimée de la limitation des facilités de paiement faisait, enfin, par lettre du 11 juin 1999, toutes réserves sur les "restrictions incompatibles avec une activité normale et un bon fonctionnement de la concession", avant de saisir le tribunal de commerce dans les conditions qui ont été rappelées.
Parallèlement, à la suite d'une déclaration de cessation de paiements effectuée auprès du greffe du Tribunal de commerce de Carcassonne par Philippe Golivet, ce tribunal a ouvert, le 16 février 2000 une procédure de redressement judiciaire à l'égard des sociétés Ital Auto et Golivet puis a prononcé, par jugement du 12 avril 2000, la liquidation judiciaire de ces sociétés et désigne Madame Geneviève Frontil en qualité de liquidateur judiciaire.
Vu les dernières écritures, signifiées le 11 mars 2003, aux termes desquelles d'une part, Madame Frontil, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto et de la société Philippe Golivet, et d'autre part, Philippe Golivet, appelants, prient la cour:
- de réformer le jugement entrepris,
- de dire que la société Fiat Auto (France) a résilié abusivement les contrats de concession à durée indéterminée,
- de dire que cette société doit répondre de l'intégralité des préjudices nés de ses décisions de résiliation abusives,
- de la condamner en conséquence à payer à titre de dommages et intérêts:
- à Maître Frontil, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto, les sommes de:
* 96 061,02 euros (630 119F)
* 88 632,49 euros (581 391,02 F)
- à Maître Frontil, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Philippe Golivet, la somme de 351 892,62 euros (2 308 264,20 F)
- à Monsieur Philippe Golivet la somme de 60 979,60 euros (400 000 F)
- de condamner la société Fiat Auto (France) au paiement de la somme de 6 100 euros à Maître Frontil, ès qualités, d'une part, et 1 000 euros à Monsieur Philippe Golivet d'autre part, sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
- la condamner, enfin, aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Vu les dernières conclusions, signifiées le 17 mars 2003, selon lesquelles la société Fiat Auto (France), intimée et incidemment appelante, demande à la cour:
Vu notamment les articles 122 et 564 du nouveau Code de procédure civile,
Vu l'article L. 622-5 du Code de commerce et l'article L. 624-3 du même code,
Vu notamment le règlement communautaire 1475-95, les articles 1134, 1147, 1153, 1315 et 1347 du Code civil,
- de déclarer irrecevables et à défaut mal fondés en toutes leurs demandes Maître Frontil ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Philippe Golivet et Monsieur Philippe Golivet,
- de déclarer irrecevable en toutes ses demandes Maître Frontil ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto,
- de débouter Maître Frontil ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto et de la société Philippe Golivet ainsi que Monsieur Philippe Golivet de l'ensemble de leurs demandes,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer la somme de 4 573,47 euros (30 000 F) à titre de dommages et intérêts à la société Ital Auto,
- de condamner Maître Frontil ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto à restituer la somme de 4 573,47 euros (30 000 F) outre les intérêts au taux légal à compter du 15 février 2000,
- de condamner, enfin, Maître Frontil ès qualités avec Monsieur Philippe Golivet, solidairement et, à défaut, in solidum, à payer à la société Fiat Auto (France) la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
Sur la recevabilité des demandes présentées devant la cour par Madame Frontil ès qualités et par Monsieur Philippe Golivet:
Considérant que Fiat Auto (France) objecte que les demandes en paiement des sommes de 88 632,49 euros, et de 351 892,62 euros présentées pour la première fois devant la cour par Maître Frontil, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto et de la société Philippe Golivet dans l'intérêt des créanciers de ses sociétés et en réparation de leur préjudice, sont irrecevables comme nouvelles;
Mais considérant que Madame Frontil s'est contentée de poursuivre des actions aux fins d'indemnisation d'un préjudice subi par les sociétés Ital Auto et Philippe Golivet qui avaient déjà été introduites par leur représentant légal avant l'ouverture de la procédure collective;
Que les demandes qui sont désormais formées devant la cour à hauteur d'une insuffisance d'actif susceptible de préjudicier aux intérêts des créanciers de ces sociétés, tendent aux mêmes fins que celles qui ont été déjà soumises aux premiers juges, même si leur fondement juridique est différent;
Qu'elles ne peuvent, dès lors, être qualifiées de prétentions nouvelles au sens de l'article 565 du nouveau Code de procédure civile;
Considérant, en outre, que les autres griefs faits par la société intimée aux demandes présentées au nom de la société Philippe Golivet ou aux demandes de Monsieur Philippe Golivet lui-même concernent, en réalité, le principe même de sa responsabilité et non la recevabilité de ces demandes;
Qu'il s'ensuit, ce moyen n'étant pas fondé, que les demandes de Madame Frontil ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés Ital Auto et Philippe Golivet et de Monsieur Philippe Golivet seront déclarées recevables;
Sur la responsabilité de la société Fiat Auto:
1°) En ce qui concerne la résiliation des contrats de concession
Considérant que les appelants sollicitent l'infirmation du jugement en faisant valoir que la société concédante a fait un usage déloyal de son droit de résiliation, alors que l'importance des engagements initialement souscrits pour acquérir les titres d'Ital Auto imposaient le maintien de relations contractuelles sur une longue durée;
Mais considérant que la société Fiat Auto (France) a régulièrement notifié la résiliation du contrat de concession en respectant le préavis, contractuellement convenu, d'un an;qu'elle a, également de manière régulière dans le délai de 90 jours suivant l'expiration du contrat, versé à Madame Frontil ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto l'indemnité conventionnelle prévue par l'article 7-2 des contrats de concession;
Qu'en outre, les appelants ne font état ni de promesses ni de pourparlers ayant trait à la possible poursuite de ces contrats sur une longue durée;
Qu'ils n'allèguent pas non plus la réalisation d'investissements spécialement demandés par la société concédante et indissolublement liés à l'exploitation des marques objet du contrat de concession;
Que comme le leur oppose la société intimée, c'est Monsieur Golivet qui a lui-même négocié avec le précédent détenteur du capital d'Ital Auto les conditions de son rachat et décidé de recourir à un emprunt;
Qu'il n'est pas non plus sérieusement discutable que les conditions financières initialement imposées au concessionnaire ont été fixées normalement, eu égard aux objectifs de vente de véhicules et au risque inhérent au crédit fournisseur toléré;
Qu'enfin, Monsieur Golivet, qui a, après la notification de la résiliation, gardé le silence pendant prés de six mois, n'a lui-même formulé aucun grief en ce qui concerne une perte d'investissements, en se bornant, dans son courrier du 12 mai 1999, à évoquer la question du rachat de son entreprise;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas démontré, qu'en l'espèce, la société Fiat Auto ait manqué à son obligation de loyauté et ait abusivement usé de son droit de résiliation;
2°) En ce qui concerne la négociation avec le repreneur
Considérant que Madame Frontil prétend également que la société Fiat Auto (France) s'est comportée de manière déloyale, en ce que, informée des transactions en cours sur la cession des titres d'Ital Auto, elle a ainsi entravé toute possibilité de reprise, qu'elle se réfère, à ce sujet, à une lettre du 29 octobre 1998 adressée par Monsieur Golivet à Monsieur Burguière, concessionnaire Fiat à Perpignan, ainsi libellée:
"Je fais suite à votre visite du 21 octobre 1998 dans les locaux de la société à Carcassonne.
Vous m'avez indiqué être intéressé par le rachat de mon entreprise, suite à la volonté exprimée par notre constructeur commun, Fiat, de regrouper la concession actuelle sur des territoires plus importants.
Ainsi que je vous l'ai indiqué, je ne suis pas opposé à une telle négociation dans la mesure où je souhaite retrouver les sommes que j'ai initialement investies dans cette opération, tant en capital qu'en compte courant au cours de l'année 1994 et suivantes.
Comme suite à votre demande, je vous prie de trouver ci-joints, les bilans de la SA Ital Auto et de la SARL Philippe Golivet, clos au 31 décembre 1997".
Considérant, toutefois, que rien ne permet de démontrer que Fiat Auto (France) était nécessairement informée de ces simples contacts, antérieurs à une véritable négociation sur le prix de rachat des sociétés concernées, ni au demeurant, que la société intimée avait, en lui notifiant la résiliation du contrat de concession le 6 novembre 1998, entendu placer délibérément Ital Auto dans une position d'infériorité vis-à-vis des concessionnaires occupant des territoires limitrophes et susceptibles de racheter son fonds;
3°) En ce qui concerne les conditions d'exécution du préavis:
Considérant que Madame Frontil soutient également que le caractère abusif des décisions de résiliation serait "renforcé par des atteintes graves apportées en cours de préavis à l'exécution normale des contrats de concession" en raison:
- du paiement délibérément tardif de la prime MOS,
- de l'exclusion arbitraire de l'encours de financement des véhicules de démonstration et de "courtoisie",
- enfin, de la divulgation prématurée de la résiliation de la concession, attestée par la pose, par le nouveau concessionnaire agréé, d'un panneau comportant la mention "concession automobile Fiat Carcassonne".
a) sur la prime MOS
Considérant que par lettre du 19 avril 1999, Ital Auto a réclamé à Fiat Auto (France) la régularisation de cette prime afin de remplir ses obligations fiscales et d'établir son bilan définitif, et que le Commissaire aux comptes d'Ital Auto a lui-même, par courrier du 20 avril 1999, questionné la société concédante sur le montant de cette prime;
Que la société Fiat Auto (France) avait répondu le 23 avril 1999 qu'Ital Auto ne pouvait y prétendre, en raison d'un taux de pénétration du marché atteignant seulement 3,37%, soit un chiffre inférieur au taux de 3,5% fixé par la circulaire déterminant ses conditions d'attribution, que Monsieur Golivet rétorquait alors qu'en raison d'un certain pourcentage d'immatriculations réalisées par des loueurs de véhicules, le véritable taux à prendre en considération était de 3,72% et qu'il convenait, dès lors, d'effectuer le versement de la prime MOS, que celui-ci est en définitive intervenu alors que les parties étaient désormais en litige, en octobre 1999;
Considérant que la vérification ainsi opérée par Fiat Auto (France) des conditions ouvrant droit à cette prime ne permettent pas de lui imputer un retard délibéré apporté à son paiement;
Qu'au demeurant, les appelants ne démontrent pas qu'Ital Auto se soit alors trouvée, pendant la période précédant ce versement, dans l'impossibilité, du fait d'un bilan qui aurait ainsi été rendu déficitaire, de solliciter des concours financiers;
Que dès lors, le jugement attaqué sera réformé en ce qu'il a, estimant à ce sujet qu'un préjudice imputable à Fiat Auto était caractérisé, alloué une somme de 30 000 F (4 573,47 euros) à titre de dommages et intérêts à Ital Auto;
b) sur l'exclusion de l'encours de financement des véhicules de démonstration et de courtoisie
Considérant que les véhicules de démonstration et de courtoisie ("VD/VK") étaient susceptibles de bénéficier, en vertu d'une circulaire diffusée par Fiat Auto (France) "d'un financement gratuit à compter de la date de mise en démonstration"; que les appelants reprochent à l'intimée d'avoir, dans sa lettre du 14 mai 1999, en lui notifiant que les facilités de paiement seraient limitées au montant des garanties fournies, annoncé la suppression des conditions de paiement "VD/VK";
Mais considérant qu'aux termes de l'article 7° de l'annexe 6 des contrats de concession, les facilités de paiement, par ailleurs stipulées comme ayant "toujours un caractère précaire" et pouvant "être réduites ou supprimées à tout moment par le concédant", sont expressément limitées, dès la fin du 6eme mois suivant la notification du préavis de résiliation au montant des garanties constituées et maintenues en vigueur par le concessionnaire;
Que comme l'oppose utilement Fiat Auto (France) aucune exception ou dérogation n'est contractuellement prévue pendant la période de préavis en ce qui concerne les conditions de financement des véhicules de démonstration et de courtoisie;
Que dès lors, aucune inexécution de ses obligations contractuelles n'est imputable sur ce point à la société intimée;
c) sur la divulgation de la résiliation des contrats de concession
Considérant que, se référant a un constat d'huissier du 4 août 1999, le liquidateur judiciaire des sociétés Ital Auto et Philippe Golivet soutient qu'au début du mois d'août, trois mois avant l'expiration du préavis, Monsieur Burguière, agréé par Fiat Auto pour la reprise de la concession de Carcassonne, a fait afficher sur un panneau dressé sur un chantier où étaient effectués des travaux d'implantation de la future concession Fiat, la mention "concession Automobile Fiat Carcassonne";
Que, selon les appelants, Fiat Auto (France), informée de cette divulgation de la résiliation des contrats de concession consentis à Ital Auto et de la violation de l'exclusivité de représentation de la marque bénéficiant encore à Ital Auto, a cependant contesté, de mauvaise foi, sa responsabilité;
Considérant que la présence, constante, sur ce panneau de chantier, des mentions critiquées avec l'apposition de la marque Fiat reproduite avec ses caractéristiques et ses couleurs habituelles a, certes, été dénoncée par Monsieur Golivet par un courrier du 9 avril 1999 dans les termes suivants "cette utilisation de votre marque qui ne peut se faire sans votre accord confère un caractère public à votre décision de résiliation à notre égard alors que le préavis de résiliation que vous avez notifié n'est pas achevé";
Qu'il est cependant acquis, alors que cette lettre ne faisait pas référence au constat d'huissier du 4 août 1999 attestant ces faits, que la société Fiat Auto (France) a aussitôt interrogé Monsieur Burguière qui, dans sa réponse du 13 août 1999 a déclaré, en joignant un procès-verbal de constat d'huissier, qu'il n'avait jamais affiché sa nouvelle qualité de concessionnaire Fiat;
Que la société intimée a alors notifié à Monsieur Golivet que son courrier était "sans objet", ce qui le conduisait alors à réitérer ses griefs par lettre du 25 août 1999; qu'un procès-verbal de constat d'huissier des deux et quatorze septembre 1999 dressé à la requête d'Ital Auto atteste, toutefois, que la mention "Fiat" qui était initialement incriminée n'était, en définitive, plus visible et était désormais masquée par une planchette de bois;
Que Monsieur Burguière a précisé, à ce sujet, à un huissier qu'il avait, à son tour, chargé d'un constat sur ces faits, qu'il avait lui-même masqué le panneau incriminé lorsqu'il avait découvert les mentions reprochées;
Que de surcroît, l'article de la "Dépêche du Midi" du 14 septembre 1999 sur lequel s'appuie Monsieur Golivet pour soutenir que l'information sur la situation de sa concession ainsi a été portée à la connaissance du public, ne se réfère ni à cet affichage ni à la succession d'Ital Auto mais se borne simplement à relater la prochaine installation de la concession Fiat sur un autre site;
Considérant que la société Fiat Auto (France) apparaît ainsi étrangère aux faits incriminés, imputables à un tiers, et que, dès qu'elle en a été informée, elle a cherché à y remédier dans des conditions qui ne permettent pas de mettre en cause sa responsabilité;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la résiliation ne pouvant être qualifiée d'abusive ou déloyale et les conditions d'exécution du préavis n'étant par ailleurs pas fautives, Madame Frontil, liquidateur judiciaire de la société Ital Auto et de la société Golivet ainsi que Monsieur Philippe Golivet seront déboutés de toutes leurs demandes;
Sur l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile
Considérant que l'équité commande d'allouer à l'intimée une indemnité de 3000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, Madame Frontil et Monsieur Philippe Golivet, qui succombent, ne pouvant pour leur part qu'être déboutés de leur demande à ce titre;
Par ces motifs: Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société Fiat Auto (France) à payer à la société Ital Auto la somme de trente mille francs (4 573,47 euros); Réformant de ce seul chef le jugement et y ajoutant, Déclare recevables les demandes présentées, d'une part, par Madame Frontil ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto et de la société Philippe Golivet et, d'autre part, par Monsieur Philippe Golivet; Déboute Madame Frontil ès qualités et Monsieur Philippe Golivet de toutes leurs demandes; Condamne in solidum Madame Frontil ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ital Auto ainsi que de la société Philippe Golivet et Monsieur Philippe Golivet à payer à la société Fiat Auto (France) la somme de 3 000 euros (trois mille) au titre de ses frais irrépétibles d'appel; Condamne Madame Frontil ès qualités ainsi que Monsieur Philippe Golivet aux dépens d'appel et admet la SCP Bernabe Chardin Cheviller, avoué, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.