CA Orléans, ch. com., 27 mars 2003, n° 02-00564
ORLÉANS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Bijouterie Roussel (SARL)
Défendeur :
N (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Remery
Conseillers :
Mme Magdeleine, M. Garnier
Avoués :
SCP Laval-Lueger, Me Garnier
Avocats :
SCP Lysiane, Gerald Vairon, Me Brugière
La SARL Bijouterie Roussel a conclu le 4 mai 2000 avec la SARL N un contrat en vue de l'organisation et de l'animation d'une liquidation du stock de son magasin situé à Lens du 20 mai au 3 juin 2000. La facture du solde des prestations étant demeurée impayée, la société N a assigné sa cliente en règlement des sommes dues.
Par jugement du 5 octobre 2001, le Tribunal de commerce de Tours a condamné la SARL Bijouterie Roussel à payer à la SARL N la somme de 47 840 F TTC (7 293,16 euros) avec intérêts légaux à compter du 28 juillet 2000, outre celle de 7 000 F (1 067,14 euros) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La SARL Bijouterie Roussel a relevé appel.
Par conclusions signifiées le 21 mai 2002, poursuivant l'infirmation de la décision entreprise, elle fait valoir que la SARL N, à l'égard de laquelle elle doit être considérée comme une non-professionnelle, a manqué à son devoir de conseil, notamment en appliquant une remise de 50 % sur tous les produits, ce qui constitue une vente à perte interdite par la législation. Elle ajoute que l'intimée a également commis des fautes dans l'exécution du contrat, ce dont il résulte un préjudice de 9 146,94 euros, toutes causes confondues. Elle requiert le rejet de toutes les prétentions de la société N ainsi que l'allocation de la somme de 2 286,74 euros en remboursement de ses frais de procédure.
Par ses écritures du 9 janvier 2003, la SARL N relève que le contrat ne prévoit en aucune manière qu'elle ait eu à préparer les démarques à appliquer, celles-ci restant du ressort du bijoutier. Elle fait observer que les dispositions prohibant la vente à perte ne sont pas applicables à une liquidation avant travaux, autorisée par le Préfet. Elle souligne que l'appelante n'apporte aucun élément sur les pertes financières qui en auraient découlé, et que les attestations versées aux débats, émanant des salariées de la bijouterie et toutes rédigées sur un même modèle, sont dépourvues de valeur probante. Elle prétend avoir parfaitement rempli ses obligations en matière de publicité, rédaction de prospectus, animation de la liquidation, et conclut à la confirmation du jugement, à la capitalisation des intérêts et à la condamnation de l'appelante à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Sur quoi,
Attendu que le contrat conclu entre les parties pour l'organisation et l'animation d'une liquidation de stock, et moyennant un prix TTC de 59 800 F porte sur un ensemble de prestations ainsi énumérées :
- Estimation du chiffre d'affaires réalisable
- Conseils sur le choix des supports publicitaires
- Mise en place du concept (équipe et technique de vente)
- Prêt gratuit des plateaux de liquidation
- Présence sur place de Christian et Carine N du lundi 29 mai au samedi 3 juin 2000
- Préparation de la liquidation
- Animation avec sonorisation
- Fourniture de deux cassettes audio pour l'animation commerciale;
Attendu, en premier lieu, que les dispositions législatives de protection des consommateurs ne s'appliquent pas aux contrats de fourniture de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le co-contractant, telle que l'organisation d'une liquidation de stock par une bijouterie ;
Qu'en second lieu, l'article L. 442-2 du Code de commerce relatif à l'interdiction pour tout commerçant de revendre un produit à un prix inférieur à son prix d'achat effectif ne s'applique pas aux ventes volontaires motivées par la cessation ou le changement d'une activité commerciale; que tel est le cas des ventes de liquidation autorisées par le préfet en raison d'une prochaine fermeture pour travaux;
Que le contrat litigieux ne prévoit nullement que le prestataire serait responsable de la fixation des prix et que les copies de quelques bordereaux de ventes réalisées, qui au demeurant ne mentionnent pas une réduction systématique de 50 % du tarif comme l'allègue l'appelante, ainsi que les attestations des vendeuses, rédigées en termes identiques pour les besoins de la cause, sont dépourvues de toute force probante;
Que la société N communique au contraire les documents (affiches publicitaires, photographies de l'agencement du magasin pendant la liquidation, présence sur place de l'organisateur-conseil) démontrant qu'elle a réalisé les prestations prévues au contrat, alors que la SARL Bijouterie Roussel, hormis ses propres affirmations péremptoires, ne précise pas en quoi le prestataire aurait manqué à son obligation de conseil et n'apporte aucune preuve du préjudice financier qu'elle invoque;
Que le tribunal a également relevé, à juste titre, que la société Bijouterie Roussel n'avait émis ni réserve ni critique à réception de la facture, et que les conventions devaient être exécutées de bonne foi;
Que le jugement mérite, par conséquent, confirmation en toutes ses dispositions;
Attendu que la capitalisation des intérêts, judiciairement demandée par la société N depuis le 31 mai 2002, et conforme aux dispositions de l'article 1154 du Code civil, sera ordonnée;
Attendu qu'en raison du caractère infondé de ses moyens qui reposent sur de simples allégations dépourvues de preuves, et en s'acharnant non sans témérité à poursuivre une procédure vouée à l'échec, la SARL Bijouterie Roussel a interjeté un appel abusif et dilatoire et doit être sanctionnée par une amende civile dont le montant sera fixé à 1 500 euros;
Attendu que la SARL Bijouterie Roussel supportera les dépens d'appel et à ce titre versera à la SARL N la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Par ces motifs, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort; Confirme le jugement entrepris; Y ajoutant; Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil; Condamne la SARL Bijouterie Roussel à payer au Trésor Public une amende civile de 1 500 euros sur le fondement de l'article 559 du nouveau Code de procédure civile; La condamne aux dépens d'appel et à verser à la SARL N la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Accorde à Maître Garnier, Avoué, le droit reconnu par l'article 699 du même Code.