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Décisions

CCE, 10 décembre 2003, n° 2004-341

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Aide d'État mise en œuvre par l'Italie, région de Campanie, en faveur du secteur agricole

CCE n° 2004-341

10 décembre 2003

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment l'article 88, paragraphe 2, premier alinéa, après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément audit article (1), et compte tenu des observations transmises, considérant ce qui suit:

I. PROCÉDURE

(1) Par lettre du 31 octobre 1994, enregistrée le 4 novembre 1994, l'Italie a notifié à la Commission, conformément à l'article 88, paragraphe 3, du traité, l'aide prévue par la loi régionale n° 24 du 12 août 1993 de la région de Campanie portant réglementation, promotion et valorisation de l'agriculture biologique en Campanie.

(2) L'aide, initialement enregistrée sous la référence N 645-94, a ensuite été inscrite au registre des aides non notifiées sous la référence NN 140-94, la Commission ayant constaté que la loi avait déjà été adoptée et qu'elle était entrée en vigueur sans aucune clause suspensive.

(3) Par lettre du 27 juillet 1995 [SG(95) D-10012], la Commission a informé l'Italie de sa décision de lancer la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité pour l'aide considérée.

(4) La décision de la Commission de lancer cette procédure a été publiée au Journal officiel des Communautés européennes (2). La Commission a invité les intéressés à présenter leurs observations.

(5) La Commission a reçu des observations de l'Italie au sujet de cette aide par lettre du 29 septembre 1995, enregistrée le 3 octobre 1995.

(6) Par lettre du 6 décembre 1995, enregistrée à la même date, la Commission a reçu des observations de la représentation permanente du Danemark auprès de l'Union européenne. Celle-ci les a transmises à l'Italie, par lettre n° VI-001809 du 8 janvier 1996, en lui offrant la possibilité de les commenter, mais elle n'a reçu aucune observation de l'Italie.

(7) Par télécopie n° VI-29692 du 22 juillet 1996, les services de la Commission ont invité les autorités italiennes à fournir des précisions sur les observations qu'elles avaient présentées, lorsque la procédure a été entamée, par lettre du 29 septembre 1995, enregistrée le 3 octobre 1995. Les services de la Commission n'ont reçu aucune réponse à ladite télécopie.

(8) Afin de conclure l'examen du dossier, les services de la Commission, par télécopie enregistrée sous la référence AGR 021605 du 7 août 2003, ont envoyé une nouvelle lettre aux autorités italiennes pour leur demander de répondre à la précédente télécopie n° VI-29692 du 22 juillet 1996. Cette lettre est restée sans réponse.

II. DESCRIPTION DÉTAILLÉE DE L'AIDE

(9) La loi régionale citée ci-dessus réglemente, au niveau régional, la promotion et la mise en place des techniques de l'agriculture biologique. La seule mesure d'aide prévue concerne l'octroi d'une contribution en faveur des exploitations qui se convertissent (article 19 de la loi régionale n° 24-93), aide destinée à compenser les pertes de revenu que les exploitations agricoles subissent pendant leur période de passage des techniques agricoles traditionnelles à celles de l'agriculture biologique visées dans le règlement (CEE) n° 2092-91, pendant quatre ans au maximum. L'aide peut couvrir jusqu'à 75 % des revenus manquants.

(10) La Commission, se fondant sur les considérations exposées ci-après, a décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité contre l'aide considérée.

(11) La Commission avait une attitude généralement favorable aux aides destinées à faciliter la conversion vers des formes de production biologique conformes au règlement (CEE) n° 2092-91 du Conseil du 27 juin 1991 concernant le mode de production biologique de produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires (3), à condition que l'ensemble des aides ne dépasse pas la valeur réelle des pertes de revenu subies par l'agriculteur à cause de sa conversion.

(12) Le règlement (CEE) n° 2092-91 établit de manière obligatoire les conditions à respecter pour que des produits agricoles puissent être qualifiés de produits biologiques, et toute éventuelle disposition nationale (ou régionale) dans le même domaine doit être conforme à ces conditions.

(13) La loi régionale considérée ne remplissait pas ces conditions, notamment en ce qui concerne:

a) la durée de la période de conversion [la loi régionale prévoit une période de deux ans, aussi bien pour les cultures annuelles que pour les cultures pérennes, alors que l'annexe I du règlement (CEE) n° 2092-91 indique pour ces dernières une période minimale de trois ans];

b) la possibilité d'intégrer des ingrédients non issus de l'agriculture biologique [sans se référer aux pourcentages maximaux admissibles pour pouvoir utiliser des indications relatives au mode de production biologique dans la dénomination de vente du produit ou dans la liste des ingrédients, comme le prévoit l'article 5 du règlement (CEE) n° 2092-91];

c) les organismes chargés des contrôles (qui ne figuraient pas sur la liste des organismes de contrôle agréés par l'Italie);

d) la liste des produits figurant dans les annexes relatives aux normes de production [qui ne correspond pas à la liste des produits figurant dans les annexes du règlement (CEE) n° 2092-91].

(14) En outre, l'annexe 12 de la loi régionale prévoit que les produits provenant de l'extérieur de la région doivent être accompagnés d'un certificat spécial délivré par les autorités compétentes du territoire de provenance.

(15) À l'intérieur de la Communauté, la circulation des produits de l'agriculture biologique est libre si les normes de production et les dispositions en matière de conditionnement et de commercialisation prévues à l'annexe III du règlement (CEE) n° 2092-91 sont respectées. Il s'ensuit que la loi considérée enfreignait également l'article 12 du règlement (CEE) n° 2092-91, qui interdit de limiter la commercialisation des produits issus de l'agriculture biologique.

(16) Étant donné que les dispositions de la loi régionale n° 24-93 de la région de Campanie étaient en contradiction, sous différents aspects, avec les dispositions obligatoires du règlement (CEE) n° 2092-91, la Commission a estimé que l'aide prévue à l'article 19 de la loi régionale ne pouvait bénéficier d'aucune des dérogations prévues à l'article 87, paragraphes 2 et 3, du traité.

III. OBSERVATION DES INTÉRESSÉS

(17) Par lettre du 6 décembre 1995, enregistrée à la même date, la Commission a reçu des observations de la représentation permanente du Danemark auprès de l'Union européenne.

(18) Dans ses observations, le ministère danois de l'Agriculture et de la Pêche se déclarait d'accord avec les objections formulées par la Commission dans sa décision annonçant l'ouverture de la procédure à l'égard de l'aide considérée. À son avis, les aides en faveur de l'agriculture biologique ne doivent en effet être accordées qu'aux exploitations agricoles qui respectent les dispositions prévues par le règlement (CEE) n° 2092-91.

(19) Dans sa lettre, le ministère de l'Agriculture se déclarait par ailleurs préoccupé par le fait que les dispositions italiennes prévoient de restreindre l'importation de produits biologiques dans la région de Campanie. En ce qui concerne la méthode de calcul de l'aide prévue par la loi italienne, le ministère rappelait que les engagements pris par les bénéficiaires doivent être maintenus pendant au moins cinq ans (et non au moins quatre ans), conformément aux dispositions du règlement (CEE) n° 2078-92 du Conseil du 30 juin 1992 concernant des méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l'environnement ainsi que l'entretien de l'espace naturel (4).

IV. OBSERVATIONS DE L'ITALIE

(20) La Commission a reçu des observations de l'Italie, pour le compte de la région de Campanie, par lettre du 29 septembre 1995, enregistrée le 3 octobre 1995.

(21) Dans leurs observations, les autorités italiennes faisaient valoir que "la loi n'avait pas été appliquée puisque la Giunta régionale avait décidé de suspendre son application, par décision n° 1703 du 28 mars 1995", en partie parce qu'elle n'avait pas été notifiée en temps voulu à la Commission conformément à l'article 88, paragraphe 3, du traité, et en partie parce qu'il fallait y apporter des adaptations qui la rendent plus cohérente avec la législation communautaire en matière d'agriculture biologique.

(22) Pour satisfaire à cette dernière exigence, un projet de loi a été élaboré, mais il est demeuré sans suite en raison de la fin de la législature régionale.

(23) Dans leurs observations, les autorités italiennes ont déclaré qu'elles partageaient les observations de la Commission, qui constituaient pour elles une nouvelle invitation à procéder à la révision de la loi régionale n° 24-93. Enfin, elles ont confirmé que l'application de cette loi demeurait suspendue.

V. ÉVALUATION DE L'AIDE

(24) Aux termes de l'article 87, paragraphe 1, du traité CE, sont incompatibles avec le Marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États, ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou menacent de fausser la concurrence.

(25) La mesure considérée prévoit l'octroi d'aides sur les ressources publiques à certaines exploitations agricoles qui bénéficieraient alors indéniablement d'un avantage économique et financier indu, au détriment d'autres exploitations qui ne reçoivent pas la même contribution. D'après la jurisprudence de la Cour de justice, consolider la position d'une entreprise en lui accordant une aide d'État peut fausser la concurrence vis-à-vis d'autres entreprises qui ne bénéficient pas de la même aide (5).

(26) La mesure affecte les échanges entre États membres car le volume des échanges intracommunautaires de produits agricoles est considérable, comme le montre le tableau suivant (6), qui reprend les valeurs totales des importations et des exportations entre l'Italie et le reste de l'Union au cours de la période 1993/2001 (7). Il ne faut pas perdre de vue qu'en Italie, la Campanie est un important producteur de produits agricoles.

EMPLACEMENT TABLEAU

(27) Rappelons en outre que, d'après la Cour de justice, une aide à une entreprise peut être de nature à perturber les échanges entre les États membres et à fausser la concurrence lorsque l'entreprise se trouve concurrencée par des produits provenant d'autres États membres sans être elle-même exportatrice. Lorsqu'un État membre accorde une subvention à une entreprise, la production nationale peut demeurer inchangée, ou bien elle peut augmenter, ce qui a pour conséquence de réduire les possibilités des entreprises établies dans d'autres États membres d'exporter leurs produits dans le premier État membre. Une telle aide peut donc se répercuter sur les échanges entre États membres et fausser la concurrence (8).

(28) La Commission en conclut donc que la mesure relève de l'interdiction prévue à l'article 87, paragraphe 1, du traité CE.

(29) L'interdiction prévue à l'article 87, paragraphe 1, est suivie de certaines dérogations visées aux paragraphes 2 et 3 du même article.

(30) Les dérogations prévues à l'article 87, paragraphe 2, points a), b) et c), sont manifestement inapplicables, étant donnée la nature et les objectifs de la mesure d'aide considérée. En effet, l'Italie n'a demandé ni l'application des points a) et b) de l'article 87, paragraphe 2, ni celle du point c).

(31) L'article 87, paragraphe 3, point a), n'est pas non plus applicable dans la mesure où les aides ne sont pas destinées à favoriser le développement des régions où le niveau de vie est particulièrement bas, ou qui connaissent un grave chômage.

(32) Est tout aussi inapplicable l'article 87, paragraphe 3, point b), puisque les aides considérées ne sont pas destinées à favoriser la réalisation d'un important projet européen d'intérêt commun, ni à porter remède à une grave perturbation de l'Economie italienne.

(33) L'aide considérée n'est pas non plus destinée ou apte à promouvoir les objectifs prévus à l'article 87, paragraphe 3, point d).

(34) Étant donné la nature et les objectifs des aides considérées, l'unique dérogation éventuellement applicable est celle prévue à l'article 87, paragraphe 3, point c), du traité.

Dispositions applicables

(35) La possibilité d'appliquer la dérogation précitée doit être évaluée d'après les dispositions relatives à l'octroi d'aides d'État dans le secteur agricole, c'est-à-dire les lignes directrices concernant les aides d'État dans le secteur agricole (9) (ci-après dénommées "les lignes directrices"), entrées en vigueur le 1er janvier 2000.

(36) D'après le point 23.3 des lignes directrices, la Commission les applique à compter du 1er janvier 2000 aux nouvelles aides d'État notifiées, ainsi qu'à celles dont la notification est en cours à cette date. Les aides illégitimes visées à l'article 1er, point f), du règlement (CE) n° 659-99 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d'application de l'article 88 du traité CE (10) sont évaluées selon les règles et les lignes directrices en vigueur à la date où elles ont été octroyées.

(37) Il est à noter que par "mettre en œuvre", on entend non seulement l'octroi de l'aide en bonne et due forme, mais aussi de pouvoirs qui permettent de verser l'aide sans autres formalités (11).

(38) D'après les considérations précédentes, la mesure d'aide considérée doit être examinée sur la base de la législation en matière d'aides d'État applicable à ce type de mesure avant l'entrée en vigueur des lignes directrices de la Communauté concernant les aides d'État dans le secteur agricole (12).

(39) La mesure considérée, prévue à l'article 19 de la loi régionale n° 24-93, consiste en l'octroi d'une aide aux exploitations qui se convertissent à la production biologique; elle est destinée à compenser les pertes de revenu que subissent les exploitations agricoles pendant la période où elles passent des techniques agricoles traditionnelles à celles de l'agriculture biologique visées dans le règlement (CEE) n° 2092-91, période qui ne peut dépasser quatre ans. L'aide peut couvrir jusqu'à 75 % de ces pertes de revenu.

(40) Avant l'adoption des lignes directrices actuellement en vigueur, la Commission évaluait la compatibilité de ce type d'aide en appliquant par analogie les dispositions du règlement (CEE) n° 2078-92 du Conseil du 30 juin 1992 concernant des méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l'environnement ainsi que l'entretien de l'espace naturel (13).

(41) L'article 2 du règlement (CEE) n° 2078-92 dispose que si les aides ont des effets positifs sur l'environnement et l'espace naturel, elles peuvent être accordées aux exploitants agricoles qui s'engagent à diminuer sensiblement l'utilisation d'engrais et/ou de produits phytopharmaceutiques, ou à maintenir les diminutions déjà entreprises, ou à introduire ou maintenir des méthodes de l'agriculture biologique.

(42) L'article 10 du règlement (CEE) n° 2078-92 dispose que les États membres ont la faculté de prendre des mesures d'aides supplémentaires dont les conditions ou modalités d'octroi s'écartent de celles qui y sont prévues ou dont le montant excède les plafonds qui y sont prévus (14), sous réserve que ces mesures ne relèvent pas du champ d'application de l'article 5, paragraphe 2, et qu'elles soient adoptées conformément aux objectifs du règlement ainsi qu'aux articles 92, 93 et 94 (maintenant articles 87, 88 et 89) du traité.

(43) Comme indiqué dans la décision de lancement de la procédure dans le cas considéré, la Commission était généralement favorable aux aides destinées à faciliter la conversion vers des formes de production biologique conformes au règlement (CEE) n° 2092-91 concernant le mode de production biologique des produits agricoles, à condition que le montant des aides ne soit pas supérieur à la valeur réelle des pertes de revenu subies par l'agriculteur en raison de sa conversion.

(44) Se fondant sur la législation applicable, on peut estimer que la mesure considérée, destinée à favoriser la conversion vers les méthodes de production biologique prévues par le règlement (CEE) n° 2092-91, poursuit les objectifs visés à l'article 2, paragraphe 1, point a), du règlement (CEE) n° 2078-92 (favoriser l'introduction ou le maintien des méthodes de l'agriculture biologique).

(45) Toutefois, la mesure considérée prévoit simplement une aide destinée à compenser, à concurrence de 75 %, les pertes de revenu que subissent les exploitations agricoles pendant leur période de passage des techniques agricoles traditionnelles à celles de l'agriculture biologique, période qui ne peut dépasser quatre ans. Il n'a pas été indiqué de quelle manière sont évaluées et calculées ces pertes, qui servent de base au calcul de l'aide, de manière à permettre à la Commission de vérifier que l'aide n'est pas supérieure à la valeur réelle des pertes subies par l'agriculteur en raison de sa conversion.

(46) En outre, compte tenu des observations présentées par les autorités danoises, il ne faut pas perdre de vue que les autorités italiennes n'ont fourni aucune indication précise sur la durée de l'engagement à se convertir à l'agriculture biologique (qui serait de quatre ans au maximum), ni sur les conditions dans lesquelles l'aide pourrait être accordée dans les cas où l'agriculteur n'est pas personnellement en mesure de souscrire à un engagement pendant la période minimale requise [cinq ans d'après le règlement (CEE) n° 2078-92 du Conseil] (15).

(47) Par ailleurs, comme la Commission l'a rappelé dans sa décision de lancer la procédure, le règlement (CEE) n° 2092-91 fixe de façon obligatoire les conditions qui doivent être remplies pour que les produits agricoles puissent être qualifiés de produits biologiques, et toute éventuelle disposition nationale (ou régionale) dans le même domaine doit être respectée.

(48) La loi régionale considérée, comme les autorités italiennes l'ont reconnu dans leur lettre du 29 septembre 1995, ne remplit pas ces conditions, notamment en ce qui concerne:

a) la durée de la période de conversion [la loi régionale prévoit une période de conversion de deux ans, tant pour les cultures annuelles que pour les cultures pérennes, alors que l'annexe I du règlement (CEE) n° 2092-91 indique pour ces dernières une période minimale de trois ans];

b) la possibilité d'incorporer des ingrédients non issus de l'agriculture biologique [en particulier, aucune référence n'est faite aux pourcentages maximaux admissibles pour appliquer les indications concernant le mode de production biologique dans la dénomination de vente du produit ou dans la liste des ingrédients, comme le précise l'article 5 du règlement (CEE) n° 2092-91];

c) les organismes chargés du contrôle (qui ne figurent pas sur la liste des organismes de contrôle reconnus par l'Italie);

d) la liste des produits figurant dans les annexes relatives aux normes de production [et ne correspondant pas à la liste des produits qui figure dans les annexes du règlement (CEE) n° 2092-91].

(49) Malgré les demandes qui leur ont été faites à différentes reprises à ce sujet, les autorités italiennes n'ont fourni aucune indication sur les modifications effectivement apportées à la loi régionale considérée pour la rendre conforme au règlement (CEE) n° 2092-91.

(50) Se fondant sur l'évaluation décrite ci-dessus, la Commission conclut donc que les doutes formulés dans sa décision de lancer la procédure à l'égard de la mesure considérée sont confirmés, puisque cette mesure n'est pas conforme à la législation en matière d'aides d'État applicable avant le 1er janvier 2000 aux aides à la conversion vers les méthodes de l'agriculture biologique visées dans le règlement (CEE) n° 2092-91.

(51) L'évaluation de la mesure considérée par la Commission est inchangée, y compris si l'on se réfère aux nouvelles lignes directrices applicables aux aides d'État.

(52) En premier lieu, malgré une récente lettre de rappel en ce sens envoyée par télécopie enregistrée sous la référence AGR 021605 du 7 août 2003, les autorités italiennes n'ont encore fourni aucune indication sur les modifications effectivement apportées à la loi régionale considérée pour la rendre conforme au règlement (CEE) n° 2092-91.

(53) Deuxièmement, il est à noter que le point 5.3 (aide au titre d'engagements agro-environnementaux) des lignes directrices de la Communauté concernant les aides d'État dans le secteur agricole (16), applicable à ce type d'aides, renvoie aux articles 22, 23 et 24 du règlement (CE) n° 1257-99 (17), qui abroge et remplace le règlement (CEE) n° 2078-92, ainsi qu'à leurs modalités d'exécution, dorénavant prévues par le règlement (CE) n° 445-2002 de la Commission du 26 février 2002 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 1257-1999 du Conseil concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) (18).

(54) Les nouvelles dispositions actuellement applicables à ce type d'aide, s'ajoutant à de nouvelles exigences qui ne sont pas satisfaites par la mesure considérée (19), prévoient les mêmes exigences fondamentales que le règlement (CEE) n° 2078-92.

(55) Ces exigences fondamentales, cela est démontré ci-dessus, ne sont pas remplies par la mesure d'aide prévue à l'article 19 de la loi régionale n° 24-93, notamment en ce qui concerne la nécessité de prouver à la Commission les pertes de revenu subies par l'agriculteur, les modalités de calcul des pertes subies et la durée des engagements pris par les agriculteurs.

(56) D'après l'évaluation proposée ci-dessus, l'aide prévue à l'article 19 de la loi régionale n° 24-93 n'est pas conforme à la législation en matière d'aides d'État applicable aux aides à la conversion vers les méthodes de production biologique prévues par le règlement (CEE) n° 2092-91. Elle ne peut donc pas bénéficier de la dérogation prévue à l'article 87, paragraphe 3, point c), du traité. Comme l'indiquent les considérants 30 à 33, l'aide ne peut bénéficier d'aucune autre dérogation prévue par le traité et doit donc être considérée comme incompatible avec le Marché commun.

(57) Cependant, étant donné que les autorités italiennes ont suspendu l'application de la loi (voir le considérant 21 de la présente décision), il n'est pas nécessaire d'ordonner la récupération de l'aide.

(58) En ce qui concerne l'article 12 de la loi régionale (selon lequel les produits provenant de l'extérieur de la région doivent obligatoirement être accompagnés d'un certificat approprié délivré par les autorités compétentes du territoire de provenance), il convient de noter ce qui suit: les produits issus de l'agriculture biologique peuvent circuler librement à l'intérieur de la Communauté si leurs normes de production et les dispositions concernant leur conditionnement et leur commercialisation, prévues à l'annexe III du règlement (CEE) n° 2092-91, sont respectées. Il s'ensuit que la loi régionale considérée enfreignait également l'article 12 du règlement (CEE) n° 2092-91, qui interdit de limiter la commercialisation des produits de l'agriculture biologique. Toutefois, cet élément n'a pas d'incidence sur la compatibilité de l'aide avec le Marché commun; il constitue plutôt une infraction en soi à la législation communautaire, qui pourrait faire l'objet d'une procédure d'infraction (article 226 du traité CE). La Commission se réserve le droit d'intervenir sur ce point, mais étant donné que les autorités italiennes ont suspendu l'application de la loi, il n'est pas nécessaire pour le moment de lancer cette procédure.

VI. CONCLUSIONS

(59) À la lumière de ce qui vient d'être exposé, la mesure d'aide prévue à l'article 19 de la loi régionale n° 24-93 de la région de Campanie vise à compenser les pertes de revenu subies par les exploitations agricoles au cours de leur période de passage des techniques agricoles traditionnelles à celles de l'agriculture biologique visées dans le règlement (CEE) n° 2092-91. Elle ne peut bénéficier d'aucune des dérogations prévues par l'article 87, paragraphe 1, du traité, et elle est incompatible avec le Marché commun.

(60) D'après les informations fournies par les autorités italiennes, la loi régionale n° 24-93 n'a pas été mise en œuvre.

(61) Il n'y a donc pas lieu d'ordonner la récupération de l'aide considérée,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

L'aide d'État instaurée par l'article 19 de la loi régionale n° 24-93 de la région de Campanie, que l'Italie avait l'intention de mettre en œuvre pour compenser les pertes de revenu subies par les exploitations agricoles lorsqu'elles se convertissent aux techniques de l'agriculture biologique prévues par le règlement (CEE) n° 2092-91, est incompatible avec le Marché commun. C'est aide ne peut pas être mise en œuvre.

Article 2

Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, l'Italie communique à la Commission les mesures prises pour se conformer à la présente décision.

Article 3

La République italienne est destinataire de la présente décision.

(1) JO C 292 du 7.11.1995, p.14.

(2) Voir note 1 de bas de page.

(3) JO L 198 du 22.7.1991, p. 1.

(4) JO L 215 du 30.7.1992, p. 85. Règlement abrogé par le règlement (CE) n° 1257-1999 (JO L 160 du 26.6.1999, p. 80).

(5) Voir l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 17 septembre 1980 dans l'affaire C-730-79 (Philip Morris contre Commission), Rec. 1980, p. 2671, points 11 et 12.

(6) Source: Eurostat.

(7) D'après la jurisprudence constante de la Cour, la condition liée à l'effet sur les échanges est remplie puisque l'activité de l'entreprise bénéficiaire fait l'objet d'échanges entre les États membres. Le simple fait que l'aide renforce la position de cette entreprise par rapport aux entreprises concurrentes dans le cadre des échanges intracommunautaires permet de considérer que l'aide s'est répercutée sur ces échanges. En ce qui concerne les aides d'État dans le secteur agricole, selon une jurisprudence consolidée, malgré le niveau relativement faible de l'ensemble des aides et leur répartition entre un grand nombre d'agriculteurs, ces aides ont une incidence sur les échanges intracommunautaires et sur la concurrence [voir les arrêts de la Cour de justice du 19 septembre 2002 dans l'affaire C-113-2000 (Royaume d'Espagne contre Commission), Rec. 2002, p. 7601, points 30 à 36 et 54 à 56, ainsi que l'arrêt de la même date dans l'affaire C 114-2000, Rec. 2002, p. 7657, points 46 à 52 et 68 à 69].

(8) Arrêt de la Cour de justice du 13 juillet 1988 dans l'affaire 102-87 (République française contre Commission des Communautés européennes), Rec. 1988, p. 4067.

(9) JO C 232 du 12.8.2000, p. 19.

(10) JO L 83 du 27.3.1999, p. 1.

(11) Voir lettre de la Commission SG (89)D-5521 du 27 avril 1989.

(12) Voir note 9 de bas de page.

(13) Voir note 4 de bas de page.

(14) L'article 4 (Nature et montants des aides) du règlement (CEE) n° 2078-92 prévoyait l'octroi d'une prime annuelle par hectare, ou par unité de bétail déduite, aux exploitants agricoles qui souscrivaient, pour au moins cinq ans, un ou plusieurs des engagements visés à l'article 2, conformément au programme applicable dans la zone concernée. L'aide devait être accordée dans les conditions prévues par le même règlement. En particulier, l'article 5 (Conditions d'octroi des aides) prévoyait qu'en vue d'atteindre les objectifs du règlement, les États membres devaient déterminer: a) les conditions d'octroi de l'aide; b) le montant des aides, en fonction de l'engagement souscrit par le bénéficiaire et des pertes de revenu, ainsi que du caractère incitatif de la mesure; c) les conditions auxquelles l'aide pour l'entretien des surfaces abandonnées visées à l'article 2, paragraphe 1, point e), pouvait être accordée, en cas de non-disponibilité des agriculteurs, à des personnes autres que des agriculteurs; d) les conditions à souscrire par le bénéficiaire en vue notamment de vérifier et de contrôler le respect des engagements souscrits; e) les conditions d'octroi de l'aide lorsque l'exploitant n'est pas en mesure de souscrire lui-même un engagement pour la période minimale requise. Aucune aide au sens du règlement ne pouvait être octroyée aux surfaces faisant l'objet du régime communautaire de retrait des terres qui sont utilisées pour une production non alimentaire. Tout en respectant le caractère incitatif de la mesure, l'aide pouvait être limitée à un montant maximal par exploitation et modulée selon la dimension des exploitations.

(15) Article 5 du règlement (CEE) n° 2078-92, voir note 4 de bas de page.

(16) JO C 232 du 2 août 2000.

(17) JO L 160 du 26.6.1999. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1783-2003 (JO L 270 du 21.10.2003, p. 70). En particulier, ce dernier règlement remplace entièrement les dispositions du chapitre VI du règlement (CE) n° 1257-1999 qui concernent les mesures agro-environnementales.

(18) JO L 74 du 15.3.2002, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 963-2003 (JO L 138 du 5.6.2003, p. 32). Voir en particulier les articles 13 à 21 du règlement (CE) n° 445-2002.

(19) Voir note 18 de bas de page, et en particulier les articles 13 à 21 du règlement (CE) n° 445-2002. Par exemple, l'article 20 du règlement (CE) n° 445-2002 dispose que tout agriculteur souscrivant un engagement agro-environnemental pour une partie de son exploitation est tenu de respecter au minimum les principes de bonnes pratiques agricoles habituelles dans l'ensemble de l'exploitation