CA Paris, 1re ch. H, 17 juin 2003, n° ECOC0300236X
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Transports Déménagements Roussel (SA), Demex-Joncqueur (SARL), AGS Armorique (SARL), Exploitation des Déménagements Le Floch (SARL), Boulouard Déménagements (SARL)
Défendeur :
Ministre de l'Economie, DGCCRF
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Carre-Pierrat
Conseillers :
M. Le Dauphin, Mme Delmas-Goyon
Avoué :
SCP Garrabos Gerigny-Freneaux
Avocat :
Me Hiblot.
Par lette du 16 février 1999 le ministre chargé de l'Economie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques constatées dans le secteur du déménagement des personnels de la Marine nationale basés en Bretagne pour lesquels les prestations fournies par les entreprises présentent des particularités dues à la réglementation qui leur est applicable, laquelle résulte notamment de l'instruction interarmées n° 30000/DEF/C/30 du 1er septembre 1974 prévoyant que le remboursement des frais réellement exposés dans la limite d'un plafond, est subordonné à la présentation à l'administration de deux devis d'entreprises concurrentes et au choix du moins élevé des deux.
Cette saisine faisait suite à une enquête réalisée à la demande du ministre par les services de la DGCCRF, ayant porté sur 127 dossiers de déménagements de militaires de la Marine nationale effectués entre 1995 et 1997.
Au vu des éléments recueillis, le grief de pratique concertée de devis de couverture a été notifié aux entreprises de déménagement intéressées. Par décision n° 02-D-62 du 27 septembre 2002 relative à des pratiques relevées dans le secteur du déménagement des personnels de la Marine nationale en Bretagne, le Conseil de la concurrence, statuant après mise en œuvre de la procédure prévue à l'article L. 463-3 du Code de commerce, a:
- dit qu'il est établi que les entreprises Déménagements Le Floch (ci-après Le Floch), Transports Déménagements Roussel (ci-après Roussel), Acropole Déménagements, Démex-Joncqueur (ci-après Démex), AGS Armorique (ci-après AGS), Boulouard Déménagements (ci- après Boulouard) et Aux Aménageurs Bretons ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce,
- infligé les sanctions pécuniaires suivantes :
* 75 000 euros à la société Le Floch,
* 65 000 euros à la société Roussel,
* 10 000 euros à la société Acropole Déménagements,
* 18 000 euros à la société Démex,
* 35 000 euros à la société AGS,
* 30 000 euros à la société Boulouard déménagement,
- enjoint aux entreprises sanctionnées de publier à leurs frais et à proportion des sanctions pécuniaires prononcées à leur encontre, la décision susvisée dans la revue "Armées Aujourd'hui", dans un délai de deux mois à compter de la date de sa notification,
- dit n'y avoir lieu de prononcer de sanction à l'encontre de la société Aux Aménageurs Bretons.
LA COUR ;
Vu le recours régulièrement formé, le 24 octobre 2002, par les sociétés Roussel, Démex, AGS, Le Floch et Boulouard à l'encontre de la décision précitée, notifiée le 1er octobre 2002;
Vu la déclaration de recours incident déposée le 22 novembre 2002 par le ministre chargé de l'Economie et tendant à la confirmation en toutes ses dispositions de la décision du Conseil de la concurrence;
Vu le mémoire contenant l'exposé des moyens des requérantes, déposé le 29 novembre 2002, dans le délai prescrit à l'article 2-3° du Décret n° 87-819 du 19 octobre 1987, par lequel les entreprises requérantes demandent à la cour :
- à titre principal, d'annuler la décision n° 02-D-62 du Conseil de la concurrence,
- à titre subsidiaire, d'annuler cette décision à l'égard de la société Boulouard,
- à titre très subsidiaire, de réformer ladite décision en ce qu'elle a prononcé des sanctions pécuniaires dont le montant est excessif eu égard au préjudice causé à l'économie et au "profit" réalisé par les entreprises et en ce qu'elle a ordonné une mesure de publication
Vu les observations déposées le 6 janvier 2003 par le ministre chargé de l'Economie sur les recours des sociétés Roussel, Démex, AGS, Le Floch et Boulouard, tendant au rejet de ces recours ;
Vu les observations déposées le 10 janvier 2003 par le Conseil de la concurrence
Vu le mémoire en réplique déposé le 24 mars 2003 par les entreprises requérantes;
Ouï à l'audience du 29 avril 2003 le conseil des requérantes, le représentant du ministre chargé de l'Economie en ses observations, le représentant du Ministère public en ses conclusions tendant au rejet du recours principal, le conseil des requérantes ayant eu la parole en dernier;
Vu l'arrêt en date du 13 mai 2003 ayant ordonné la réouverture des débats à l'audience du 27 mai 2003 sur la seule question de la recevabilité du recours incident du ministre chargé de l'Economie;
Vu les observations écrites déposées le 27 mai 2003 par le ministre de l'Economie relatives à ladite question
Vu les observations orales présentées à l'audience du 27 mai 2003 par le représentant du ministre de l'Economie, le Ministère public et les entreprises parties à la procédure, celles-ci ayant eu la parole en dernier ;
Sur ce:
Sur les observations du Conseil de la concurrence devant la cour :
Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, l'exercice par le Conseil de la concurrence de la faculté qu'il tient des dispositions de l'article 9, alinéa 1er du Décret n° 87-849 du 19 octobre 1987 de présenter des observations écrites, portées à la connaissance des parties, n'a pas porté atteinte au droit des entreprises poursuivies à un procès équitable, étant au demeurant observé que ces dernières ont usé de la faculté de répliquer, par écrit et oralement, aux observations de cette autorité administrative ;
Sur le recours du ministre chargé de l'Economie:
Considérant que selon les dispositions de l'article L. 464-8 du Code de commerce, le recours formé par les parties en cause ou par le ministre chargé de l'Economie contre les décisions du Conseil de la concurrence mentionnées aux articles L. 462-8, L. 464-2, L. 464-3, L. 464-5 et L. 464-6 tend à l'annulation ou à la réformation desdites décisions ;
Qu'aux termes de l'article 2 du Décret du 19 octobre 1987 relatif aux recours exercés devant la Cour d'appel de Paris contre les décisions du Conseil de la concurrence, la déclaration de recours précise l'objet du recours, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office;
Que l'article 6 dudit Décret énonce que le recours incident est formé selon les modalités prévues à l'article 2 ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces textes que doit être déclaré irrecevable le recours, fut-il incident, n'ayant pas pour objet l'annulation ou la réformation, totale ou partielle, de la décision qu'il vise ;
Or considérant que tout en déclarant former un recours incident à l'encontre de la décision du Conseil n° 02-D-62 du 27 septembre 2002, le ministre chargé de l'Economie ne formule aucune critique à l'encontre de cette décision et demande à la cour la confirmation de cette dernière et le rejet du recours ;
Qu'il s'ensuit que la cour n'est pas saisie d'un recours conforme aux exigences des dispositions susvisées et que celui-ci doit être déclaré irrecevable ;
Sur le recours principal:
Sur la procédure:
Considérant que les requérantes font en premier lieu valoir que, la décision déférée ne leur ayant pas été notifiée, la seule notification au Conseil ne valant pas notification aux entreprises, ladite décision leur est inopposable;
Mais considérant que l'avocat des cinq personnes morales requérantes ayant, par lettre du 13 mai 2002 jointe au mémoire déposé par ses clientes en réponse à la notification des griefs dont elles avaient été destinataires, précisé que ces dernières faisaient élection de domicile en son cabinet "pour les besoins de la présente procédure", les requérantes ne peuvent utilement reprocher au Conseil de la concurrence de s'être conformé aux indications qu'elles lui ont ainsi données, alors surtout que la formation du présent recours démontre que l'observation de celles-ci ne leur a causé aucun grief;
Considérant que les requérantes soutiennent en deuxième lieu qu'en écartant des débats comme tardif le mémoire qu'elles ont déposé le 14 juin 2002 en réplique aux observations écrites du commissaire du Gouvernement contenant des demandes de sanctions pécuniaires à leur égard, émises le 13 mai 2002 mais reçues par elles postérieurement à la date ultime fixée pour le dépôt des observations, soit le 15 mai 2002, le Conseil a méconnu tant le principe du contradictoire que les exigences du procès équitable telles qu'elles résultent de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (la CESDH) ; qu'elles font aussi grief au Conseil d'avoir refusé de répondre à leur demande aux fins de renvoi préjudiciel devant la Cour de justice des Communautés européennes formulée dans leur second mémoire ;
Mais considérant, d'abord, que l'affaire ayant été examinée par le Conseil de la concurrence conformément aux dispositions de l'article L. 463-3 du Code de commerce et le délai de deux mois ouvert aux destinataires de la notification des griefs pour présenter un mémoire en réponse par les dispositions de l'article L. 463-2 du même Code étant venu à expiration le 15 mai 2002, c'est en faisant l'exacte application des textes précités que le Conseil a déclaré recevable le mémoire déposé le 13 mai 2002 par les requérantes et écarté des débats leur second mémoire, déposé hors délai le 14 juin 2002 ;
Considérant, ensuite, qu'il n'en est résulté aucune atteinte au droit à un procès équitable dès lors que les parties ont disposé, par application du texte précité, d'un délai de quinze jours avant la séance du 26 juin 2002 pour prendre connaissance des observations du commissaire du Gouvernement comprenant ses propositions de sanctions pécuniaires, de sorte qu'elles ont été mises à même de préparer les éléments leur permettant d'en discuter le montant dans leurs observations orales présentées devant les membres du Conseil;
Considérant, en outre, qu'est inopérant le reproche fait au Conseil de la concurrence d'avoir refusé de prendre en considération la demande de renvoi préjudiciel relative à la validité de la réglementation française du remboursement des frais de déménagement des militaires contenue dans un mémoire déclaré, à juste titre, irrecevable;
Considérant, en troisième lieu, que selon les requérantes l'engagement de poursuites contre les seules entreprises de déménagement et non contre les fonctionnaires qui leur réclament les devis litigieux et les remettent à leur administration aux fins de paiement caractérise une violation des dispositions de l'article 6 de la CESDH ;
Mais considérant que le Conseil de la concurrence n'ayant pas le pouvoir de sanctionner le comportement des personnels bénéficiaires des prestations de l'administration, seraient-ils impliqués dans la mise en œuvre des pratiques anticoncurrentielles imputées aux entreprises de déménagement, c'est sans encourir le reproche susvisé que le Conseil s'est prononcé comme il a fait;
Considérant que les requérantes font aussi valoir que les faits dont s'agit ont déjà été jugés et les entreprises condamnées ; qu'en effet, le Conseil de la concurrence a déjà sanctionné plusieurs entreprises de Bretagne, notamment par sa décision n° 99-D-50 du 13 juillet 1999 relative aux pratiques anticoncurrentielles concernant le déménagement des militaires dans la région de Vannes ; qu'elles en déduisent que "cette nouvelle notification se heurte à l'autorité de la chose jugée et au principe qui veut qu'on ne soit pas jugé deux fois pour les mêmes faits (non bis in idem) ;
Mais considérant que le Conseil de la concurrence a pertinemment retenu que s'il est exact que certaines des entreprises mises en cause dans la présente affaire ont déjà été sanctionnées pour des pratiques de devis de couverture, les faits ayant donné lieu à ces sanctions, qui se sont déroulés soit en 1989 et 1990 (décision n° 92-D-37 du 2 juin 1992), soit en 1992 et 1993 (décision n° 99-D-50 précitée), sont distincts de ceux visés par la présente procédure, lesquels ont été commis entre 1995 et 1997 ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la violation de la règle et du principe ci-dessus rappelés est sans fondement;
Considérant encore que les requérantes concluent à l'annulation de la décision du 27 septembre 2002 en ses dispositions relatives à la société Boulouard au motif que les dispositions des articles L. 621-40 et L. 621-43 du Code de commerce s'opposent au prononcé de toute condamnation à l'encontre de cette société dans la mesure où celle-ci trouverait son origine dans des pratiques antérieures à la mise en redressement judiciaire de cette partie prononcée par jugement du Tribunal de commerce de Lorient du 4 mai 2001 et où le ministre chargé de l'Economie a négligé de déclarer sa créance au titre de la condamnation requise ; qu'elles ajoutent que le prononcé d'une sanction après l'adoption, comme en l'espèce, d'un plan de continuation, en dépit de l'absence de déclaration de la créance correspondante, a pour effet de rompre l'égalité entre les créanciers et de faire peser sur le bénéficiaire du plan des charges non prévues;
Mais considérant que les condamnations prononcées par le Conseil de la concurrence, ayant la nature de sanctions pécuniaires, la créance du Trésor public n'existe que depuis la décision du Conseil de sorte que, s'agissant de la société Boulouard, cette créance, qui n'a pas son origine antérieurement au jugement d'ouverture de son redressement judiciaire, n'était pas soumise aux dispositions de l'article L. 621-43 du Code de commerce;
Sur le fond
Sur les pratiques :
Considérant que selon les requérantes le Conseil de la concurrence n'a pas justifié les limites du marché pertinent ; qu'elles exposent, à cet égard, que la réglementation applicable au remboursement des opérations de déménagement des militaires n'est pas spécifique à la Bretagne mais s'applique sur tout le territoire métropolitain et que c'est donc de manière artificielle qu'est défini un marché de zone géographique sur la Bretagne, les militaires déménageant également hors de Bretagne; qu'au surplus le Conseil n'a pas pris en compte le fait que le militaire domicilié en Bretagne pouvait s'adresser à une entreprise située hors de Bretagne, par exemple une entreprise proche de son lieu de destination;
Mais considérant qu'à la demande de prestations de déménagement des militaires mutés à partir des bases établies en Bretagne, c'est-à-dire essentiellement celle des militaires de la Marine nationale, répond l'offre d'entreprises de dimension locale ou régionale, spécialisées dans ce type de déménagements, de sorte que pour cette catégorie de prestations l'offre et la demande ne peuvent se rencontrer que dans une aire géographiquement limitée par la proximité de l'entreprise avec laquelle le client entre directement en relation pour l'évaluation du cubage du mobilier à transporter et l'établissement du devis préalable à l'exécution du déménagement;
Considérant, en conséquence, qu'ainsi que l'a constaté le Conseil de la concurrence, sans avoir à faire d'autre recherche, il existe bien, nonobstant le caractère national de la réglementation relative au remboursement des déménagements des agents du ministère de la Défense, un marché régional du déménagement des militaires de la Marine nationale en Bretagne;
Et considérant que le Conseil de la concurrence a, par des motifs pertinents, qui répondent à l'argumentation des requérantes, notamment celle, non sérieusement étayée, relative aux faits imputés à la société Boulouard, et que la cour fait siens, caractérisé, sur le marché ainsi délimité, en s'appuyant sur l'étude, lors de l'enquête administrative, de 127 dossiers de déménagements de militaires basés en Bretagne effectués entre 1995 et 1997, des pratiques d'ententes, prohibées par les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, mises en œuvre par les entreprises Le Floch, Roussel, Démex, AGS et Boulouard et consistant en la fourniture de devis de couvertures en vue de la fourniture de prestations de déménagement à des agents du ministère de la Défense ;
Qu'il suffit de relever ici que l'affirmation des requérantes selon laquelle "le Conseil de la concurrence a considéré à tort qu'il y avait entente entre l'entreprise Joncqueur et la société AGS puisque les deux étaient liées par un contrat de sous-traitance" dès lors qu'il a été démontré que la seconde avait établi des devis de connivence au profit de la première et qu'il n'est produit aucun élément de nature à établir que l'une ou l'autre de ces entreprises ne disposait pas d'une autonomie de décision quant à son comportement sur le marché considéré;
Sur les sanctions
Considérant qu'aux termes de l'article L. 464-2 du Code de commerce les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ; qu'elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction;
Considérant que les requérantes font grief au Conseil de s'être arrêté à l'examen d'une pratique sans rechercher si effectivement elle avait eu pour effet d'éliminer la concurrence ou d'élever artificiellement les prix ; que déniant avoir réalisé des profits illicites, elles estiment qu'à supposer les pratiques incriminées établies, le montant des condamnations est excessif;
Mais considérant, en premier lieu, s'agissant de la gravité des faits, qu'il y doit être souligné, d'une part, que les pratiques de concertation par utilisation de devis de couverture ne sont nullement imposées aux entreprises du secteur par le dispositif réglementaire régissant le remboursement des frais de déménagement des militaires, lequel vise au contraire à renforcer le jeu de la concurrence par les prix, et, d'autre part, que des comportements analogues ont déjà été sanctionnés, notamment par une décision du Conseil de la concurrence n° 92-D-37 du 2 juin 1992 relative à des pratiques anticoncurrentielles concernant le déménagement des marins de la Marine nationale en Bretagne, étant observé que cette décision a été publiée dans un quotidien local et que les sociétés Le Floch et AGS figurent au nombre des entreprises qui se sont vues infliger des sanction pécuniaires à l'occasion de cette procédure qui a donné lieu à un arrêt de cette cour en date du 29 avril 1993, antérieur aux faits dénoncés ;
Considérant, s'agissant du dommage à l'économie, que la systématisation des ententes visant à aligner le prix des prestations de déménagement des militaires sur la limite supérieure de prise en charge par l'administration prévue par les textes a nécessairement eu pour effet d'élever artificiellement ces prix, partant de provoquer des surcoûts supportés par la collectivité, même si l'importance n'en a pas été mesurée ; qu'il ne peut être utilement soutenu que les pratiques en cause n'ont pas causé de dommage à l'économie;
Considérant, s'agissant des éléments individuellement retenus pour la fixation du montant des sanctions pécuniaires, qu'il y a lieu de relever:
- en ce qui concerne la société Le Floch que l'examen des dossiers communiqués à la DGCCRF a permis de démontrer que cette entreprise a effectué cinq déménagements pour lesquels une pratique de devis de couverture a été mise en œuvre à son profit et qu'elle a fourni un devis de couverture dans trois dossiers ; que la société Le Floch a réalisé en France, en 2001, un chiffre d'affaires hors taxe de 2 384 062 euros;
- en ce qui concerne la société Roussel, que celle-ci a effectué trois déménagements pour lesquels une pratique de devis de couverture a été mise en œuvre à son profit et qu'elle a fourni un devis de couverture dans cinq dossiers ; que la société Roussel a réalisé en France, en 2001, un chiffre d'affaires hors taxe de 2 434 644 euros;
- en ce qui concerne la société AGS, qu'elle a obtenu de la société Démex six devis de couverture et effectué les déménagements correspondants ; que cette société a réalisé en France, en 2001, un chiffre d'affaires hors taxe de 1 624 039 euros ;
- en ce qui concerne la société Boulouard, que celle-ci a effectué deux déménagements pour lesquels une pratique de devis de couverture a été mise en œuvre à son profit et qu'elle a fourni un devis de couverture dans deux dossiers ; que la société Boulouard, qui a réalisé en France, en 2001, un chiffre d'affaires hors taxe de 3 342 273 euros, a été mise en redressement judiciaire le 4 mai 2001, un plan de redressement organisant la continuation de l'entreprise ayant été ultérieurement arrêté, ainsi que le rappelle la décision déférée ;
Considérant qu'en l'état de l'ensemble de ces éléments généraux et individuels, il y a lieu de confirmer ladite décision quant au montant des sanctions pécuniaires, sauf en ce qui concerne la société Démex ;
Considérant, enfin, que la publication de cette décision dans la revue " Armées d'aujourd'hui ", mensuel édité par le ministère de la Défense et destiné spécifiquement à l'information des personnels militaires est une mesure appropriée, eu égard à la persistance des pratiques qui y sont relatées ;
Considérant toutefois que la mise en liquidation judiciaire de la société Démex-Joncqueur par jugement du Tribunal de commerce de Brest en date du 11 avril 2003 justifie que cette entreprise soit déchargée des sanctions prononcées à son encontre ;
Par ces motifs : Déclare irrecevable le recours incident formé par le ministre chargé de l'Economie Confirme la décision déférée, sauf en ce qu'elle a prononcé des sanctions à l'encontre de la société Démex-Joncqueur ; La réformant de ce seul chef, dit n'y avoir lieu à sanction à l'encontre de cette société Laisse les dépens à la charge des sociétés requérantes.
[version corrigée par arrêt de la Cour d'appel de Paris, 1re ch. sect. H, n° ECOC0300361X du 9 septembre 2003]