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Décisions

Ministre de l’Économie, 28 janvier 2003, n° ECOC0400146Y

MINISTRE DE L’ÉCONOMIE

Lettre

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DE L'ECONOMIE

Défendeur :

Conseil de la société Crédit Agricole

Ministre de l’Économie n° ECOC0400146Y

28 janvier 2003

MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE

Maître,

Par dépôt d'un dossier déclaré complet le 24 décembre 2002, vous avez notifié le projet d'offre publique de la société Crédit Agricole SA sur l'ensemble des titres de la société Crédit Lyonnais SA. Ce projet d'offre publique a été déclaré recevable le 23 décembre 2002 par le Conseil des marchés financiers.

I. - Les parties et l'opération

Crédit Agricole SA, véhicule coté en bourse, est l'organe central du groupe Crédit Agricole (1) ainsi que la société mère des filiales spécialisées du groupe. De fait, le groupe est structuré en trois niveaux : (i) 48 caisses régionales (regroupant 2 666 caisses locales et 5,5 millions de sociétaires), qui sont les principaux actionnaires de (ii) Crédit Agricole SA ; (iii) la Fédération nationale du Crédit Agricole, qui est l'instance de concertation et de représentation du groupe.

Les activités du groupe Crédit Agricole (ci-après " le Crédit Agricole ") s'organisent autour de cinq pôles de métiers : (i) la banque de proximité en France (activités de vente de produits et services bancaires et d'assurances commercialisés par les caisses régionales) qui s'appuie sur un réseau d'environ 6 800 agences ; (ii) la banque de grande clientèle (grandes entreprises et investisseurs institutionnels français et étrangers), qui recouvre l'ensemble des métiers du Crédit Agricole (financement, investissements, marchés, fusions-acquisitions, capital-investissement et services financiers) ; (iii) la gestion d'actifs (OPCVM et comptes gérés), assurances et banque privée ; (iv) les activités exercées à l'étranger, essentiellement des activités de banque de détail ; (v) les activités de gestion pour compte propre.

Le Crédit Agricole a réalisé en 2001 un chiffre d'affaires total consolidé de 48,5 milliards d'euros, dont plus de 35 milliards dans l'Union européenne et plus de 31 milliards en France.

Crédit Lyonnais SA est à la tête d'un groupe (ci-après " Crédit Lyonnais ") qui exerce trois métiers principaux : (i) la banque de réseau en France, qui comporte environ 1 900 agences ; (ii) la banque de grande clientèle ; (iii) la gestion d'actifs. Le groupe comporte également un pôle d'activité en matière d'assurances - pour l'essentiel de l'assurance-vie - regroupé au sein de la société Union des assurances fédérales. Le Crédit Lyonnais a réalisé en 2001 un chiffre d'affaires total consolidé de 22,5 milliards d'euros, dont près de 17 milliards dans l'Union européenne et 15,7 milliards en France.

L'article L. 410-1 du Code de commerce dispose que les règles définies au livre IV du Code de commerce, qui inclut le titre III relatif au contrôle des concentrations économiques, " s'appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques, notamment dans le cadre de conventions de délégation de service public. "

Toutefois, le premier alinéa de l'article L. 511-4 du Code monétaire et financier (CMF) dispose que " le livre IV du Code de commerce s'applique aux établissements de crédit pour ce qui est de leurs activités définies à l'article L. 511-3 ", c'est-à-dire les activités autres que les opérations de banque et connexes, au sens des articles L. 311-1 et L. 311-2 du CMF. Par ailleurs, les établissements de crédit sont, aux termes des articles L. 511-9 et L. 511-10 du CMF, agréés par le comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (ci-après " CECEI ").

Sur le fondement de l'article L. 511-10, Crédit Agricole SA a donc également notifié l'opération au CECEI.

Par courrier daté du 8 janvier 2003 adressé au Gouverneur de la Banque de France, Président du CECEI, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie a précisé que le CECEI " dispose d'une compétence exclusive pour examiner, au titre du bon fonctionnement du système bancaire, l'ensemble des aspects des opérations de concentrations entre entreprises dont l'activité se compose uniquement d'opérations bancaires ou connexes au sens du Code monétaire et financier (articles L. 311-1 et L. 311-2). Lorsque les entreprises concernées exercent également dans d'autres secteurs de l'économie, ou lorsqu'en application des articles 21 et 22 du règlement (CE) n° 4064-89 du Conseil, la Commission européenne dispose d'une compétence exclusive pour examiner l'opération, la concentration doit faire l'objet d'une notification aux autorités de concurrence de droit commun, étant entendu par ailleurs que le Code de commerce ne s'applique pas aux activités bancaires et connexes. "

Aussi bien le groupe Crédit Agricole (ci-après " le Crédit Agricole ") que le groupe Crédit Lyonnais (ci-après " le Crédit Lyonnais ") exercent certaines activités qui, au sens du CMF, ne sont ni des opérations de banques ni des opérations connexes à celles-ci (par commodité on désignera ci-après par " opérations bancaires " l'ensemble des opérations de banque et des opérations connexes au sens du CMF, et par " opérations non bancaires " les autres opérations). Il convient donc d'examiner si l'opération notifiée est contrôlable par le ministre chargé de l'Economie, au sens des articles L. 430-1 à L. 430-3 du Code de commerce.

L'opération notifiée a pour effet d'entraîner le contrôle exclusif du Crédit Lyonnais au profit de Crédit Agricole SA. Cette opération constitue donc une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

Bien que franchissant les seuils de chiffres d'affaires déclenchant le contrôle communautaire des concentrations, les deux groupes parties à l'opération réalisent plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires en France. Cette opération n'est donc pas de dimension communautaire et est soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce, relatives à la concentration économique.

II. - La définition des marchés

Les activités concernées par l'opération relèvent essentiellement du secteur bancaire et du secteur des assurances.

Les parties exercent également des activités relevant d'autres secteurs tels que celui de l'immobilier. Toutefois, en ce qui concerne ces dernières activités, les positions des parties y sont relativement faibles et l'opération soit entraînera des chevauchements très faibles, soit n'entraînera pas de chevauchement. En conséquence, il n'est pas nécessaire, pour les besoins de la présente décision, de définir les marchés pertinents relatives à ces dernières activités.

L'opération aura par ailleurs un impact significatif sur l'activité de location de coffres-forts, activité qui ne relève pas des opérations bancaires, mais qui est liée, du fait de l'implantation physique des coffres-forts dans les agences, à l'activité de banque de détail. Toutefois, l'activité de location de coffres-forts présente certaines spécificités par rapport à d'autres activités de banque de détail. Ainsi, La Poste, qui est un concurrent des autres établissements de crédit pour nombre de services de la banque de détail, ne peut pas, en revanche, offrir des services tels que le crédit à la consommation, certains crédits à l'immobilier, ainsi que des services de location de coffres-forts (2).

Concernant la location de coffres-forts, les autorités de concurrence n'ont pas eu l'occasion, jusqu'à présent, de définir de marché pertinent. La définition du marché n'est pas aisée du fait du peu d'information disponible sur cette activité. En effet, il ressort de l'instruction du dossier que les établissements de crédit ne possèdent pas de données statistiques globales et exhaustives sur la location de coffres-forts en France. Il en est de même de la Banque de France, dont le gouverneur a indiqué (3) que " la Banque de France ne dispose pas de données statistiques sur le nombre de coffres-forts loués par les banques ni sur les chiffres d'affaires s'y rapportant ". Les parties n'ont pu donner que des informations relatives à leur propre activité de location de coffres-forts. Crédit Agricole a notamment indiqué qu'elle avait réalisé un chiffre d'affaires en 2001 de [...] millions d'euros en France pour cette activité, Crédit Lyonnais ayant quant à lui réalisé un chiffre d'affaires de [...] millions d'euros en 2002.

L'instruction du dossier permet cependant de dégager certaines caractéristiques de cette activité. Ainsi, il apparaît que, bien qu'étant annexe à l'activité de banque de détail, cette activité n'est pas exercée par toutes les agences d'un même réseau bancaire. En outre, les informations recueillies montrent que cette activité revêt une dimension locale. En effet, pour des raisons de sécurité, les clients ne souhaitent pas transporter sur de longues distances leurs biens de valeur et s'adressent donc à l'agence de leur banque habituelle qui est la plus proche de leur domicile. Dès lors, il serait cohérent de définir une zone de chalandise de dimension similaire à la zone d'attraction de l'agence bancaire en matière de banque de détail.

Pour apprécier l'effet de réseau induit par l'opération de concentration, les parties ont proposé de retenir la notion de microzone. Selon la définition adoptée par les parties, une microzone est un bassin de vie regroupant des communes liées entre elles par une attraction forte, du point de vue des services ou du travail. Pour ce faire, les parties ont utilisé les travaux de la société Expérian France, qui se fondent, notamment, sur des bases de données de l'INSEE.Au total, les parties ont identifié 795 microzones pour l'ensemble du territoire français. Les délais impartis par la procédure ne permettent pas de vérifier de manière approfondie la pertinence de la définition de chacune des 795 microzones en matière de banque de détail. Il appartiendra au demeurant au CECEI de procéder à de telles vérifications dans le cadre de l'analyse qu'il effectuera au titre de sa mission de garant du " bon fonctionnement du système bancaire ".

Toutefois, la démarche proposée par les parties a l'avantage de dépasser le simple découpage administratif du territoire et semble plus cohérente avec la notion de marché pertinent géographique, " territoire sur lequel sont offerts et demandés des biens et des services, sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes et qui peut être distingué de zones géographiques voisines, parce que, en particulier, les conditions de concurrence y diffèrent de manière appréciable " (4). En effet, les critères d'affectation des communes à une microzone prennent en compte les flux entre le lieu de domicile et le lieu de travail, ainsi que les facteurs d'attractivité de la commune-pôle tels que la taille de l'agglomération de la commune ou la présence de commerces de détail.Il peut être noté à cet égard que le ministre a intégré des critères semblables dans son analyse concurrentielle relative aux zones de chalandises des grandes surfaces spécialisées dans le bricolage. Ainsi, dans la décision relative à l'acquisition de Tabur SA par Mr Bricolage SA (5), le ministre, après avoir rappelé les critères de définition des zones de chalandise, précise que " au-delà de ces principes généraux relatives à la délimitation des zones de chalandise, chaque zone doit faire l'objet d'une analyse au cas par cas afin de prendre en compte un certain nombre de facteurs dont l'influence peut être non négligeable. Parmi ces derniers, sont en particulier à retenir le coût du déplacement et la direction naturelle des flux de déplacement. " S'agissant des flux de déplacement naturels, la décision précise également qu'ils " doivent être pris en compte afin d'évaluer vers quelles enseignes il est le plus probable que s'effectue le report de clientèle en cas d'augmentation de prix. Ainsi, dans une agglomération relativement importante, disposant naturellement d'une forte attractivité du fait des services administratifs dont elle dispose, ainsi que de la gamme de magasins et des hypermarchés qu'elle offre, un magasin de bricolage de format équivalent pourra représenter une concurrence pour un autre magasin de bricolage situé en dehors de l'agglomération tout en restant dans la zone de chalandise d'une vingtaine de minutes : les consommateurs ont naturellement de multiples raisons de se rendre dans cette agglomération. L'inverse ne sera cependant pas nécessairement toujours vrai : un magasin implanté en zone rurale pourra subir la concurrence des magasins implantés dans une grande agglomération, mais ne sera pas en mesure d'exercer une pression concurrentielle sur ces mêmes magasins. Les conditions de concurrence peuvent donc être asymétriques en fonction de l'implantation des surfaces de vente. Ainsi, même si un point de vente se trouve à l'intérieur de la zone mais en périphérie de cette dernière, il est nécessaire de relativiser son poids dans le jeu de la concurrence. "

Pour ce qui concerne la banque de détail, on peut donc raisonnablement penser que la notion de microzone correspond dans une large mesure à la définition d'un marché géographique pertinent, sur lequel les conditions de concurrence sont homogènes, tout en permettant de prendre en compte certaines asymétries de concurrence telles que celles relevées par le ministre dans la décision précitée.

En conséquence, pour les besoins de la présente décision, il sera retenu un marché pertinent de la location des coffres-forts avec une dimension locale fondée sur la microzone telle que définie ci-dessus.

En matière de banque commerciale, le Crédit Agricole et le Crédit Lyonnais sont tous les deux des opérateurs significatifs, notamment en termes (i) d'affacturage et de (ii) financement du commerce extérieur, activités qui relèvent toutes les deux des opérations bancaires. La Commission a considéré dans plusieurs décisions que chacune de ces activités constituait un marché pertinent distinct, en aval de l'assurance crédit (6).

L'affacturage constitue une opération de gestion financière par laquelle un organisme spécialisé gère les comptes clients d'entreprises en acquérant leurs créances, en garantissant éventuellement la couverture du risque acheteur et en effectuant, le cas échéant, le recouvrement pour son propre compte. La plupart du temps, les opérateurs sont des filiales de banques qui, souvent, se réassurent auprès de sociétés d'assurance crédit. Néanmoins l'assurance crédit et l'affacturage constituent deux marchés distincts selon la Commission, dans la mesure où, notamment, l'assurance crédit ne couvre que le risque d'insolvabilité du client de l'assuré (7).

Le financement du commerce extérieur comprend le financement à court terme des exportations de produits de consommation ainsi que le financement à long terme des exportations de biens d'équipement. Dans certains cas, les banques qui accordent ces financements souscrivent des contrats d'assurance crédit afin de garantir les crédits qu'elles octroient.

En matière d'assurances, les parties sont essentiellement présentes dans l'assurance-vie et, dans une moindre mesure, dans l'assurance dommages. Dans plusieurs décisions, le ministre a estimé, à l'instar de la Commission, qu'il convenait de distinguer l'assurance-vie de l'assurance dommages. Il ressort par ailleurs de ces décisions que l'on peut définir autant de marchés qu'il y a de risques à couvrir. Toutefois, au cas d'espèce, il n'est pas nécessaire, en matière d'assurance dommages, de définir plus étroitement les marchés concernés, dans la mesure où les parties ont des positions relativement faibles et où les conclusions de l'analyse demeureront inchangées. Enfin, en ce qui concerne la dimension géographique, il ressort des décisions précitées que les marchés relevant de l'assurance-vie et de l'assurance dommages ont une dimension nationale. En conséquence, pour les besoins de la présente décision il sera retenu, d'une part, (i) un marché de l'assurance-vie de dimension nationale et, d'autre part, (ii) un marché de l'assurance dommages de dimension nationale.

III. - Analyse concurrentielle

1. La location de coffres-forts

Ainsi que cela a déjà été précisé, il n'existe pas d'information statistique exhaustive en matière de location de coffres-forts tant au niveau national qu'au niveau local. Toutefois, cette activité est un service de proximité étroitement lié à la présence d'un réseau de guichets, les clients d'une agence s'agissant de la prestation de location de coffres-forts étant par ailleurs, de manière générale, clients de cette agence pour les autres activités exercées par celle-ci, et notamment la gestion de comptes-chèques. Dans ces conditions, la création ou le renforcement d'une position dominante, que la nouvelle entité serait susceptible d'acquérir en matière de banque de détail sur certaines microzones (8), pourrait créer un problème de concurrence en matière de location de coffres-forts sur ces mêmes microzones, d'autant plus que, si toutes les agences n'exercent pas d'activités de location de coffres-forts, on relève que la principale barrière à l'entrée sur ce marché est lié à la détention d'un réseau d'agences bancaires. Par ailleurs, le poids de La Poste doit être relativisé. En effet, ainsi que cela a été indiqué ci-dessus, La Poste n'exerce pas toutes les activités de ses concurrents en matière de banque de détail et ne propose notamment pas de services de location de coffres-forts. Aussi, au regard de ces activités non exercées par La Poste, le renforcement du Crédit Agricole en termes de réseau est beaucoup plus important.

Eu égard, notamment, aux positions renforcées de la nouvelle entité sur un nombre important de microzones, ainsi que cela a été décrit ci-dessus, il peut exister un risque d'atteinte à la concurrence en matière de banque de détail, et donc de location de coffres-forts, sur plusieurs de ces microzones. Toutefois, dans la mesure où le CECEI devra examiner de manière approfondie les marchés bancaires, il disposera de tous les éléments précis permettant d'identifier les atteintes à la concurrence de l'opération en matière de banque de détail. Dès lors, les remèdes qu'il prendrait afin de pallier les atteintes à la concurrence en matière de banque de détail seraient à même de faire disparaître les atteintes à la concurrence qui y seraient liées en matière de location de coffres-forts.

2. L'affacturage, le financement du commerce extérieur et l'assurance crédit

Sur le marché de l'affacturage, les parts de la nouvelle entité seraient d'environ [30-40] % (Crédit Agricole : [20-30] % et Crédit Lyonnais : [0-10] %), devant GE Factofrance (environ [20-30] %), Banques Populaires ([0-10] %), Société Générale ([0-10] %), Crédit Mutuel-CIC ([0-10] %) et BNP Paribas ([0-10] %).

En ce qui concerne le marché du financement du commerce extérieur, son évaluation est difficile ainsi que l'a déjà souligné récemment la Commission (9). Toutefois, il apparaît que les parts de la nouvelle entité ne devraient pas dépasser [20-30] % (environ [10-20] % pour le Crédit Agricole et [0-10] % pour le Crédit Lyonnais). Selon la décision précitée, les principaux autres opérateurs seraient BNP Paribas (entre 15 et 25 % de part de marché), Société Générale (entre 15 et 25 %) et Natexis Banques Populaires (entre 5 et 15 %).

Sur ces deux marchés, il apparaît que la nouvelle entité ne sera pas en mesure d'acquérir ou de renforcer une position dominante, dans la mesure où il existe des concurrents importants avec des parts de marché significatives.

Les parties ont recouru à l'assurance crédit, notamment du fait de leurs activités d'affacturage et de financement du commerce extérieur, pour un montant de moins de [...] millions d'euros en 2001, soit moins de [0-10] % de la valeur du marché pour cette période (10).

Par ailleurs, les fournisseurs d'assurance crédit sont des opérateurs qui disposent d'une puissance de marché importante puisque les trois premiers d'entre eux collectent plus de 75 % des primes afférentes à ce type d'assurance en France (11).

Il s'ensuit qu'à l'issue de l'opération le Crédit Agricole ne bénéficiera pas d'une puissance d'achat sur le marché de l'assurance crédit susceptible de placer les fournisseurs d'assurance crédit en situation de dépendance économique.

3. L'assurance vie et l'assurance dommages

En matière d'assurance vie, le réseau renforcé du Crédit Agricole sera un atout pour distribuer les produits d'assurance vie. En effet, les guichets sont un moyen privilégié de distribution puisque près de 60 % du chiffre d'affaires de l'assurance vie est réalisé en France au travers des guichets (11).

La part de marché combinée des parties est [10-20] %, tant en termes de primes collectées qu'en termes d'encours gérés (Crédit Agricole : [10-20] % ; Crédit Lyonnais : [0-10] %. La nouvelle entité sera le 2e opérateur sur ce marché mais sera en concurrence avec des opérateurs importants tels que la CNP ([10-20] %), qui bénéficie par ailleurs du réseau de La Poste, Axa ([10-20] %), BNP Paribas ((0-10] %), Crédit Mutuel-CIC ([0-10] %), AGF et Aviva ([0-10] % chacun), Société Générale ([0-10] %).

En conséquence, l'opération ne sera pas de nature à créer une position dominante au profit du Crédit Agricole sur le marché de l'assurance vie.

En matière d'assurance dommages, la part de marché combinée des parties est faible puisqu'elle est inférieure à [0-10] % (Crédit Agricole : [0-10] % ; Crédit Lyonnais : [0-10] %). La nouvelle entité sera face à plusieurs concurrents puissants (parmi lesquels AXA : [10-20] % ; Groupama Gan : [10-20] % ; AGF : [10-20] %) bénéficiant de parts de marché beaucoup plus fortes.

En conséquence, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché de l'assurance dommages, notamment par création ou renforcement d'une position dominante au profit du Crédit Agricole.

En conclusion, je vous informe donc que j'autorise cette opération.

Je vous prie d'agréer, Maître, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Nota. - A la demande des parties notifiantes, des informations relatives au secret des affaires ont été occultées et la part de marché exacte remplacée par une fourchette plus générale.

Ces informations relèvent du "secret des affaires", en application de l'article 8 du décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence.

(1) Crédit Agricole SA, en tant qu'organe central du groupe, veille à la cohésion et au bon fonctionnement du réseau, ainsi qu'au respect des normes de gestion garantissant la liquidité et la solvabilité des caisses régionales ; il garantit l'unité financière du groupe et assure la cohérence du développement du groupe en coordonnant la stratégie des différents métiers et en concevant les produits et services commercialisés par le réseau.

(2) Aux termes de l'article L. 518-25 du CMF, " La Poste offre, dans le domaine des services financiers et dans le respect des règles de la concurrence, selon les règles propres à chacun de ses domaines d'activité, contenues notamment dans le Code des postes et télécommunications, des prestations relatives aux moyens de paiement et de transfert de fonds, aux produits de placement et d'épargne, à la gestion des patrimoines, à des prêts d'épargne-logement et à tous produits d'assurance. "

(3) Lettre datée du 16 janvier 2003, adressée au Directeur Général de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes.

(4) Décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence.

(5) Décision du 29 août 2002, BOCCRF n° 19 du 31 décembre 2002.

(6) Voir décision M. 2805 Natexis Banques Populaires/COFACE du 1er juillet 2002.

(7) Voir notamment la décision M. 1661 Crédit Lyonnais/Allianz-Euler du 26 août 1999.

(8) A l'issue de l'opération de concentration, la nouvelle entité détiendra, hors La Poste, plus de [25-35 %] % des guichets au plan national et sera le premier opérateur dans près de 60 % des microzones. Sur plus de 170 microzones la part de guichets (hors La Poste) de la nouvelle entité représentera deux à cinq fois la part du concurrent le plus immédiat, et dans une cinquantaine de ces microzones la part de la nouvelle entité sera au moins trois fois supérieure à celle du concurrent le plus immédiat.

(9) Voir décision M. 2805 du 1er juillet 2002 précitée.

(10) La Fédération française des sociétés d'assurances évalue à 700 millions d'euros le chiffre d'affaires généré par l'assurance crédit en France en 2001 (L'assurance française en 2001).

(11) L'assurance française en 2001 précité.