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Décisions

CA Paris, 13e ch. A, 24 juin 1998, n° 98-00783

PARIS

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guilbaud

Avocat général :

M. Blanc

Conseillers :

MM. Paris, Barrau

Avocat :

Me Vignet.

TGI Auxerre, ch. corr., du 4 sept. 1997

4 septembre 1997

Rappel de la procédure:

La prévention:

N Micheline est poursuivie du chef de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, en l'espèce sur des croissants et mini-croissants "pur beurre" sur les qualités substantielles et la composition de ces produits fabriqués avec d'autres matières grasses que le beurre et présentant un déficit de matières grasses,

Faits commis courant 1995, à Montigny-La-Resle (89), Bobigny et sur le territoire national,

Infraction prévue et réprimée par l'article L. 213-1 Code de la consommation

Le jugement:

Le tribunal, par jugement contradictoire, a:

Renvoyé Micheline N des fins de la poursuite en application de l'article 470 du Code de procédure pénale.

Renvoyé le Ministère public à mieux se pourvoir.

Vu les articles 473 et suivants du Code de procédure pénale,

Laissé les dépens à la charge de l'Etat.

Les appels:

Appel a été interjeté par:

M. le Procureur de la République, le 11 septembre 1997 contre Madame N Micheline;

Madame N Micheline, le 12 septembre 1997 sur les dispositions pénales,

Décision:

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels relevés par le Ministère public et le prévenu à l'encontre du jugement précité, auquel il convient de se référer pour l'exposé de la prévention;

Monsieur l'Avocat général requiert, par infirmation, une déclaration de culpabilité à l'encontre de Micheline N; il s'en rapporte à la sagesse de la cour sur la sanction à infliger ; il fait valoir, essentiellement, que les analyses pratiquées par le Laboratoire de Massy ne sont pas contestées par la prévenue, et que les faits visés à la prévention sont bien imputables à Micheline N, en l'absence de délégation de pouvoir valable;

Qu'en effet, Michel N, le délégataire, ne justifiant pas de la compétence, de l'autorité, et des moyens nécessaires pour bénéficier d'une telle délégation ;

Par voie de conclusions, Micheline N sollicite la confirmation du jugement dont appel, qui l'a renvoyée des fins de la poursuite;

Elle ne conteste pas, oralement, les résultats des analyses pratiquées par le Laboratoire de Massy, à la demande de la Direction Générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes, mais elle discute leur imputabilité ;

Elle fait valoir, essentiellement, que, depuis le 2 janvier 1993, son père, Michel N, bénéficie d'une délégation de pouvoirs, en qualité de directeur de la fabrication ; que l'avenant au contrat de travail du 2 janvier 1993 précise les attributions du directeur, à savoir la préparation de la fabrication, la surveillance de l'exécution, le contrôle de la qualité; qu'ainsi dans le cadre de ses fonctions, Michel N doit veiller particulièrement au contrôle des matières premières, des méthodes de production et de productivité;

Considérant qu'il convient de rappeler que, courant 1995, les services de la Direction Générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes procédaient à plusieurs contrôles au sein de la société "X", sise à Montigny La Resle (89), dont le PDG était Micheline N ; qu'il était relevé, à cette occasion, dans la fabrication et la commercialisation de viennoiseries "Pur beurre", un déficit en matière grasse, et la présence de matières grasses étrangères au beurre ;

Considérant que la matérialité des faits n'est pas contestée par la prévenue,qui, à l'audience de la cour, a expliqué que des mélanges de produits pouvaient intervenir, lors des changements de production sur les chaînes de fabrication;

Considérant toutefois, que Micheline N, en sa qualité de chef d'entreprise, verse aux débats un document intitulé "avenant au contrat de travail - délégation de pouvoir", daté du 2 janvier 1993 et signé de sa main et de celle de son père; Qu'il y est spécifié que Michel N, directeur de fabrication, suite à l'augmentation de son salaire, aura désormais les attributions suivantes :

"- préparation de la fabrication,

- surveillance de l'exécution,

- contrôle de qualité"

Qu'il assurera plus particulièrement :

- le contrôle des matières premières,

- le contrôle des méthodes de production et de productivité,

- la direction du laboratoire et le contrôle des analyses de qualité, avec conformité à la législation et aux normes des produits mis sur le marché";

Considérant que la cour rappelle que la forme des délégations de pouvoir n'est pas réglementée ;

Qu'elle relève, en l'espèce, que Michel N avait le statut de "directeur de fabrication", qu'il était majoritaire dans la société, et qu'il est boulanger de profession ;que, de par ses compétences techniques et son rang dans l'entreprise, lesquels avaient justifié une importante augmentation de salaire, il avait l'autorité nécessaire pour contrôler la qualité des matières premières (achats réalisés par le PDG mais sur sa proposition), surveiller la fabrication, vérifier la qualité des produits finis, contrôler et diriger les méthodes de production et le laboratoire interne de la société;

Qu'en définitive, la cour estime que Michel N avait la compétence, l'autorité et les moyens nécessaires à l'accomplissement de la mission qui lui avait été confiée le 2 janvier 1993 ;

Considérant, dès lors,que la cour confirmera le jugement dont appel qui a renvoyé Micheline N des fins de la poursuite ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Vu la délégation de pouvoirs du 2 janvier 1993, Confirme le jugement dont appel qui a renvoyé Micheline N des fins de la poursuite.