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Décisions

CA Paris, 13e ch. B, 3 juin 1998, n° 97-04889

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sauret

Avocat général :

Mme Auclair

Conseillers :

Mmes Marie, Filippini

Avocat :

Me Vaconsin.

TGI Créteil, 11e ch., du 24 mars 1997

24 mars 1997

Rappel de la procédure :

La prévention :

G Anne-Marie est poursuivie pour avoir à Alfortville, courant 1994

- trompé ou tenté de tromper l'acheteur ou contractant sur la nature, l'espèce, l'origine, les qualités substantielles, la composition ou la teneur en principes utiles de la marchandise, sur la quantité des choses livrées ou sur leur identité par la livraison d'une marchandise autre que la chose déterminée qui a fait l'objet d'un contrat

- en exploitant un établissement en trompant les personnes âgées

- sur la nature de celui-ci qui n'est pas une " maison de retraite " autorisée à les héberger

- sur les qualités substantielles des prestations fournies par son établissement qui ne peut faire bénéficier les personnes âgées de la protection et des avantages procurés par la loi n° 90 600 du 6 juillet 1990,

- en sa qualité de gérante de la SARL X, diffusé une publicité mensongère en qualifiant indûment son établissement de "maison de retraite" alors qu'elle n'avait fait aucune demande d'autorisation après des autorités compétentes pour l'hébergement des personnes âgées

Le jugement:

Le tribunal, par jugement contradictoire,

- a ordonné la jonction de la procédure référencée sous le n° C 96 21401197 à la procédure 9430800239

- a déclaré G Anne-Marie

Coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, faits commis courant 1994, à Alfortville (94), infraction prévue et réprimée par l'article L. 213-1 Code de la consommation

Coupable de publicité mensongère ou de nature a induire en erreur, faits commis courant 1994, à Alfortville (94), infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 213-1 Code de la consommation

L'a condamnée à 2 mois d'emprisonnement avec sursis

L'a condamnée à une amende délictuelle de 25 000 F

Lui a fait interdiction pour une durée de 2 ans d'exploiter ou diriger un établissement pour personnes âgées, infirmes, inadaptées ou indigentes

A dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable la condamnée.

Les appels :

Appel a été interjeté par :

- Mademoiselle G Anne-Marie, le 1er avril 1997

- M. le Procureur de la République, le 1er avril 1997 contre Mademoiselle G Anne-Marie

Décision:

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels régulièrement interjetés par la prévenue et le Ministère public à l'encontre du jugement déféré auquel il est fait référence pour les termes de la prévention ;

Anne-Marie G, présente et assistée de son conseil, sollicite par voie de conclusions sa relaxe, faisant valoir :

Sur l'exploitation malgré un arrêté de fermeture

Que la citation devant le tribunal correctionnel est entachée de nullité au motif que la citation vise des arrêtés préfectoraux de fermeture du 9 mai 1990, alors qu'il émane du président du Conseil général du Val-de-Marne et qu'outre le fait qu'un arrêté préfectoral de fermeture n'est pas un arrêté du Président du Conseil général du Val-de-Marne, il est indiqué sur la citation que cette infraction est prévue par l'article 213 alinéa 1 et alinéa 2 du Code de la famille, texte qui se borne à préciser les peines prévues en cas d'infraction aux dispositions des articles 203, 204, 205, 206, 207 et 209 du Code de la famille ou aux dispositions de l'article 210, ou enfin aux dispositions de l'article 211 de ce même Code ;

La prévenue estime que la citation ne vise pas le ou les articles définissant l'infraction en vertu desquels elle est poursuivie et qu'en conséquence la citation est nulle ;

Elle ajoute qu'elle avait soulevé cette nullité devant le tribunal qui ne s'est pas prononcé sur ce moyen et a néanmoins prononcé une peine d'interdiction d'exploiter et de diriger un établissement pour personnes âgées, infirmes, inadaptées ou indigentes pendant deux ans, faisant application de l'article 213 alinéa 2 du Code de la famille ;

Sur la tromperie et la publicité mensongère

Qu'elle est la gérante de [la société] X qui exploitait un fonds de commerce d'hôtel-pension de famille ainsi qu'il résulte de l'objet social de cette société et de son inscription au registre du commerce ;

Qu'accueillant dans cet hôtel un certain nombre de personnes âgées non dépendantes pour des séjours de plus ou moins longue durée, elle a été l'objet d'un contrôle de la DDASS dont les représentants ont estimé que [la résidence] Y était en fait devenue une maison de retraite soumise en tant que telle à la législation spécifique applicable à ce type d'établissement et décidé que cette maison de retraite fonctionnant d'après des normes prévues pour un hôtel n'était pas en harmonie avec les régies de sécurité applicables aux maisons de retraite ;

La concluante souligne qu'au vu du rapport établi par la DDASS, sans qu'elle ait pu formuler une quelconque observation, le Préfet et le Président du Conseil général du Val-de-Marne ont pris un arrêté de fermeture qu'elle a attaqué devant les tribunaux administratifs et que dans le même temps elle a déposé une demande d'ouverture de maison de retraite, conformément au décret n° 76-030 du 25 avril 1976 pris en application de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 et ajoute que ce texte dispose que l'autorisation requise est réputée acquise au demandeur dans le cas où l'administration laisserait s'écouler sans répondre un délai de six mois à compter de la réception de la demande ;

Elle précise que l'administration ne s'étant pas prononcée elle a estimé avoir bénéficié d'une autorisation tacite et s'est désistée de ses recours contre les arrêtés de fermetures qui devenaient de ce fait caducs ;

Anne-Marie G estime que l'administration a d'ailleurs reconnu l'existence de cette autorisation implicite et s'est gardée d'en contester le principe lors des visites qu'elle a rendu à Y postérieurement au 16 septembre 1990 ;

Sur la qualification de maison de retraite de l'établissement

Après avoir rappelé que dans le procès-verbal de délit du 3 octobre 1994, établi par Madame Nuzzellec, chef de section des services de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, il est indiqué :

"Cet établissement fait l'objet d'une fermeture administrative par arrêté préfectoral du 19 février 1990, confirmé le 17 juillet 1990 après avis du Conseil Départemental d'Hygiène. Le 7 avril 1994, un arrêt de la Cour d'appel de Paris a condamné Mademoiselle G pour non exécution de l'arrêté de fermeture";

Anne-Marie G soutient qu'ayant été poursuivie devant la 12e chambre du Tribunal correctionnel de Créteil, pour avoir :

"Courant 1990, continué d'exploiter un établissement de maison de retraite en dépit d'un arrêté préfectoral de fermeture prononcé à son encontre en date du 19 février 1990",

Elle avait plaidé qu'il existait en réalité trois périodes, à savoir :

- celle antérieure à l'arrêté du 19 février 1990, alors qu'elle se croyait être à la tête d'un hôtel ou d'une pension de famille,

- celle postérieure à l'arrêté du 19 février 1990 et antérieure au 16 septembre 1990, alors qu'elle avait introduit un recours en annulation contre les arrêtés ordonnant la fermeture de son établissement,

- celle postérieure au 16 septembre 1990, alors qu'elle exploitait une maison de retraite disposant des autorisations légales requises.

Que le tribunal, confirmé en cela par la cour ne l'a condamnée que pour avoir continué d'exploiter son établissement de maison de retraite du 19 février au 16 septembre 1990 et qu'en conséquence aucune condamnation n'est intervenue à son encontre pour avoir continué d'exploiter son établissement postérieurement au 16 septembre 1990 ;

La concluante fait observer qu'elle était citée devant le tribunal pour avoir continué d'exploiter son établissement en violation d'un arrêté préfectoral, alors qu'il existe deux DDASS, la DDASS régionale, dont les avis sont sanctionnés par le conseil général et son Président, qui s'intéresse surtout à l'implantation des maisons de retraite et aux autorisations d'ouverture, et la DDASS départementale dont les rapports sont exploités et sanctionnés par le Préfet, qui s'occupe plus particulièrement du contrôle des maisons de retraite existantes, de la sécurité et de la salubrité et que la demande d'ouverture qu'elle avait formée le 15 mars 1990 avait été adressée au Président du Conseil général du Val-de-Marne et non au Préfet qui n'était pas compétent pour se prononcer sur une telle demande ;

Elle précise qu'elle a été citée postérieurement à l'arrêt de la cour, devant la 12e chambre du Tribunal de grande instance de Créteil pour avoir exploité un local affecté à l'hébergement collectif malgré une fermeture administrative et que par jugement du 28 mars 1995, le tribunal l'a relaxée des fins de la poursuite au motif que les infractions visées par la citation comprennent les établissements d'hébergement collectif hormis les établissements pour lesquels des dispositions spéciales sont prévues, notamment celui dont la prévenue est responsable, à savoir une maison de retraite ;

Anne-Marie G estime qu'on ne saurait la poursuivre pour avoir trompé les personnes âgées sur la nature de son établissement qui ne serait pas une maison de retraite autorisée à les héberger, sur les qualités substantielles des prestations fournies par son établissement ou qu'elle a diffusé une publicité mensongère, dés lors que son établissement est bien une maison de retraite, qu'elle a les autorisations requises pour l'exploiter et que ses différents interlocuteurs, fonctionnaires de la DDASS, le considèrent bien comme tel ;

Sur les qualifications pénales

Que Madame Nuzellec, dans son procès-verbal de délit" du 3 octobre 1994, part du postulat erroné qu'elle n'a fait aucune demande d'autorisation auprès des autorités compétentes pour l'hébergement de personnes âgées pour prétendre que son établissement ne saurait être qualifié de "maison de retraite", alors qu'il a été démontré qu'elle exploitait bien une maison de retraite en disposant des autorisations légales requises et que les personnes âgées hébergées à la "Résidence Y" pourraient prétendre à bénéficier des dispositions de la loi n° 90-600 du 6 juillet 1990 et qu'en toute hypothèse, quand bien même existerait-il une difficulté pour que certains pensionnaires de cet établissement puissent bénéficier, pour l'avenir, d'une participation aux frais de séjour, période visée par la citation, aucune personne âgée n'a séjourné pendant une durée de cinq ans dans cet établissement ;

Rappel des faits

La société "X" était crée en 1989 pour exploiter un hôtel destiné à des personnes du 3e âge appelé "Y" et sis <adresse>Alfortville ;

A la suite d'une inspection qui révélait que les personnes y séjournant n'étaient pas en sécurité dans l'établissement, l'une d'elles s'était occasionnée une plaie ouverte en faisant un chute nocturne, il était conseillé à la gérante Anne-Marie G de demander l'autorisation d'ouvrir une maison de retraite au Président du Conseil général après avis de la Commission régionale des institutions sociales et médico-sociales ;

Le directeur des actions et aides sociales indiquait en effet, à Anne-Marie G qu'au cours de la visite de contrôle effectuée le 26 janvier 1990 dans son établissement, il a été constaté que la résidence Y accueillait à titre principal des personnes âgées et que l'objet de cette résidence étant de fournir à ces personnes âgées, non seulement un logement, mais tout un ensemble de services identiques à ceux mis en place dans les établissements médico-sociaux, l'assujettissement de cette résidence à la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 a pu être formellement établi ;

Il était ajouté que les personnes accueillies au sein de cette structure étant, pour plusieurs d'entre elles en perte d'autonomie importante, l'Inspecteur départemental de la Santé et le médecin de l'aide sociale, chargé des personnes âgées ont pu établir que la sécurité médicale des personnes accueillies n'était pas assurée ;

Enfin le directeur des actions et aides sociales informait Anne-Marie G qu'il allait présenter à la Commission régionale des institutions sociales et médico-sociales un rapport proposant la fermeture de Y ;

Le 19 février 1990, le Préfet prenait un arrêté de fermeture fondé sur le défaut d'autorisation d'ouverture Anne-Marie G adressait néanmoins le 15 mars 1990 une demande d'autorisation d'ouverture d'une maison de retraite ;

Le 9 mai 1990, le Président du Conseil général prenait un arrêté de fermeture, au motif que les conditions d'accueil et de séjour offertes aux résidents ne leur apportaient pas la sécurité et la qualité de vie auxquelles ils pouvaient prétendre, après avoir pris l'avis de la Commission régionale des institutions sociales et médico-sociales ;

Le 17 juillet 1990, le Préfet prenait un nouvel arrêté de fermeture fondé sur le manque de personnel qualifié mettant en danger les personnes accueillies ;

La DDASS n'apportait aucune réponse à la demande d'ouverture d'une maison de retraite formée par Anne-Marie G, le 15 mars 1990 estimant que cet arrêté valait refus ;

Anne-Marie G était condamnée par arrêt du 7 avril 1994 de la cour de céans pour avoir continué d'exploiter l'établissement en dépit de l'arrêté de fermeture du 19 février 1990 ;

Louisette Nuzellec, chef de section des services déconcentrés de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes se présentait les 19 et 30 août 1994, dans les locaux de la 'Y" ;

Cet enquêteur constatait qu'Anne-Marie G hébergeait à cette adresse 15 personnes âgées dont l'une d'elle était hospitalisée. Onze de ces personnes avaient signé à leur entrée dans l'établissement un contrat de séjour à durée indéterminée, tel que prévu par la loi n° 90-600 du 6 juillet 1990 relative aux conditions de fixation des prix des prestations fournies par certains établissements assurant l'hébergement des personnes âgées. Les plus anciens contrats de séjour avaient été signés en 1991 ;

Ce contrat qui indique, en tête, que Y est une "maison de retraite" reprend notamment les dispositions prévues par la loi susvisées, précisant même à l'article 9 "tous les prix qui figurent dans le présent contrat varieront dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article 3 de la loi n° 90-600 du 6 juillet 1990 ;

Dans l'annuaire téléphonique "France Télécom 1994", la Résidence X figurait sous la rubrique "Maison de retraite - établissements privés";

Anne-Marie G remettait aux personnes qui désirent des renseignements un livret d'accueil sur le fonctionnement de la résidence où il était indiqué les soins peuvent être dispensés par une équipe médicale et paramédicale. Sept médecins libéraux interviennent dans l'établissement, beaucoup de personnes âgées ayant conservé leur médecin traitant. Quatre infirmières et un kinésithérapeute, tous libéraux donnent des soins aux personnes hébergées dans l'établissement. Aucune des personnes ci-dessus n'est liée par contrat avec la maison de retraite. Ils interviennent tous à l'acte ;

Il était précisé à la rubrique présentation, que Y est une maison de retraite privée, créée en 1990. Elle accueille les personnes âgées valides, semi-valides et dépendantes, sans limite d'âge. A la rubrique soins, que ceux-ci peuvent être dispensés par une équipe médicale et paramédicale. Toutefois chaque résident garde le libre choix de ses praticiens ;

Par ailleurs des représentants de la DDASS avaient établi un rapport le 20 décembre 1995, duquel il résultait ;

Que dans la chambre 001 au rez-de-chaussée, une personne dormait devant la télévision ; la chambre comportait un lit médicalisé ; que dans la chambre 002, une femme dormait sur un fauteuil ; que dans la chambre 003 une femme utilisait un déambulateur ; que la chambre 004 était occupée par une personne désorientée que dans la chambre 101, une femme dormait assise ; que la chambre 103 était occupée par deux personnes dont l'une pleure assise sur un fauteuil, l'autre se plaignant, attachées toutes deux, ces personnes ne pouvant manifestement plus se supporter ; que dans la chambre 201, un homme pleurait sans arrêt assis sur un fauteuil, que dans la chambre 301 une personne se déplaçait avec un déambulateur que dans la chambre 303 se trouvait une personne dormant assise, que dans le chambre 304, se trouvait un homme très handicapé, avec à proximité de lui un appareil de levage, que dans la chambre 305 se trouvait un homme dormant sur son lit ;

Sur le fait que deux personnes soient attachées, il était répondu par l'adjointe de direction que les familles exigent d'attacher leurs parents pour leur éviter des chutes ;

Il était relevé par les inspecteurs qu'il n'existe pas d'espace, pas d'accompagnement, pas d'animation, la porte donnant sur l'extérieur étant fermée à clef pour éviter les fugues ;

Sur le suivi médical et paramédical, il était précisé que les médecins de ville viennent suivre leurs malades à la demande ; qu'ils sont 6 pour les 15 personnes, une infirmière venant donner les soins ; un médecin était présent le jour de la visite ;

Les inspecteurs relevaient que la dispensation des médicaments aux résidents n'est pas effectuée par du personnel qualifié, cette responsabilité étant refusée par une des employées Madame Grez qui n'exerce en outre que les fonctions d'agent de service ;

La cuisine, selon ce rapport, ne répondait pas aux prescriptions réglementaires de l'arrêté du 26 septembre 1980 relatif aux conditions d'hygiène des établissements de restauration ;

Le Président du Conseil général du Val-de-Marne ayant déposé le 19 juillet 1996 plainte à l'encontre d'Anne-Marie G, une enquête était diligentée par la police au sein de Y en octobre 1996 ;

Les enquêteurs constataient qu'une chambre était occupée par une personne aveugle assise à sa table, que dans une autre se trouvait une personne âgée dans un fauteuil roulant attachée par la taille audit fauteuil à l'aide d'une pièce de tissu, cette personne âgée n'ayant visiblement plus toutes ses facultés mentales, dans la pièce se trouvait d'ailleurs un fauteuil coquille muni de diverses sangles pour maintenir la personne, un lit médicalisé et un appareil de levage, dans une troisième pièce se trouvait une personne âgée dormant dans un fauteuil ;

Madame Mendes, qui exerce les fonctions d'adjoint de direction, reconnaissait que le personnel ne possédait pas de qualification particulière ;

SUR CE

Sur le moyen tiré de la nullité de la citation

Considérant qu'Anne-Marie G soutient qu'il est indiqué sur la citation que l'infraction qui lui est reprochée est prévue par l'article 213 alinéa I et alinéa 2 du Code de la famille, texte qui se borne à préciser les peines prévues en cas d'infraction aux dispositions des articles 203, 204, 205, 206, 207 et 209 du Code de la famille ou aux dispositions de l'article 210, ou enfin aux dispositions de l'article 211 de ce même Code, et que la citation ne visant pas le ou les articles de l'infraction en vertu desquels elle est poursuivie est nulle ;

Considérant cependant que l'article 213 du Code de la famille et de l'aide sociale, renvoie aux articles réglementant les établissements hébergeant des personnes âgées, des adultes infirmes, des indigents valides et des personnes accueillies en vue de leur réadaptation sociale et les infractions attachées à cette réglementation;

Que la citation est donc régulière et que ce moyen doit donc être écarté

Sur le moyen tiré de l'existence d'une autorisation tacite d'ouverture

Considérant que selon l'article 9 de la loi 75-535 du 30 juin 1975, la création, la transformation et l'extension des établissements recevant des personnes âgées sont subordonnées à une autorisation donnée par l'autorité administrative compétente délivrée avant tout commencement d'exécution du projet ;

Qu'il est précisé à l'alinéa 4 que la décision est notifiée au demandeur dans un délai maximum de six mois à compter du dépôt de la demande qu'à défaut de décision dans ce délai l'autorisation est réputée acquise ;

Qu'à l'intérieur de ce délai, Anne-Marie G s'était vu notifier un arrêté de fermeture pris par le Président du Conseil général du Val-de-Marne le 6 mai 1990, qui était motivé par les conditions d'accueil et de séjour offertes aux résidents, l'établissement ne leur apportant pas la sécurité et la qualité de vie auxquelles ils pouvaient prétendre ;

Que cet arrêté valait refus d'autorisation d'ouverture de l'établissement ;

Qu'Anne-Marie G soutient donc vainement avoir bénéficié d'une autorisation tacite ;

Que ce moyen doit donc être écarté sans qu'il soit besoin d'examiner les autres arguments de la prévenue ;

Sur les infractions de tromperie et de publicité mensongère

Considérant que l'établissement d'Anne-Marie G n'avait pas été agréé comme maison de retraite, notamment en raison des carences que cet établissement présentait pour la sécurité et le bien-être des personnes qui y résidaient ;

Qu'en effet, il résulte de l'enquête que les résidents étaient peu autonomes et ne vivaient pas dans des conditions conformes à celles qui doivent être offertes par une maison de retraite ;

Que la surveillance médicale était assurée par des praticiens extérieurs à l'établissement intervenant à l'acte, le personnel ne disposant pas des compétences nécessaires pour leur assurer les soins requis par leur état ;

Qu'en recevant dans ces conditions des personnes âgées dépendantes et dans un établissement qui n'avait pas été agréé comme maison de retraite, la prévenue a bien commis le délit de tromperie ;

Que par ailleurs, Y était présentée dans divers documents comme étant une maison de retraite, alors que cette résidence n'avait pas reçu d'agrément pour y prétendre comme il l'a été dit plus haut ;

Qu' en précisant dans le livret d'accueil que les soins pouvaient être dispensés par une équipe médicale et paramédicale, la prévenue faisait croire que l'établissement disposait d'un service médical et paramédical attaché à l'établissement, alors que les praticiens n'intervenaient qu'à l'acte ;

Que le délit de publicité mensongère est donc caractérisé dans tous ses éléments;

Que le jugement entrepris doit donc être confirmé sur ces deux chefs de prévention ;

Sur la prévention d'avoir à Alfortville courant 1994, 1995 et 1996 exploité un établissement hébergeant des personnes âgées malgré l'arrêté de fermeture du Président du Conseil général du Val-de-Marne et deux arrêtés préfectoraux

Considérant que le tribunal qui a joint l'affaire 9621401197 à l'affaire 9430800239 était saisie de cette prévention bien qu'il ait omis de la faire figurer au jugement ;

Qu'il a d'ailleurs statué sur cette prévention en précisant que la prévenue avait continué d'exploiter Y en dépit de trois décisions administratives de fermetures ;

Considérant que la prévenue avait eu connaissance de ces arrêtés et que comme il l'a été dit précédemment, elle ne peut prétendre avoir bénéficié d'une autorisation tacite d'ouverture de l'établissement qu'elle dirigeait ;

Que ces arrêtés n'étaient donc pas devenus caducs comme elle le soutient ;

Que l'infraction est donc caractérisée dans tous ses éléments et que le jugement doit donc être confirmé sur la déclaration de culpabilité ;

Sur la peine prononcée

Considérant qu'Anne-Marie G a persévéré dans son exploitation d'une maison de retraite sans autorisation, malgré les condamnations dont elle avait fait l'objet ;

Qu'elle hébergeait des personnes âgées lourdement handicapées pour certaines dans des conditions tout à fait insatisfaisantes quant à la sécurité et à la qualité de vie offertes ;

Qu'il convient d'augmenter la pour personnes donc de prononcer une sanction pénale plus significative et durée de l'interdiction de diriger ou exploiter un établissement âgé, infirme, inadapté ou indigent ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement ; Reçoit les appels de la prévenue et du Ministère public ; Confirme le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité ; L'infirme sur la répression ; Condamne Anne-Marie G à une peine de un an d'emprisonnement avec sursis et à 50 000 F d'amende ; Lui fait interdiction, pour une durée de 5 ans, d'exploiter ou diriger un établissement pour personnes âgées, infirmes, inadaptées ou indigentes ; Dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable la condamnée.