CA Paris, 5e ch. A, 5 novembre 2003, n° 2003-08049
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Djounadi
Défendeur :
Ace Tocqueville (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Riffault-Silk
Conseillers :
MM. Faucher, Picque
Avoués :
SCP Bolling-Durand-Lallement, SCP Hardouin
Avocats :
Mes Grignon du Moulin, Dehiles.
Estimant que sa mandante ne respectait pas notamment les conditions contractuelles de rémunération, Farid Djounadi a attrait le 8 octobre 2002, la SARL Ace Tocqueville (société Ace) devant le Tribunal de grande instance de Paris, demandant dans le dernier état des prétentions formulées devant les premiers juges,
- la résiliation du contrat d'agence commerciale,
- la condamnation de la société Ace à lui payer provisionnellement, outre intérêts au taux légal et anatocisme à compter de la date de la rupture, 144 859,05 euro à titre d'indemnité de rupture, 12 071,72 euro au titre du préavis, 37 643,47 euro de frais de réemploi, 24 100 euro de rappel de commissions,
- l'injonction à la société Ace sous astreinte de 200 euro par jour de retard à compter de la décision, de lui remettre l'intégralité des documents comptables, les conventions conclues avec les établissements de crédit et les factures de rétrocession adressées aux assureurs et à leurs courtiers, outre 3 500 euro de frais irrépétibles et, subsidiairement l'institution d'une mesure d'expertise pour faire les comptes entre les parties.
La société Ace s'est opposée aux demandes et a sollicité 72 429,53 euro de dommages et intérêts et 4 000 euro de frais non compris dans les dépens, en suggérant de condamner Farid Djounadi à une amende civile de 4 000 euro sur le fondement des articles 32-1 du nouveau Code de procédure civile et 1382 du Code civil.
Subsidiairement, elle requérait aussi la résiliation du contrat d'agence aux torts exclusifs de Monsieur Djounadi.
Par jugement contradictoire du 19 mars 2003, le tribunal a rejeté toutes les demandes, Farid Djounadi étant condamné aux dépens de première instance.
Appelant le 30 avril 2003, Farid Djounadi expose, aux termes de ses dernières écritures signifiées le 14 août suivant, qu'il a souscrit le 2 mai 2001 avec la société Ace, laquelle exerce l'activité de courtage en prêts immobiliers, un contrat d'agent commercial lui donnant mandat d'obtenir auprès d'établissements de crédit, des prêts immobiliers aux meilleures conditions pour le compte d'une clientèle de particuliers. Il précise :
- que le contrat stipule une commission de 50 % du montant TTC des factures concernant les affaires traitées dans le secteur défini, de quelque façon dont la commande est parvenue au mandant,
- qu'aucune liste de départements n'a été jointe au contrat, et que l'agent devait être rémunéré sur l'ensemble du chiffre d'affaires généré par son activité,
- qu'à ses yeux, l'assiette des commissions comprenait non seulement les frais de dossiers réglés par les clients, mais aussi d'une manière générale, l'ensemble des factures qui rémunèrent la société Ace pour sa prestation de courtage, sans distinction par rapport au type de facture émise, ce qui inclut, selon l'analyse de Monsieur Djounadi, les rétrocessions bancaires au taux effectivement pratiqué et les rémunérations versées au courtier au titre des contrats d'assurances accessoires aux prêts immobiliers,
L'appelant fait grief à sa mandante d'avoir :
- limité à 1 % les commissions perçues des banques et incluses dans l'assiette de calcul des commissions dues à l'agent commercial et de les avoir en outre, amputées arbitrairement de 30 %, aucune stipulation contractuelle ne le prévoyant et la preuve n'étant pas rapportée de l'existence d'un prétendu usage destiné à prendre en compte la publicité faite par la société Ace permettant de rabattre des clients,
- exclu de l'assiette des commissions dues à l'agent commercial, les commissions que la société Ace percevait sur la souscription par ses clients des polices d'assurance décès-invalidité-incapacité accessoires aux prêts immobiliers,
- limité l'assiette de calcul des commissions aux seuls frais de dossiers perçus sur la clientèle,
- unilatéralement supprimé en septembre 2002, la mise à disposition du bureau et autres moyens matériels dont il bénéficiait antérieurement, tout en bloquant le traitement des dossiers des clients qu'il avait démarchés en prétendant faussement auprès de ceux-ci, qu'il avait quitté l'entreprise et en donnant consigne aux organismes bancaires d'en renvoyer les demandes les concernant.
Farid Djounadi fait valoir :
- qu'en application des dispositions d'ordre public de l'article L. 134-6 du Code de commerce, l'agent a droit à une rémunération pour toute opération commerciale conclue grâce à son intervention, pendant la durée du contrat d'agence,
- qu'en ayant estimé que les moyens mis à sa disposition pour exercer son activité d'agent, l'avaient placé dans un état de subordination par rapport à la société Ace, le tribunal n'a pas tiré toutes les conséquences de sa constatation en refusant de qualifier alors la convention litigieuse de contrat de travail,
- qu'en les lui retirant brutalement, la société Ace a paralysé son activité en le plaçant dans l'impossibilité d'exécuter son mandat rompant de fait le contrat.
L'appelant conteste les fautes alléguées par la société Ace à son encontre et considère que la résiliation du contrat d'agence doit entraîner le paiement des indemnités de cessation de contrat, de préavis et de frais de ré-emploi, cette dernière pour compenser la taxe perçue par le Fisc sur les plus-values.
Farid Djounadi conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Ace de toutes ses prétentions.
Pour le surplus, il poursuit sa réformation en demandant, à titre principal, le tribunal ayant constaté selon l'appelant, le lien de subordination par rapport à la société Ace, de :
- re-qualifier le contrat d'agent commercial en contrat de travail et de dire que la société Ace l'a rompu,
- de la condamner, sur le fondement de l'article L. 122-14-5 du Code du travail, au paiement de 144 859,05 euro de dommages et intérêts pour licenciement abusif, outre 12 071,72 euro au titre de l'indemnité de préavis et 36 215 euro, au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 324-11-1 du même Code.
Subsidiairement, il sollicite la résiliation du contrat d'agence aux torts exclusifs de la société Ace et de la condamner, " sauf à parfaire " à lui payer les mêmes montants des indemnités visées ci-dessus, mais respectivement au titre de la rupture, du préavis et des frais de ré-emploi, ces derniers étant portés à 37 663,47 euro.
En toute hypothèse, Monsieur Djounadi requiert :
- les indemnités complémentaires de 15 970 euro au titre du rattrapage de l'abattement de 30 % indûment pratiqué et de 8 130 euro au titre "des commissions sur le différentiel entre le taux réel et le taux appliqué sur les factures de rétrocession adressées aux établissements bancaires pour les prêts immobiliers ayant fait l'objet d'un commissionnement",
- la majoration de toutes les sommes ci-dessus visées, des intérêts au taux légal à compter de la date de rupture effective du contrat qui sera fixée par la cour et anatocisme, outre 3 500 euro de frais irrépétibles,
- l'injonction sous astreinte à l'intimée de remettre divers documents "afin de vérifier et de calculer le montant des commissions conformément au décret n° 92-506 du 10 juin 1992 et le cas échéant, de l'article 143 du Code de procédure civile",
- " le cas échéant " l'institution d'une expertise pour faire les comptes entre les parties et déterminer le montant des commissions et des indemnités dues du fait de la résiliation du contrat.
Intimée, la société Ace réplique, aux termes de ses ultimes conclusions signifiées le 10 septembre 2003, qu'antérieurement à l'apparition du litige courant été 2002, Farid Djounadi n'avait fait part d'aucune difficulté quant aux conditions de rémunération ou d'exécution du mandat, aucune modification de rémunération n'étant intervenue et les aménagements des conditions d'exercice ne modifiant pas l'économie du contrat. Elle estime que l'appelant a "longtemps exercé son activité par ses propres moyens" et subodore que cela résulte notamment des déductions de frais de fonctionnement que celui-ci a normalement dû opérer sur ses revenus annuels, bien qu'il n'ait pas déféré à sa sommation de communiquer les déclarations fiscales correspondantes.
Elle estime que la chambre civile de la cour est incompétente pour apprécier un prétendu contrat de travail. En tout état de cause sur le fond, elle indique que les conditions réelles d'exercice des activités de l'appelant, excluaient tout lien de subordination à son égard, ce que l'intéressé admet au demeurant, selon elle, dans ses écritures.
Elle indique que l'appelant, lequel ne s'est plus manifesté depuis fin décembre 2002, a cessé de fait son activité pour le compte de la société Ace et a concomitamment commencé à exercer pour son propre compte et pour celui d'une entreprise concurrente. Elle conteste que sa proposition de contrat de travail pour l'avenir ait pu exercer une quelconque pression sur l'intéressé et soutient que la liberté avec laquelle Farid Djounadi exerçait ses activités, exclut tout lien de subordination à son égard, aucune entrave n'étant démontrée.
Sur les prétentions subsidiaires de celui-ci, la société Ace fait valoir :
- qu'initialement la commission de 50 % ne portait que sur les factures de frais de dossier adressées aux clients de la société Ace et que le contrat d'agent commercial ne prévoyait pas que les commissions versées par les banques à cette dernière, au titre de son activité de courtage pour le compte de celles-ci, entreraient dans l'assiette de calcul des commissions versées aux agents commerciaux,
- que les commissions bancaires ont été postérieurement intégrées dans l'assiette de calcul en étant plafonnées à 1 %,
- qu'il n'a jamais été prévu de rémunérer l'agent commercial à partir de la souscription par la clientèle, de contrats d'assurance accessoires aux prêts immobiliers, la proposition d'un contrat d'assurance n'entrant pas dans le champ des activités d'un agent commercial,
- qu'en plus de ses propres dossiers résultant de son activité de recherche de clients, Farid Djounadi s'est vu confier la faculté de traiter des dossiers directs de l'entreprise dont l'ouverture ne résultait pas de l'activité directe de l'agent, mais des investissements publicitaires de la société Ace sur différents médias, de sorte que la rémunération correspondante subissait un abattement de 30 % pour tenir compte de leur spécificité, ce qu'au demeurant l'intéressé a accepté dans un courrier électronique du 7 juin 2002,
- que Farid Djounadi exerçait son activité avec ses propres moyens, ceux mis progressivement à la disposition de l'agent commercial s'étant limités à la mise à disposition d'un bureau, pour recevoir les clients qui n'étaient pas rencontrés en d'autres circonstances, et d'un ordinateur fixe avec "éventuellement" le logiciel de l'entreprise,
- qu'en revanche, il n'a jamais été prévu que les standardistes et secrétaires de la société Ace soient mises à la disposition de l'agent commercial,
- que ces moyens non initialement prévus au contrat, n'étaient pas substantiels et ont pu ultérieurement être modifiés,
- que les agissements de Farid Djounadi et la cessation brutale de son activité ont provoqué une baisse de son chiffre d'affaires et ont porté atteinte à son image vis-à-vis de ses partenaires et apporteurs d'affaires,
- qu'elle a en outre été déstabilisée par le dénigrement pratiqué par l'appelant et ses tentatives de débauchage de personnel et de détournements de dossiers,
- qu'au surplus, il a violé son obligation de non-concurrence en agissant désormais pour le compte d'une société concurrente.
La société Ace s'oppose à la demande de requalification du contrat d'agent commercial et conclut à la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles.
Formant appel incident de ce chef, elle sollicite 72 429,53 euro de dommages et intérêts et requiert par ailleurs, 5 000 euro de frais non compris dans les dépens.
Sur ce,
Sur la demande principale de requalification du contrat
Considérant que, pour requérir la requalification du contrat d'agent commercial en contrat de travail, l'appelant invoque essentiellement la mise à disposition de moyens matériels et humains pour l'accomplissement du mandat et les motifs des premiers juges, lesquels ont estimé notamment qu'en ayant accepté de travailler sur des dossiers de clients initialement non prospectés par lui, selon les mêmes méthodes et avec des moyens comparables à ceux utilisés par les préposés commerciaux de la société Ace, Farid Djounadi aurait "aliéné son indépendance ";
Mais considérant, nonobstant la motivation correspondante des premiers juges, laquelle n'est pas adoptée par la cour, que les moyens temporairement mis à disposition de l'agent par sa mandante pour faciliter l'exécution du contrat d'agence, ne sont pas incompatibles avec l'indépendance qui préside au contrat d'agence commerciale, la mise à disposition d'un local pour recevoir les clients et la transmission des messages téléphoniques par le secrétariat de l'entreprise, n'entraînant pas, à eux seuls, l'existence d'un lien de subordination,le dirigeant de la société Ace ayant même confirmé, dans la lettre du 29 septembre 2002, qu'il n'avait nullement l'intention de remettre en cause l'indépendance à laquelle Farid Djounadi avait déclaré être attaché;
Considérant aussi, que ce dernier n'a pas allégué, ni a fortiori démontré, qu'il recevait des ordres de la part du dirigeant de la société Ace, pour l'exécution du mandat, comparables aux instructions données par un chef d'entreprise qui contrôle l'activité de ses préposés et en vérifie les résultats ;
Qu'en outre, la totalité de la rémunération de Farid Djounadi dépendait de la réalisation des affaires avec la clientèle sans bénéficier de la moindre rémunération fixe, le risque économique en résultant n'étant pas compatible avec l'absence minimale de risque économique du salarié dépendant entièrement de l'autorité du chef d'entreprise ;
Qu'en conséquence, le lien de subordination allégué n'ayant pas été démontré, la demande de requalification du contrat d'agent commercial en contrat de travail sera rejetée ;
Sur l'assiette de calcul de la rémunération de l'agent
Considérant qu'il n'est pas contesté que le secteur géographique envisagé pour l'agent, n'a jamais été défini et qu'en application combinée des articles L. 134-5 et L. 134-6 du Code de commerce, à défaut de secteur géographique et de groupes déterminés de personnes, le droit à commission de l'agent commercial s'étend à toutes les opérations conclues par son intermédiaire pendant la durée du contrat, la rémunération étant calculée selon les modalités qui y sont prévues ;
Considérant que les paragraphes intitulés "commissions" et "paiement de la commission" du contrat d'agent commercial du 2 mai 2001, stipulent une "commission égale TTC à 50 % du montant TTC des factures, de quelque façon que la commande soit parvenue au mandant " laquelle est payable mensuellement sur les affaires facturées par le mandant le mois précédent mais sous " déduction des affaires précédemment commissionnées et dont il est établi que le paiement par le client n'aura pas lieu " ;
Considérant que les parties s'opposent sur la portée de ces stipulations et qu'en application des articles 1156 et 1161 du Code civil, il convient de rechercher quelle a été leur commune intention sans s'arrêter au sens littéral des termes, toutes les clauses s'interprétant les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier ;
Que le paragraphe "commissions" ne précise pas la nature des factures entrant dans l'assiette de calcul mais qu'il se déduit de la combinaison des stipulations ci-dessus rappelées, que les parties n'ont envisagé que les factures émises à l'intention des clients de la mandante ;
Que par ailleurs, il n'est pas non plus discuté que la société Ace exerce une activité de courtage en prêts immobiliers dont la mission consiste à rechercher pour son client le prêt le mieux adapté au financement du projet d'acquisition immobilière aux meilleures conditions, de sorte que le " client ", visé par le contrat d'agent commercial, est le particulier en recherche d'un financement et non l'établissement bancaire susceptible de lui consentir le prêt recherché ;
Que pour les mêmes motifs, l'assiette de calcul de la commission de l'agent commercial ne comprend pas davantage les gratifications perçues par la société Ace de la part des compagnies d'assurances auprès desquelles l'emprunteur a facultativement souscrit les différentes garanties couvrant les risques pendant la durée d'amortissement de l'emprunt ;
Considérant par ailleurs, que la société Ace reconnaît qu'ultérieurement, bien que les rémunérations perçues des banques n'aient pas été initialement incluses dans l'assiette contractuelle de calcul de la commission, celles-ci y ont été partiellement introduites dans la limite maximum de 1 % ;
Qu'en application de l'article 1315 du Code civil, il appartient à Farid Djounadi de prouver l'existence de l'obligation complémentaire dont il réclame l'exécution, au delà de la limite de 1 % reconnue par l'intimée ;
Que ne rapportant pas la démonstration que l'accord sur l'accroissement ultérieur de l'assiette de calcul des commissions, par introduction des rémunérations perçues par la mandante, s'étendait sur la totalité de la ristourne au delà de 1 % du montant des prêts accordés, l'appelant n'est pas fondé dans cette partie de sa réclamation ;
Considérant en revanche, que le paragraphe "commissions" stipule expressément que l'agent perçoit la commission "de quelque façon que la commande soit parvenue au mandant" sans réserver le cas des clients de la société Ace qui s'adressaient à elle à la suite des insertions pratiquées dans différents médias ;
Que la société Ace ne conteste pas que la recherche de crédit pour les clients s'étant directement rapprochés auprès d'elle à la suite de la publicité effectuée et ayant été transmis à l'agent commercial, a bien ensuite été effectuée par ce dernier ;
Que dès lors, le contrat ayant expressément écarté la façon dont la commande est parvenue au mandant, la société Ace n'est pas fondée à minorer de 30 % l'assiette correspondante de rémunération de l'agent, les frais de dossier facturés au client concerné correspondant bien à une opération conclue grâce à l'intervention de celui-ci ;
Que l'évaluation par Farid Djounadi à hauteur de 15 970 euro, de la minoration correspondante, n'a pas été véritablement contestée par la société Ace, laquelle s'est bornée à tenter de justifier le principe de cet abattement, de sorte que l'institution d'une mesure d'instruction n'est pas justifiée et qu'il n'y a pas davantage lieu de faire droit à la demande subsidiaire de communication sous astreinte des pièces comptables, l'évaluation proposée par l'appelant n'étant pas critiquée ;
Sur les moyens fournis par le mandant pour l'exécution du mandat
Considérant qu'aux termes de l'article L. 134-1 du Code de commerce, l'agent commercial est un professionnel indépendant chargé de négocier et éventuellement de conclure des contrats notamment de prestation de services au nom et pour le compte de son mandant;
Que l'indépendance qui préside à son exercice professionnel implique qu'il organise librement son entreprise et exerce sa mission avec ses propres moyens sans qu'il soit interdit aux parties de prévoir la mise à disposition de moyens spécifiques pour améliorer l'exécution du mandat ;
Considérant que le contrat litigieux ne met pas à la charge du mandant, l'obligation de fournir des moyens particuliers à l'agent ;
Que la société Ace reconnaît en avoir fournis "progressivement" sans admettre pour autant que les mises à disposition correspondantes s'inscrivaient dans la durée, tandis que Farid Djounadi affirme qu'ils lui ont été fournis dès l'origine de l'exécution du contrat d'agence et sous-entend que la mandante avait souscrit l'obligation de les maintenir pendant toute la durée du contrat ;
Considérant qu'il appartient ici aussi à l'agent commercial, de prouver l'existence de l'obligation complémentaire dont il réclame l'exécution ;
Qu'en dehors des obligations contractuelles, la mise à disposition de moyens reconnue par l'intimée, n'était pas assortie d'une durée et qu'en pareille circonstance, l'engagement souscrit sans limitation de temps, peut être dénoncé à tout moment en respectant un préavis raisonnable laissant au cocontractant la possibilité de se réorganiser ;
Qu'en se bornant à prétendre que la suppression des moyens litigieux constituait une inexécution fautive du contrat d'agence, Farid Djounadi n'a pas allégué, ni a fortiori démontré, que la dénonciation faite par la lettre du 1er août 2002 de la société Ace, ne lui avait pas ménagé un délai suffisant ;
Que contrairement à ce qu'il affirme sans le démontrer, la lettre du 26 juin 2002 de la société Ace se limite à reconnaître l'utilisation, par l'agent, des moyens de l'entreprise "depuis quelque temps" et que n'ayant pas rapporté la preuve qui lui incombe, de l'obligation de fourniture de moyens qui aurait été souscrite par la société Ace pour la durée du contrat, il ne justifie pas la nécessité de résilier la convention du seul fait de leur suppression;
Sur la demande de résiliation du contrat d'agence et les indemnités correspondantes
Considérant que Farid Djounadi n'a pas contredit la société Ace lorsqu'elle a indiqué qu'il avait de fait cessé son activité à son service depuis un certain temps ;
Qu'aucune des parties ne sollicite aujourd'hui l'exécution forcée du contrat et qu'il n'appartient pas à la cour de résilier un contrat qui a déjà pris fin ;
Qu'en revanche il convient de rechercher les responsabilités de la résiliation précédemment survenue ;
Considérant qu'en cessant ses activités au bénéfice de la société Ace alors que celle-ci lui avait confirmé, notamment par ses lettres des 1er août et 16 septembre 2002, son souhait de les lui voir continuer, Farid Djounadi a pris l'initiative de la rupture en la justifiant par de supposées violations des obligations contractuelles concernant le défaut d'inclusion dans l'assiette de calcul des commissions, des ristournes octroyées par les compagnies d'assurances et des rémunérations versées par les banques à la société Ace ;
Qu'aucune de ces prétentions n'étant accueillie, elles ne peuvent justifier une résiliation ;
Qu'en définitive, la seule prétention admise concerne la réfaction de 30 %, pratiquée à tort par la société Ace ;
Qu'au regard des autres obligations du contrat et des activités inhérentes, le litige correspondant n'apparaît pas d'une importance suffisante pour justifier une résiliation, alors qu'il pouvait se résoudre sans qu'il soit nécessaire de mettre la convention à néant, Farid Djounadi n'en faisant pas une revendication essentielle dans sa lettre de mise au point du 14 septembre 2002 et ne justifiant pas d'une mise en demeure antérieure qui aurait été infructueuse ;
Que par ailleurs, la simple proposition d'abandon du statut d'agent commercial pour adopter celui de préposé commercial salarié de l'entreprise, ne constitue pas en soi une pression et ne motive pas davantage la résiliation du contrat ;
Considérant en conséquence, que Farid Djounadi ne justifie pas que la cessation du contrat, dont il a pris l'initiative, résulte de circonstances imputables au mandant et qu'en application de l'article L. 134-13, 2° du Code de commerce, la réparation prévue par l'article L. 134-12 du même Code, n'est pas due;
Qu'ayant pris l'initiative de la rupture, l'agent commercial ne peut pas davantage prétendre à une indemnité compensatrice du préavis de rupture qui n'a pas été accompli ;
Sur la demande reconventionnelle de la société Ace et les frais irrépétibles
Considérant que les faits allégués de dénigrement et de détournement de clientèle ne résultent pas en l'état des pièces versées au dossier, l'information des tiers au litige qui oppose les parties ne constituant pas en soi un dénigrement ;
Que la société Ace n'établit pas non plus, que les tentatives de débauchage qu'elle invoque, aient pour conséquence de désorganiser son entreprise ;
Qu'elle ne démontre pas davantage la violation de la clause de non-concurrence qu'elle invoque;
Considérant encore, que la société Ace ne démontre pas avoir subi une atteinte à son image vis-à-vis de ses partenaires et apporteurs d'affaires et qu'elle ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que la baisse relative de la progression de son chiffre d'affaires constatée au cours du dernier quadrimestre de l'année 2002, laquelle ne résulte au demeurant que d'un simple tableau établi par le gérant de la société intimée, soit le résultat de la défection de Farid Djounadi;
Que les demandes reconventionnelles ne seront pas accueilles et que l'équité ne commande pas en l'espèce, l'allocation d'indemnités au titre des frais non compris dans les dépens.
Par ces motifs, Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de Farid Djounadi au titre de la réfaction de 30 % des commissions concernant certains clients et en ce qu'il a mis les dépens de première instance à la charge de ce dernier, Statuant à nouveau de ces seuls chefs, Condamne la SARL Ace Tocqueville à payer à Farid Djounadi, 15 970 euro, majorés des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 8 octobre 2002, valant mise en demeure, au titre du rappel de commission suite à la réfaction injustifiée de 30 % appliquée sur les commissions correspondant à certains clients, Fait masse des dépens de première instance et d'appel et les met à la charge des parties, chacune pour moitié, Admet les SCP Bolling-Durand-Lallement et Hardouin, chacune pour ce qui la concerne, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.