Cass. crim., 16 juin 1981, n° 80-93.379
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mongin
Rapporteur :
M. Monzein
Avocat général :
M. Dullin
Avocats :
Me Hennuyer, SCP Philippe, Claire Waquet.
LA COUR: - Statuant sur le pourvoi de K Germaine, épouse D contre un arrêt de la Cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, du 8 juillet 1980, qui l'a condamnée à 600 francs d'amende pour refus de vente et qui a accordé des dommages-intérêts à la partie civile; - Vu les mémoires produits en demande et en défense; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 37-1-A de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 relative aux prix et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale;
En ce que l'arrêt attaqué a déclaré la dame D coupable du délit de refus de vente prévu par l'article 37-1-A de l'ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945 et réprimé par l'article 40 de l'ordonnance du 30 juin 1945;
Aux motifs que s'il ne pouvait être fait grief à la prévenue de ne pas détenir dans son établissement tous les produits médicamentaux dont celui demandé par la cliente, et si celle-ci ne l'avait pas priée de commander ce médicament, il appartenait à la pharmacienne de proposer à sa cliente cette solution, ce qu'elle n'avait pas fait, que d'ailleurs si la cliente avait formulé une telle demande, la pharmacienne aurait refusé;
Alors qu'en vertu de l'article 37-1-a le refus de vente n'est assimilé à la pratique de prix illicite que si le commerçant refuse de satisfaire dans la mesure de ses disponibilités aux demandes des acheteurs, et que l'arrêt en constatant d'une part que dame D ne possédait pas le produit demandé et d'autre part que la cliente ne l'avait pas priée de commander ce médicament ne pouvait, au bénéfice d'une recherche d'intention et d'un motif hypothétique, déclarer dame D coupable du délit qui lui était reproché;
Vu lesdits articles; - Attendu que le juge pénal ne peut déclarer un prévenu coupable d'une infraction et le condamner de ce chef que dans la mesure ou le fait reproché constitue une contravention, un délit ou un crime prévu et réprimé par la loi;
Attendu que, pour déclarer Germaine K, épouse D, coupable d'un refus de vente, l'arrêt attaqué, après avoir expressément énoncé que la prévenue n'avait pas dans son officine le contraceptif réclamé, l'a néanmoins condamnée pour un refus de vente en affirmant qu'elle avait violé les dispositions de l'article 37-1-A de l'ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945, au motif qu'elle n'avait pas satisfait à l'usage courant qui exigerait que le pharmacien prenne lui-même l'initiative de proposer à son client de commander la marchandise qu'il n'a pas en stock;
Mais attendu qu'en mettant ainsi à la charge de la prévenue une obligation à laquelle elle n'était tenue par aucun texte légal, en en déduisant sa culpabilité et en se fondant en outre sur un motif hypothétique, la cour d'appel a entaché sa décision d'illégalité; que l'arrêt doit être cassé de ce chef;
Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens; casse et annule en toutes ses dispositions l'arrêt de la Cour d'appel de Besançon du 8 juillet 1980, et pour être à nouveau statué conformément à la loi, renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Lyon à ce désignée par délibération prise en chambre du conseil.