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Décisions

CA Dijon, ch. civ. B, 8 novembre 2001, n° 00-00311

DIJON

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Comité d'entreprise du Groupe Cayon

Défendeur :

Bourgogne Distribution Automatique (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Littner (faisant fonction)

Conseillers :

M Kerraudren, Mme Arnaud

Avoués :

SCP Fontaine-Tranchand & Soulard, SCP Bourgeon & Kawala

Avocats :

Mes Fedide, Hopgood.

TGI Chalon sur Saône, ch. corr., du 4 ja…

4 janvier 2000

Exposé des faits et de la procédure:

Le Comité d'entreprise du Groupe Cayon (le Comité d'entreprise) a interjeté appel d'un jugement du Tribunal de grande instance de Chalon-sur-Saône du 4 janvier 2000 qui l'a condamné à payer à la SARL Bourgogne Distribution Automatique (BDA) la somme de 80 000 F HT à titre de dommages et intérêts pour avoir résilié abusivement la convention de dépôt et de gestion de distributeurs automatiques de boissons chaudes et froides, sandwiches, confiseries et viennoiseries qu'ils avaient conclue le 17 juin 1996 ainsi que celle de 4 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il soutient que la clause du contrat prévoyant qu'il est conclu pour une période de quatre années est abusive et doit être réputée non écrite. Il en conclut qu'il était fondé à le résilier dès lors que la SARL BDA, pourtant informée des manquements qui lui étaient reprochés, n'y avait pas remédié et n'exécutait pas correctement ses prestations.

Il sollicite son débouté et sa condamnation à lui payer 10 000 F, à titre de dommages et intérêts et la somme sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SARL BDA forme appel incident pour obtenir la condamnation du Comité d'entreprise à lui payer 125 734 F HT, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, représentant son manque à gagner sur deux années ainsi que 10 000 F en remboursement de ses frais irrépétibles.

Elle conteste que le contrat soit soumis aux dispositions du Code de la consommation et estime qu'en toute hypothèse, la clause prévoyant qu'il est conclu pour une durée déterminée est licite. Elle approuve le tribunal d'avoir considéré que le Comité d'entreprise ne démontrait pas qu'elle ait manqué à ses obligations mais lui reproche d'avoir minoré son préjudice.

Discussion

Attendu que l'article 10 du contrat stipule qu'il prendra effet à compter du jour de sa signature pour une période ininterrompue de quatre années et qu'il se renouvellera par tacite reconduction, pour des périodes de deux ans, sauf résiliation, par lettre recommandée, trois mois avant son expiration; que l'article 11 prévoit que le gestionnaire (la SARL BDA) se réserve le droit de pouvoir retirer tout ou partie du matériel installé dans l'établissement, ou de le remplacer par du matériel mieux approprié ou d'obtenir du dépositaire une participation afin de maintenir un bon équilibre entre le coût de la prestation et les recettes obtenues... et qu'il préviendra le dépositaire, par lettre, de toute modification envisagée un mois à l'avance;

Attendu que,s'il est légitime que la SARL BDA ait la faculté de retirer son matériel si elle n'obtient pas un bon équilibre entre le coût de la prestation et les recettes obtenues, celui-ci n'est pas défini par le contrat; qu'ainsi qu'il est libellé, l'article 11 du contrat l'autorise à le résilier selon sa seule volonté alors que l'article 10 n'offre pas la même possibilité au Comité d'entreprise; que celui-ci, qui agit comme un non professionnel, est bien fondé à voir déclarer cette clause abusive par application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation;

Attendu néanmoins que la brusque rupture d'un contrat à durée indéterminée, sans indemnité, ne peut être justifiée que par une faute, ce que admet le Comité d'entreprise qui invoque les manquements de la SARL BDA, auxquels cette dernière n'aurait pas remédié, en dépit de ses plaintes;

Attendu que pour les établir, le Comité d'entreprise se prévaut d'une lettre du 5 décembre 1997, d'une attestation d'un de ses membres et d'un procès-verbal de constat d'huissier du 9 janvier 1998;

Attendu que si la lettre du 5 décembre 1997 n'est pas produite aux débats, la SARL BDA l'a bien reçue puisqu'elle y a répondu le 12 décembre 1997; que toutefois, il ne peut en être tiré argument dès lors que cette réponse ne comporte aucune reconnaissance de responsabilité mais au contraire une réfutation, point par point, des griefs allégués;

Attendu que l'attestation n'a pas plus de valeur probante, compte tenu de l'appartenance de son auteur au Comité d'entreprise;

Attendu que le constat n'est pas lui non plus pertinent dès lors que l'huissier a fait ses constatations après enlèvement de certaines machines et a essentiellement relevé l'état de saleté extérieur de celles-ci, qui relève, selon l'article 7 du contrat, de la responsabilité du Comité d'entreprise; que par ailleurs, les confidences qu'il a recueillies des anciens salariés de la SARL BDA sur ses pratiques, selon eux, douteuses, manquent assurément d'impartialité dès lors que ces derniers ont eux-mêmes constitué une société concurrente:

Attendu qu'en définitive et par des motifs que la cour adopte, le tribunal a justement considéré que la preuve d'une faute n'était pas apportée;qu'en conséquence, le Comité d'entreprise doit être débouté de sa demande en dommages et intérêts et la cour doit vérifier si un délai de préavis suffisant a été respecté;

Attendu que par lettre du 9 janvier 1998, le Comité d'entreprise a fait savoir à la SARL BDA que ses machines devaient être impérativement retirées pour le 23 janvier 1998; que la rupture doit être considérée comme brutale puisque le préavis n'a été que de quelques jours alors qu'il aurait du être, selon les usages, de trois mois;

Attendu que la SARL BDA produit aux débats une attestation de son expert comptable qui indique que son chiffre d'affaire annuel s'élevait avec ce client à la somme de 107 447 F et que sa marge moyenne commerciale était de 58,51 %; que par référence, à ces éléments, son préjudice doit être évalué à la somme de 15 000 F;

Attendu que l'équité commande en outre de lui accorder 5 000 F en remboursement de ses frais irrépétibles, le Comité d'entreprise, qui succombe, ne pouvant, pour sa part, y prétendre;

Par ces motifs: Réformant partiellement, Condamne le Comité d'entreprise du Groupe Cayon à payer à la SARL BDA 15 000 F - soit 2 286,74 euros - à titre de dommages et intérêts ainsi que 5 000 F - soit 762,25 euros - sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Déboute le Comité d'entreprise du Groupe Cayon de ses demandes, Le condamne aux dépens et dit que la SCP Bourgeon Kawala pourra lies recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.