CA Lyon, 7e ch. C, 3 juin 1998, n° 320
LYON
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dulin
Substitut général :
M. Cadiot
Conseillers :
MM. Gouverneur, Raguin
Avocat :
Me Prudon
Par jugement en date du 9 octobre 1997, le Tribunal de grande instance de Lyon a retenu Christian C dans les liens de la prévention pour avoir à Lyon (69), courant novembre 1996, notamment les 12, 18 et 21 novembre 1996:
- effectué une publicité en faveur d'une opération commerciale soumise à autorisation au titre de la loi du 5 juillet 1996, en l'espèce une vente de marchandises sous la forme de liquidation n'ayant pas fait l'objet d'une autorisation préfectorale ni municipale;
(art. 121-25 du Code de la consommation, 1, 2 et 3 de la loi du 30 décembre 1906 - abrogés postérieurement à la commission des faits - 1, 2, 3, 4, 5 du décret n° 62-1463 du 26 novembre 1962 modifié, 26, 27, 28, 30, 33 de la loi 96-603 du 5 juillet 1996);
- courant octobre et novembre 1996, notamment entre le 29 octobre et le 21 novembre 1996, vendu des marchandises sous la forme de liquidation sans autorisation préfectorale, ni municipale ou en méconnaissance de cette autorisation,
(art. 1er, 2, 3 de la loi du 30 décembre 1906, 1, 3, 5 du décret du décret 62-1463 du 26 novembre 1962 modifié, 26, 31-1 al.1 10 et al.2, 33 de la loi 96-603 du 5 juillet 1996, 131-35 du Code pénal, 31 II de la loi 96-603 du 5 juillet 1996, 121-2, 131-39 du Code pénal)
Et par application des articles susvisés, l'a condamné à vingt mille francs d'amende.
Le condamné étant redevable du droit fixe de procédure et la contrainte par corps fixée conformément à la loi.
Le même jugement a renvoyé la SARL X des fins des mêmes poursuites.
Attendu que le Ministère public a relevé appel dans les forme et délai légaux;
Attendu que Maître B, mandataire ad hoc désigné par ordonnance du Président du Tribunal de grande instance de Lyon en date du 4 avril 1997, pour représenter la SARL X, prévenue, bien que cité à tort en qualité de mandataire-liquidateur, accepte de comparaître volontairement en application de l'article 388 du Code de procédure pénale;
Attendu qu'il résulte de la procédure et des débats les faits suivants:
Le 21 novembre 1996, vers 14 heures 30, un contrôleur de la Direction Régionale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, se présentait au magasin "X", situé <adresse> à Lyon 3e et exploité par la SARL du même nom dont l'activité est la vente de vélos, de pièces détachées et d'accessoires de cycles, afin de vérifier la véracité des allégations des publicités diffusées par cet établissement dans l'hebdomadaire régional "Le 69 Affaires" les 12 novembre 1996 et 18 novembre 1996 comportant les mentions suivantes: "X fait peau neuve - Déstockage massif - Cycles et accessoires - - 30 % - 40 % - 50 % -derniers jours".
Il constatait que six affiches fluorescentes étaient apposées sur les vitrines du magasin avec l'inscription suivante: "Déstockage - 30 - 40 - 50 suivant étiquetage - changement de propriétaire".
Lors de son audition, Christian C, gérant de la société et responsable du magasin expliquait que la SARL X avait racheté le 2 octobre 1996 le fonds de commerce de la SA X déclarée en liquidation judiciaire le 30 septembre 1996 et que cette campagne publicitaire avait pour but de vendre le stock repris dans le cadre de la liquidation et ne correspondant pas à sa nouvelle activité.
Il reconnaissait qu'il ne disposait d'aucune autorisation municipale ou préfectorale lui permettant d'effectuer un déstockage massif et admettait qu'il s'agissait, en réalité, d'une opération de liquidation soumise à autorisation.
Discussion et motifs de la décision:
Attendu que le Ministère public requiert la confirmation du jugement déféré en ce qui concerne Christian C et, par infirmation, la déclaration de culpabilité de la SARL X;
Attendu que Christian C, assisté de son avocat, ne discute pas sa culpabilité et sollicite l'indulgence de la cour;
Attendu que la SARL X conclut, au principal, à la confirmation de la décision entreprise sur la relaxe prononcée en sa faveur aux motifs qu'aucune infraction distincte de celle reprochée à son gérant et reconnue par celui-ci ne peut lui être imputée et subsidiairement, au prononcé d'une dispense de peine ou d'une amende avec sursis;
Sur les faits reprochés à Christian C:
Attendu que les faits reprochés à Christian C sont établis et reconnus; qu'en le retenant dans les liens de la prévention, le tribunal a tiré des circonstances de la cause les conséquences juridiques qui s'imposaient; que le jugement déféré sera donc confirmé sur la déclaration de culpabilité et sur la peine d'amende prononcée à son encontre, juste sans être excessive eu égard à la personnalité du prévenu ainsi qu'à la gravité des faits poursuivis, de nature à porter atteinte à la loyauté des transactions;
Sur les faits reprochés à la SARL X:
Attendu qu'aux termes de l'article 121-2 al. 1 du Code pénal, les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants;
Attendu que tel est le cas en l'espèce; qu'en effet, il est suffisamment établi que les faits de vente en liquidation non autorisée reprochés à Christian C, organe et représentant de la SARL X en sa qualité de gérant, ont été commis pour le compte de ladite société;
Attendu que par ailleurs, il résulte de l'alinéa 3 du même article qu'une telle responsabilité n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits;
Attendu que par cette disposition, le législateur a entendu seulement éviter que le représentant d'une personne morale bénéficie d'une indemnité pour la seule raison qu'il aurait agi pour le compte de celle-ci;
Attendu qu'ainsi, contrairement aux motifs retenus par le tribunal et aux prétentions de la SARL X, il n'est pas exigé que la personne morale ait commis des faits distincts de ceux constitutifs de l'infraction reprochée à son organe ou représentant; que sa responsabilité pénale, s'analysant comme une responsabilité du fait personnel par représentation, et non de substitution, est engagée dès lors que ses organes ou représentants, qui expriment sur le plan juridique la volonté même de celle-ci, ont commis pour son compte, en tant qu'auteurs, l'élément matériel et l'élément moral d'une infraction;
Attendu qu'en l'espèce, Christian C a reconnu avoir agi en pleine connaissance de cause, dans le cadre de ses attributions de gérant et dans l'intérêt exclusif de la SARL X; que sa culpabilité étant formellement établie, la SARL X sera également retenue dans les liens de la prévention;
Attendu qu'il convient, en conséquence, de déclarer la SARL X coupable des délits visés à la prévention; que la décision entreprise sera réformée en ce sens;
Attendu qu'en répression, la peine de 20 000 F d'amende apparaît juste et proportionnée à la nature des faits, s'agissant d'une véritable concurrence déloyale portant préjudice aux autres commerces de cycles;
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi, En la forme, reçoit l'appel du Ministère public, Au fond, Confirme le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité de Christian C et sur la peine d'amende prononcée, L'infirmant pour le surplus, Déclare la SARL X coupable des délits visés à la prévention, La condamne à vingt mille francs d'amende, Dit que Christian C et la SARL X seront tenus au paiement du droit fixe de procédure, Fixe la durée de la contrainte par corps conformément à la loi, Le tout par application des articles 121-15 du Code de la consommation, 1, 2, 3, 4, 5 du décret du 26 novembre 1962 modifié, 26, 27, 28, 29, 30, 31-1, 31-2, 33 de la loi du 5 juillet 1996, 121-2 et 131-37 du Code pénal.