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Décisions

CA Chambéry, ch. soc., 20 décembre 2001, n° 2001-01454

CHAMBÉRY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Samse (SA)

Défendeur :

Perruchietti, Chambéry Matériaux (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rogier

Conseillers :

Mme Cuny, M. Gallice

Avocats :

Mes Gallizia, Darves Bornoz, Cochet.

Cons. prud'h. d'Annecy, du 31 mai 2001

31 mai 2001

Exposé du litige:

Monsieur Michel Perruchietti a été embauché par la SA Samse le 29 mai 1974.

Au mois d'octobre 1990, il est devenu chef de dépôt à Annecy. Un nouveau contrat en date du 26 octobre 1990 a alors été établi comportant une clause de non-concurrence.

Le 6 mars 2000, Monsieur Michel Perruchietti a démissionné de son emploi. Il indiquait que son départ de la société devrait être effectif à dater du 9 avril 2000.

Il a cessé effectivement ses fonctions au sein de la SA Samse le 10 mars 2000, ayant été en congé du 13 mars au 7 avril 2000.

Il a été embauché par la société Chambéry Matériaux en qualité de chef de dépôt, qualification cadre, niveau VII, échelon C, coefficient 490 de la convention collective, suivant contrat à durée indéterminée en date du 10 avril 2000.

Lui faisant grief de violer la clause de non-concurrence contractuellement stipulée, la SA Samse a saisi le Conseil de prud'hommes d'Annecy qui, par jugement en date du 31 mai 2001 auquel le présent arrêt se réfère expressément pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties a:

- dit et jugé que la clause de non-concurrence était nulle,

- débouté la SA Samse de ses demandes,

- condamné la SA Samse à payer à Monsieur Michel Perruchietti la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- mis hors de cause la SARL Chambéry Matériaux,

- débouté celle-ci de ses demandes,

- condamné la SA Samse aux entiers dépens.

La SA Samse a relevé appel de ce jugement.

Elle fait valoir:

- que Monsieur Michel Perruchietti a toujours travaillé à son service en qualité de commercial et qu'il était en contact avec la clientèle et les fournisseurs, que c'est donc à juste titre qu'une clause de non-concurrence figurait dans son contrat de travail,

- que la clause de non-concurrence est limitée dans l'espace et dans le temps,

- que Chambéry est situé à une distance d'Annecy inférieure à 50 kilomètres, qu'en outre la clause vise l'ensemble des dépôts de la société au jour du départ du salarié, qu'elle a un dépôt à la Motte-Servolex, à Aix-les-Bains, à Albertville et à Saint Martin d'Hères, que ces lieux d'activité sont à moins de 50 kilomètres de Chambéry,

- qu'il n'existe pas dans le domaine du négoce de matériaux une seule convention collective qui comporterait des dispositions particulières pour telle ou telle catégorie de personnel, qu'il existe trois conventions collectives distinctes:

* une convention collective nationale des ouvriers du négoce des matériaux de construction,

* une convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise (ETAM) du négoce des matériaux de construction,

* une convention collective nationale des cadres du négoce des matériaux de construction,

- que Monsieur Michel Perruchietti répond à la qualification d'agent de maîtrise, que la convention collective qui lui est applicable ne comporte aucune allusion à la clause de non-concurrence, qu'elle ne l'interdit donc pas,

- que dès le mois de mars 2000 et pendant la durée du préavis, Monsieur Michel Perruchietti disait à qui voulait l'entendre qu'il avait été débauché par un concurrent de la SA Samse, le groupe Promater, et contactait les fournisseurs habituels de celle-ci en sa nouvelle qualité,

- qu'elle a mis en garde tant son salarié que la société Promater mais en vain,

- que l'embauche de Monsieur Michel Perruchietti s'inscrit dans le cadre d'une campagne de débauchage systématique du groupe Promater.

Elle demande à la cour:

- d'infirmer le jugement entrepris,

- de constater que Monsieur Michel Perruchietti a enfreint la clause de non-concurrence contenue dans son contrat de travail,

- de lui ordonner de cesser son activité actuelle au service de la société Chambéry Matériaux dans les 24 heures de la notification de l'arrêt à peine d'une astreinte de 50 000 F par infraction constatée,

- de dire qu'elle sera compétente le cas échéant pour liquider l'astreinte,

- de déclarer l'arrêt à intervenir opposable à la société Chambéry Matériaux,

- de condamner Monsieur Michel Perruchietti au paiement de la somme de 20 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Monsieur Michel Perruchietti soutient:

- que la clause de non-concurrence ne contient aucune contrepartie financière,

- que le contrat comportant la clause de non-concurrence a été conclu sur la fonction précise de chef de dépôt, mais qu'il n'est plus appliqué depuis le mois de janvier 1998 où il est devenu attaché technico-commercial,

- que les dispositions des conventions collectives ouvriers et ETAM qui lui sont applicables ne comportent aucune réglementation permettant l'institution d'une clause de non-concurrence à l'inverse de la convention cadres, qui au cas de clause de non-concurrence impose de surcroît une contrepartie financière,

- que la convention collective du négoce des matériaux de construction affirme le principe du libre établissement du salarié après résiliation de son contrat pour quelque cause que ce soit et n'envisage une exclusion à ce principe que pour les cadres, ce qui n'était pas son cas, que s'il y a trois conventions collectives, le système conventionnel de négoce des matériaux ne fait qu'un, que d'ailleurs la nouvelle classification conventionnelle est unique, se substitue aux textes séparés et comporte des dispositions communes assorties de dispositions particulières à chaque catégorie, qu'il en va de même des avenants salaire, des accords de réduction de la durée du travail hebdomadaire, que les partenaires sociaux ont ainsi entendu exclure pour les catégories non-cadres la possibilité de mettre en place une clause de non-concurrence dans le contrat de travail,

- que suivre le raisonnement de la SA Samse reviendrait à considérer qu'une clause de non-concurrence pourrait être imposée à un salarié non-cadre sans contrepartie financière alors qu'elle serait nulle pour un cadre en l'absence d'une telle contrepartie,

- que pour être valable une clause de non-concurrence doit permettre lors de la signature du contrat d'en connaître la portée et l'étendue, que la SA Samse ne démontre pas que le 26 octobre 1990, son implantation correspondait à celle existant au moment de la rupture du contrat de travail,

- que la clause de non-concurrence s'appliquant dans un rayon de 50 kilomètres à partir de chaque dépôt acquis par la SA Samse, non pas au moment de la signature du contrat mais au départ du salarié est atteinte de nullité dans la mesure où elle ne lui permettait pas de connaître réellement le secteur protégé,

- que par ailleurs la clause ne protège pas un intérêt légitime de l'employeur,

- que les entreprises se servant au dépôt d'Annecy ne se servent pas au dépôt de Chambéry.

Il conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de la SA Samse à lui payer une indemnité de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel et à supporter les dépens.

La société Chambéry Matériaux explique:

- que contrairement à ce que soutient la SA Samse, l'embauche de Monsieur Michel Perruchietti ne s'inscrit pas dans une campagne de débauchage systématique,

- que d'ailleurs Promater n'existe pas et qu'il s'agit d'une enseigne à laquelle adhèrent plusieurs négoces de matériaux indépendants,

- qu'elle est la filiale d'une société Profi,

- qu'elle ne peut être concernée par le litige qui oppose Monsieur Michel Perruchietti à la SA Samse devant la juridiction prud'homale,

- qu'elle a cependant intérêt à voir le jugement dont appel confirmé,

- qu'en réalité il existe une seule convention collective contenant trois chapitres, qu'il n'existe dans le chapitre qui intéresse Monsieur Michel Perruchietti aucune disposition concernant la clause de non-concurrence,

- que lorsqu'une catégorie de salariés peut être soumise à un engagement de non-concurrence, cela signifie, en l'absence de disposition pour les autres salariés, que ces derniers ne peuvent y être soumis,

- que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail de Monsieur Michel Perruchietti est donc illicite et nulle,

- que telle qu'elle est libellée, elle a en outre comme conséquence qu'il est impossible pour Monsieur Michel Perruchietti de travailler sur la totalité du quart Sud-Est de la France, qu'elle est par suite excessive,

- qu'elle n'est pas nécessaire pour préserver les intérêts de la SA Samse, la clientèle du bâtiment étant très attachée aux centres de distribution, que la clientèle de Chambéry ne se sert pas à Annecy et vice versa et que l'éloignement entre le dépôt de Chambéry et celui d'Annecy est de 52 kilomètres.

Elle conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de la SA Samse à lui payer la somme de 8 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à supporter les dépens.

Sur ce, LA COUR

Attendu que la société Chambéry Matériaux ne conteste plus devant la cour qu'en cas de demande de condamnation du salarié à cesser ses fonctions auprès du nouvel employeur, celui-ci peut être mis en cause devant la juridiction prud'homale aux fins de déclaration de décision commune, ce qui est bien le cas en l'espèce; qu'elle ne sollicite plus sa mise hors de cause;

Attendu que le contrat de travail en date du 26 octobre 1990 signé par Monsieur Michel Perruchietti alors employé comme chef de dépôt dispose en son article 6:

"Monsieur Perruchietti devra consacrer tout son temps et toute son activité au service de la société contractante. Il s'engage à respecter le secret professionnel.

En cas de résiliation du présent contrat, pour quelque cause que ce soit, Monsieur Perruchietti s'interdit formellement de s'intéresser directement ou indirectement à une affaire concurrente de la distribution des matériaux de construction:

- dans un rayon de 50 kilomètres autour de chaque dépôt de la société (au jour de son départ),

- pendant une durée de 2 ans (à compter de son départ).

La société Samse pourra délier Monsieur Perruchietti de son obligation de non-concurrence si l'intéressé en fait la demande après avis de la commission des cadres réunie pour en délibérer avec la direction";

qu'il ressort d'un document signé du chef d'agence de la SA Samse le 1er décembre 1997 et de Monsieur Michel Perruchietti le 16 décembre 1997 que suite à la nouvelle classification résultant de la convention collective des Matériaux, Monsieur Michel Perruchietti s'est vu attribuer la classification suivante:

"catégorie: technicien

niveau: V

échelon: A, B, C, position: niveau V échelon B coefficient 330 salaire 9 175 F minimum intitulé de fonction: ATC filière: négoce"

Ce que corroborent ses bulletins de paie;

Que lorsqu'un contrat de travail fait l'objet de modifications et que l'avenant ne fait aucune allusion à la clause de non-concurrence insérée dans le contrat initial, il faut considérer que le silence de la convention ne peut avoir pour effet de rendre caduque la clause de non-concurrence, la novation ne se présumant pas;

Que tel est le cas en l'espèce où la modification ne concernait que la classification et où Monsieur Michel Perruchietti, qui de chef de dépôt devenait attaché technico-commercial, continuait à travailler en qualité de commercial et à appartenir à la catégorie des ETAM;

Que la clause de non-concurrence n'est donc pas devenue caduque par l'effet du seul changement de classification;

Attendu que Monsieur Michel Perruchietti et la société Chambéry Matériaux soutiennent que la clause de non-concurrence stipulée dans le contrat signé de Monsieur Michel Perruchietti est nulle et de nul effet aux motifs:

- que la convention collective des ouvriers et ETAM du négoce de matériaux de construction ne comporte aucune disposition permettant la stipulation d'une clause de non-concurrence, que la possibilité de stipuler une telle clause n'est prévue que dans la convention collective des cadres avec des conditions de limitation dans l'espace et dans le temps et une contrepartie financière,

- que la clause de non-concurrence ne permettait pas à Monsieur Michel Perruchietti lors de sa signature d'en connaître la portée et l'étendue,

- qu'elle ne protège pas un intérêt légitime de l'employeur;

Que selon la société Chambéry Matériaux, il y a 52 kilomètres entre les dépôts de Chambéry et d'Annecy et que selon la SA Samse, Chambéry est situé à une distance inférieure à 50 kilomètres d'Annecy et il existe de plus des dépôts Samse à la Motte-Servolex, Aix-Les-Bains, Albertville et Saint-Martin-d'Hères, tous ces lieux étant situés dans un périmètre inférieur à 50 kilomètres depuis Chambéry;

Attendu que l'article 17 de la convention collective des cadres du négoce des matériaux de construction résultant de l'avenant n° 11 du 9 octobre 1975 dispose en son III d): "La résiliation du contrat pour quelque cause que ce soit ne saurait interdire au salarié, même pour un temps limité, un engagement dans une entreprise similaire, sauf stipulation expresse contraire contenue dans le contrat de travail individuel. L'interdiction devra être limitée dans le temps et territorialement et être assortie d'une indemnité compensatrice à verser au salarié au moment de la rupture du contrat";

Que la convention collective des ouvriers du négoce des matériaux et la convention collective des ETAM du négoce des matériaux ne comportent quant à elles aucune disposition en matière de clause de non-concurrence;

Qu'en vain, Monsieur Michel Perruchietti se prévaut d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 12 novembre 1997 dont il résulte que lorsque la convention collective prévoit qu'une catégorie de salariés peut être soumise à une clause de non-concurrence, les autres catégories ne peuvent se voir appliquer une telle clause;

Qu'en effet, il était question dans cet arrêt d'une seule et même convention collective qui ne prévoyait la possibilité d'une clause de non-concurrence que pour les chefs de bureau et non pour les autres catégories de salariés entrant dans son champ d'application;

Qu'en l'espèce, l'on n'est pas en présence d'une seule et même convention collective régissant les ouvriers, ETAM et cadres du négoce de matériaux de construction ne prévoyant la possibilité d'une clause de non-concurrence sous certaines conditions que pour les cadres mais de trois conventions collectives distinctes, l'une pour les ouvriers, une autre pour les ETAM et un troisième pour les cadres dont une seule, celle des cadres, réglemente la clause de non-concurrence;

Qu'en présence de trois conventions qui tout en intéressant le domaine du négoce des matériaux de construction sont distinctes, il n'est pas possible de déduire de ce qu'une seule, celle des cadres, envisage la clause de non-concurrence, qu'une telle clause n'est pas possible dans les contrats de travail des ouvriers et ETAM;

Que chaque convention ne peut s'apprécier que distinctement des autres;

Que dès lors que la convention collective des ETAM du négoce des matériaux de construction ne contient aucune disposition relative à l'obligation de non-concurrence, Monsieur Michel Perruchietti et la société Chambéry Matériaux sont mal fondés à prétendre que la clause de non-concurrence figurant dans le contrat de travail de Monsieur Michel Perruchietti est illicite, cette convention collective ne permettant pas la stipulation d'une telle clause;

Que faute d'être interdite par la convention collective spécifique aux ETAM du négoce des matériaux, la stipulation d'une clause de non-concurrence dans le contrat de travail de cette catégorie de salariés est permise;

Attendu qu'en l'absence de dispositions plus strictes de la convention collective applicable, une clause de non-concurrence doit, pour être valable, être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'employeur et ne pas faire échec au principe de la liberté du travail en rendant impossible pour le salarié l'exercice d'une activité conforme à sa formation et à ses connaissances;

Que pour apprécier si la clause ne fait pas échec au principe de la liberté du travail, il y a lieu de prendre en compte la limitation de la clause dans le temps, dans l'espace et quant à la nature des activités visées, ces trois conditions n'étant pas cumulatives;

Qu'il est possible de procéder à la réduction de ses effets plutôt qu'à son annulation lorsqu'elle est excessive;

Que l'existence d'une compensation financière en faveur du salarié n'est pas une condition de validité de la clause;

Qu'enfin, une telle clause qui limite la liberté de travailler doit être interprétée de manière restrictive;

Attendu qu'il est constant que Monsieur Michel Perruchietti a toujours travaillé pour la SA Samse en qualité de commercial de sorte qu'il se trouvait en contact régulier avec la clientèle et avec les fournisseurs dont il connaissait toutes les conditions notamment de prix;

Qu'il ne peut de plus être sérieusement soutenu que la clientèle de Chambéry ne se sert pas à Annecy et vice versa; que si les entreprises locales ont pour habitude de s'approvisionner au dépôt le plus proche, certaines entreprises peuvent avoir leur siège à égale distance d'Annecy et de Chambéry et que des entreprises plus proches de Chambéry peuvent avoir des chantiers proches d'Annecy et vice versa; qu'en tout état de cause, rien ne s'oppose à ce que, pour des raisons d'ailleurs diverses, une entreprise de Chambéry s'approvisionne à Annecy et vice versa;

Qu'ainsi donc, la clause de non-concurrence était bien destinée à protéger un intérêt légitime de l'employeur;

Qu'elle est limitée dans le temps à savoir deux ans à compter de la cessation effective des fonctions c'est-à-dire en cas de dispense de préavis, à compter du départ du salarié de l'entreprise;

Qu'elle vise toute affaire concurrente de la distribution des matériaux de construction dans un rayon de 50 kilomètres autour de chaque dépôt de la société au jour du départ du salarié;

Qu'à cet égard, force est de constater qu'elle ne permettait pas au salarié au jour où il s'engageait, soit le 26 octobre 1990, de connaître l'étendue du secteur réellement protégé et donc de son engagement puisque les implantations des dépôts Samse étaient susceptibles de modifications pendant la durée contrat de travail, jusqu'à sa rupture et de surcroît également au-delà;

Que Monsieur Michel Perruchietti n'a donc pu s'engager valablement au regard de dépôts qui n'existaient pas au jour du contrat;

Qu'il n'est du reste pas même démontré qu'il lui ait été remis à l'époque de la signature du contrat comportant une clause de non-concurrence une liste des dépôts de SA Samse;

Que dans ces conditions et par suite de la nécessaire interprétation restrictive des clauses de non-concurrence, il convient de réduire les effets de la clause contractuelle litigieuse à partir des seuls dépôts existants à la date de sa stipulation, soit le 26 octobre 2000;

Qu'il appartient dès lors à la SA Samse de rapporter la preuve de la violation de la clause de non-concurrence dans les limites de sa validité, c'est-à-dire d'établir que Monsieur Michel Perruchietti s'intéresse directement ou indirectement à une affaire concurrente dans un rayon de 50 kilomètres autour de chaque dépôt de la société au jour du contrat en date du 26 octobre 1990;

Qu'il travaille au dépôt de la société Savoie Matériaux sis 515 avenue des Landiers à Chambéry (Savoie); que les parties n'ont pas cru devoir préciser l'adresse et la localisation du dépôt d'Annecy où il travaillait; qu'il est mentionné sur ses bulletins de paie "employeur: Samse Annecy - route de Bellegarde - 74330 La Balme de Sillingy";

Que tandis que la société Savoie Matériaux indique qu'il y a 52 kilomètres entre les deux dépôts dont s'agit et que la SA Samse affirme qu'il y a 49 km entre Annecy et Chambéry, la SA Samse à qui la charge de cette preuve incombe ne fournit aucun élément établissant formellement que le dépôt où travaille actuellement Monsieur Michel Perruchietti à Chambéry est dans un rayon de 50 km à compter du dépôt où il travaillait pour son compte dans le secteur d'Annecy;

Qu'elle n'établit pas non plus que les dépôts de la Motte-Servolex, Aix-Les-Bains, Albertville et Saint-Martin d'hères qu'elle cite expressément existaient à la date du 26 octobre 1990 ni que le dépôt où travaille actuellement Monsieur Michel Perruchietti à Chambéry est dans un rayon de 50 kilomètres de chacun de ceux-ci notamment pour ce qui concerne Albertville et Saint Martin d'Hères;

Que d'une façon plus générale, la SA Samse ne rapporte pas la preuve que Monsieur Michel Perruchietti travaille depuis sa démission dans un dépôt sis dans un rayon de 50 kilomètres à compter de l'un des dépôts de la SA Samse que celle-ci possédait et exploitait déjà le 26 octobre 1990; que Monsieur Michel Perruchietti a pourtant expressément fait valoir dans ses conclusions que "pour être valable une clause de non-concurrence doit permettre lors de la signature du contrat d'en connaître la portée et l'étendue. Or la Samse ne démontre pas que le 26 octobre 1990, son implantation correspondait à celle existant au moment de la rupture du contrat";

Qu'il convient dans ces conditions sinon d'annuler du moins de réduire les effets de la clause de non-concurrence litigieuse dans l'espace et de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SA Samse de sa demande tendant à la condamnation de Monsieur Michel Perruchietti à cesser son activité actuelle au service de la société Chambéry Matériaux sous astreinte;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Michel Perruchietti l'intégralité des frais irrépétibles que lui a occasionnés la présente procédure; que la SA Samse sera tenue de lui verser la somme de 8 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel confondus;

Que l'équité ne commande pas par contre d'allouer une indemnité à la société Savoie Matériaux sur le fondement de ce même texte;

Qu'il n'est pas non plus inéquitable de laisser à la charge de la SA Samse qui succombe l'intégralité des frais irrépétibles que lui a occasionnés la présente procédure;

Qu'elle supportera enfin les entiers dépens de première instance et d'appel;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Déclare l'appel de la SA Samse Matériaux recevable en la forme, Au fond, Réforme le jugement entrepris en ce qu'il a: - dit que la clause de non-concurrence liant Monsieur Michel Perruchietti et la SA Samse est nulle, - condamné la SA Samse à payer à Monsieur Michel Perruchietti la somme de 10 000 F au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, - mis hors de cause la SARL Chambéry Matériaux, Le confirme pour le surplus, notamment en ce qu'il a débouté la SA Samse de l'ensemble de ses demandes, Statuant à nouveau sur les chefs réformés, Limite les effets de la clause de non-concurrence dans l'espace aux affaires concurrentes de la distribution des matériaux de construction dans un rayon de 50 kilomètres autour de chaque dépôt de la société au jour du contrat en date du 26 octobre 1990 comportant ladite clause, Condamne la SA Samse à payer à Monsieur Michel Perruchietti la somme de 8 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel confondus, Dit que la mise en cause de la SARL Chambéry Matériaux afin que la décision à intervenir lui soit opposable est recevable et justifiée, Déboute les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires, Condamne la SA Samse aux entiers dépens de première instance et d'appel.