CA Agen, 1re ch., 9 août 1989, n° 1248-88
AGEN
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Passoni
Défendeur :
Ducos (SAE)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Selmes
Conseillers :
MM. Parent, Cazes
Avoués :
SCP Tandonnet, Me Burg
Avocats :
SCP Tandonnet-Moulette, SCP Thizy-Guerre.
Faits et procédure:
Germain Passoni a relevé appel le 25 octobre 1988 d'un jugement rendu pas le Tribunal de commerce d'Auch en date du 7 octobre 1988 qui l'a débouté de toutes ses demandes fins et conclusions dans l'instance qu'il avait engagée contre les Etablissements Ducos en exécution de travaux et dommages-intérêts et l'a condamné aux dépens.
Il s'évince de la procédure et des débats les faits suivants:
Le 29 mars 1984 la SAE Etablissements Ducos a livré et installé un pont élévateur Facom dans le garage automobile de Passoni à Lectoure suivant facture pour un prix TTC de 51 637,91 F;
Des désordres se seraient produits en 1985 suivis de l'intervention des Etablissements Ducos qui auraient modifié le scellement.
Par exploit du 14 décembre 1987, Passoni a assigné les Etablissements Ducos en référé au motif que le pont élévateur qui avait basculé vers l'avant le 10 novembre 1987 ne pouvait plus fonctionner.
L'expert Guintard a été commis par ordonnance du Président du Tribunal de commerce en date du 18 décembre 1987.
Moyens et prétentions des parties:
L'appelant fait plaider que la SAE Etablissements Ducos n'a pas respecté son obligation de délivrance, de garantie de pérennité et bon fonctionnement de l'ouvrage et qu'il est fondé à obtenir réparation en application des articles 1615 et 1641 du Code civil.
Il estime que la SAE Ducos a manqué à son devoir de conseil en installant le pont litigieux sur une charpe en béton maigre de 5 cm d'épaisseur alors qu'elle savait qu'il n'était pas possible de faire une mise en place correcte sur cette assise bétonnée.
Il reproche aux Etablissements Ducos de ne pas lui avoir fourni le carnet d'entretien. Il conteste ne pas avoir agi à bref délai.
Enfin, il estime que dès lors qu'il est établi que l'ancrage du pont se trouvait défectueux, il est évident que même si un contrôle ultérieur l'avait révélé la SAE Ducos n'en est pas moins responsable pour ne pas ne pas avoir délivré la chose et tout ce qui était destiné à son usage perpétuel.
L'appelante conclut à la réformation du jugement dont appel, à ce que la SAE Etablissements Ducos soit déclarée responsable de son dommage et à sa condamnation à lui payer:
1°) au titre des frais de remise en état du pont élévateur la somme hors taxes de 9 010 F;
2°) au titre du préjudice commercial et financier la somme de 150 000 F;
3°) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile celle de 10 000 F;
Et, subsidiairement à la désignation d'un expert chargé d'investiguer sur le quantum du préjudice qu'il a subi;
La SAE Etablissements Ducos conclut à l'irrecevabilité des demandes formulées par Germain Passoni en raison de leur tardiveté plus de trois ans après l'installation du pont élévateur alors qu'il devait agir à bref délai. Elle fait également valoir que le pont élévateur a été livré avec une garantie d'un an et qu'aux termes de l'article 1643 du Code civil elle se trouve déchargée en toute garantie depuis l'expiration de ce délai étant précisé que Passoni est un acheteur utilisateur professionnel de ce type d'affaire;
Subsidiairement sur le fond du litige les Etablissements Ducos estiment démontrer comme ils l'ont fait devant l'expert:
- que les chevilles utilisées étaient correctement installées sinon l'ensemble boulon cheville serait remonté lors de sa mise en place
- que la seule résistance du seul boulon qui a cassé était supérieure à celle préconisée par le fabricant du pont élévateur pour l'ensemble des 4 points de fixation;
- que l'épaisseur du béton 50 à 60 mm était insuffisante car non conforme aux normes en la matière;
L'intimée affirme:
- que le rapport de l'expert Guintard n'établit pas la relation de cause à effet entre les conditions d'installation du pont élévateur et le prétendu vice, que si la colonne fait bras de levier sur les têtes de boulon cela est dû à un manque d'entretien de Passoni;
- que l'expert méconnaît totalement les conséquences qu'ont pu avoir sur le pont, précisément sur son ancrage au sol l'accident survenu avec un camion C 35 basculé du pont, ce qui expliquait l'effet de levier mentionné par l'expert.
Les Etablissements Ducos concluent au débouté de Passoni en la totalité de ses demandes comme étant irrecevables et en tt cas mal fondées et à sa condamnation à verser à la SAE Etablissements Ducos la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Sur quoi, LA COUR:
Attendu que l'appelant invoque l'article 1615 du Code civil comme base de son action en soutenant que les Etablissements Ducos n'ont pas respecté leurs obligations de délivrance de la chose vendue, de sorte que sa demande n'est soumise à aucune condition du délai.
Attendu que la SAE Ducos soutient au contraire qu'il s'agit d'une action en garantie contre les vices cachés qui doit être intentée à bref délai;
Attendu que la non-conformité de la chose livrée à celle commandée implique l'absence d'une qualité que l'on peut escompter de la chose;
Que l'absence de cette qualité ne saurait être confondue avec l'existence d'un vice susceptible de donner la préséance aux règles spéciales de la garantie;
Attendu que Passoni se borne à invoquer l'usage normal que l'on doit attendre de la chose.
Attendu qu'il s'infère des pièces de la procédure et des débats et notamment du rapport d'expertise qu'à la suite d'une intervention des Etablissements Ducos qui aurait modifié le scellement du pilier moteur avant gauche qui s'était descellé, ladite SAE Duclos a missionné l'APAVE association de prospection d'appareils électriques pour faire procéder à un contrôle du fonctionnement sécurité du pont élévateur;
Attendu qu'il ressort du rapport du 5 juin 1986 et des explications de M. Thillac de l'APAVE que deux ans après la mise en fonctionnement de l'appareil celui-ci était en bon état et satisfaisait aux règles de sécurité;
Attendu néanmoins que l'ingénieur a relevé qu'il n'y avait jamais eu de réception, que ni Passoni ni les Etablissements Ducos informés de la nécessité de la réception n'ont donné de suite à cette invitation;
Attendu qu'un autre contrôle a été fait le 1er octobre 1987 par la société Shamm sans qu'aucune anomalie ait été signalée.
Attendu que Passoni mécanicien habitué à l'usage des ponts élévateurs n'a pu faire valoir jusqu'en 1987 des vices de fonctionnement de l'appareil à l'appui de sa thèse actuelle de non- conformité de la chose livrée.
Attendu qu'il ne peut donc invoquer à la suite de l'incident du 3 novembre 1987 que l'existence d'un vice caché.
Attendu donc que l'action engagée pour non-conformité de la chose livrée à celle commandée recouvre en réalité une action en garantie des vices cachés.
Attendu que si le bref délai court à partir de la découverte du vice par l'acheteur, cette notion n'en exclut pas moins le bien fondé d'une action engagée plus de trois ans après la livraison de l'appareil.
Attendu que les Etablissements Ducos ne justifient pas d'un préjudice du fait de l'action engagée par Passoni;
Qu'il y a lieu en conséquence de confirmer la décision entreprise.
Par ces motifs, LA COUR: Reçoit Passoni en son appel régulier en la forme; Au fond, l'en déboute; Confirme la décision entreprise; Condamne Passoni aux dépens qui seront recouvrés par Me Burg, avoué, selon les dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.