CCE, 16 octobre 2002, n° 2002-C 280/04
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Aides d'État - France - Aide C 68-2002 (ex E 3/2002 et NN 80/2002) - Avantage dont a bénéficié Électricité de France (EDF) à la suite de la création irrégulière de provisions, pour 56 866 millions de francs français, aux fins de renouvellement du réseau d'alimentation générale (RAG)
Texte du résumé
Par l'article 4 de la loi 97-1026 du 10 novembre 1997, le Gouvernement français a indiqué clairement qu'EDF est propriétaire du RAG depuis 1956. Cela contredisait la position d'EDF, qui avait modifié sa pratique comptable pendant la période 1987/1996 en faisant passer les biens RAG au poste du bilan "Biens mis en concession" pour pouvoir bénéficier des règles comptables dérogatoires applicables aux biens qui doivent être retournés au concédant à la fin d'une concession.
Si EDF était propriétaire du RAG depuis 1956, elle n'aurait pas dû requalifier ces biens en 1987 dans son bilan en les faisant passer du poste "Biens propres" au poste "Biens mis en concession". De même, elle n'aurait pas dû être autorisée à créer, comme elle l'a fait, des provisions complémentaires totalisant 56866 millions de francs français (FRF) pour le remplacement du RAG, en plus des provisions normales pour amortissement.
En s'écartant de sa pratique comptable antérieure et en créant ces provisions de manière irrégulière au cours de la période 1987/1996, EDF a réduit son revenu imposable annuel du même montant sur ladite période et s'est assuré un avantage financier indu équivalent à la valeur capitalisée de l'allégement fiscal dont elle a bénéficié durant cette période.
En plus de cet avantage fiscal, EDF a bénéficié également au cours de la même période d'une réduction indue de la rémunération qu'elle aurait dû payer pour la participation de l'État dans son capital si elle avait enregistré de meilleurs résultats.
EDF a adopté une pratique comptable que l'administration fiscale française a tolérée et qui a permis à EDF de bénéficier d'un avantage financier substantiel. Cette situation s'est perpétuée même après les rapports de la Cour des comptes française qui, dès octobre 1994, concluait que la création par EDF des provisions pour renouvellement était irrégulière et visait uniquement à réduire artificiellement sa charge fiscale.
Après l'adoption par le Parlement français de l'article 4 de la loi 97-1026, EDF a procédé à une série d'ajustements comptables et de reclassements, que les autorités françaises ont autorisés, concernant les provisions complémentaires, qui n'ont que partiellement compensé l'avantage dont l'entreprise avait bénéficié pendant la période 1987/1996.
La Commission a invité à plusieurs reprises les autorités françaises à lui fournir un calcul détaillé de l'avantage précité. Or, malgré cela, les autorités françaises n'ont pas communiqué tous les renseignements demandés.
À ce stade, les mesures d'aide en cause ne semblent pas remplir les conditions prévues pour ne pas tomber sous le coup de l'interdiction posée à l'article 87, paragraphe 1, du traité.
Conformément à l'article 14 du règlement (CE) n° 659-1999 du Conseil, toute aide illégale pourra faire l'objet d'une récupération auprès de son bénéficiaire.
Texte de la lettre
"La Commission souhaite informer la France qu'après avoir examiné les informations fournies par vos autorités dans le cas CP 89/2001 susmentionné, elle a décidé de proposer des mesures utiles conformément à l'article 88, paragraphe 1, du traité CE et d'ouvrir une procédure formelle d'examen conformément à l'article 88, paragraphe 3, du traité CE, concernant une série d'aides d'État en faveur d'EDF. La Commission souhaite également informer la France qu'elle a décidé de lui enjoindre de lui fournir toute information utile pour l'évaluation des aides dans le cadre de la procédure formelle d'examen.
I. Procédure
1. Par lettre du 10 juillet 2001, la Commission a invité les autorités françaises à lui fournir une première série d'informations concernant un certain nombre de mesures en faveur d'Électricité de France (EDF) qui pouvaient contenir des éléments d'aide d'État.
2. Par lettre du 19 juillet 2001, les autorités françaises ont demandé que le délai fixé pour fournir les informations soit reporté au 15 septembre 2001. La Commission a accepté la demande de la France par lettre du 27 juillet 2001.
3. N'ayant pas reçu de réponse, la Commission, par lettre du 10 octobre 2001, a adressé un rappel aux autorités françaises.
4. Les autorités françaises ont répondu à la demande de renseignements de la Commission par lettre du 12 octobre 2001.
5. Par lettre du 27 novembre 2001, la Commission a demandé aux autorités françaises de lui soumettre les informations qui manquaient dans leur réponse précédente, ainsi que certains éclaircissements sur les informations fournies.
6. Par lettre du 14 décembre 2001, les autorités françaises ont demandé que le délai fixé pour fournir ces renseignements complémentaires et ces éclaircissements soit reporté au 26 janvier 2002, en raison des difficultés qu'elles éprouvaient à réunir ces informations et à cause de la période des congés. La Commission a accédé à la demande française par lettre du 11 janvier 2002.
7. N'ayant toujours pas reçu de réponse, les services de la Commission, par lettre du 5 février 2002, ont rappelé aux autorités françaises leur engagement de répondre à la demande de la Commission pour le 26 janvier 2002 et les ont averties que, à défaut de réponse, ils seraient contraints de proposer à la Commission d'adopter les mesures prévues dans un tel cas par le règlement (CE) n° 659-1999 du Conseil portant modalités d'application de l'article 88 du traité CE.
8. Par lettre du 21 février 2002, les autorités françaises ont présenté une réponse partielle à la demande d'éclaircissements de la Commission.
9. Par lettre du 9 avril 2002, les autorités françaises ont soumis un certain nombre d'informations complémentaires.
10. Par lettre du 6 mai 2002, la Commission a réitéré sa demande concernant les informations toujours manquantes et a demandé des éclaircissements sur les dernières informations soumises.
11. Par lettre du 23 mai 2002, les autorités françaises ont demandé à la Commission de proroger d'un mois le délai de vingt jours fixé pour répondre à la demande susmentionnée.
12. Par lettre du 18 juin 2002, la Commission a informé les autorités françaises qu'elle ne pouvait proroger le délai susmentionné. Elle a attiré l'attention des autorités françaises sur le fait que l'essentiel des informations et des clarifications demandées l'avaient déjà été depuis longtemps dans sa lettre du 27 novembre 2001 et que plusieurs rappels leur avaient ensuite été adressés. La Commission a enfin averti les autorités françaises que, à défaut de réponse, elle serait contrainte d'adopter les mesures prévues dans un tel cas par le règlement de procédure (CE) n° 659-1999.
13. Par lettre du 28 juin 2002, les autorités françaises ont transmis certains renseignements complémentaires et sollicité une rencontre avec les services de la Commission. Une réunion a donc eu lieu le 3 septembre 2002.
II. Électricité de France (EDF)
14. EDF est une entreprise entièrement détenue par l'État et créée par la loi française 46-628 du 8 avril 1946 qui a nationalisé le secteur de l'électricité en France. EDF a été créée avec le statut d'"établissement public à caractère industriel et commercial" (EPIC). Le Premier ministre français nomme le président d'EDF. La politique d'EDF est déterminée en étroite coopération avec le ministère français de l'Energie.
15. À la suite de la mise en œuvre par la France de la directive 96-92-CE du Conseil concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité (1), EDF qui, formellement, était verticalement intégrée, a dû scinder les comptes de ses activités entre trois entités séparées assurant, respectivement, la production, le transport et la distribution de l'électricité.
16. En 2000, EDF assurait 95 % de la production d'électricité en France. Elle est propriétaire du réseau d'alimentation générale (RAG) - haute et très haute tension - et gère 95 % du réseau de distribution français sur la base de concessions données par les municipalités. Malgré la libéralisation du marché réalisée par la directive du Conseil susmentionnée, EDF continue de détenir une position dominante sur le marché français de la fourniture d'électricité. En 2000, 95 % des clients éligibles au sens de la directive (qui représentent 30 % de l'ensemble du marché) avaient décidé de rester fidèles à EDF. Il convient de noter que la gestion du RAG a été confiée à une nouvelle entité, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité. Néanmoins, ledit gestionnaire continue à faire partie intégrante de l'entreprise EDF. La séparation des comptes au sein d'EDF est toutefois imposée pour les trois activités: production, transport et distribution.
17. En 2001, EDF comptait 51 millions de clients en Europe, dont 31,9 millions en France. Le produit de ses ventes dépassait 40,7 milliards d'euro (dont 35 % hors de France, avec un objectif de 50 % en 2005), pour une production d'électricité approchant 470 000 millions de kWh. Son revenu net était de 841 millions d'euro (en baisse par rapport à 1999 et 2000, années où il atteignait environ 1,2 milliard d'euro). En 2000, EDF enregistrait des flux nets de trésorerie de 6,8 milliards d'euro et employait 117 249 personnes en France et 40 000 à l'étranger. Son endettement net s'élevait à 17 560 millions d'euro.
18. Le groupe EDF a élargi le champ de ses activités commerciales essentielles. En 1993, EDF a créé EDF International SA. Cette société achète et détient les investissements d'EDF à l'étranger, soit directement soit en participant à des consortiums d'investissement. Grâce à ses investissements à l'étranger, EDF est maintenant l'un des premiers groupes énergétiques au monde. Selon des informations qu'elle a publiées, EDF a déjà investi près de 11 milliards d'euro dans quelque 22 pays en Europe, en Amérique latine, en Afrique et en Asie (2). EDF est également active sur les marchés de la fourniture de services liés à l'énergie. Afin de soutenir ses activités essentielles, le groupe a décidé de créer EDF Trading, une société spécialisée dans le négoce d'électricité et d'autres énergies, en partenariat avec le groupe Louis Dreyfus. Dans le cadre de sa politique de diversification, EDF a également créé, avec Vivendi Environnement, une entreprise commune, Dalkia, qui fournit des services liés à l'énergie. Elle est maintenant le premier fournisseur de services liés à l'énergie en Europe.
III. Aides d'Etat évaluées
a) Garantie générale accordée à EDF en tant qu'emprunteur
19. EDF a été créée par la loi 46-628 du 8 avril 1946 en tant qu' 'Établissement public à caractère industriel et commercial' (EPIC). En France, les procédures d'insolvabilité et de faillite ne sont pas applicables aux personnes morales de droit public et donc notamment aux EPIC. Selon les autorités françaises, cette exclusion n'a pas été incorporée dans les statuts des EPIC par un acte spécifique, mais résulte d'un principe général de droit français qui vise à faire prévaloir sur les intérêts individuels la continuité du service public assuré par l'EPIC.
20. Toutefois, bien que les actifs des EPIC ne puissent pas être saisis selon les procédures normales, il existe une procédure spéciale qui permet à leurs créanciers de faire valoir leurs droits à leur encontre. Selon les autorités françaises, en vertu de la loi du 16 juillet 1980 relative aux 'Astreintes prononcées en matière administrative et à l'exécution des jugements par les personnes morales de droit public', l'autorité administrative compétente est tenue d'ordonnancer le paiement de toute somme que l'État ou un EPIC n'a pas payée, chaque fois qu'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée les a condamnés à payer.
21. En particulier, l'article 1er, section II, de la loi susmentionnée dispose ce qui suit: 'II. Lorsqu'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée a condamné une collectivité locale ou un établissement public au paiement d'une somme d'argent dont le montant est fixé par la décision elle-même, cette somme doit être mandatée ou ordonnancée dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de justice. À défaut de mandatement ou d'ordonnancement dans ce délai, l'autorité de tutelle procède au mandatement d'office.
En cas d'insuffisance de crédits, le représentant de l'État dans le département ou l'autorité de tutelle adresse à la collectivité ou à l'établissement une mise en demeure de créer les ressources nécessaires; si l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement n'a pas dégagé ou créé ces ressources, le représentant de l'État dans le département ou l'autorité de tutelle y pourvoit et procède au mandatement d'office.
22. Il y a lieu de noter que, selon le second alinéa de la disposition susmentionnée, l'État semble tenu de payer à la place de l'EPIC défaillant en sa qualité de garant en dernier ressort des dettes de celui-ci.
b) Garanties accordées à EDF pour certains emprunts déterminés
23. Selon les autorités françaises, l'État français a cessé de garantir les emprunts d'EDF en francs français (FRF) et en devises, respectivement en 1972 et en 1990. Les derniers emprunts émis par EDF avec la garantie explicite de l'État et non encore remboursés étaient les emprunts obligataires émis sur le marché en 1966, 1982, 1984 et 1989. Chacune de ces émissions était soumise à des règles spécifiques de remboursement et la portion non amortie des emprunts a donc diminué progressivement au fil du temps. Selon les informations fournies, en 1995, la portion non amortie des emprunts garantis était de 15017 millions de FRF sur un total d'emprunts d'EDF de 142 870 millions de FRF (10,51 %). Fin 2001, cette portion non amortie s'élevait à 47 millions de FRF sur un montant total d'emprunts de 98 242 millions FRF (0,05 %). EDF n'a payé aucune prime à l'État pour les garanties qui lui ont été accordées pour ces emprunts.
c) Provisions comptables en franchise d'impôt pour le renouvellement du réseau d'alimentation générale (RAG)
24. Par la loi 46-628 du 8 avril 1946, la France a nationalisé la production, le transport, la distribution ainsi que l'importation et l'exportation d'électricité. La gestion de ces opérations a été confiée à Électricité de France (EDF), la nouvelle entreprise d'État créée à cet effet.
25. Le premier cahier des charges fixant les conditions de l'exercice des activités susmentionnées a été adopté par le décret 56-1225 du 28 novembre 1956. En vertu des articles 29 et 31 de celui-ci, l'État a accordé à EDF une concession dont la durée est en principe de 75 ans pour la gestion du réseau d'alimentation générale (RAG). Ce cahier de charges ne définissait toutefois pas le système de rétrocession de la concession à l'État.
26. Par l'article 4 de la loi 97-1026 du 10 novembre 1997, reproduit ci-dessous, le Gouvernement français a clarifié le régime de propriété et les biens mis en concession: 'I. Les ouvrages du réseau d'alimentation générale en énergie électrique sont réputés constituer la propriété d'Électricité de France depuis que la concession de ce réseau lui a été accordée.
II. Pour l'application des dispositions de la section I, au 1er janvier 1997, la contre-valeur des biens mis en concession du réseau d'alimentation générale figurant au passif du bilan d'Électricité de France est inscrite, nette des écarts de réévaluation correspondants, au poste de 'dotation en capital'.
III. À compter du 1er janvier 1997, tout ouvrage du réseau d'alimentation générale en énergie électrique amené à être reclassé pour relever ensuite du régime de la distribution publique sera remis gratuitement par Électricité de France à l'autorité concédante concernée.'
27. À la suite de l'adoption par le Parlement français de l'article 4 susmentionné, EDF a procédé à une série d'ajustements comptables et de reclassements afin que son bilan reflète, à compter du début de l'exercice 1997, le régime de propriété clarifié par l'acte législatif susmentionné.
28. En particulier, les ajustements et les reclassements comptables ont été les suivants:
a) les biens RAG ont été comptabilisés, pour 90325 millions de FRF, comme 'Biens propres' et non plus comme 'Biens mis en concession';
b) les provisions pour renouvellement s'élevant à 38521 millions de FRF ont été comptabilisées en tant que bénéfice non distribué sans transiter par le compte de profits et pertes (points 29 à 32). Les provisions reclassées ont alors été affectées pour 20225 millions de FRF au report à nouveau de pertes, qui s'est ainsi trouvé apuré, le solde de 18296 millions de FRF étant affecté au poste 'Réserves';
c) au passif, les 18345 millions de FRF représentant les provisions complémentaires pour renouvellement utilisées ont été affectés aux dotations en capital (14119 millions de FRF, le solde étant inscrit à divers comptes de réévaluation) sans transiter par le compte de profits et pertes.
Les écritures comptables visées aux points a) et c) étaient expressément autorisées par les sections I et II, respectivement, de l'article 4 de la loi 97-1026 du 10 novembre 1997. D'après les autorités françaises, l'écriture comptable visée au point b) figurait dans le projet original de cet article, mais étant jugée inutile, elle n'a pas été reprise dans le projet final approuvé par le Conseil national de la comptabilité.
29. Les provisions complémentaires pour renouvellement visées ci-dessus ont été créées par EDF en 1987. Jusqu'à l'exercice 1986, EDF avait inscrit le RAG dans son bilan en tant que 'Biens propres' et lui avait appliqué les règles comptables normales. À cette époque, en vertu de celles-ci, les entreprises françaises étaient autorisées à amortir leurs biens propres et à inscrire au compte de profits et pertes uniquement les provisions d'amortissement calculées sur la base du coût historique ou du prix de revient. EDF a appliqué ce traitement comptable aux biens affectés au RAG jusqu'en 1986.
30. Toutefois, en 1987, EDF a modifié sa pratique comptable. Au motif que le RAG lui avait été confié en 1956 par un contrat de concession, EDF a reclassé les biens affectés au RAG au poste de bilan 'Biens mis en concession'. En même temps, EDF a appliqué à ces biens RAG les règles comptables spéciales établies en France pour les biens mis en concession publique qui doivent être retournés à l'État à la fin de la concession. En particulier, EDF a commencé à inscrire à son compte de profits et pertes les provisions complémentaires pour renouvellement du RAG en plus des provisions normales pour amortissement.
31. Pour les biens qui doivent être retournés au concédant à la fin de la concession, les règles comptables françaises autorisaient l'inscription de provisions pour renouvellement complémentaires en plus de l'amortissement normal. La valeur des provisions complémentaires était égale à la différence entre le coût de remplacement estimé des biens, qui est ajusté chaque année, et leur coût historique. Comme les provisions normales pour amortissement, les provisions complémentaires pour renouvellement diminuent elles aussi le revenu imposable de l'entreprise.
32. Profitant du reclassement du RAG en 1987 et des règles comptables dérogatoires susmentionnées, EDF a créé pour 56 866 millions de FRF de provisions pour renouvellement en franchise d'impôt sur la période 1987/1996. De ce montant, 18345 millions de FRF seulement ont été utilisés mais sans passer par le compte de profits et pertes, raison pour laquelle elles ont conservé leur statut de provisions exonérées. Les autorités fiscales françaises ont autorisé cette pratique.
33. Dans des rapports non publics sur les comptes d'EDF adoptés le 10 octobre 1994 (Réf. 1993 - 682 - OC et 1993 - 304 - OC), la Cour des comptes française a durement critiqué le caractère irrégulier de la création par EDF des provisions complémentaires pour renouvellement. Elle estimait que la concession n'ayant pas de date d'expiration, EDF n'était pas autorisée à créer des provisions complémentaires pour renouvellement. Elle dénonçait également le caractère irrégulier de l'allégement fiscal dont bénéficiait EDF à la suite de la création irrégulière de provisions pour renouvellement pour le RAG.
IV. Appréciation
A. Avantage pour EDF
34. Par les mesures décrites aux points a), b) et c) de la section III, l'État français a conféré à EDF un avantage sur ses concurrents tant en France que dans les autres États membres.
a) Garantie générale accordée à EDF en tant qu'emprunteur
35. Selon le point 2.1.3 de la communication de la Commission sur l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides d'État sous forme de garanties (3): 'La Commission estime que constituent également une aide sous forme de garantie les conditions de crédit plus favorables obtenues par les entreprises dont le statut légal exclut la possibilité d'une procédure de faillite ou d'insolvabilité ou prévoit explicitement une garantie de l'État ou une couverture des pertes par l'État. La même remarque vaut pour l'acquisition par l'État d'une participation dans une entreprise lorsqu'elle s'accompagne d'une responsabilité illimitée au lieu de la responsabilité limitée normale'.
36. Entre autres effets, l'octroi par les autorités françaises du statut d'EPIC à EDF emporte l'octroi d'une garantie couvrant tous les engagements de cette entreprise. En accordant ce statut, l'État rend inapplicables à EDF les dispositions normales régissant l'insolvabilité et la faillite en droit commercial français ordinaire et annule par conséquent le risque de défaillance sur tous ses engagements, y compris les emprunts. En l'absence de la garantie que comporte le statut d'EPIC, la notation d'EDF baisserait fortement à la suite de la perte de la couverture de l'État et le coût de ses emprunts augmenterait pour refléter la véritable solidité financière intrinsèque de la société.
37. Les autorités françaises ont affirmé que, malgré ce qui précède, les créanciers peuvent faire valoir leur droits à l'encontre d'EDF en utilisant la procédure spéciale de recouvrement de créances sur les institutions publiques prévue à l'article 1er, section II, de la loi du 16 juillet 1980 (points 20 et 21). Toutefois, cette procédure en vertu de laquelle l'autorité administrative compétente est tenue d'ordonnancer le paiement d'un montant dû revêt un caractère exceptionnel et ne peut être appliquée que si EDF a fait l'objet d'une condamnation définitive.
38. En outre, en vertu du second alinéa de cet article, l'État doit non seulement ordonnancer le paiement, mais aussi intervenir en tant que garant d'EDF en dernier ressort. En particulier, l'État serait tenu de payer à la place d'EDF si, après avoir fait l'objet d'une condamnation définitive et après l'ordonnancement du paiement, EDF n'était pas en mesure d'effectuer ledit paiement.
b) Garanties accordées à EDF pour certains emprunts déterminés
39. Conformément au point 2.1.2 de la communication de la Commission susmentionnée relative aux aides d'État sous forme de garanties: 'Une garantie de l'État présente l'avantage de faire supporter par l'État le risque associé à la garantie. Cette prise de risque devrait normalement être rémunérée par une prime appropriée. Lorsque l'État y renonce, il y a à la fois avantage pour l'entreprise et ponction sur les ressources publiques. Par conséquent, même si l'État n'est pas amené à faire des paiements au titre de la garantie accordée, il y a aide au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité. L'aide est accordée au moment où la garantie est offerte, et non au moment où elle est mobilisée ou à celui où elle entraîne des paiements. C'est donc au moment où la garantie est donnée qu'il y a lieu de déterminer si elle constitue ou non une aide d'État et, dans l'affirmative, de calculer le montant de cette aide.'
40. Dans le cas examiné, l'État français a accordé à EDF des garanties explicites pour une série d'émissions d'emprunts obligataires sans demander aucune rémunération pour cette prise de risque. L'avantage financier que présentent ces garanties de l'État pour EDF serait donc égal à la prime qu'une institution financière commerciale aurait facturée à EDF pour obtenir ces garanties sur les emprunts au moment de leur émission.
41. Il convient toutefois de noter que, selon le point 5.3 de ladite communication, la Commission n'acceptera les garanties, même si elles donnent lieu au paiement d'une prime calculée au prix du marché, que si leur mobilisation est subordonnée contractuellement à des conditions spécifiques pouvant aller jusqu'à la déclaration obligatoire de la faillite de l'entreprise bénéficiaire ou une procédure analogue. Comme indiqué dans la section précédente, la mise hors jeu de la loi sur l'insolvabilité et la faillite dont a bénéficié EDF grâce à son statut d'EPIC amènerait la Commission à considérer que les garanties en question constituent une aide même si EDF avait payé en contrepartie de celle-ci une prime.
c) Provisions comptables en franchise d'impôt pour le renouvellement du réseau d'alimentation générale (RAG)
42. Par l'article 4 de la loi 97-1026 du 10 novembre 1997, le Gouvernement français a indiqué clairement qu'EDF est propriétaire du RAG depuis 1956. Cela contredisait la position d'EDF, qui avait modifié sa pratique comptable pendant la période 1987/1996 en faisant passer les biens RAG au poste du bilan 'Biens mis en concession' pour pouvoir constituer des provisions pour renouvellement en franchise d'impôt.
43. Les informations soumises par les autorités françaises corroborent la conclusion selon laquelle EDF peut être considérée comme propriétaire du RAG depuis le début, c'est-à-dire depuis le premier cahier des charges de 1956. Cette conclusion est fondée sur l'appréciation des éléments suivants: les caractéristiques des différents types de contrats de concession en droit français, les caractéristiques particulières de la concession originale à EDF qui ne comportait pas de clause précise de rétrocession, la procédure d'acquisition des actifs concernés pour lesquels EDF a dû acquitter un droit similaire à une indemnité d'expropriation, et les conditions de financement de l'entretien et du développement ultérieurs du RAG aux frais d'EDF.
44. Par conséquent, la requalification par EDF en janvier 1997 des ouvrages du RAG qui passent du poste du bilan 'Biens mis en concession' au poste 'Biens propres', après l'adoption par le Parlement français de l'article 4 de la loi 97-1026 du 10 novembre 1997, ne peut être considérée comme contenant des éléments d'aide d'État.
45. Toutefois, si EDF était propriétaire du RAG depuis 1956, elle n'aurait pas dû requalifier ces biens en 1987 dans son bilan en les faisant passer du poste 'Biens propres' au poste 'Biens mis en concession'. De même, selon les règles nationales, EDF n'aurait pas dû être autorisée à créer, comme elle l'a fait, des provisions complémentaires totalisant 56866 millions de FRF pour le remplacement du RAG. En s'écartant de sa pratique comptable antérieure et en créant ces provisions de manière irrégulière au cours de la période 1987/1996, EDF a réduit son revenu imposable annuel du même montant sur ladite période et s'est assuré un avantage financier indu équivalent à la valeur capitalisée de l'allégement fiscal dont elle a bénéficié chacune de ces années.
46. Au cours de la période 1987/1996, EDF a adopté une pratique comptable que l'administration fiscale française a tolérée et qui a permis à EDF de bénéficier d'un allégement fiscal substantiel indu. Cette situation s'est perpétuée même après les rapports de la Cour des comptes française qui, dès octobre 1994, concluait que la création des provisions pour renouvellement par EDF était irrégulière et visait uniquement à réduire artificiellement sa charge fiscale.
47. En plus de cet avantage fiscal, à la suite de la création irrégulière des provisions complémentaires, EDF a bénéficié également au cours de la même période d'une réduction indue de la rémunération qu'elle aurait dû payer pour la participation de l'État dans son capital.
Sur la période considérée, cette rémunération comprenait deux éléments: une rémunération des dotations en capital à un taux d'intérêt fixé annuellement et une rémunération complémentaire variable fixée en pourcentage des résultats d'EDF. La réduction des résultats d'EDF résultant de l'inscription indue à son compte de profits et pertes des provisions complémentaires a également entraîné une réduction indue de la rémunération due à l'État.
48. Pour annuler le double avantage indu susmentionné, les ajustements et reclassements comptables effectués par EDF à la suite de la clarification de son statut de propriétaire du RAG par l'article 4 de la loi 97-1026 auraient dû faire augmenter l'impôt sur les sociétés dû par EDF en 1997 d'un montant équivalent à la valeur capitalisée de l'avantage dont elle avait joui au cours de la période 1987/1996 pendant laquelle les provisions complémentaires pour renouvellement ont été créées irrégulièrement.
49. Or, les ajustements et les reclassements comptables effectués en 1997 n'annulent que partiellement l'avantage indu dont EDF a joui au cours de la période 1987/1996.
50. Lorsqu'on examine cette question, il y a lieu d'établir une distinction entre les provisions déjà utilisées et les provisions non utilisées, qui s'élevaient respectivement à 18345 millions de FRF et à 38521 millions fin 1997.
51. Sur le montant total des provisions utilisées, 14119 millions de FRF ont été reclassés au poste du bilan 'Dotations en capital', le solde de 4 226 millions de FRF étant inscrit à divers comptes de réévaluation. Étant donné que la requalification n'a pas transité par le compte de profits et pertes et que les augmentations de capital ne sont pas considérées comme constituant une augmentation du patrimoine net de la société aux fins du calcul de l'impôt sur les sociétés, cette requalification a consolidé l'allégement fiscal dont bénéficiait EDF sur ces provisions.
Selon les autorités françaises, l'avantage dont EDF a bénéficié en termes d'allégement fiscal peut être estimé à 5883 millions de FRF [14 119 × 41,67 %(4)].
52. Il convient toutefois de noter que cette estimation sous-estime l'avantage réel dont a bénéficié EDF étant donné qu'il a été calculé de manière approximative sur la base des valeurs comptables historiques. En outre, la réduction artificielle de la rémunération due à l'État n'a pas non plus été prise en considération. Pour calculer l'avantage réel, il faudrait capitaliser l'allégement fiscal et la réduction de la rémunération dont EDF a effectivement bénéficié chaque année au cours de la période 1987/1996 à la suite de la création irrégulière des provisions complémentaires.
53. Bien qu'elles y aient été invitées, jusqu'à présent, les autorités françaises n'ont pas fourni à la Commission de calcul détaillé de la véritable valeur de ces avantages.
54. Pour leur part, en ce qui concerne les provisions complémentaires non encore utilisées, les autorités françaises ont affirmé que les ajustements et reclassements comptables effectués par EDF en 1997 ont annulé l'avantage fiscal qu'EDF s'était assuré de manière irrégulière en créant les provisions mentionnées plus haut. Sur un total de 38 521 millions de FRF, 20 225 millions de provisions pour renouvellement non utilisés sont venus apurer le report à nouveau déficitaire, le reste, soit 18 296 millions, étant mis en réserve.
Selon les autorités françaises, bien qu'elles n'aient transité par le compte de profits et pertes d'EDF, les écritures comptables correspondantes ont eu pour effet de faire augmenter la valeur nette de la société, sur la base de laquelle EDF a payé un impôt sur les sociétés plus élevé.
55. Toutefois, pour pouvoir apprécier si cette augmentation de l'impôt sur les sociétés de 1997 a annulé l'avantage obtenu par EDF par le biais de la création irrégulière des provisions complémentaires en question, il est indispensable de disposer d'un relevé détaillé des allégements fiscaux dont EDF a bénéficié sur la période 1987/1996, ainsi que de l'augmentation produite par lesdites écritures comptables au niveau de l'impôt sur les sociétés effectivement payé par EDF en 1997. Le calcul devrait prendre en considération les valeurs actualisées et donc capitaliser l'allégement fiscal dont EDF a effectivement bénéficié au cours de la période 1987/1996 de manière à obtenir la valeur réelle en 1997 au moment où l'augmentation alléguée de l'impôt sur les sociétés s'est produite. En outre, le calcul de l'avantage réel d'EDF devrait également prendre en considération la rémunération que l'État a perdue du fait des moins bons résultats enregistrés par EDF en raison de la création irrégulière des provisions complémentaires.
56. Toutefois, malgré les demandes réitérées de la Commission, les autorités françaises n'ont pas soumis le relevé susmentionné qui aurait permis à la Commission d'établir dans quelle mesure l'avantage dont EDF a indûment bénéficié avait été annulé par l'augmentation de l'impôt sur les sociétés que l'entreprise a payé en 1997. La Commission considère par conséquent que les provisions pour renouvellement représentent un élément d'aide important.
57. Dans leurs deux dernières lettres, les autorités françaises ont fait valoir que les écritures comptables enregistrées par EDF à la fin de 1997, après l'adoption par le Parlement français de l'article 4 de la loi 97-1026 clarifiant le régime de propriété des biens RAG, avaient placé EDF dans une situation fiscale moins favorable que celle qui aurait résulté de l'application des règles de droit commun telles que modifiées après l'adoption de l'article 5 de la loi de finances pour 1998.
D'après les autorités françaises, l'article 5 de cette dernière loi aurait étendu le bénéfice de provisions en franchise d'impôt à toute société qui, en France, est tenue de renouveler des actifs, que ses opérations présentent un caractère de service public ou soient de nature commerciale classique, et qu'il existe ou non un contrat de concession.
Les autorités françaises affirment notamment que, en vertu de l'article 5 de la loi de finances pour 1998, EDF aurait été autorisée à maintenir à son bilan la totalité ou, tout au moins, une partie des 38521 millions de FRF de provisions pour renouvellement non utilisées et afférentes au RAG. De leur point de vue, le fait de soumettre ces provisions à l'impôt sur les sociétés en application des écritures comptables enregistrées à la fin de 1997 aurait plus que compensé l'avantage potentiel consolidé concernant les 18296 millions de FRF de provisions utilisées. Au total, elles concluent qu'EDF n'a bénéficié d'aucun avantage.
58. En ce qui concerne cette dernière allégation des autorités françaises, il convient de noter tout d'abord que l'article 5 de la loi de finances pour 1998 est entré en vigueur après l'octroi de l'aide examinée en l'espèce. Il ne saurait être question de régulariser des aides d'État a posteriori en procédant à une application rétroactive de modifications législatives. En outre, on ne saurait exclure que le régime de provisions en franchise d'impôt, tel que modifié par l'article 5 de la loi de finances pour 1998, soit une mesure sélective qui constitue, en tout état de cause, une aide au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité.
59. Quoi qu'il en soit, contrairement à l'avis des autorités françaises, la Commission constate qu'EDF ne relevait pas du champ d'application de l'article 5 de la loi de finances pour 1998. Les rapports d'information de l'Assemblée nationale comme du Sénat confirment qu'EDF ne pouvait bénéficier des dispositions de cet article.
60. Le rapport de l'Assemblée nationale précise que: 'Le présent article fixe la base légale de calcul des provisions pour renouvellement d'équipements, que constituent les entreprises concessionnaires ou locataires soumises à une obligation de restitution des biens exploités en fin de contrat'. Comme expliqué précédemment, l'article 4 de la loi 97-1026 du 10 octobre 1997 a précisé qu'EDF était propriétaire du RAG depuis 1956 et que, par conséquent, elle ne devait pas le rétrocéder à l'État. C'est pourquoi EDF n'était pas autorisée à créer de nouvelles provisions en application de l'article 5 de la loi de finances pour 1998.
61. Par ailleurs, le rapport du Sénat confirme qu'EDF ne pouvait bénéficier des dispositions de cet article. Il explique notamment: 'C'est notamment le reproche que la Cour des comptes a adressé à Électricité de France dans son rapport particulier du 10 octobre 1994 sur les concessions d'EDF. Elle écrit ainsi: 'L'absence de réelle date d'expiration des concessions permet au concessionnaire de ne jamais remettre les immobilisations du domaine concédé au concédant, et, par la suite, de ne jamais supporter réellement cette charge spécifique attachée à la nature même du contrat de concession. Cette charge a pourtant été déduite du résultat, et figure, au passif du bilan pour le montant total de la provision pour renouvellement.'
Elle ajoute: 'Abstraction faite du cas théorique où le mécanisme de dotations aux provisions pour renouvellement n'aurait plus de raison d'être au motif que les valeurs de remplacement des immobilisations renouvelables correspondraient à leur prix d'achat, les provisions figurant au passif du bilan ne pourront jamais être apurées. Au contraire, elles continueront d'augmenter en raison même du mécanisme de dotation retenu.'
EDF a ainsi pu déduire de ses résultats plus de 32 milliards de FRF de dotation aux provisions pour renouvellement au titre de la période 1987-1992, alors que, au cours de la même période, seulement 4,4 milliards de FRF ont été utilisés pour assurer le renouvellement du réseau d'alimentation générale.
La récente loi portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier a résolu le problème des provisions pour renouvellement effectuées au titre du réseau d'alimentation générale d'EDF en faisant de l'entreprise le propriétaire de ce réseau. Elle n'est donc plus habilitée à constituer des provisions pour renouvellement sur les ouvrages de ce réseau. Le montant constitué jusqu'alors est venu accroître les capitaux propres de l'établissement.'
62. En résumé, à ce stade de l'examen, la Commission doit par conséquent conclure que, à la suite de la création irrégulière de 56 866 millions de FRF de provisions complémentaires pour renouvellement du réseau d'alimentation générale (RAG) sur la période 1987/1996, EDF a bénéficié d'un avantage consistant dans la mesure dans laquelle la somme de la valeur capitalisée de l'allégement fiscal obtenu au cours de la même période et de la valeur de la rémunération à laquelle l'État a renoncé n'a pas été annulée par l'augmentation de l'impôt sur les sociétés résultant des enregistrements comptables d'EDF en 1997, à la suite de l'adoption par le Parlement français de l'article 4 de la loi 97-1026.
B. Distorsion de la concurrence au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité
63. En dépit du fait qu'EDF exerçait en France des activités sur une série de marchés soumis à des droits de monopole avant l'entrée en vigueur de la directive 96-92-CE du Conseil libéralisant le secteur de l'électricité, la Commission considère que les mesures d'aides en cause en faveur d'EDF ont faussé ou menacé de fausser la concurrence et le commerce aux termes de l'article 87, paragraphe 1, du traité. Cela résulte en particulier du fait que, malgré les droits exclusifs dont jouissait EDF dans l'exercice de certaines activités en France, il existait néanmoins un certain degré de commerce entre États membres sur ces marchés. De surcroît, une libre concurrence existait sur les marchés connexes sur lesquels EDF avait déjà diversifié (que se soit d'un point de vue géographique ou sectoriel) ses activités au-delà de l'étendue de ses droits exclusifs. Ces effets étaient déjà présents bien avant la libéralisation provoquée par la directive susmentionnée.
64. Depuis sa création en 1946 et jusqu'à l'entrée en vigueur de la directive du Conseil 96-92-CE libéralisant le secteur de l'électricité, EDF a joui sur le marché français d'une situation de monopole consistant en droits d'exclusivité pour le transport, la distribution ainsi que l'importation et l'exportation d'électricité. Toutefois, EDF était déjà en concurrence avec les producteurs d'électricité des autres États membres avant l'entrée en vigueur de la directive susmentionnée sur la libéralisation. Au cours de la période pendant laquelle les aides ont été mises en œuvre, l'électricité faisait l'objet d'échanges importants et croissants entre les États membres et EDF y participait activement. Ces échanges, renforcés par l'adoption de la directive 90-547-CE relative au transit d'électricité sur les grands réseaux, s'effectuaient sur la base d'accords commerciaux entre les différents opérateurs des réseaux d'électricité de haute tension dans les États membres. Dans les pays européens de l'OCDE, les importations d'électricité ont augmenté à un taux annuel moyen de plus de 7 % entre 1980 et 1990. Sur la période 1981 à 1989, EDF a multiplié l'excédent de sa balance commerciale d'électricité par 9, atteignant des exportations nettes de 42 TWh représentant 10 % de sa production totale. En 1996, EDF a exporté 61 TWh vers les autres États membres, contre 19 TWh en 1985. Les échanges d'électricité de haute tension entre les États membres représentent actuellement plus de 10 % de la consommation totale.
En 1997, EDF a enregistré un solde positif d'exportation-importation de commerce d'électricité de 65 TWh avec les pays européens, dont le Royaume-Uni, l'Italie, l'Allemagne, la Suisse, la Belgique, le Luxembourg, l'Espagne et Andorre. En 2001, les exportations d'électricité d'EDF ont augmenté à une valeur record de 83,9 TWh, contribuant pour 2300 millions d'euro aux ventes annuelles.
65. En outre, avant l'entrée en vigueur de la directive sur la libéralisation en février 1999, certains États membres avaient déjà adopté unilatéralement des mesures visant à ouvrir anticipativement leur marché de l'électricité. En particulier, le Royaume-Uni a ouvert son marché à 100 % pour les gros clients industriels en 1990. La Suède a ouvert son marché à 100 % en 1996, la Finlande a commencé à l'ouvrir en 1995 pour atteindre 100 % en 1997, l'Allemagne l'a ouvert à 100 % en 1998 et les Pays-Bas l'ont ouvert totalement pour les clients industriels en 1998. Dans ces conditions, dès ces dates antérieures à la date fixée par la directive, les aides d'État accordées à un monopoleur d'un État membre participant activement aux échanges intracommunautaires, comme c'est le cas d'EDF, faussent la concurrence sur le marché de la distribution au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité.
66. En outre, EDF participait et continue de participer à la concurrence tant en France qu'à l'étranger dans d'autres domaines que celui de son activité principale, à savoir la production et la distribution d'électricité en France.
EDF a diversifié ses activités sur les marchés entièrement libéralisés des services liés à l'énergie. Directement ou par l'intermédiaire de filiales comme SDS (synergie, développement et services), EDF offre des services sur plusieurs marchés voisins comme les conseils et l'ingénierie en énergie, la gestion des déchets, l'éclairage, les télécommunications, etc. Par ailleurs, depuis 1993, avec la création d'EDF International, EDF est active sur les marchés de l'électricité étrangers par les participations qu'elle détient dans des sociétés de production, de transport et de distribution.
En 1997, EDF était l'un des opérateurs internationaux leaders dans le secteur de l'électricité avec plus de 13000 FRF d'investissements dans des installations de production et plus de 8 millions de clients à travers le monde ce qui équivalait à environ 11 % de la capacité de production déployée en France. À cette époque, en Europe, EDF générait et fournissait de l'électricité dans neuf pays et, dans certains cas, fournissait également du gaz et d'autres services.
En 1997, la société holding Chart, une filiale détenue intégralement par EDF, réunissait les activités d'EDF dans la production d'électricité et de sources d'électricité renouvelable telle que géothermal, vent et certaines usines hydroélectriques. Sa contribution au chiffre d'affaires consolidé était de 70 millions d'euro. Pour sa part, SDS, autre filiale intégralement détenue par EDF, a réuni les activités liées à la fourniture de services pour les individuels, les entreprises et les autorités locales. SDS exerce son activité dans le traitement des déchets, éclairage de rue et autres services liés à l'énergie avec une contribution aux ventes équivalent à 685 millions d'euro en 1998 par rapport à 650 en 1997.
La tendance croissante des ventes à l'étranger d'EDF depuis le début des années quatre-vingt dix renforce la position de leader mondial d'EDF en qualité de groupe multiservice, multi-energy. Les activités d'EDF à l'étranger (participations étrangères, entreprises de services et exportations de la maison mère EDF) sont passées de 12 % de son chiffre d'affaires en 1998 à 18 % en 1999. Les ventes provenant de l'extérieur du marché français de l'électricité équivalaient à 34 % du total du groupe en 2001 avec une cible prévue de 50 % en 2005.
67. Enfin, en tant que producteur et distributeur d'électricité, EDF a été et est encore en concurrence avec des fournisseurs d'autres sources d'énergie de substitution comme le charbon, le pétrole et le gaz, tant sur son marché national que sur les marchés internationaux. En France, par exemple, EDF a lancé avec succès une campagne pour encourager l'utilisation d'électricité pour le chauffage. Elle a ainsi accru sa part de marché par rapport à ses concurrents qui fournissent des sources d'énergie de substitution comme le pétrole ou le gaz. Dans le secteur de l'acier, les fours électriques sont eux aussi en concurrence avec les fours à gaz et à pétrole.
68. Par conséquent, les aides examinées ont faussé ou ont menacé de fausser la concurrence et les échanges au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité.
C. Statut légal des aides d'État
a) Garantie générale accordée à EDF en tant qu'emprunteur
69. Selon les autorités françaises, le rôle de garant en dernier ressort joué par l'État vis-à-vis des établissements publics, bien que codifié par la loi de 1980, découle d'un principe général de droit français antérieur à l'institution des Communautés. Dès lors, il s'agit d'un élément d'aide existant au sens de l'article 88, paragraphe 1, du traité.
b) Garanties accordées à EDF pour certains emprunts déterminés
70. Les garanties couvrant les emprunts obligataires émis en 1966, 1982, 1984 et 1989 ont été accordées par le ministre des Finances français dans le cadre des arrêtés autorisant lesdites émissions. Ces arrêtés font explicitement référence à la garantie inconditionnelle de l'État couvrant le service des emprunts en termes d'intérêts, d'amortissement, de primes potentielles, de commissions, de coûts et d'autres frais éventuels. Lesdits arrêtés ayant été adoptés il y a plus de dix ans, en vertu de l'article 15, paragraphe 3, du règlement de procédure (CE) n° 659-1999, la renonciation à la prime sur les garanties correspondantes constitue un élément d'aide existant au sens de l'article 88, paragraphe 1, du traité.
Les autorités françaises ont fait valoir que l'aide avait été accordée et produit la totalité de ses effets lors de l'émission des emprunts obligataires avec la garantie de l'État. La Commission considère toutefois que ces mesures de garantie faisaient partie du financement général à long terme d'EDF et qu'elles continuent à produire leurs effets pendant toute la durée de vie des emprunts, jusqu'à leur remboursement. Dans ces conditions, la Commission considère, à ce stade, que l'élément d'aide permanent que constitue la renonciation à une prime annuelle pour la portion des prêts garantis non encore amortie peut faire l'objet d'une proposition de mesures utiles.
c) Provisions comptables en franchise d'impôt pour le renouvellement du réseau d'alimentation générale (RAG)
71. Les reclassements et les ajustements comptables qui ont consolidé une partie de l'avantage qu'EDF s'était assuré par la création irrégulière de provisions pour le renouvellement du réseau d'alimentation générale à haute tension ont été enregistrés en 1997, à la suite de l'adoption par le Parlement français de l'article 4 de la loi 97-1026 du 10 novembre 1997. L'élément d'aide, consistant dans la valeur capitalisée de l'avantage non annulé par lesdits reclassements et ajustements, a donc été consolidé avec l'agrément des autorités françaises dans le courant du délai de prescription de dix ans prévu à l'article 15, paragraphe 3, du règlement de procédure (CE) n° 659-1999 et en infraction avec l'article 88, paragraphe 3, du traité. Cet élément d'aide constitue donc une aide nouvelle.
D. Compatibilité potentielle en vertu de l'article 87, paragraphes 2 et 3, du traité
72. L'article 87, paragraphe 1, du traité, dispose que les aides correspondant aux critères qu'il définit sont en principe incompatibles avec le Marché commun.
73. Les exceptions à cette incompatibilité prévues à l'article 87, paragraphe 2, du traité, ne sont pas applicables en l'espèce en raison de la nature de l'aide, qui n'est pas destinée à atteindre les objectifs énumérés dans ce paragraphe.
74. En ce qui concerne les exceptions prévues à l'article 87, paragraphe 3, points a) et c), pour les aides destinées à favoriser le développement économique de certaines régions, les aides concernées en l'espèce ne remplissent pas les conditions nécessaires pour avoir un tel effet, d'autant plus qu'elles ont été accordées sous la forme d'aides au fonctionnement, c'est-à-dire qu'elles n'étaient pas subordonnées à des investissements ou à la création d'emplois comme le prévoit les lignes directrices de la Communauté européenne concernant les aides d'État à finalité régionale(5).
75. En ce qui concerne les exceptions prévues à l'article 87, paragraphe 3, points b) et d), du traité, les aides concernées en l'espèce n'étaient pas destinées à promouvoir la réalisation d'un projet d'intérêt commun, ni à remédier à une perturbation grave de l'économie française, ni à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine.
76. L'article 87, paragraphe 3, point c), du traité, prévoit également une exception pour les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités quant elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun. En l'espèce, à ce stade, les aides examinées ne semblent remplir les conditions d'autorisation d'aucun des encadrements des aides d'État à finalité régionale adoptés par la Commission. En outre, les autorités françaises n'ont pas invoqué cet argument.
77. Au contraire, les aides examinées étant des aides au fonctionnement, elles semblent avoir eu pour objet ou pour effet de renforcer la position concurrentielle d'EDF vis-à-vis de ses concurrents pendant la période qui a précédé l'entrée en vigueur de la directive sur la libéralisation du secteur de l'électricité.
E. Conclusion
78. Par conséquent, les aides à EDF examinées constituent des aides au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité et ne semblent pas, à ce stade, permettre de considérer que les conditions énoncées à l'article 87, paragraphes 2 et 3, du traité, sont remplies.
79. EDF est un fournisseur de services publics pour une partie de ses activités. Il convient de noter que bien que, jusqu'à présent, elles n'aient pas invoqué à cet égard l'application de l'article 86, paragraphe 2, du traité, les autorités françaises ont souligné le fait qu'EDF est tenue par des missions de service public. Les autorités n'ont cependant fourni aucune évaluation du coût occasionné à EDF par ces obligations. Il est donc impossible de vérifier la correspondance entre les différentes aides d'État dont cet opérateur bénéficie et les coûts des missions de service public qui lui sont imposées. Il semble, de toute façon, que les aides examinées en l'espèce, qui revêtent essentiellement la forme de dérogations exceptionnelles aux dispositions normalement applicables dans le domaine comptable et commercial, ont conféré à EDF un avantage opérationnel qui semble à ce stade dépasser les coûts de n'importe quel service public. EDF n'a pas reçu de dotations en capital depuis longtemps. Les aides examinées ont contribué de facto à financer l'expansion agressive d'EDF par l'acquisition de participations à l'étranger. Un tel usage de ces fonds semble sortir du cadre de ce que l'on peut considérer comme une mission de service public admissible.
V. Décisions
A. Proposition de mesures utiles
80. Les aides à EDF consistant en une garantie illimitée couvrant tous ses engagements en vertu de son statut d'EPIC et la renonciation à une prime sur les garanties couvrant les emprunts obligataires décrits dans la section IV points a) et b) constituent des aides existantes au sens de l'article 1er, point b), du règlement de procédure (CE) n° 659-1999. Conformément à l'article 18 dudit règlement, si la Commission parvient à la conclusion qu'un régime d'aides existant n'est pas, ou n'est plus, compatible avec le Marché commun, elle adresse à l'État membre concerné une recommandation proposant l'adoption de mesures utiles.
81. Par lettre du 22 mars 2002, la Commission a informé la France de son avis préliminaire sur l'incompatibilité de ces aides et lui a donné l'occasion de présenter ses observations dans un délai d'un mois conformément à l'article 17, paragraphe 2, du règlement de procédure (CE) n° 659-1999.
82. Par conséquent, la Commission propose que la France élimine les éléments d'aide en question:
i) en supprimant la garantie illimitée dont bénéficie EDF sur tous ses engagements en vertu de son statut d'EPIC, et
ii) en exigeant qu'EDF paie une prime au prix du marché en contrepartie de la garantie existante sur la portion des emprunts obligataires non encore amortie.
83. Ces deux mesures doivent être prises avec effet immédiat.
La France devra, conformément à l'article 19, paragraphe du règlement de procédure (CE) n° 659-1999, informer la Commission de son accord concernant cette proposition de mesures utiles dans un délai d'un mois de la réception de cette lettre. Autrement, la Commission appliquera la procédure prévue à l'article 19, paragraphe 2, du règlement de procédure (CE) n° 659-1999.
En ce qui concerne la garantie illimitée dont jouit EDF de par son statut d'EPIC, il est important de souligner que, dans sa proposition de mesures utiles, la Commission ne remet en aucune façon en cause le statut public du capital d'EDF, ni ne conteste le statut d'EPIC en tant que tel. La Commission s'interroge simplement sur l'effet lié à la mise en œuvre d'une des particularités du statut d'EPIC, à savoir la dérogation prévue aux procédures de redressement et de liquidation judiciaires et le rôle de l'État en qualité de garant en dernier ressort des dettes de la société, qui est applicable à une entreprise particulière telle que EDF qui exploite des activités économiques sur des marchés concurrentiels.
Aux termes de l'article 295 du traité, la Communauté est neutre en ce qui concerne le régime de la propriété dans les États membres et aucune disposition du traité ne fait obstacle à ce que l'État détienne (entièrement ou partiellement) des entreprises. Cela étant, les règles de concurrence doivent s'appliquer de la même manière aux entreprises privées comme aux entreprises publiques. Aucun de ces deux types d'entreprises ne saurait être avantagé ou désavantagé par l'application de ses règles. Dans le cas présent, la garantie ne résulte pas de la propriété mais du statut juridique de l'entreprise. Comme cela est expliqué au point 2.1.3 de la communication de la Commission sur les aides octroyées sous forme de garanties (JO C 71 du 11.3.2000, p. 14), si la forme juridique d'une entreprise est associée à des avantages entraînant une distorsion de concurrence prohibée par le traité, et particulièrement par les règles en matière d'aides d'État, cette forme juridique doit être soumise à la discipline des aides d'État. Les États membres sont libres de choisir la forme juridique des entreprises mais doivent, dans leur choix, respecter les règles de concurrence du traité. En particulier, le simple fait que la garantie de l'État soit automatiquement liée à un statut juridique particulier n'empêche pas ladite garantie de constituer une aide d'État aux termes de l'article 87, paragraphe 1, du traité si les conditions applicables sont réunies. Cette conclusion n'est pas affectée par l'article 295 du traité. Bien au contraire, dans un scénario concurrentiel, le principe de neutralité impliquerait la suppression de tout avantage injustifié au bénéfice des entreprises publiques au détriment de leurs concurrents privés. Une approche identique a été récemment suivie par la Commission, à titre d'illustration, dans le cas concernant les institutions publiques de crédit en Allemagne (point 5 de la proposition de mesures utiles du 8 mai 2001).
B) Procédure formelle d'examen
84. L'aide résultant de l'avantage qu'EDF s'est assuré par la création irrégulière de 56 866 millions de FRF de provisions comptables pour le renouvellement du RAG, qui n'est que partiellement compensé par les ajustements et reclassements comptables enregistrés en 1997, est illégale. Conformément à l'article 88, paragraphe 2, du traité, et à l'article 4, paragraphe 4, du règlement de procédure (CE) n° 659-1999, si la Commission constate, après un examen préliminaire, que la mesure suscite des doutes quant à sa compatibilité avec le Marché commun, elle décide d'ouvrir la procédure formelle d'examen.
85. À la lumière des considérations qui précèdent, la Commission invite la France, dans le cadre de la procédure de l'article 88, paragraphe 2, du traité, à lui présenter ses observations et à fournir toute information utile pour l'évaluation de l'aide susmentionnée, dans un délai d'un mois à compter de la date de réception de la présente. Elle invite vos autorités à transmettre immédiatement une copie de cette lettre à EDF.
86. La Commission rappelle à la France l'effet suspensif de l'article 88, paragraphe 3, du traité, et se réfère à l'article 14 du règlement (CE) n° 659-1999, qui dispose que toute aide illégale pourra faire l'objet d'une récupération auprès de son bénéficiaire.
87. La Commission avise la France qu'elle informera les intéressés par la publication de la présente lettre et d'un résumé de celle-ci au Journal officiel des Communautés européennes. Elle informera également les intéressés dans les pays de l'AELE signataires de l'accord EEE par la publication d'une communication dans le supplément EEE du Journal officiel, ainsi que l'autorité de surveillance de l'EEE, en leur envoyant une copie de la présente. Tous les intéressés susmentionnés seront invités à présenter leurs observations dans un délai d'un mois à compter de la date de cette publication.
C) Injonction de fournir des informations
88. Par lettre du 27 novembre 2001, la Commission a invité les autorités françaises à lui fournir certaines informations. Bien que la Commission ait réitéré sa demande par lettres du 6 mai 2002 et du 18 juin 2002, les autorités françaises n'ont pas encore soumis toutes les informations demandées par la Commission.
89. Conformément à l'article 10, paragraphe 3, du règlement de procédure (CE) n° 659-1999, si en dépit du rappel qui lui a été adressé, un État membre ne fournit pas les renseignements demandés dans le délai imparti par la Commission ou les fournit de façon incomplète, la Commission arrête une décision lui enjoignant de fournir lesdites informations.
90. Compte tenu des considérations qui précèdent, la Commission enjoint la France de lui fournir, dans un délai d'un mois à compter de la réception de la présente, tous les documents, informations et données nécessaires pour apprécier la compatibilité des aides dans le cadre de la procédure formelle d'examen prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité, et en particulier les informations suivantes qui, bien qu'elles aient été demandées, n'ont pas encore été fournies ou ne l'ont été que partiellement:
i) copies complètes des rapports non publics de la Cour des comptes française sur EDF;
ii) copies des redressements fiscaux notifiés à EDF par les autorités fiscales françaises en 1987/1997 ainsi que des accords éventuels auxquels les deux parties seraient arrivées;
iii) calcul détaillé des résultats comptables et fiscaux d'EDF pour la période 1986/1997, indiquant la situation fiscale d'EDF dans l'hypothèse où les 56 866 millions de FRF de provisions irrégulières constituées pour le renouvellement du RAG n'auraient pas été créés, comparée à l'impôt sur les sociétés effectivement payé;
iv) calcul détaillé de l'impôt et de la rémunération de l'État qu'EDF aurait dû payer à celui-ci en l'absence des provisions en question.
Les calculs visés aux points iii) et iv) doivent être capitalisés afin de refléter leurs valeurs courantes à la date de paiement de l'impôt sur les sociétés de 1997.
91. Sinon, la Commission adoptera une décision sur la base des informations dont elle dispose."
(1) JO L 27 du 30.1.1997.
(2) La ventilation géographique des investissements de production se présente comme suit: 74 % en Europe, 12 % en Asie, 8 % en Amérique du sud, 2 % en Afrique et 4 % dans le Maghreb/Moyen-Orient. Dans le secteur de la distribution, la ventilation est la suivante: 44 % en Europe, 49 % en Amérique latine, 4 % en Afrique et 3 % dans le Maghreb/Moyen-Orient.
(3) JO C 71 du 11.3.2000.
(4) Taux normal de l'impôt sur les sociétés (33,1/3 %) majoré des dotations additionnelles effectuées pour les exercices financiers clôturés entre le 1er janvier 1997 et le 1er janvier 1999.
(5) JO C 74 du 10.3.1998.