CCE, 24 juillet 2002, n° M.2706
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Carnival Corporation/P & O Princess
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 57, vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises(1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1310-97(2), et notamment son article 8, paragraphe 2, vu la décision de la Commission du 11 avril 2002 d'engager la procédure dans la présente affaire, après avoir donné aux entreprises concernées la possibilité de faire connaître leur point de vue sur les objections soulevées par la Commission, vu l'avis du comité consultatif en matière de concentrations(3), vu le rapport final du conseiller-auditeur dans la présente affaire(4), considérant ce qui suit:
I. Introduction
(1) Le 27 février 2002, la Commission s'est vu notifier, conformément à l'article 4 du règlement (CEE) n° 4064-89 ("le règlement sur les concentrations"), un projet de concentration portant sur l'acquisition du contrôle, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations, de l'entreprise britannique P & O Princess plc ("POPC") par la société américaine Carnival Corporation ("Carnival"), par le biais d'une offre publique d'achat annoncée le 16 décembre 2001.
(2) Après avoir examiné la notification, la Commission est parvenue à la conclusion que l'opération notifiée entrait dans le champ d'application du règlement sur les concentrations modifié et soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun et avec le fonctionnement de l'accord EEE. Le 11 avril 2002, la Commission a décidé d'ouvrir la procédure dans cette affaire, conformément à l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement sur les concentrations et à l'article 57 de l'accord EEE.
(3) Après un examen approfondi de l'affaire, la Commission est aujourd'hui parvenue à la conclusion que la concentration prévue ne créera et ne renforcera pas de position dominante ayant comme conséquence qu'une concurrence effective dans le Marché commun, ainsi que le fonctionnement de l'accord EEE, seraient entravés de manière significative.
II. Les parties
(4) Carnival est un organisateur de croisières maritimes opérant à l'échelle mondiale, qui détient un grand nombre de compagnies de croisières: Carnival Cruise Lines ("CCL"), Holland America Ligne ("HAL"), Costa Cruises ("Costa"), Cunard Ligne ("Cunard"), Seabourn Cruise Ligne ("Seabourn") et Windstar Cruises ("Windstar"). Carnival exploite environ 40 navires dans différentes zones géographiques du globe.
(5) POPC opère elle aussi essentiellement dans le secteur de l'organisation de croisières maritimes à l'échelle mondiale. Elle possède environ 20 navires, exploités par les compagnies suivantes: Princess Cruises ("Princess"), P & O Cruises, Swan Hellenic, Aida Cruises ("Aida"), Arkona et A'Rosa. Elle organise également des croisières fluviales. Carnival et POPC seront désignées collectivement ci-après sous le terme "les parties"(5).
III. L'opération et la concentration
(6) Le 16 décembre 2001, Carnival a lancé une offre publique d'achat, conditionnelle et unilatérale, qui portait sur l'ensemble des actions de POPC. Carnival ayant l'intention d'acquérir le contrôle exclusif de POPC, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations.
IV. Dimension communautaire
(7) Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 5 milliards d'euros(6) (Carnival: 4,05 milliards d'euros; POPC: 2,62 milliards d'euros). Chacune d'entre elles réalise un chiffre d'affaires total dans la Communauté de plus de 250 millions d'euros (Carnival: [500-750]*(7) millions d'euros; POPC: [500-750]* millions d'euros). Si POPC a réalisé plus des deux tiers de son chiffre d'affaires communautaire total au Royaume-Uni, ce n'est pas le cas de Carnival. L'opération notifiée a donc une dimension communautaire conformément à l'article 1er, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations.
V. Procédure
(8) Le 18 mars 2002, la Commission a reçu du Royaume-Uni une demande de renvoi de l'affaire aux autorités de la concurrence du Royaume-Uni, au titre de l'article 9, paragraphe 2, point 1, du règlement sur les concentrations, pour la partie de l'opération relative au marché de l'offre de vacances en croisière au Royaume-Uni. Le Royaume-Uni estimait que la concentration risquait d'entraîner la création d'une position dominante sur ce marché. À la suite de cette demande de renvoi, le délai prévu pour l'examen préliminaire à l'article 10, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations a été porté de un mois à six semaines.
(9) Le 11 avril 2002, la Commission a décidé d'engager la procédure, conformément à l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement sur les concentrations, parce qu'elle estimait que l'opération soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun, du moins sur les marchés nationaux de l'organisation de croisières océaniques au Royaume-Uni et en Allemagne.
(10) Le 22 mai 2002, la Commission a fait parvenir à Carnival une communication au titre de l'article 18 du règlement sur les concentrations (ci-après dénommée "communication des griefs"). Le 18 juin 2002, Carnival a envoyé une réponse à la communication des griefs (ci-après "la réponse de Carnival"). Le 3 juin 2002, POPC a, elle aussi, adressé à la Commission une réponse à la communication des griefs (ci-après "la réponse de POPC"). Carnival et POPC ont toutes deux informé le conseiller-auditeur de la Commission, avant le 7 juin 2002, qu'elles ne feraient pas usage de leur droit à une audition.
(11) Le comité consultatif a examiné l'avant-projet de décision le 22 juillet 2002.
VI. Compatibilité avec le Marché commun
A. Introduction
(12) L'opération porte sur l'organisation de croisières océaniques de vacances(8). La présente section décrit l'évolution historique du secteur et certaines de ses caractéristiques fondamentales.
A.1. Historique du secteur
(13) Le secteur actuel des croisières trouve son origine dans la conversion des paquebots transatlantiques du transport à la croisière de loisirs, qui a débuté dans les années 60. Le secteur des croisières a connu une croissance rapide au cours des années 80, les plus importantes compagnies de croisières construisant des navires de très grande taille, alors que quelques compagnies plus petites acquéraient des navires d'occasion. Depuis le milieu des années 90, certaines grandes compagnies ont construit des navires dits "post-Panamax", de plus de 100 000 tonneaux, appelés ainsi parce qu'ils sont trop grands pour traverser le canal de Panama. En 2001, le secteur des croisières comprenait environ 230 navires dans le monde, un chiffre qui devrait passer à environ 260 en 2003. Les navires ne sont pas liés à des régions ou des itinéraires particuliers, ils peuvent être déplacés n'importe où dans le monde et sont achetés et affrétés à l'échelle internationale.
(14) Les quatre plus grands organisateurs de croisières dans le monde sont Carnival, Royal Caribbean Cruise Ligne ("RCCL"), POPC et Star Group [y compris Norwegian Cruise Ligne Limited ("NCL")]. Du point de vue de l'importance de la flotte, c'est Carnival qui occupe la première place, avec 43 navires, suivie par Royal Caribbean, avec 23 navires, puis par le groupe NCL/Asian Star et POPC, qui possèdent chacun 18 navires. À l'heure actuelle, Carnival a passé commande de 12 navires, qui sont en cours de construction et seront livrés à la fin de 2004; POPC a 5 navires en commande, eux aussi destinés à être livrés à la fin de 2004, de même que RCCL. De toutes les compagnies de croisières, c'est cette dernière qui possède la flotte la plus récente (âge moyen: 5 ans environ) et les plus grands navires au monde (Voyager, Explorer et Adventure, avec 3100 lits chacun). NCL/Star a un navire en cours de construction.
(15) En 2001, on comptait environ 7 millions de croisiéristes en provenance d'Amérique du Nord (72 % de la demande mondiale), 1,9 million (20 %) en provenance d'Europe et 800 000 (8 %) en provenance d'Asie. Les croisières ont atteint un taux de pénétration beaucoup plus élevé aux États-Unis d'Amérique qu'en Europe (États-Unis: 2,2 %; Europe de l'Ouest continentale: 0,4 %)(9).
(16) Au cours des dernières années, le secteur de la croisière a connu des taux de croissance beaucoup plus élevés que d'autres types de vacances. Selon les prévisions, cette croissance devrait progresser plus rapidement en Europe qu'aux États-Unis. On s'attend généralement à ce qu'elle se situe entre 8 % et 20 %.
(17) Au Royaume-Uni, une part importante de cette croissance est due à l'arrivée sur le marché de voyagistes intégrés verticalement. Airtours a été le premier, en 1994/1995, rapidement suivi par Thomson et, plus récemment, par First Choice. Ces compagnies ont transporté ensemble environ un tiers de l'ensemble des croisiéristes britanniques en 2000.
A.2. Les parties
(18) Carnival est une société fondée aux États-Unis en 1972. Elle détient actuellement les compagnies de croisières suivantes: CCL, Costa, HAL, Cunard, Seabourn et Windstar, ces deux dernières proposant des croisières de luxe. CCL propose des croisières de type américain. Carnival a acquis le contrôle conjoint de Costa avec Airtours, en juin 1997, avant d'en acquérir le contrôle exclusif en 2000. Costa opère essentiellement en Europe, sur les marchés méditerranéens, où elle détient une part (en nombre de passagers) d'environ [50-60 %]* en Italie, [35-45 %]* en Espagne et [15-25 %]* en France. C'est aussi essentiellement par l'intermédiaire de Costa que Carnival est présente sur le marché allemand. HAL, qui propose des croisières de type américain, a été acquise par Carnival à la fin des années 80. CCL, Costa et HAL détiennent une part relativement faible du marché britannique. La percée de Carnival sur ce marché a été essentiellement réalisée à la suite du rachat de Cunard, en mai 1998.
(19) L'autre partie à l'opération, POPC, s'est séparée de P & O Steam Navigation Company en octobre 2000. Son activité dans le secteur des croisières est ancienne, puisqu'elle remonte au XIXe siècle. POPC possède les compagnies de croisières P & O Cruises, Princess, Swan Hellenic, Aida et A'Rosa et s'apprête à lancer une nouvelle compagnie au Royaume-Uni, "Ocean Village", qui s'adressera à une clientèle plus jeune et décontractée et qui commencera à opérer en 2003. P & O Cruises, qui propose des croisières de type britannique, est le numéro un du marché britannique. Princess opère essentiellement sur le marché nord-américain. POPC a pénétré sur le marché allemand des croisières grâce à l'acquisition de AIDA en 1999 et de Seetours en 2000.
(20) L'offre de Carnival sur POPC est en concurrence avec une offre de Royal Caribbean. Cette offre a été examinée par le Bundeskartellamt, qui a autorisé l'affaire le 8 janvier 2002, et ainsi que par l'OFT, qui a recommandé un renvoi à la commission de la concurrence britannique. Celle-ci a publié son rapport le 19 juin 2002, en concluant que le regroupement de RCCL et POPC n'aurait pas d'incidence sensible sur la concurrence. Ces deux opérations font actuellement l'objet d'un examen antitrust aux États-Unis, sous l'égide de la FTC.
B. Les marchés en cause
(21) Les produits proposés par les parties, ainsi que par d'autres opérateurs dans divers pays, possèdent un certain nombre de traits distinctifs. Pour des raisons de clarté, la Commission exposera tout d'abord les preuves qui l'ont amenée à considérer que les marchés géographiques en cause étaient de dimension nationale. Elle examinera ensuite les marchés de produits en cause.
B.1. Les marchés géographiques en cause
(22) Carnival a mis en évidence différents aspects qui pourraient faire considérer les marchés géographiques en cause des croisières comme étant nationaux ou internationaux.
(23) En ce qui concerne les éléments indiquant l'existence d'un marché "international", Carnival [...]* mentionne[nt]* le fait que les navires ne sont pas liés à des régions ou des itinéraires particuliers et peuvent être déplacés facilement n'importe où dans le monde, que de nombreuses croisières océaniques sont commercialisées à l'échelle mondiale et regroupent des clients de différentes nationalités parlant plusieurs langues, que les organisateurs de croisières cherchent à favoriser une atmosphère internationale sur leurs navires et que grâce à l'Internet, il est possible de "faire son marché" dans différents pays pour choisir et acheter ses vacances, par exemple des croisières en ligne. [Carnival]* mentionne[nt]* également le fait que l'euro permet aux clients de mieux comparer les prix et souligne[nt] que les navires sont achetés et affrétés dans le monde entier, sur une base internationale.
(24) Pour ce qui est des éléments qui permettraient de conclure à l'existence d'un marché géographique national, [Carnival]* mentionne[nt]* des différences nationales en matière d'habitudes de vacances, de goûts et de préférences (par exemple, en ce qui concerne les horaires ou les habitudes alimentaires), les langues, la commercialisation axée sur la clientèle nationale, des prix moyens différents ainsi que des différences sensibles dans la présence sur le marché de certains organisateurs de croisières et voyagistes.
(25) Dans la décision IV/M.334 - Costa Crociere/Chargeurs/Accor(10), la Commission était parvenue à la conclusion que "les marchés des croisières et autres voyages organisés restaient de dimension essentiellement nationale".
(26) L'étude réalisée par la Commission sur le marché des croisières océaniques montre que les marchés géographiques en cause sont des marchés nationaux, pour les raisons suivantes:
a) la présence sur le marché des organisateurs de croisières varie considérablement d'un État membre à l'autre. Ainsi, en 2000, Carnival détenait une part de marché, en passagers, de [50-60 %]* en Italie et de [0-10 %]* au Royaume-Uni, alors que celle de POPC était inférieure à [0-5 %]* en Italie et atteignait [15-25 %]* au Royaume-Uni;
b) le taux de pénétration des croisières de vacances varie d'un État membre à l'autre. En 2000, 1,25 % des citoyens britanniques ont fait une croisière, alors que ce taux était d'environ 0,4-0,5 % en Allemagne, en Italie et en France, et inférieur à 0,2 % en Espagne;
c) les circuits de distribution ne sont pas les mêmes dans tous les États membres, dans la mesure où tant les agences spécialisées dans les croisières que les agences de voyages généralistes opèrent à un niveau essentiellement national. Seule une petite proportion des ventes s'est faite par l'Internet et un grand nombre de sites Internet qui vendent des croisières opèrent à l'échelon national. Au Royaume-Uni, il existe de nombreuses agences spécialisées dans les croisières, en plus des agences généralistes;
d) la commercialisation et les promotions se font généralement à l'échelon national, la plupart du temps par l'intermédiaire d'une filiale ou d'un agent général indépendant, qui sont chargés de tenir compte des particularités nationales pour les opérations de commercialisation et de promotion. Le contenu et la présentation des promotions sont adaptés en fonction des États membres;
e) les stratégies en matière de prix, ainsi que le niveau des prix, diffèrent d'un État membre à l'autre. La Commission a recueilli des preuves indiquant qu'une même croisière pouvait être vendue par des organisateurs de croisières à des prix différents selon le pays où elle était proposée;
f) les croisières de certaines compagnies sont commercialisées uniquement, ou essentiellement, dans certains États membres; c'est ainsi que les croisières de Cunard et de P & O Cruises sont axées sur le marché britannique, alors que celles d'Aida et A'Rosa s'adressent avant tout au marché allemand.
(27) La plupart des facteurs énumérés au considérant 26 demeureraient valables si le marché de produits comprenait également, en plus des croisières océaniques, d'autres types de vacances. La conclusion selon laquelle les marchés géographiques en cause sont nationaux demeurerait donc valable même si l'on estimait que le marché des produits en cause est celui de l'offre de voyages de loisir, ainsi que le suggère Carnival (voir considérant 29).
B.2. Les marchés de produits en cause
(28) Les parties opèrent dans le secteur de l'offre de croisières océaniques. Les croisières océaniques consistent en un voyage comprenant plusieurs nuitées à bord d'un navire, entrepris à des fins de loisirs dans des eaux maritimes.
B.2.1. L'avis des parties sur le marché de produits
(29) Carnival considère que le marché de produits est celui de l'offre de voyages de loisirs, qui comprend un vaste éventail de possibilités de vacances différentes. Elle fait valoir que des vacances en croisière peuvent remplacer différents autres types de vacances, tels que le séjour dans un club de vacances ou dans un complexe hôtelier tout compris, un voyage organisé, un séjour de ski ou un circuit dans un pays exotique.
(30) La société cible (POPC) a une opinion similaire, mais pas identique. Elle considère que les croisières océaniques font partie d'un marché plus vaste, mais ne pense toutefois pas qu'elles soient en concurrence avec tous les autres types de vacances(11).
(31) L'enquête de la Commission a mis en évidence un certain nombre d'éléments distinguant les croisières océaniques d'autres formes de vacances en Europe(12).
B.2.2. Les croisières océaniques et les autres vacances (à terre)
Caractéristiques des croisières et perceptions des consommateurs
(32) Dans le cas des croisières océaniques(13), le client achète un produit distinct de tout autre produit "vacances", dans la mesure où il allie: a) l'expérience de la mer, b) l'expérience d'un voyage d'un endroit à un autre sur plusieurs jours et plusieurs nuits, c) sans avoir besoin de faire et défaire sans arrêt ses valises, et d) une expérience de convivialité à bord tout à fait particulière, différente des expériences de groupe à terre.
(33) Tous ces critères apparaissent dans la liste des motifs donnés par les consommateurs pour justifier leur choix d'une croisière. Ces motifs sont propres aux croisières et les distinguent de tous les autres types de vacances, y compris les vacances à forfait. L'enquête menée par la Commission lui a permis de compléter les informations publiées dans des sources professionnelles sur les raisons pour lesquelles les consommateurs achètent une croisière(14). Interrogés sur les raisons pour lesquelles leurs clients achètent une croisière, les agents de voyage ont mentionné trois raisons principales qui, considérées ensemble, sont propres aux croisières. Il s'agit: 1) de l'attractivité de l'itinéraire et de l'enchaînement des destinations; 2) du fait que les services offerts à bord d'un navire soient ou non "tout compris", et 3) du fait qu'une croisière ne nécessite pas de faire et de défaire les bagages entre deux étapes, ce qui constitue une façon très pratique de passer ses vacances. Aucune autre forme de vacances ne réunit ces trois attraits principaux. Plusieurs des autres raisons citées n'étaient pas propres aux croisières, comme, par exemple, le prix, le rapport qualité/prix et le rapport qualité/satisfaction.
(34) POPC affirme que les voyages organisés en autocar et les vacances à terre "multicentres" sont, par certains aspects, semblables aux croisières(15). Elle fait également référence à sa propre enquête auprès des consommateurs, dont il ressort que les raisons les plus importantes citées pour le choix d'une croisière sont le prix, l'itinéraire, le fait qu'une occasion spéciale soit en cause ainsi que le moment de l'année(16). L'argument relatif aux prix est très général, tout comme, dans un contexte de voyage, celui relatif au "moment de l'année". Le fait qu'il soit possible de partir en croisière pendant toute l'année distingue effectivement ce type de vacances d'autres produits plus limités. Les "occasions spéciales" peuvent constituer une caractéristique commune à un certain nombre de vacances haut de gamme, mais elles peuvent également constituer une caractéristique qui distingue les croisières de bien d'autres types de vacances. Enfin, les itinéraires des croisières peuvent être considérés comme tout à fait uniques, dans la mesure où il est difficilement possible de reproduire les mêmes itinéraires, et encore moins les expériences qui y sont associées, avec des moyens de transport terrestres.
(35) L'avis de Carnival sur la différence potentielle entre les croisières et d'autres types de vacances au Royaume-Uni repose sur deux études, réalisées par IRN Research(17) et par Mintel(18).
(36) Carnival a chargé Mintel d'étudier la mesure dans laquelle les croisières sont en concurrence avec des vacances à terre, et si les croisières proposées par des organisateurs spécialisés, tels que Carnival, sont en concurrence avec les croisières proposées par les voyagistes (à ce propos, voir considérants 70 à 93. Mintel a réuni des données provenant d'un grand nombre de sources, qui lui ont permis démontrer que: a) les croisières sont de plus en plus intégrées dans des forfaits-vacances comprenant également des éléments "terrestres"; b) la moyenne d'âge des croisiéristes est en baisse et les paquebots sont adaptés aux besoins de cette clientèle plus jeune; c) les prix réels des croisières sont en baisse, et d) les croisiéristes prennent aussi d'autres vacances que des vacances en croisière.
(37) La Commission ne pense pas que le premier facteur indique l'existence d'un seul marché comprenant à la fois les éléments "croisière" et les éléments "terrestres" de ce type de vacances. Le rapport entre les deux aspects pourrait être un rapport complémentaire plutôt qu'un rapport de substitution, auquel cas ce même facteur pourrait être interprété en sens exactement inverse. De même, l'âge moyen des croisiéristes, qui baisse assez lentement, n'indique pas non plus l'existence d'un marché comprenant à la fois les croisières et les vacances à terre, dans la mesure où le profil des clients par rapport à leur âge continue à être très différent pour les deux types de vacances (voir tableau 1). Les données fournies par Mintel n'indiquent pas que les prix à la journée soient en baisse. L'augmentation de la fourchette de prix inférieure à 500 livres sterling, si on la compare à la fourchette 500-1 000 livres sterling (GBP), peut s'expliquer par l'augmentation du nombre de croisières courtes, que Mintel elle-même mentionne; tandis que les catégories de prix supérieures, en revanche, ont beaucoup moins changé. Le tableau 1 montre que les prix des croisières ont toujours tendance à être sensiblement différents des prix des autres principaux types de vacances. Enfin, Mintel elle-même reconnaît que les habitudes de vacances des croisiéristes sont très différentes de celles de la population moyenne, puisque la probabilité qu'ils prennent plusieurs périodes de vacances par an est beaucoup plus grande. Que ces autres vacances soient ou non des croisières n'influe pas sur le fait de savoir si les croisières océaniques et les autres vacances à terre appartiennent au même marché, dans la mesure où les différentes façons dont les gens passent leur temps de loisir et dépensent leur revenu disponible sont considérées comme complémentaires. C'est pourquoi la Commission estime que ces preuves ne sont pas concluantes aux fins de la définition du marché.
(38) IRN Research estime que les vacances à terre et les croisières sont fortement interchangeables et que l'on peut considérer que ces deux types de vacances appartiennent au même marché. Elle est parvenue à cette conclusion après avoir analysé des données sur les perceptions et les préférences des vacanciers ainsi que sur les tendances générales du secteur. Elle a notamment noté que 64 % des adultes dont les dernières vacances ont été passées en croisière envisageaient de prendre des vacances à terre(19). Malheureusement, il n'est pas possible, à partir du résultat présenté, de déterminer si ces choix avaient été faits après une comparaison active des prix, des itinéraires, etc., qui avait amené les personnes concernées à opter pour une croisière, ou si celles-ci avaient décidé de partir en croisière avant d'avoir obtenu des informations plus complètes à ce propos.
(39) L'avis de Preussag (propriétaire de TUI, Thomson et Hapag Lloyd) est également important, dans la mesure où elle a une très bonne connaissance du marché général des vacances et où, par l'intermédiaire de Thomson et de Hapag Lloyd, elle vend des croisières à la fois au Royaume-Uni et en Allemagne. Preussag a déclaré que l'une des caractéristiques du secteur des croisières était l'importance très grande du fait qu'il s'agissait de vacances en groupe, ce qui accroît l'importance des facteurs sociaux. Certaines catégories sociales souhaitent rester entre elles. Cela souligne l'importance de la convivialité. Selon Preussag, plusieurs autres éléments, déjà cités au considérant 32 comme constituant des caractéristiques objectives d'une croisière, jouent aussi un rôle important dans la préférence affichée par le consommateur pour les croisières en tant que forme spécifique de vacances (mobilité dans le confort, pas de bagages à faire et à défaire, circuit en mer).
(40) La Commission estime que la préférence des consommateurs pour les croisières océaniques apparaît dans les informations qu'ils cherchent à obtenir lorsqu'ils contactent un agent de voyage pour la première fois. À cette occasion, ils peuvent demander un grand nombre d'informations différentes sur divers types de vacances. Par exemple, ils peuvent demander à la fois des brochures sur des croisières et des brochures sur des forfaits vacances à l'étranger, et décider ensuite pour quel type de vacances ils opteront. Afin d'étudier cette question, la Commission a demandé à des agents de voyage de lui indiquer quelles informations les clients qui finissaient par acheter une croisière avaient initialement demandées. Les résultats de cette enquête indiquent que seul un petit nombre de ceux qui ont finalement acheté une croisière avaient d'abord demandé une brochure sur des vacances à forfait à l'étranger. En revanche, la quasi-totalité des clients qui ont effectivement acheté une croisière avaient demandé en premier lieu une brochure sur des croisières. Cela indique que leur décision de partir en croisière était généralement prise avant qu'ils ne se rendent dans une agence de voyage.
(41) Les résultats mentionnés au considérant 40 sont corroborés par les informations fournies par RCCL(20). RCCL avait commandé une enquête dont le but était de demander aux personnes qui avaient effectué une croisière au cours des cinq dernières années si elles avaient envisagé un autre type de vacances au moment où elles avaient décidé de faire leur dernière croisière(21). L'enquête a montré que moins d'une personne sur cinq (18 %) ayant effectué une croisière avait envisagé un autre type de vacances. Cette proportion était à peu près la même chez les clients qui avaient effectué des croisières "prestige" et chez ceux qui avaient acheté des croisières à des voyagistes. Malheureusement, les enquêteurs n'ont pas demandé aux personnes interrogées si elles auraient envisagé une autre solution au cas où les prix relatifs des croisières et de ces autres types de vacances auraient été différents.
(42) Ces résultats sont conformes à ceux d'une enquête réalisée aux États-Unis, la Nationwide Tracking Survey, qui réunit des informations sur les personnes ayant effectué une croisière au cours des douze mois précédents. Cette enquête a montré que 85 % des croisiéristes avaient décidé de partir en croisière avant de contacter un agent de voyage(22). Cela indique qu'il n'existe qu'une concurrence et une substituabilité limitées entre les croisières et d'autres formes de vacances au moment où les clients prennent contact avec un agent de voyage.
Catégories de clients
(43) Le facteur social constitue une caractéristique importante des croisières. La répartition démographique de la clientèle constitue donc un élément important pour déterminer la structure de la demande de croisières océaniques. La répartition démographique des croisiéristes diffère considérablement de celle d'autres groupes de clients.
(44) Si les catégories de clients du secteur des croisières sont en évolution, le client type reste beaucoup plus âgé et beaucoup plus aisé que les clients des forfaits-vacances "terrestres" à l'étranger. Un rapport(23) fait ressortir que "le client moyen des forfaits-vacances" a généralement entre 20 et 34 ans, appartient à la catégorie sociodémographique C1 ou C2(24), et a un emploi à temps plein. La proportion hommes/femmes et mariés/non mariés semble être de 50/50 environ. En revanche, l'âge moyen du croisiériste britannique en 2000 était toujours de 53,9 ans, et 9 % seulement des croisiéristes britanniques avaient moins de 35 ans, alors que 78 % étaient âgés de plus de 45 ans(25).
(45) Une enquête réalisée au Royaume-Uni sur les vacances passées hors du domicile en 1999(26) confirme les principales différences qui existent, sur le plan démographique, entre les personnes qui partent uniquement en croisière et celles qui partent uniquement à l'étranger ou en vacances à forfait. Ces données sont résumées au tableau 1. L'enquête montre clairement que le croisiériste type est différent du vacancier moyen "tout étranger", du client moyen "forfaits-vacances à l'étranger", ainsi que des voyageurs qui privilégient les destinations lointaines, tant en termes d'âge (plus âgés) que de famille (moins d'enfants), de classe sociale (plus élevée), d'emploi (retraite) et de revenus (plus élevés).
Tableau 1 - Répartition démographique par types de vacances
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
NOP.
(46) POPC a remis une étude préparée à son intention par [l'étude commandée par POPC]* qui étudie la demande réelle et potentielle dans le secteur des croisières au Royaume-Uni en 2001. L'étude [commandée par POPC]* analyse tout d'abord les principales caractéristiques démographiques des croisiéristes, des personnes qui envisageraient de faire une croisière et de celles qui ne l'envisageraient jamais. Les résultats de cette étude confirment les caractéristiques décrites aux considérants 43 à 45, en particulier le fait que les croisiéristes voyagent moins avec leurs enfants(27).
Prix
(47) Les parties ont fait valoir que les prix des croisières étaient similaires aux prix d'autres vacances à terre.
(48) Le tableau 2 compare les dépenses journalières moyennes des clients britanniques en vacances "à forfait", en vacances "indépendantes" ou en vacances vers des destinations lointaines, avec les dépenses effectuées pendant des croisières océaniques. Ces données révèlent que les dépenses moyennes par jour sont plus de deux fois plus élevées dans le cas des croisières que dans le cas des forfaits-vacances à l'étranger, des vacances vers des destinations lointaines et des vacances à l'étranger en indépendant.
Tableau 2 - Prix moyen par jour: croisières et autres vacances, 1999
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
NOP Consumer 1999.
(49) Le tableau 2 montre également que pour ce qui est des dépenses totales, seuls les voyages vers des destinations lointaines sont proches des croisières océaniques, parce que la durée moyenne de ces voyages est beaucoup plus élevée.
(50) Carnival a remis des données grâce auxquelles elle tente de démontrer l'équivalence des prix des vacances à terre et des croisières. Une grande partie de ces informations présentent des exemples isolés de vacances en croisière et de vacances à terre, que Carnival juge substituables entre elles et dont les prix sont similaires.
(51) Carnival et POPC ont toutes deux remis un rapport intitulé "Turning the Tide"(28), réalisé par Cruise Information Service pour la Passenger Shipping Association, qui est l'organisation professionnelle des compagnies de croisières britanniques. Ce rapport tente de démontrer qu'il existe une équivalence entre les prix des croisières et les prix d'autres types de vacances. Sur les cinq croisières présentées, une seule était une croisière "prestige", tandis que, parmi les autres, il y avait une croisière fluviale, deux croisières économiques (proposées l'une par Thomson et l'autre par Royal Olympic), et une croisière de luxe (voir considérants 100 et 102). Il convient de noter que la croisière "prestige" présentée est atypique, dans la mesure où sa durée n'équivaut qu'à la moitié de la durée moyenne des croisières sur ce navire.
(52) Carnival a mentionné plusieurs vacances de prestige qui peuvent potentiellement se substituer aux croisières océaniques. Les preuves fournies par les organisateurs de forfaits-vacances à terre ne confirment pas l'argument selon lequel ces vacances appartiendraient au même marché que les croisières océaniques. Carnival a, par exemple, mentionné un organisateur de voyages à forfait qui, selon elle, proposerait des voyages qui pourraient se substituer de façon quasiment parfaite aux croisières océaniques. Cet organisateur se considère lui-même incontestablement comme un organisateur de vacances à forfait dans des complexes hôteliers de luxe et il estime que ses clients ne considéreraient les croisières océaniques comme des substituts à ce type de vacances "que dans une faible mesure". C'est également l'avis d'une société qui vend des vacances à forfait dans des complexes hôteliers plus bas de gamme. En outre, celle-ci estime que ses clients n'opteraient "pas, ou alors dans une mesure négligeable", pour une croisière océanique, et ce pour des raisons de prix. Elle a indiqué à ce propos que l'élasticité prix croisée entre les vacances à forfait dans des complexes hôteliers et les croisières océaniques était faible.
Les marques, la commercialisation et la distribution
(53) Si plusieurs organisateurs de vacances à terre ont commencé à opérer dans le secteur des croisières au Royaume-Uni, sur le segment "économique" (voir considérants 70 à 93), la très grande majorité de compagnies de croisières opérant au Royaume-Uni sont des sociétés spécialisées, qui ne proposent pas d'autres formes de vacances (à terre). C'est pourquoi, pour la plupart d'entre elles, les marques sous lesquelles les croisières sont vendues au Royaume-Uni sont des marques qui ne proposent que des croisières et l'extension d'autres marques au secteur des croisières ne constitue pas un trait dominant du secteur. Cela vaut également pour l'Allemagne, où les marques sous lesquelles les croisières sont commercialisées sont propres à ce secteur. De bons exemples de marques spécifiques au secteur de croisières en Allemagne sont deux sociétés appartenant à POPC, Aida et A'Rosa.
(54) Toutefois, au Royaume-Uni, il existe certains cas d'extension de quelques marques haut de gamme telles que "Disney", "Club Med" et "Radisson" (Radisson Seven Seas Cruises) et de marques telles que Saga et Page & Moy. Ces marques représentent ensemble moins de 10 % du marché des croisières au Royaume-Uni.
(55) Il existe certains traits communs entre la commercialisation des croisières océaniques et la commercialisation d'autres produits "vacances". Tous sont par exemple présentés dans des brochures et vendus par l'intermédiaire d'agences de voyages. Toutefois, la plupart des croisières océaniques sont présentées dans des brochures spécialisées. Au Royaume-Uni, il existe de nombreuses agences de voyage indépendantes qui vendent une grande partie des croisières océaniques.
Les différents modes de réservation
(56) Il semble que, contrairement à ce qu'affirment les parties, les modes de réservation ne soient pas entièrement comparables. Les tableaux 3a et 3b contiennent des données provenant de l'étude NOP 1999, qui résument certaines informations relatives aux modes de réservation de différents groupes de vacanciers. Elles mettent en évidence des différences importantes, qui sont fonction du mode/canal de réservation (en personne, par téléphone) et de l'agent auprès duquel la réservation est faite (agent de voyage, voyagiste, compagnie de croisières).
Tableau 3a - Modes de réservation
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
NOP Consumer, 1999, p. 112 à 117 et 130 à 132.
Tableau 3b - Canaux de réservation
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
NOP Consumer, 1999, p. 112 à 117 et 130 à 132.
Avis des agents de voyage et des concurrents
(57) Une grande majorité des agents de voyages qui ont répondu à l'enquête de la Commission estiment que les croisières océaniques appartiennent à un marché de produits distinct de celui des autres formes de vacances. Ils ne pensent pas non plus que l'on puisse considérer que certaines catégories spécifiques de croisières océaniques, par exemple celles appartenant au segment "prestige", constituent un marché de produits commun avec d'autres types de vacances.
(58) Les concurrents des parties ont exprimé des avis différents. Certaines sociétés, notamment des voyagistes britanniques intégrés verticalement qui proposent des croisières, considèrent que les croisières océaniques font partie d'un marché plus vaste. Toutefois, la plupart des concurrents proches des parties dans le secteur des croisières, que ce soit à l'échelle mondiale ou en Europe, estiment que les croisières océaniques constituent au moins un marché de produits distinct.
(59) Les concurrents ont indiqué à la Commission que lorsqu'ils déterminent leur politique de prix, d'un point de vue stratégique et, plus encore, tactique, ils tiennent compte uniquement des prix pratiqués par les autres compagnies de croisières, et non des autres possibilités de vacances offertes au consommateur.
Preuves empiriques de l'incidence des capacités nouvelles sur les rendements
(60) Deux rapports établis par des consultants ont été remis à la Commission. Ils étudient les rapports entre les rendements de l'activité "croisières", les ajouts de capacités et les conclusions qu'en ont tirées les parties pour la définition des marchés de produits.
(61) L'un d'entre eux a été commandé par POPC à NERA Economic Consulting(29). Il met en évidence les rendements(30) dans le domaine des croisières et les analyses par rapport à la capacité totale proposée au Royaume-Uni par POPC et d'autres organisateurs de croisières, en particulier les nouvelles capacités importantes offertes en catégorie économique par les voyagistes depuis 1995. La principale conclusion avancée par NERA est que les rendements de POPC sont, pour l'essentiel, restés constants d'une année à l'autre, alors que ses capacités ont fortement augmenté. Cette conclusion s'applique de façon à peu près équivalente aux croisières dans les Caraïbes, dans les îles de l'Atlantique et en Méditerranée.
(62) Selon NERA, cette conclusion implique que la forte augmentation des croisières a été réalisée en grande partie aux dépens d'autres types de vacances et que l'absence de "fortes réductions des rendements, alors qu'il y a eu d'importantes augmentations de capacités, est difficile à concilier avec l'argument selon lequel les vacances en croisière constitueraient un marché de produits distinct". C'est pourquoi NERA est parvenue à la conclusion que, dans la mesure où les rendements n'étaient pas affectés par les nouvelles capacités introduites, on pouvait considérer que les croisières faisaient partie d'un marché de vacances plus vaste.
(63) Toutefois, cette conclusion ne constitue pas la seule explication possible. En particulier, si le fait que les rendements de POPC ne soient pas affectés par les importantes nouvelles capacités introduites peut s'expliquer par l'existence d'un marché en cause regroupant l'ensemble des vacances (d'où la faiblesse relative de l'incidence des augmentations de capacité), il peut tout autant s'expliquer par l'appartenance des croisières "prestige", dans la deuxième moitié des années 90, à un marché distinct de celui des croisières économiques (ce qui explique pourquoi l'ajout de capacités sur le marché économique n'a pas affecté les rendements sur le marché "prestige"). D'autres explications sont également possibles et il convient de noter que NERA a reconnu, à propos de ces conclusions, que l'étude ne contenait aucune information sur les déplacements de la demande. NERA est parvenue à la conclusion qu'elle ne disposait pas de données suffisantes - par exemple sur les déplacements de la demande - pour tirer des conclusions définitives sur la définition du marché(31). Ces résultats ne permettent donc pas, à eux seuls, de tirer des conclusions définitives sur la définition du marché.
(64) Carnival a remis un document préparé par Margaret E. Guerin-Calvert et Janusz Ordover(32) (le "document Ordover"), qui parvient à des conclusions similaires à celles de NERA, mais pour le marché américain. Le document Ordover a analysé les données relatives à cinq navires opérant dans les Caraïbes, en partant de l'hypothèse que si les croisières devaient constituer un marché en cause distinct, alors des augmentations substantielles de capacités ne pourraient être absorbées qu'au prix d'une baisse sensible des bénéfices(33). Le document Ordover contient une étude des bénéfices et de la capacité, pendant la période 1995-2001, pour cinq paquebots Carnival qui ont navigué dans les Caraïbes pendant la plus grande partie ou la totalité de cette période.
(65) Cette étude constate qu'une augmentation sensible des capacités dans les Caraïbes n'a eu qu'une faible incidence sur les bénéfices et les prix. Les auteurs en ont conclu "qu'il serait difficile de croire que des capacités aussi importantes puissent être absorbées par un marché des Caraïbes qui ne comprendrait que les croisières, sans entraîner une forte baisse des profits" et que les résultats de l'étude permettaient de penser que le marché en cause était plus vaste(34).
(66) Comme cela a été le cas pour l'étude NERA, on peut reprocher au document Ordover d'avoir uniquement examiné les changements au niveau de l'offre. Ses conclusions sont notamment affaiblies par le fait que l'introduction de nouvelles capacités s'accompagne d'actions lancées par les organisateurs de croisières afin de tenter de déplacer la demande de croisières. Les informations fournies par Carnival à propos de ses dépenses marketing aux États-Unis montrent, par exemple, qu'elle a fortement augmenté ces dépenses au cours de la période considérée dans le document. C'est ainsi que les dépenses engagées par Carnival pour la commercialisation de ses produits ont connu en 2001 un accroissement de [...]* par rapport à 1995. Pendant la seule période 1998-1999, Carnival a augmenté ses dépenses de [...]*. Ces coûts marketing n'ayant pas été pris en compte dans l'analyse des rendements, il se peut que la conclusion selon laquelle les rendements n'ont pas été modifiés ne soit pas fondée. En outre, il est clair que Carnival a investi des sommes considérables pour déplacer la demande. Or, en l'absence d'informations complémentaires sur ces déplacements de la demande, il n'est pas possible d'utiliser les données relatives aux effets de la modification de l'offre sur les rendements pour tirer des conclusions sur la dimension du marché de produits en cause.
(67) C'est pourquoi la Commission estime que les conclusions tant de NERA que de Guerin-Calvert/Ordover ne constituent pas des preuves fiables du fait que les croisières appartiennent à un marché de produits en cause plus vaste. L'étude NERA est également pertinente en ce qui concerne la distinction entre croisière "prestige" et croisières économiques (voir considérants 69 à 98).
Conclusion
(68) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est parvenue à la conclusion que les marchés de produits en cause nationaux sont les marchés de l'offre de croisières océaniques. Cette conclusion reste valable, que les croisières océaniques "prestige" soient considérées en fonction de l'effet sur la concurrence des vacances à terre de type prestige, ou que l'ensemble des croisières océaniques soient considérées en fonction de l'effet exercé sur la concurrence par une catégorie plus large de vacances à terre.
B.2.3. Croisières "prestige" et croisières (économiques) organisées par des voyagistes au Royaume-Uni
(69) Le marché britannique des croisières se caractérise par un certain nombre de caractéristiques, notamment l'émergence, entre 1995 et 1999, d'un type particulier de croisières proposé par des voyagistes britanniques, à la suite de laquelle il a été nécessaire de déterminer si les croisières "prestige" pouvaient être considérées comme appartenant à un marché en cause distinct de celui des croisières économiques. De fait, au moment où elle a publié la communication des griefs, la Commission estimait, a priori, qu'il existait un marché en cause distinct pour les croisières "prestige" au Royaume-Uni. L'analyse qui suit présente l'examen de la situation par la Commission à la lumière des réponses à la communication des griefs.
Caractéristiques du produit et perceptions des consommateurs
(70) On peut distinguer trois segments sur le marché des croisières océaniques au Royaume-Uni: les croisières de luxe, les croisières "prestige" et les croisières économiques. Pour ce qui est des croisières de luxe, voir les considérants 101 et 102.
(71) Les croisières "prestige" et les croisières économiques possèdent un grand nombre de caractéristiques communes. Néanmoins, il existe également entre elles des différences qui permettent de les distinguer et leur confèrent un profil qui leur est propre. Il existe, par exemple, quelques différences dans les équipements utilisés, c'est-à-dire les navires (dans le cas des croisières "prestige", ils sont en général plus récents et dotés de meilleures installations), et/ou dans la qualité du service (à titre d'exemple, dans les croisières "prestige", le rapport personnel/clientèle est généralement plus élevé(35) et l'ambiance est, dans la plupart des cas, plus formelle et plus élégante). Il existe également des différences dans la façon dont les offres économiques sont qualifiées, commercialisées et distribuées. Toutes ces différences se reflètent dans les écarts de prix que l'on peut observer entre croisières "prestige" et croisières économiques.
(72) Toutefois, il apparaît également clairement que pour chacun des facteurs cités au considérant 71, il existe des qualités différentes tant sur le segment "prestige" que sur le segment économique. C'est ainsi que sur le segment "prestige", certaines compagnies, comme Cunard, proposent un produit très formel, alors que d'autres, telles que RCI, fournissent et commercialisent elles-mêmes un produit basé sur un service beaucoup plus détendu, où l'accent est moins mis sur certaines traditions généralement associées aux croisières de prestige, telles que la "soirée du commandant". De même, pour ce qui est des équipements utilisés, il existe des organisateurs de croisières de prestige qui cherchent à n'utiliser que des navires très modernes, alors que d'autres, comme Saga, utilisent des navires plus anciens que ceux utilisés par certains organisateurs de croisières économiques.
(73) Ces éléments se retrouvent dans certaines des preuves présentées à la Commission à propos de la façon dont les consommateurs perçoivent les différentes compagnies de croisière. POPC a remis à la Commission(36) les résultats d'une enquête sur l'image des compagnies de croisières, dans le cadre de laquelle il a été demandé aux consommateurs de répondre à 19 questions relatives aux organisateurs de croisières. L'analyse de ces informations par la Commission montre que les consommateurs ont une perception similaire des différents opérateurs de croisières de prestige (P & O Cruises, Princess, Cunard, RCI), ainsi que de Thomson et Airtours, mais qu'il existe des différences dans la façon dont les opérateurs de prestige sont perçus par rapport aux opérateurs économiques.
(74) L'enquête réalisée par IRN Research pour Carnival ne confirme pas cette distinction. IRN a mis en évidence qu'il existait des rapports très étroits entre les raisons pour lesquelles les gens réservaient une croisière auprès d'une compagnie de croisières et les raisons pour lesquelles ils réservaient une croisière auprès d'un voyagiste(37). Il convient de noter qu'un grand nombre des résultats sont basés sur des échantillons de moins de 100 personnes, ce qui limite leur fiabilité statistique.
(75) POPC a communiqué une enquête qu'elle a réalisée en août 2001 ("enquête auprès de la clientèle") et qui aborde le problème sous un angle légèrement différent. Cette enquête devait lui permettre de démontrer que ses propres passagers examinaient également les croisières offertes par un grand nombre d'autres organisateurs, y compris les voyagistes. À propos de cette enquête auprès de sa clientèle, POPC fait observer [référence à la déclaration de POPC]* que [15-25 %]* des personnes ayant répondu à cette enquête qui avaient consulté la brochure P & O Cruises ou son site Internet avaient également consulté la brochure ou le site Internet d'Airtours. En outre, POPC pense que, au moment où Thomson a commencé à organiser des croisières, en 1996, [15-35 %]* de ses passagers avaient déjà fait auparavant une croisière POPC. Elle estime que cela indique que les croisières organisées par les voyagistes britanniques sont en concurrence directe avec celles de POPC(38).
(76) POPC a également communiqué des preuves indiquant qu'elle examine régulièrement toutes les brochures des organisateurs de croisières, y compris celles d'Airtours et de Thomson, et qu'elle contrôle également la qualité des produits offerts par ses concurrents en envoyant certains de ses propres employés faire des croisières avec tous les autres opérateurs, y compris les voyagistes britanniques, dans le but de réaliser une étude comparative. POPC affirme que cela prouve qu'elle estime que les actions des autres opérateurs limitent son propre comportement concurrentiel et que rien ne permet de justifier l'existence d'un marché de produits en cause englobant uniquement certains organisateurs de croisières(39).
(77) Les preuves relatives aux caractéristiques des produits et aux perceptions des consommateurs ne vont donc toutes dans le même sens. Certaines indiquent qu'il existe des différences entre les croisières de prestige et les croisières économiques, alors que d'autres permettent de penser que les limites entre ces deux segments ne sont pas clairement définies.
Prix des croisières "prestige" et des croisières économiques
(78) S'il existait une distinction nette entre les croisières "prestige" et les croisières économiques, cela se refléterait probablement dans les écarts de prix entre ces deux types de produits(40). En revanche, si les prix étaient homogènes, cela indiquerait qu'il n'existe pas de différence claire, sur le plan de la qualité et des prix, entre les croisières "prestige" et les croisières économiques, et qu'elles appartiennent donc au même marché de produits en cause. C'est pourquoi la Commission a cherché à déterminer non seulement s'il y avait une différence nette en termes de prix moyens, mais aussi s'il y avait ou non une homogénéité entre les prix maximaux des croisières économiques et les prix minimaux des croisières "prestige".
(79) POPC a remis à la Commission une étude réalisée par RBB Economics, qui plaide en faveur de l'existence d'une homogénéité des prix des croisières organisées par les voyagistes britanniques et des autres croisières proposées aux consommateurs britanniques. La méthode utilisée par RBB Economics repose sur une comparaison des prix moyens pour un type de cabines donné (Suite/Premier, intérieure et extérieure) pondérée par le nombre de cabines d'un même prix. Cette comparaison a porté sur un certain nombre de croisières "voyagistes" et de croisières "prestige" proposées sur le marché britannique. L'étude comprend des tableaux et des graphiques indiquant que les prix des croisières "voyagistes" et ceux des croisières "prestige" se chevauchent. Une analyse plus poussée de l'étude révèle qu'elle compare les prix de croisières caractérisées par: i) une durée différente(41); ii) des itinéraires sensiblement différents(42); iii) des distances différentes aux ports de départ (croisières avec vols, croisières au départ du Royaume-Uni); iv) des concepts "tout compris" différents (avec pourboires et/ou boissons compris ou non et v) différentes éditions pour les brochures (un client n'ayant alors vraisemblablement pas accès à une remise indiquée sur la première édition d'une brochure au moment où il examine le prix réduit indiqué sur la troisième édition de la brochure relative à un autre produit).
(80) Pour que des preuves indiquant une homogénéité des prix soient significatives, elles doivent refléter les choix que les consommateurs ont la possibilité de faire. C'est ainsi que le fait que des croisières de 7 et 14 jours puissent être vendues à des prix à la journée inférieurs ne signifie pas qu'elles puissent constituer, de quelque façon que ce soit, des solutions de remplacement équivalentes pour les consommateurs ou qu'une augmentation du prix d'une croisière de 7 jours donnée puisse inciter un consommateur à opter pour une croisière de 14 jours beaucoup plus chère. De même, il ne faudrait pas baser des études de prix sur différentes éditions de brochures, car il est alors impossible d'avoir une vue des choix que les consommateurs sont susceptibles de faire à un moment donné. C'est pourquoi la Commission a uniquement examiné les prix figurant dans une même édition. Il y est apparu que la durée des croisières n'était pas facilement adaptable au type "14 jours", dans la mesure où la durée réelle des croisières variait entre 10 et 16 jours. POPC a fourni des prix à la journée sur une base pondérée, tant pour les prix "brochures" que pour les prix réduits indiqués sur les brochures. La Commission a donc segmenté l'échantillon indiqué par POPC en fonction des critères suivants: i) date de départ (avril, juin, août); ii) durée de la croisière (7 jours, "14" jours); iii) édition de la brochure (première, deuxième), et iv) prix brochure réduit/prix brochure non réduit.
(81) Les échantillons comprenaient de trois à neuf croisières individuelles "voyagistes" et "prestige". La Commission a alors mesuré la différence de prix entre les croisières "voyagistes" les plus chères et les croisières "prestige" les moins chères (sous forme de différence par rapport au prix des croisières voyagistes, exprimée en pourcentage).
(82) Les résultats de cette comparaison sont les suivants: pour les 48 prix observés, le prix le plus élevé d'une croisière "voyagiste" était meilleur marché que le prix "prestige" le moins élevé dans 41 cas, le contraire étant vrai dans six cas (dans l'un des cas, le prix était le même). Dans 15 cas, la différence était inférieure à ± 10 %. Le tableau 4 indique les différences en pourcentage pour la première et la seconde édition des brochures.
Tableau 4 - Différence en pourcentage entre la croisière "voyagiste" britannique la plus chère et la croisière "prestige" britannique la moins chère
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
Commission, sur la base de données fournies par RBB.
(83) Le tableau 4 montre qu'il existe certaines différences de prix sensibles entre les croisières "voyagistes" et les croisières "prestige" si l'on effectue la comparaison en fonction des mêmes types de cabines, des mêmes durées et des mêmes dates de départ approximatives pour une édition donnée, notamment lorsque l'on compare les premières éditions. Toutefois, ce tableau montre aussi clairement que tous les prix les plus bas des croisières "prestige" ne sont pas sensiblement plus élevés que les prix des croisières économiques les plus chères. En fait, notamment si l'on compare les prix avec réduction, on relève plusieurs exemples d'une croisière économique qui est plus chère qu'une croisière "prestige". Compte tenu de tous ces éléments, il ne semble pas y avoir de différence claire entre les prix des croisières économiques et les prix des croisières de prestige.
(84) En outre, le choix des consommateurs peut ne pas se limiter à un choix entre le même type de cabine sur différents navires. À cet égard, les parties ont affirmé que les cabines intérieures les moins chères d'une croisière "prestige" pourraient être équivalentes à des cabines extérieures de croisières économiques, et qu'il y avait donc un chevauchement des prix, même si les prix moyens pour des catégories de cabines similaires étaient différents. Si l'on admet que les différents types de cabines sont substituables, le nombre des chevauchements augmente. En effet, sur les 16 comparaisons réalisables (4 dates de départ/durées de croisière × 2 prix - avec réduction/sans réduction - × 2 éditions de brochures), 10 indiquent un chevauchement entre les prix des cabines intérieures "prestige" et ceux des cabines extérieures "économiques". Même si l'on procédait à un certain ajustement pour tenir compte du fait que dans les croisières économiques, les pourboires sont compris, alors que cela n'est généralement pas le cas dans les croisières "prestige", ce chevauchement ne disparaîtrait pas. Dans environ un tiers des croisières comparables mentionnées au tableau 4, il y aurait un chevauchement entre les cabines "prestige" intérieures et les cabines économiques extérieures, même si un montant de 10 livres par jour était ajouté aux croisières de prestige pour tenir compte des pratiques différentes en matière de pourboires.
(85) Dans une enquête par téléphone réalisée pour le compte de Royal Caribbean le 13 mars 2002, des différences de prix sensibles entre tous les produits "prestige" et tous les produits économiques proposés par des voyagistes ont été mises en évidence(43). L'enquête visait à recueillir les prix d'une cabine extérieure "standard" sur des croisières de sept jours en Méditerranée (y compris les vols, les taxes portuaires, les frais de sécurité) pour trois dates de départ, en juin, juillet et août 2002, avec un ajustement tenant compte de l'inclusion ou non des pourboires et des boissons. Elle indique des différences de prix allant de 20 à 45 % entre les croisières "voyagistes" britanniques et les croisières "prestige"(44). La comparaison des prix d'une croisière "voyagiste" et de deux croisières "prestige" de quatorze jours dans les Caraïbes, en janvier 2003, a mis en évidence des différences encore plus grandes(45). Comme la Commission l'avait noté dans la communication des griefs, la pertinence de ces informations pour l'appréciation de la présente opération est limitée par le fait que ni P & O Cruises ni Fred Olsen n'étaient comprises dans l'échantillon, apparemment parce que ces compagnies ne proposaient pas d'itinéraires comparables.
(86) RCCL a préparé une autre enquête pour mettre à jour et étendre les données sur les prix qu'elle avait présentées auparavant. Cette enquête a été réalisée le 21 mai 2002 et a consisté à obtenir les prix de croisières dans les Caraïbes d'une durée de quatorze ou quinze jours. Les prix ont été obtenus auprès des services de réservation des compagnies de croisières. L'enquête a porté sur 5 croisières de prestige et 2 croisières économiques, avec départ en janvier/février 2003. Les tarifs pris en compte ont été ceux des cabines extérieures "standard", des cabines intérieures "standard" et des cabines de luxe avec balcon ou équivalentes. RCCL a ajusté les données afin de tenir compte de l'inclusion ou non des pourboires dans le prix. Les résultats ont montré que les prix facturés par les organisateurs de croisières de prestige étaient supérieurs de 47 % en moyenne, pour une même durée(46). Une comparaison entre les cabines intérieures les moins chères sur les navires de prestige et les cabines économiques extérieures montre que le prix des premières est supérieur de 34 % en moyenne au prix des secondes. Il convient toutefois de noter que les différences de prix entre les croisières "voyagistes" et les croisières "prestige" sont généralement plus importantes dans les Caraïbes. De même, la prise en compte de valeurs moyennes pour les deux groupes de navires peut dissimuler des chevauchements entre les prix économiques et les prix "prestige". Si l'on examine les prix par navire, il convient de noter que les deux offres les plus proches de l'échantillon (l'offre prestige la moins chère et l'offre économique la plus chère) étaient séparées par un écart de 2 %. C'est pourquoi, même sur la base des données fournies par RCCL, une homogénéité des prix ne peut être exclue.
(87) La Commission a également examiné les chiffres des ventes d'une importante agence de voyages britannique appartenant à une grande chaîne, qui indiquent une différenciation entre croisières "voyagistes" et croisières "prestige" au Royaume-Uni. Si l'on met en relation le volume des ventes d'une croisière donnée (mesuré en nombre de passagers) avec la valeur des ventes de cette même croisière (c'est-à-dire le prix total que le client a payé pour la croisière et le vol) chez cette agence de voyages, on constate une différence importante entre les croisières "prestige" et les croisières "voyagistes". Dans chaque cas, le rapport valeur/volume des croisières "voyagistes" était inférieur à la moitié du rapport moyen pour les croisières "prestige", au cours de trois années consécutives (1999-2001). Cela montre que les prix des croisières "voyagistes" sont beaucoup plus bas que les prix moyens des croisières "prestige". Ces données ne permettent pas de conclure à l'existence d'une homogénéité entre les prix des croisières "voyagistes" et ceux des croisières "prestige".
(88) La Commission a vérifié ce résultat à l'aide de données annuelles communiquées par deux autres importantes agences de voyages appartenant à des grandes chaînes et elle a découvert que dans chaque cas, la valeur des croisières "voyagistes" représentait de 43 à 73 % de la moyenne des croisières "prestige".
(89) Toutefois, dans chacun de ces cas, il y avait également des croisières de prestige, telles que celles proposées par Costa, Festival, RCI et CCL, qui représentaient ensemble des ventes non négligeables, dont les valeurs se situaient précisément entre les valeurs moyennes "voyagistes" et "prestige". Si l'on considère par ailleurs que pour chaque croisière, les valeurs indiquées sont bien sûr des valeurs moyennes pour tous les types de cabines et pour toutes les périodes de l'année, on ne peut exclure, sur la base de ces données, l'existence d'une certaine homogénéité des prix des croisières "voyagistes" et des croisières "prestige".
Conclusion sur la segmentation "croisières de prestige"/croisières économiques
(90) Il existe d'autres facteurs qui pourraient être pris en considération pour l'analyse de ces deux segments, par exemple les équipements (voir considérant 71), la politique en matière de marque (voir considérant 53) et la distribution (par exemple le fait que les spécialistes des croisières ont tendance à vendre essentiellement des croisières de prestige et de luxe). Cela montre qu'il existe plusieurs éléments à partir desquels les organisateurs de croisières peuvent chercher à distinguer leurs produits de ceux de la concurrence et à partir desquels ils constituent un vaste éventail d'offres différentes pour leurs clients, qui peuvent être regroupées pour former des segments distincts du marché des croisières océaniques.
(91) Il n'existe pas de séparation claire entre les produits de prestige et les produits économiques pour aucun des éléments mentionnés au considérant 90. La Commission estime que les preuves réunies laissent à penser qu'il existe un seul marché des croisières océaniques. S'il existait, entre les croisières économiques et les croisières de prestige, une différence suffisamment nette sur le plan de la qualité pour qu'elles n'exercent pas de pressions concurrentielles les unes sur les autres, cela se traduirait par une absence d'homogénéité des prix. Or, cette absence d'homogénéité n'a pas pu être établie avec une certitude suffisante.
(92) Il convient également de noter que deux des organisateurs de croisières de prestige, RCCL (avec First Choice) et POPC, viennent de lancer de nouvelles marques ou s'apprêtent à le faire (Island et Ocean Village respectivement), qui risquent de rendre encore plus floues les limites entre le segment de prestige et le segment économique. Cela est d'ailleurs confirmé par le fait que les organisateurs de croisières économiques sont en train de lancer des navires plus neufs et plus modernes (voir considérants 157 à 159).
(93) Compte tenu des éléments exposés aux considérants 32 à 92, la Commission estime que le marché de produits en cause aux fins de la présente décision est le marché des croisières océaniques au Royaume-Uni.
B.2.4. Croisières "prestige" et croisières économiques - Allemagne, Espagne, Italie et France
(94) En Allemagne, il n'existe pas de différences nettes du point de vue du prix et de la qualité, qui permettraient de définir des segments "prestige" ou économique, mais un vaste éventail de produits. De manière générale, les limites entre les produits économiques et les produits "prestige" allemands sont moins nettes qu'au Royaume-Uni.
(95) Si les compagnies méditerranéennes qui opèrent en Allemagne sur le segment économique considèrent qu'il y a des différences entre leurs produits économiques et leurs produits de prestige, le fait que ces deux types de produits soient proposés par les mêmes sociétés sous des marques qui ne sont pas encore distinctes ou, dans le cas de Festival, pas encore entièrement distinctes, milite également contre une séparation des marchés "prestige" et économique en Allemagne.
(96) En Espagne, Pullmantur, avec un produit qui lui est propre, et Iberojet, dans le cadre d'une entreprise commune avec Festival et Trasmediterránea, appelée Spanish Cruise Ligne, ont pénétré sur ce marché, sur lequel elles proposent des croisières à bas prix qui n'ont toutefois que peu en commun, si l'on excepte leur caractère économique, avec les produits proposés par les voyagistes britanniques. La principale caractéristique de ces produits espagnols est qu'ils ne proposent pas un voyage à forfait, mais des itinéraires aller-retour à partir de ports espagnols de Méditerranée occidentale qui, pour leurs clients espagnols, n'ont pas besoin d'être combinés avec des vols charters ou avec des forfaits "séjour et croisière".
(97) En Italie, il existait un produit, proposé par le voyagiste intégré Valtur et qui consistait en des croisières "club" dans les Caraïbes sur un navire plus ancien, qui aurait pu constituer un produit similaire à ceux des voyagistes britanniques. Toutefois, la part de marché de Valtur était faible (4,8 % en 2000) et cette société a cessé toute activité dans le domaine des croisières. Dans la mesure où son inclusion éventuelle sur le même marché que celui d'autres croisières n'aura pas de répercussions sur le fond de l'appréciation, il n'est pas nécessaire de l'examiner plus avant. Sa sortie imminente du marché peut être considérée comme une preuve supplémentaire du fait que les croisières proposées par les voyagistes britanniques n'ont pas d'équivalent sur le continent. Ce qui a été dit à propos de l'Allemagne au considérant 95 vaut également pour les produits économiques proposés par Mediterranean Shipping Cruises ("MSC") et Festival.
(98) En France, des voyagistes tels que Nouvelles Frontieres et Marsans-Transtours ont pénétré sur le marché avec des bateaux affrétés, souvent pendant une partie de l'année. Club Med et Star Clippers offrent des croisières à la voile haut de gamme. Sur le segment des croisières de luxe, la Compagnie des Îles du Ponant propose des croisières où l'on parle français, sur de petits navires. Mise à part cette offre française relativement faible, la plus grande partie du marché comprend des croisières proposées par des compagnies méditerranéennes et des marques telles que Festival, Costa (une marque Carnival), MSC et Royal Olympic. Pour la même raison que celle mentionnée au considérant 95, il n'est pas possible d'opérer une distinction, aux fins de la définition du marché de produits, entre les croisières de prestige et les croisières économiques en France.
Conclusion
(99) Compte tenu de ce qui précède, la Commission est parvenue à la conclusion que le marché de produits en cause en Allemagne, en Espagne, en France et en Italie était le marché de l'offre de croisières océaniques.
B.2.5. Autres questions liées à la définition du marché de produits
La question de savoir si les croisières de luxe constituent un marché de produits en cause distinct peut être laissée en suspens
(100) Aux fins de la présente décision, il n'est pas nécessaire de déterminer si les croisières de luxe doivent être ou non considérées comme appartenant à un marché en cause distinct, dans la mesure où elles ne représentent qu'un faible volume et où le fait qu'elles soient ou non prises en considération n'affecterait pas les conclusions de la Commission. Si l'on admettait qu'il existe un marché distinct pour les croisières de luxe, l'opération ne soulèverait pas de problèmes de concurrence, dans la mesure où les activités des parties ne se chevauchent pas. Le segment ou marché du luxe ne représente pas plus de 5 % de la capacité(47) au Royaume-Uni, en Espagne et en Italie, et 11 % en Allemagne(48).
(101) Carnival est la seule compagnie qui opère sur le segment ou le marché du luxe, par l'intermédiaire de ses marques Seabourn et Windstar et sans doute aussi du petit nombre de cabines de luxe sur le Queen Elizabeth II de Cunard. POPC ne propose pas de croisières de luxe.
(102) Compte tenu de la taille relativement faible du segment des croisières de luxe, le fait qu'il soit ou non inclus dans le marché plus vaste des croisières océaniques n'aura pas d'incidence sensible sur l'appréciation de l'affaire en l'espèce. Aux fins de la présente décision, les données sur les croisières de luxe ont été incluses dans les données relatives à l'ensemble des croisières océaniques.
Les croisières fluviales et les croisières côtières par ferry n'appartiennent pas au même marché de produits que les croisières océaniques
(103) Bien que POPC propose également des croisières fluviales en Allemagne, il n'y a pas de chevauchement entre les activités des parties dans ce domaine et, pour les raisons mentionnées au considérant 104, elles seront exclues des considérations qui suivent.
(104) L'enquête réalisée par la Commission sur le marché a confirmé que les croisières fluviales et les croisières océaniques appartenaient à des marchés distincts. C'est l'avis exprimé par la quasi-totalité des concurrents et des agents de voyages/voyagistes. Ces croisières diffèrent non seulement en termes de types de voyages, d'itinéraires et de destinations, mais également en termes de durée et de prix, une croisière fluviale moyenne étant plus courte et beaucoup moins chère qu'une croisière océanique moyenne(49). En raison de toutes ces différences, le consommateur ne considère donc pas que les croisières fluviales et les croisières océaniques soient substituables.
(105) Aux fins de la présente décision, les croisières fluviales pourraient donc être considérées comme appartenant à un marché de produits distinct de celui des croisières océaniques. Toutefois, comme les activités des parties dans le secteur des croisières fluviales ne se chevauchent pas (POPC est la seule compagnie qui propose des croisières fluviales, par l'intermédiaire de sa filiale allemande Seetours/A'Rosa), il n'est pas nécessaire de poursuivre l'appréciation de ce marché.
(106) Il est également possible d'opérer une distinction entre les croisières côtières et les croisières océaniques. Le fait, évident, que les principaux itinéraires des croisières côtières soient situés dans des zones côtières a une incidence importante sur la nature du produit. Dans les croisières côtières, en effet, c'est la vision du paysage côtier qui constitue l'un des principaux attraits de la croisière. Dans ce type de croisières, le navire se déplace donc généralement pendant la journée et reste parfois à l'ancre pendant la nuit. Dans le cas des croisières océaniques, c'est généralement le contraire qui se produit. De même, les types de distractions offertes sur les croisières côtières sont souvent différents. Les destinations les plus courantes sont les Îles britanniques, les Galapagos et la côte norvégienne.
(107) Les croisières côtières par ferry, telles que celles proposées par Norwegian Coastal Voyages/Hurtig Ruten, constituent un type particulier de croisière côtière. Ces produits ont pour caractéristique supplémentaire le fait que leur fonction principale (mais qui l'est moins en période de pointe) soit le transport de la population locale, ce qui accentue le côté "transport en commun" de ce type de produit et modifie également la vie à bord des navires pour les clients. Bien que sur ses navires les plus récents, Norwegian Coastal Voyages ait tenu compte de l'importance touristique de plus en plus grande des produits qu'elle propose, ces nouveaux produits conservent tous les traits distinctifs d'une croisière par ferry. Ces navires n'offrent pas des distractions et des installations comparables à celles des croisières océaniques et les arrêts dans les ports sont fonction du service de transport à assurer plutôt que des excursions susceptibles d'être faites (celles-ci pouvant toutefois également être prévues). Le produit proposé sur ces navires est donc sensiblement différent d'une croisière océanique, bien qu'il puisse également y avoir des croisières océaniques qui longent la côte norvégienne.
(108) Aux fins de la présente décision, les croisières côtières par ferry peuvent donc être considérées comme appartenant à un marché de produits distinct de celui des croisières océaniques. Cette approche est confirmée par la très grande majorité des personnes ayant répondu au questionnaire de la Commission et elle est conforme à la conception qu'a Norwegian Coastal Voyages/Hurtigruten de ses produits(50).
(109) En raison de l'incidence très limitée des autres croisières côtières (le nombre de navires affectés à ces croisières est faible), il n'est pas nécessaire de déterminer si les croisières côtières en général appartiennent à un marché de produits distinct.
Il n'est pas nécessaire de trancher à propos des croisières océaniques appartenant à des niches de marché
(110) La Commission a également invité les opérateurs à exprimer leur opinion sur les croisières appartenant à des niches de marché, notamment les croisières à la voile et les croisières d'exploration. Bien que la majeure partie des personnes interrogées considèrent qu'elles appartiennent à des marchés distincts, les opinions n'étaient pas aussi tranchées que celles exprimées à propos des croisières fluviales et des croisières côtières par ferry. Il n'est pas nécessaire de déterminer si ces croisières appartiennent ou non à des marchés distincts.
(111) Aux fins de la présente décision, les croisières océaniques appartenant à un marché de niche mentionnées au considérant 110 sont donc considérées comme faisant partie du marché plus vaste des croisières océaniques.
B.2.6. Conclusion relative à la définition du marché de produits
(112) La Commission estime qu'il existe, pour les croisières océaniques, des marchés en cause nationaux distincts des marchés des croisières côtières par ferry ou des croisières fluviales et également distincts de marchés plus larges englobant d'autres types de vacances (à terre). En outre, elle estime qu'il n'est pas possible de considérer le marché des croisières océaniques de prestige au Royaume-Uni comme un marché en cause distinct.
C. Appréciation de la concurrence
C.1. Parts du marché de l'EEE en nombre de passagers - estimation carnival pour 2000
(113) La part du marché des croisières maritimes de l'EEE (mesurée en nombre de passagers) que les parties ont détenue ensemble est estimée à 32 % (19 % pour Carnival et 13 % pour POPC). Le tableau 5 donne la part de marché qui résulterait de l'opération (seuls les marchés affectés sont indiqués).
Tableau 5: Parts du marché de l'EEE en 2000 (nombre de passagers)
<EMPLACEMENT TABLEAU>
(Source:estimation Carnival.)
(114) Ce tableau montre que, en 2000, les principaux chevauchements avec les parts de marché groupées de [25 à 35 %]* à [20 à 30 %]* se situent au Royaume-Uni et en Allemagne. Les parties sont fortes également en Espagne et en Italie (respectivement [35 à 45 %]* et [50 à 60 %]*), mais avec des chevauchements très limités de 2 % ou moins(51).
(115) Durant l'examen effectué par la Commission, le projet de concentration n'a pas fait naître d'inquiétudes par rapport aux marchés autrichien et irlandais de la croisière maritime. En revanche, certaines inquiétudes avaient été exprimées à cet égard en Belgique et aux Pays-Bas, mais elles n'ont pas été corroborées par l'examen de la Commission. Selon Carnival, la part de marché que les parties détiennent ensemble dans chacun de ces quatre pays (Autriche, Irlande, Belgique et Pays-Bas) est inférieure à 30 %, et son augmentation par l'effet de la concentration sera tout au plus de 5 %. Dans ces pays, le marché de la croisière n'est pas encore arrivé à maturité. Le taux de pénétration des croisières y est beaucoup plus faible que, par exemple, au Royaume-Uni(52). Mais le nombre des croisières vendues dans ces pays a fortement progressé ces dernières années et les observateurs du secteur prévoient la poursuite de cette tendance, comme en Allemagne et au Royaume-Uni(53). En outre, les croisières vendues en Autriche, en Belgique, en Irlande et aux Pays-Bas accueillent des passagers de différents pays et les compagnies qui vendent des croisières de type américain, de type paneuropéen et de type européen de pays voisins n'ont aucun mal à adapter le panachage des nationalités à bord de leurs navires pour augmenter leurs ventes (voir aussi considérants 189 à 195). C'est pourquoi la Commission considère que l'opération n'aura pas d'incidence négative notable sur la concurrence en Autriche, en Belgique, en Irlande et aux Pays-Bas.
C.2. Royaume-Uni
C.2.1. Aspects de la segmentation des produits pertinents pour le positionnement des marques sur le marché général des croisières maritimes
C.2.1.1. Importance des marques pour les croisières "luxe" et les croisières "prestige"
(116) Les critères définissant un produit de croisière sont nombreux et comprennent, entre autres, la taille du navire, l'âge du navire, la taille et l'aménagement des cabines, la dimension et la décoration des espaces publics intérieurs et extérieurs, les installations proposées, la qualité et le type de la nourriture, la qualité et le type des divertissements à bord, la qualité et le type de la restauration, la qualité et le type du service, la ou les langues parlées à bord, (la distance pour) le port d'embarquement, la durée de la croisière et son itinéraire. L'élément qui, dans chaque cas, opère la synthèse de tous ces critères individuels et permet au consommateur de distinguer les produits, c'est la marque. Selon le cas, la marque comprend un seul navire ou dix à quinze navires différents fédérés par une certaine image de marque commune exprimant un certain niveau commun de qualité de service et d'animation.
(117) En ce qui concerne l'équipement du navire, la plupart des opérateurs exploitant une flotte de navires essaient de trouver pour leur marque le bon équilibre entre diversité et uniformité et vont s'interroger pour savoir si un certain navire (plus ancien, par exemple) est toujours en adéquation avec une certaine image de marque. En général, les marques de flottes "prestige" ou "luxe" comportent aussi un petit nombre de "navires jumeaux" quasi identiques qui limitent la diversité de la marque (et qui, lorsqu'il s'agit de navires neufs, sont moins coûteux à construire). Les opérateurs appliquent la méthode de la gestion des marques pour déterminer le positionnement de leur marque de croisières et cherchent à accroître leur notoriété auprès des catégories de clientèle ciblées.
(118) Les considérants 119 à 128 présentent un certain nombre de critères servant à déterminer le positionnement d'une marque, mais aussi celui des marques qui sont en concurrence directe avec elle.
C.2.1.2. Codes linguistiques et autres codes culturels: croisières de type national, de type paneuropéen et de type américain
(119) La langue de bord et d'autres critères "culturels", comme la gastronomie, les divertissements de jour et les animations en soirée jouent un rôle important dans la perception que le client a d'un certain produit de croisière. Dans tous les grands pays de croisière européens (Royaume-Uni, Allemagne, France, Italie, Espagne), il existe une perception très nette de ce qui est considéré comme une croisière "de type national". La croisière de ce type est surtout déterminée par la langue de bord dominante, mais aussi par d'autres facteurs distinctifs comme la cuisine favorite, les heures des repas, les apéritifs et cocktails, les divertissements de jour, les animations en soirée ou la décoration du navire. L'offre de tous ces grands pays de croisière comporte des produits exclusivement ou très majoritairement axés sur un penchant national bien précis et, dans chacun de ces pays, un pourcentage significatif de clients préfère les croisières de type national.
(120) Si, dans chacun des pays examinés, un certain nombre de clients n'ont pas de préférence particulière, on trouve en revanche une minorité de clients qui préfèrent les croisières de "type international". En gros, il existe sur le marché deux types tout à fait distincts de croisières "internationales": d'une part, les croisières de type américain; d'autre part, les croisières de type paneuropéen/méditerranéen.
(121) À l'instar des croisières britanniques, les croisières de type américain sont caractérisées par le fait que l'anglais est la seule langue de bord. En revanche, ce qui les distingue très nettement des croisières à l'anglaise et de tous les autres types de croisières et en fait des produits à part, c'est que les divertissements et la décoration (style Las Vegas) sont adaptés aux goûts américains. Pour les passagers britanniques, l'identité de langue abaisse le seuil culturel, tandis que les passagers d'autres nationalités ont des chances de trouver le programme de la journée, et parfois le menu, dans la langue de leur pays. Selon leur nombre, il peut même y avoir un membre du personnel d'accueil parlant la langue de l'accompagnateur ou du passager européen désigné comme interlocuteur.
(122) Les croisières de type paneuropéen/méditerranéen essaient de tenir compte des goûts de plusieurs nationalités. En général, les annonces à bord sont faites en plusieurs langues, des groupes linguistiques sont formés pour les excursions à terre, la cuisine présente une diversité européenne, il y a deux services de repas pour tenir compte des habitudes nationales différentes, et les divertissements n'ont pas de base linguistique afin de convenir à toutes les nationalités à bord.
(123) À ce jour, les croisières de type paneuropéen/méditerranéen(54) ont réussi à s'imposer sur un certain nombre de marchés européens, tandis que les produits de type américain ont un meilleur taux de pénétration au Royaume-Uni et qu'il y a eu des tentatives d'entrée plus forte sur les marchés d'autres pays.
C.2.1.3. Critère de qualité et de mode de vie - Classification par étoiles
(124) La grande majorité des agences de voyage et des voyagistes qui ont répondu au questionnaire de la Commission confirment que, lorsqu'ils conseillent leurs clients, ils utilisent des critères de qualité ou de mode de vie comme "luxe", "prestige" ou "économique".
(125) L'étude de marché de la Commission révèle aussi une forte acceptation du système de classification par étoiles, du genre de celui qu'applique le guide annuel "Berlitz Complete Guide to Cruising and Cruise Ships"(55).
(126) Comme elle l'a fait dans des décisions antérieures concernant le secteur de l'hôtellerie et des secteurs de produits de grande consommation(56), la Commission considère que les distinctions susmentionnées conviennent pour l'appréciation du positionnement des marques et le degré de concurrence entre différents produits.
C.2.1.4. Les croisières classiques par opposition aux croisières contemporaines ou festives - Tranches d'âges et de revenus ciblées
(127) Une distinction, qui concerne plus particulièrement le ou les segments des croisières "prestige", est établie entre les croisières contemporaines ou "festives" et les croisières "classiques". Les croisières festives sont axées sur les activités à bord (comme le patin à glace et la varappe dans les Caraïbes) et l'absence de formalisme, alors que les croisières classiques se déclinent sur un mode plus paisible, plus détendu, mais aussi d'une élégance plus cérémonieuse ("dîner du commandant"). Les produits de type national européen et les produits de type américain peuvent adopter l'une ou l'autre formule, encore que ces derniers soient plus d'avant-garde en matière de croisières festives. Alors qu'aux États-Unis, les croisières classiques se situent exclusivement dans le haut du segment "prestige", en Europe on les trouve aussi dans le bas de ce segment, notamment au Royaume-Uni et en Allemagne. D'une manière générale, les croisières paneuropéennes du segment "prestige" empruntent une voie moyenne et conjuguent souvent un côté familial et bon enfant avec une petite dose de cérémonie (les dîners sont sans façon, hormis un ou deux dîners habillés). Quant aux croisières du segment économique, elles sont généralement limitées sur le plan des aménagements à vocation festive, ce qui n'empêche qu'elles présentent parfois certaines caractéristiques des croisières traditionnelles, comme une ou deux soirées habillées et une réception du commandant.
(128) L'âge moyen des croisiéristes varie d'un pays à l'autre et d'une marque à l'autre. Des tranches d'âge spécifiques peuvent faire partie ou non de la cible d'une marque donnée. Même si l'âge moyen des clients adultes et la proportion d'enfants et d'adolescents à bord constituent une indication du positionnement d'une marque, les marques essaient généralement d'attirer un éventail de clients, lequel chevauche souvent celui que d'autres marques attirent. Il en va de même pour les tranches de revenus.
C.2.2. Structure du marché
(129) Le Royaume-Uni est de loin le pays qui a la clientèle de croisiéristes la plus nombreuse d'Europe. En termes de nationalité, la clientèle britannique est la deuxième du monde, derrière la clientèle américaine. En Europe, la croisière présente de forts taux de croissance, mais les taux de pénétration des croisiéristes sont très inférieurs à ceux qui sont atteints aux États-Unis. Au Royaume-Uni comme dans d'autres pays, le secteur de la croisière a enregistré des taux de croissance beaucoup plus élevés que d'autres types de vacances durant la même période. De 1994 à 1998, en effet, le nombre de clients britanniques qui ont réservé des vacances à forfait a augmenté de 15 % et celui des personnes qui ont passé des vacances à l'étranger a augmenté de 18 %, alors que le nombre des croisiéristes britanniques a progressé de 135 % durant la même période(57).
C.2.2.1. Remarque préliminaire sur la mesure des parts de marché
(130) Carnival affirme que les parts de marché devraient être mesurées en nombre de passagers. Pour la Commission, il s'agit d'une méthode certes commode, mais qui n'est pas la plus appropriée, car elle ne tient pas compte de la durée variable des croisières. En effet, les parts de marché mesurées en nombre de passagers exagéreraient la part des opérateurs dont les croisières sont de plus courte durée. C'est pourquoi, dans la présente décision, les parts de marché sont mesurées en jours de passagers-croisière ("JPC") et non en nombre de passagers. Les parts de marché en valeur peuvent aussi servir d'indicateur, mais la Commission n'a pas obtenu de tous les acteurs du marché les informations permettant un calcul fiable des parts de marché en valeur.
C.2.2.2. Parts du marché britannique
Tableau 6 - Parts du marché britannique des croisières maritimes en JPC - 2001
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
Commission, étude de marché.
(131) L'opération envisagée regrouperait le plus grand acteur du marché avec l'un de ses concurrents du segment "prestige", Carnival (l'autre concurrent "prestige" étant RCCL dont la taille est similaire à celle de Carnival au Royaume-Uni). La nouvelle entité détiendrait [35 à 45 %]* du marché britannique (en JPC). La marque de POPC la plus forte au Royaume-Uni est P & O Cruises, avec [20 à 30 %]*. Les parts que Carnival détient dans ce pays sont réparties sur un certain nombre de marques, sa marque phare Cunard représentant [0 à 5 %]*.
(132) La Commission n'a pas été en mesure d'estimer de manière fiable la part de marché en valeur détenue par les parties ensemble. Elle serait toutefois plus élevée que leur part en JPC parce que les parties opèrent dans le segment "prestige" du marché des croisières maritimes et appliquent donc des prix par jour supérieurs à la moyenne.
(133) La Commission a examiné la manière dont les modifications apportées à la composition de la flotte ainsi que les intentions concernant le déploiement des navires et le panachage de nationalités jusqu'en 2004 sont susceptibles d'affecter les parts de marché en JPC. Dans son appréciation, la Commission a tenu compte des modifications de capacité annoncées par les parties et leurs concurrents et elle a aussi demandé aux acteurs du marché leurs modifications de capacité non annoncées. L'année 2004 est l'horizon auquel la livraison de navires neufs peut être établie avec un degré de certitude relativement élevé. Le résultat de cette étude montre que la part de marché de Cunard pourrait augmenter [...]*(58). Étant donné que POPC augmente elle aussi sa capacité(59) à un niveau supérieur à la moyenne, la nouvelle entité pourrait voir sa part de marché augmenter légèrement dans les deux années à venir si elle ne supprime pas du tonnage en sus de ce qui est déjà prévu. Toutefois, en raison des incertitudes inhérentes à ce genre de prévisions, la Commission estime qu'il ne convient pas de les prendre comme base de sa décision.
C.2.3. Positionnement des marques au Royaume-Uni
C.2.3.1. Préférences en matière de codes linguistiques et culturels: britanniques/internationaux
(134) Une partie des clients britanniques préfère les croisières qui reflètent les goûts et préférences nationaux et où l'anglais est la seule langue à bord ou celle qui prédomine. En revanche, l'étude de marché de la Commission montre qu'un certain pourcentage de la population britannique préfère les croisières considérées comme internationales. Il y a, en gros, deux offres internationales: les croisières de type américain et les croisières méditerranéennes de type paneuropéen. On trouve aussi un certain pourcentage de clients de croisière qui n'ont pas de préférence très nette pour l'une ou l'autre des deux catégories principales. Les estimations moyennes fournies par les agences de voyage dans l'enquête de la Commission donnent une préférence pour le type britannique d'environ 60 %, une préférence pour le type international d'environ 25 % et un taux "sans préférence" d'environ 20 %(60). L'étude [commandée par POPC]* parvient à des chiffres différents. Selon la catégorie considérée, cette étude examine les préférences pour le "tout britannique" et arrive aux résultats suivants:
Seulement [25 à 35 %]* des "croisiéristes potentiels" préféreraient uns croisière de type britannique, mais [50 à 60 %]* d'entre eux seraient disposés à payer un supplément. Les croisiéristes potentiels d'un certain âge sont plus attirés par les croisières de type britannique ([40 à 50 %]* parmi les plus de 65 ans), comme le sont les croisiéristes multiples ([40 à 50 %]*). Plus de [35 à 45 %]* des clients réguliers de P & O préfèrent les navires de type britannique, comme plus de [45 à 55 %]* des clients d'un groupe d'autres marques "prestige" de type britannique, dont Cunard, Fred Olsen, Page & Moy, Saga et Swan Hellenic. Toutefois, [60 à 70 %]* de croisiéristes réguliers et [50 à 60 %]* de croisiéristes potentiels n'ont pas de préférence ou préfèrent les croisières américaines. Les préférences pour les navires de type américain varient fortement et se situent dans une fourchette d'environ [5 à 15 %]* (parmi le groupe des "croisiéristes préférant le type britannique" de Cunard) et [25 à 35 %]* (parmi les croisiéristes réguliers préférant le type américain)(61).
(135) Ces résultats montrent que, si une partie de la clientèle britannique régulière et potentielle préfère les croisières de type britannique, une partie encore plus grande déclare n'avoir aucune préférence particulière, tandis qu'une autre partie préférerait les croisières de type américain. En ce qui concerne Cunard, il faut noter qu'elle est perçue comme une marque britannique, mais compte de nombreux Américains parmi ses clients, notamment pour l'un de ses deux produits phares, à savoir le produit "paquebot transatlantique" qui est actuellement représenté par le Queen Elizabeth II et le sera à partir de 2003 par le nouveau navire de Cunard, le Queen Mary.
C.2.3.2. Deuxième choix des clients
(136) Dans une étude réalisée pour le compte de RCCL, les enquêteurs ont demandé à des croisiéristes réguliers ce qu'ils considéraient comme leur deuxième choix après la marque qu'ils avaient retenue(62). Les résultats de cette enquête sont récapitulés dans le tableau 7. Deux points méritent d'être soulignés. D'abord, l'enquête a écarté les produits paneuropéens et méditerranéens qui représentent près de 10 % des croisières maritimes vendues au Royaume-Uni. Ensuite et surtout, les questions ont porté exclusivement sur le deuxième choix des clients et non sur toutes les marques qu'ils percevaient comme d'autres options possibles. Dès lors, les résultats donnent une vue restreinte de la perception qu'ont les clients du rapport concurrentiel entre les organisateurs de croisières. À titre d'exemple, une cliente de P & O Cruises qui a considéré Fred Olsen comme son deuxième choix aurait très bien pu considérer qu'un autre opérateur comme Thomson constituait une option possible. Ces rapports "secondaires" ne sont pas intégrés dans les informations que présente le tableau 7. Ce tableau indique des options possibles pour les clients, mais ne reflète pas toutes celles que les clients ont étudiées lorsqu'ils ont choisi leur croisière.
Tableau 7 - Deuxième choix des clients britanniques
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
Rapport Conquest sur l'enquête téléphonique menée auprès de croisiéristes au Royaume-Uni, mai 2002.
(137) Le plus fort pourcentage de clients de Cunard (46 %) considère que P & O Cruises serait le deuxième choix, et inversement pour les clients de P & O Cruises (26 %) vis-à-vis de Cunard. Toutefois, les clients des deux compagnies voient de nombreux autres opérateurs comme les concurrents les plus directs de ces marques. Ainsi, la marque de type britannique Fred Olsen est considérée comme leur deuxième choix par 18 % des clients de P & O Cruises interrogés et par 13 % des clients de Cunard, tandis que les clients de Fred Olsen considèrent P & O Cruises (45 %) et Cunard (13 %) comme leur deuxième choix.
(138) Par ailleurs, certains clients de P & O Cruises et de Cunard considèrent les produits de type américain comme leur deuxième choix. Globalement, 24 % des clients de P & O Cruises citent comme deuxième choix les concurrents RCI, NCL ou Celebrity (marques possédées par des concurrents des parties). Si l'on inclut Princess et Carnival CCL, ce chiffre passe à 31 %. RCI est la seule marque de type américain que les clients de Cunard mentionnent le plus fréquemment comme leur deuxième choix et de P & O Cruises, tandis que des clients de marques de type américain citent P & O Cruises et d'autres marques de type américain. Ces résultats viennent étayer ceux de [l'étude commandée par POPC]* (voir considérant 135) qui montrent qu'une forte proportion de clients potentiels au Royaume-Uni n'a pas de préférence pour les croisières de type britannique ou les croisières de type américain.
C.2.3.3. Position des parties dans les segments de type culturel du marché britannique
(139) POPC est présente dans le segment des croisières de type américain avec Princess, qui détient une part de [0 à 10 %]* au Royaume-Uni. La concentration ajoutera HAL (perçue comme un proche concurrent de Princess dans l'étude de marché de la Commission) et CCL qui détiennent 1 % chacune. Elle aurait aussi une présence légèrement renforcée dans les croisières de type américain, mais une présence restant faible dans le segment des croisières de type méditerranéen/paneuropéen.
(140) Dès lors, la concentration envisagée conférerait à la nouvelle entité une position plus forte dans le segment des croisières de type britannique. Toutefois, comme le montre l'étude [commandée par POPC]* (voir considérants 134 à 135), les clients des croisières de type britannique considèrent aussi d'autres types de croisières comme des options envisageables.
C.2.3.4. Position des parties sur le plan qualitatif au Royaume-Uni
(141) Les parties proposent une large palette de prestations allant des marques de luxe comme Seabourn et Windstar au projet récent de POPC de lancer une marque économique, Ocean Village, en passant par les marques de haut du segment "prestige" (Cunard, HAL, Princess, P & O Cruises, Swan Hellenic...) et les marques de bas du segment "prestige" (CCL, Costa, etc.). C'est donc surtout dans le ou les segments "prestige" que les activités des parties se chevauchent. Dans chaque segment, les parties se trouveront face à un certain nombre de concurrents forts.
(142) Dans le premier rapport Conquest, on a demandé aux clients britanniques leur perception des prix et de la qualité de marques de croisières. En ce qui concerne la qualité, P & O Cruises est proche de Cunard, alors que sur les prix, elle est proche de RCI(63). Il faut également noter que cette partie du rapport Conquest ne porte que sur sept marques et ne considère pas plusieurs des options qui s'offrent aux clients, comme NCL, Orient, Saga et Celebrity, ce qui limite la pertinence des résultats.
C.2.3.5. Position des parties dans les croisières "classiques" et les croisières "festives"
(143) Il existe un certain chevauchement horizontal entre Cunard et P & O Cruises dans les croisières traditionnelles de type britannique. Sur ce point, les principales similitudes entre les offres des parties viennent des croisières à bord du Caronia, un paquebot vieux de trente ans appartenant à Cunard.
(144) On constate aussi des différences notables entre les produits proposés par ces deux marques. Cunard diffère de P & O Cruises en ce sens qu'une part importante de son activité concerne les traversées de l'Atlantique qui sont sa spécialité. Actuellement assurées par le paquebot Queen Elizabeth II, les traversées de l'Atlantique à bord de ce navire ne ressemblent à rien de ce que proposent les autres organisateurs de croisières et sont vendues à des clients américains plus qu'à des clients britanniques.
(145) La part de marché actuellement représentée par le Caronia est inférieure à [0 à 5 %]* du marché britannique. Au total, la part de marché de Cunard représente moins de [0 à 5 %]* du marché britannique.
(146) La position des parties en ce qui concerne les croisières de type britannique pourrait se renforcer [...]*. Toutefois, un flou assez grand entoure la manière dont la nouvelle capacité sera déployée et où elle sera commercialisée. Il n'est donc pas possible d'établir avec une certitude suffisante l'incidence éventuelle de la nouvelle capacité au Royaume-Uni.
(147) Dans le segment américain, les parties seront en mesure de proposer une gamme de produits allant des offres de croisières "festives" (CCL...) aux produits plus "classiques" (HAL...), en passant par la marque Princess qui présente un profil intermédiaire alliant chic et décontraction. Dans chacun de ces segments, les parties se trouveront face à un certain nombre de concurrents.
C.2.3.6. Notoriété des marques
(148) En ce qui concerne la notoriété des marques auprès de la clientèle britannique, une étude commandée par POPC en 2001(64) montre que les consommateurs connaissent probablement plus la marque P & O Cruise (les valeurs indiquées concernent les croisiéristes et les non-croisiéristes: [60 à 70 %]*/[55 à 65 %]*), suivie d'Airtours ([25 à 35 %]*/[15 à 20 %]*), Thomson Cruises ([20 à 30 %]*/[15 à 25 %]*), Cunard ([20 à 30 %]*/[25 à 35 %]*), Fred Olsen ([20 à 30 %]*/[15 à 25 %]*) et RCI ([20 à 30 %]*/[10 à 20 %]*).
(149) L'étude [commandée par POPC]*(65) montre que, parmi les personnes interrogées susceptibles de faire une croisière entre 2002 et 2004, la plus forte proportion mentionne P & O Cruises comme choix de marque le plus probable, puis (dans l'ordre) Royal Caribbean, Cunard, Thomson, Airtours et Celebrity.
(150) Ce résultat montre que, hormis P & O Cruises, les consommateurs connaissent pareillement les marques de croisières "prestige" et économiques.
C.2.3.7. Preuves d'une concurrence serrée dans les documents internes de Cunard
(151) [...]*(66).
(152) [...]*(67).
C.2.3.8. Conclusion sur le positionnement des marques au Royaume-Uni
(153) D'après ce qui précède, on voit que P & O Cruises et la marque Cunard de Carnival sont concurrentes dans le segment des croisières de type britannique. D'autres marques, qu'elles soient présentes dans le même segment (comme Fred Olsen) ou dans un segment voisin (comme RCI), sont considérées comme concurrentes par les consommateurs.
C.2.4. Pressions concurrentielles
C.2.4.1. Croissance du marché au Royaume-Uni
(154) Dans les années 1990, le marché de la croisière a enregistré des niveaux élevés de croissance au Royaume-Uni, tant en termes absolus que par rapport aux taux de croissance affichés par d'autres types de vacances.
(155) De 1995 à 2001, le nombre de passagers a enregistré un taux de croissance annuel moyen de près de 17 %. Les chiffres provenant de la Passenger Shipping Association montrent que le nombre de vacances-croisière prises par les Britanniques a plus que doublé au cours de cette période. De 1995 à 1998, ces taux de croissance annuels ont tous été supérieurs à 20 % (26 % en 1995, 22 % en 1996, 25 % en 1997, 27 % en 1998). Et même s'ils sont retombés au-dessous de ces niveaux de 1999 à 2001 (13 % en 1999, 1 % en 2000, 3 % en 2001), le marché continue à tabler sur des taux de croissance élevés. Ainsi, deux sources indépendantes(68) donnent des estimations de croissance annuelle pour le Royaume-Uni de 8,5 à 9 % sur la période 2006 à 2010. Il faut noter qu'une de ces estimations a été publiée après les événements du 11 septembre 2001. Cette croissance ne manquera pas de créer des incitations à l'arrivée de nouveaux opérateurs et à l'expansion des opérateurs existants et, ce faisant, limitera l'effet des obstacles à l'entrée.
C.2.4.2. Historique récent de l'entrée et de l'expansion des opérateurs au Royaume-Uni
(156) Le marché britannique des croisières maritimes a aussi été caractérisé par l'arrivée massive d'opérateurs ces cinq ou six dernières années. En fait, l'historique de l'entrée dans le secteur de la croisière au Royaume-Uni est surtout celui de l'entrée des voyagistes dans le segment "économique" du marché britannique. Aujourd'hui, les voyagistes transportent 25 à 30 % des croisiéristes britanniques. Par ailleurs, un certain nombre d'acteurs ont pris pied dans le segment "prestige".
(157) Airtours a commencé à proposer des vacances-croisière en 1995, avec un navire de 800 couchettes, le Seawing, exploité sous la marque Sun Cruises. Depuis, Airtours a agrandi sa flotte en y ajoutant trois navires et possède désormais une capacité totale de 4200 couchettes en été(69). Le dernier en date de ses navires, le Sunbird, est nettement plus récent et offre de meilleurs aménagements que les trois autres.
(158) Thomson, récemment rachetée par le groupe allemand Preussag, a proposé des croisières pour la première fois en 1996 et a élargi son offre en 1997, 1998 et 1999. Après avoir réduit sa capacité en 2000, elle exploite actuellement trois navires en été(70). Le mois de mai 2003 verra l'arrivée d'un nouveau navire dans le programme de Thomson Cruise, le Thomson Spirit, initialement mis en service sur Holland America en 1983. Il pourrait remplacer un de ses navires plus anciens.
(159) Le troisième voyagiste à avoir pénétré sur le marché est First Choice qui s'est lancé dans les croisières en 1999 avec un navire affrété auprès de Festival, le Bolero. En 2000, il a ajouté l'Ausonia. Après avoir résilié les affrètements de ces navires, First Choice a relancé son produit en 2002, dans le cadre d'Island, une entreprise commune avec RCCL. Island exploite l'Island Escape, un navire vieux de douze ans exploité auparavant par RCCL.
(160) Les entreprises qui ont pris pied sur le marché "prestige" au Royaume-Uni sont des acteurs comme le britannique Saga. Cette société, qui a commencé par vendre des vacances aux personnes du troisième âge en 1951, fournit aujourd'hui aux personnes de 50 ans et plus une large palette de services, comme des services financiers et d'assurance, les achats par correspondance ou téléphone, les services de gaz, électricité et téléphone, l'édition et la radiodiffusion. En 1997, Saga s'est lancée dans les croisières avec un navire de petite taille (587 couchettes) qu'elle avait racheté à Cunard. En 2003, elle en ajoutera un autre, légèrement plus petit (de 352 couchettes, précédemment exploité par POPC) qu'elle affrétera apparemment pendant une partie de l'année (de mai à octobre).
(161) Festival, un acteur méditerranéen, est arrivé dans le segment des croisières économiques dans les années 90 et dans le segment des croisières "prestige" en 1999. Il vend en partie sur catalogues de voyagistes. Sa part du segment "prestige" britannique est actuellement de 1 %.
(162) Un autre acteur a pris pied dans le segment "prestige" du marché: Disney Cruise Ligne ("Disney"). Disney exploite deux navires qui sont destinés au marché américain, mais sont également vendus à la clientèle britannique et à d'autres clients européens. Il s'agit d'un acteur encore relativement petit au Royaume-Uni (part de marché < 0,5 %). Canyon Ranch prévoit d'occuper vers 2004/2005 le créneau à forte valeur des croisières thermales, mais la commercialisation visera essentiellement la clientèle américaine.
(163) Fred Olsen, qui détient actuellement une part de marché d'environ 6 %, se situe dans le bas du segment "prestige". La compagnie exploite trois navires et a élargi son offre à deux reprises ces dix dernières années, ajoutant un second navire en 1996 et un troisième en 2001/2002. Toutefois, sa croissance nette en termes de couchettes est restée inférieure à celle de P & O Cruises qui, durant la même période, a jouté des navires en 1995, en 1998 (en remplacement d'un plus ancien), en 2000 et en 2002 (en remplacement d'un navire plus petit) (gain net: P & O Cruises, 4722 couchettes; Fred Olsen, 1536 couchettes).
(164) De 1995 à 2000, RCCL a maintenu sa part(71) de 6 à 7 % du marché global des croisières maritimes au Royaume-Uni, avec une augmentation du nombre de passagers transportés de 22 000 en 1995 à 50 000 en 2000. En 2001, RCCL a vu sa part de marché passer à 10 % avec une progression du nombre de passagers britanniques transportés de près de 30000, et ce sans affecter de navires au marché britannique, mais en modifiant le panachage des nationalités à bord de ses navires et en augmentant la proportion de passagers britanniques.
C.2.4.3. Développements imminents
(165) Les acteurs traditionnels du segment "prestige" lancent des marques qui ciblent plus précisément le haut du segment économique. Ainsi, RCCL vient de lancer Island, une entreprise commune avec First Choice, qui a démarré ses activités en 2002. Dans la même veine, POPC lancera en 2003 une nouvelle marque, Ocean Village, dont la cible est une clientèle plus jeune, plus "décontractée". Ces deux nouvelles marques utiliseront des navires relativement récents provenant de la flotte de leur société mère. Ainsi, Ocean Village utilisera l'Arcadia qui, pour l'heure, fait partie de la flotte de P & O Cruises.
(166) Cunard envisage d'apporter un certain nombre de modifications importantes à sa flotte. Ces projets sont décrits en détail à la note de bas de page 55.
C.2.5. Obstacles à l'entrée et à l'expansion
(167) Aux yeux des parties, les obstacles à l'entrée sont minimes, car il n'est pas difficile de trouver des navires et de les réaménager rapidement. Elles estiment que les besoins en capitaux pour acheter ou prendre en crédit-bail des navires d'un certain âge ne sont pas élevés et que l'accès à la distribution est aisé. Elles considèrent que la notoriété des marques n'est pas un obstacle, car de nombreuses marques du secteur des produits de grande consommation ou du secteur du tourisme peuvent être étendues à la croisière. Enfin, la croissance soutenue du marché britannique renforce les possibilités de pénétration et d'expansion d'autres acteurs.
C.2.5.1. Notoriété des marques
(168) En 2001, les marques de Carnival qui ont enregistré les meilleures ventes au Royaume-Uni (Cunard, CCL et Costa) ont consacré respectivement [...]* % et [...]* % de leur chiffre d'affaires annuel aux frais de commercialisation. Pour Cunard, cela a représenté [...]*. Cunard a consacré [...]* % de son budget marketing à la publicité dans la presse quotidienne et la presse magazine, dont une grande partie destinée à la création de l'identification et de la notoriété de la marque.
(169) La Commission constate que les frais de commercialisation des marques bien implantées se situent normalement dans une fourchette de 5 à 10 % du chiffre d'affaires annuel, alors qu'ils peuvent atteindre 10 à 15 %, voire 20 %, pour les marques désireuses d'étendre leurs activités. D'une manière générale, les frais de commercialisation sont plus élevés dans le segment culture/découverte et dans le segment luxe.
(170) À moins qu'ils ne disposent déjà d'un certain capital de notoriété qui leur servira à vendre des croisières, les nouveaux arrivants risquent d'avoir plus de mal à pénétrer sur le marché, en raison des frais à engager pour créer l'identification du produit par la marque. Dans ce contexte, il faut noter que la plupart des nouveaux arrivants sur le marché de la croisière sont des entreprises qui possèdent des marques bien implantées dans une série de domaines connexes. Ainsi, avant de pénétrer sur le marché de la croisière, les voyagistes vendaient des vacances. Saga a réussi à étendre sa marque établie (une marque associée à la fourniture par marketing direct d'une gamme de services, dont des vacances, à une clientèle d'un certain âge) au domaine de la croisière. L'exemple d'Island (possédée par First Choice et RCCL) et le lancement imminent d'Ocean Village (POPC) montrent que des marques nouvelles peuvent être lancées par des opérateurs existants et que les frais de lancement ne sont donc pas prohibitifs.
(171) L'entrée ou l'expansion à partir d'un autre marché géographique constituent une autre possibilité. Même si la notoriété de marques d'opérateurs méditerranéens comme Festival et Royal Olympic est encore relativement faible au Royaume-Uni, ces opérateurs ont amélioré la qualité de leur offre dans ce pays au cours des deux ou trois années écoulées. Cela montre que l'entrée et l'expansion sont possibles, même en l'absence de forte notoriété de la marque.
C.2.5.2. Commercialisation et distribution
(172) Au Royaume-Uni, les ventes de croisières se font majoritairement par les agences de voyage. Alors que les ventes par Internet sont très rares, un nombre non négligeable de ventes est réalisé par des actions de marketing téléphonique. Par conséquent, l'accès au circuit commercial des agences de voyages et une promotion active par l'agent commercial sont indispensables à la réussite d'un organisateur de croisières.
(173) Les agences de voyages multicartes indiquent que, selon elles, la limitation du linéaire n'entrave pas l'accès à la distribution. Pour donner une idée de l'étendue de l'offre, une grande agence de voyage multicarte déclare que ses points de vente référencent actuellement jusqu'à treize produits de croisière différents. Il faut aussi noter que les marques de croisières réalisent généralement une forte proportion de leurs ventes par le truchement d'agences de voyages et spécialistes de la croisière indépendants.
(174) D'aucuns se sont montrés préoccupés par la structure des commissions des agences de voyages, en indiquant notamment qu'elle pouvait inciter celles-ci à favoriser les ventes des marques plus fortes. Mais la Commission n'a aucune preuve que cela ait empêché ou pourrait empêcher l'entrée ou l'expansion sur le marché et, par conséquent, elle ne considère pas que l'accès à la distribution constitue un obstacle majeur à l'entrée sur le marché britannique de la croisière.
(175) Par ailleurs, les fournisseurs de croisières ont besoin de "former la profession", car les agences de voyages répugnent à conseiller des produits de croisière à leurs clients si elles ne connaissent pas parfaitement les produits en question. Mais cela constitue aussi un facteur de coût pour les opérateurs existants, car ils doivent constamment actualiser les connaissances des distributeurs. Par ailleurs, les actions commerciales entreprises conjointement avec les agences de voyages permettent de promouvoir le produit d'un opérateur et constituent une méthode que peuvent utiliser aussi bien les nouveaux arrivants que les opérateurs existants.
(176) Un aspect particulier de la commercialisation et de la distribution qui joue un rôle est la possession d'une base de données clients et l'accès aux ventes de renouvellement. Ce dernier point est important, car les clients qui sont partis en croisière une fois sont beaucoup plus susceptibles de renouveler l'expérience. Les clients réguliers sont donc ceux qui coûtent le moins cher à obtenir. Il apparaît aussi que les clients réguliers ont un rendement supérieur à la moyenne. Bien que Carnival le conteste, ce point est confirmé par ses chiffres sur Cunard (y compris Seabourn). En effet, pour une partie de 2002, les passagers réguliers de Cunard/Seabourn ont représenté [...]* % des passagers, [...]* % des journées de croisière vendues, mais [...]* % du chiffre d'affaires généré(72). Une base de données des anciens clients permet de cibler les actions promotionnelles et donc de vendre les couchettes à des prix acceptables. La base de données clients de Cunard comprend [...]* ménages au Royaume-Uni, tandis que celle de Costa contient les noms de [...]* clients britanniques(73). POPC possède elle aussi une base de données clients importante.
(177) Les clients réguliers représentent une proportion substantielle des passagers de croisières. À titre d'exemple, Carnival estime que son taux de clients britanniques réguliers se situe dans une fourchette de [...]* % et que le taux de fréquentation des navires Cunard par des clients britanniques réguliers (clients qui ont déjà fait des croisières avec cette compagnie ou une autre) atteint même [...]* %. L'entreprise visée, POPC, cite elle aussi des taux de renouvellement élevés.
(178) RCCL affirme que les nouveaux arrivants n'ont pas accès à une base de données contenant les anciens clients, ce qui accroît les frais de vente de leurs croisières. Il est en effet moins coûteux de vendre à d'anciens clients sur lesquels les entreprises disposent de renseignements. Dans sa réponse, Carnival affirme que Conquest, pour son rapport payé par RCCL, a pu acheter un fichier d'environ 10 000 consommateurs résidant au Royaume-Uni qui avaient indiqué avoir fait une croisière ces dernières années, ce qui montre que les nouveaux arrivants peuvent eux aussi se procurer des renseignements concernant d'anciens clients (qui sont des clients potentiels).
(179) Par ailleurs, nombre des nouveaux arrivants, comme les voyagistes et Disney, ont déjà des activités de fourniture de vacances dont ils pourraient tirer des renseignements connexes ou, comme dans le cas de Saga, des activités de vente de produits et services aux catégories socioprofessionnelles qui sont les cibles privilégiées pour les croisières. L'arrivée de Saga a également été facilitée par le fait qu'elle vendait et vend toujours à ses clients des croisières d'autres compagnies. D'autres entreprises pourraient tirer parti de renseignements de ce genre qu'elles ont en leur possession.
(180) POPC signale que les nouveaux arrivants pourraient entreprendre des campagnes promotionnelles communes avec les agences de voyage, ce qui leur permettrait d'avoir accès aux données détenues par celles-ci.
(181) C'est pourquoi la Commission considère que l'accès aux moyens de distribution nécessaires et l'obtention des informations nécessaires pour cibler les actions promotionnelles sur les clients potentiels de manière rentable ne présentent pas de difficultés majeures. En conséquence, ces facteurs ne sont pas considérés comme des obstacles substantiels à l'entrée.
C.2.5.3. Accès aux navires
(182) Les organisateurs de croisières peuvent commander des navires neufs, acheter des navires d'occasion ou encore affréter des navires et leur équipage auprès d'affréteurs. La majorité des paquebots en cours de construction dans le monde ont été commandés par les parties(74). Les navires neufs, et surtout les post-Panamax, représentent une dépense d'équipement élevée, leur coût se chiffrant en centaines de millions de livres sterling.
(183) Toutefois, en ce qui concerne les effets concurrentiels de ces coûts, leur ampleur compte moins que la question de savoir si les opérateurs pourront ou non les récupérer à la sortie, autrement dit s'il s'agit de coûts irrécupérables ou non.
(184) Trois facteurs limitent le risque de voir les coûts irrécupérables liés à l'investissement dans des navires neufs représenter un obstacle substantiel à l'entrée. En premier lieu, il n'est pas indispensable de pénétrer sur le marché des croisières maritimes avec des navires flambant neufs; du reste, le cas est extrêmement rare. Disney est le seul opérateur actuellement présent au Royaume-Uni qui soit arrivé avec des navires neufs. En second lieu, même si un nouvel arrivant investit dans des navires neufs, l'existence d'un marché pour la revente (et donc le réaménagement) de ces navires permet de penser que les opérateurs désireux de quitter le marché pourront récupérer une partie de leur investissement. En troisième lieu, les risques que les dépenses d'équipement soient des coûts irrécupérables seraient infiniment plus grands si, au lieu d'afficher une croissance, les marchés de la croisière maritime étaient en recul.
C.2.5.4. Économies d'échelle et financement
(185) L'exploitation d'une grande flotte de navires génère des économies d'échelle, car elle permet d'étaler divers postes de coûts, comme les frais généraux (activités techniques, frais d'hôtel, activités à terre, etc.).
(186) Des économies d'échelle ne sont pas seulement réalisables en exploitant plus de navires, mais aussi en exploitant des navires plus grands et plus modernes. En effet, avec des navires plus grands, divers coûts (équipe technique, etc.) peuvent être répartis sur un plus grand nombre de clients, et les navires assez récents sont moins coûteux à exploiter en raison, par exemple, de leurs frais de carburant nettement inférieurs. Il n'en demeure pas moins que l'entrée sur un marché européen avec un navire neuf de gros tonnage est difficile. Même aux États-Unis, de loin le plus grand marché du monde, cela n'a eu lieu qu'une seule fois au cours des dix dernières années, avec Disney en l'occurrence. Ce n'est donc que dans des cas très rares et exceptionnels que ces économies d'échelle peuvent être réalisées par de nouveaux arrivants. En ce qui concerne l'expansion, seuls les grands acteurs du marché et, dans une moindre mesure, une poignée d'acteurs de second rang sont capables de réaliser ces économies pleinement. Enfin, les nouveaux arrivants qui ont des navires d'occasion ou affrétés peuvent réduire substantiellement leurs coûts et risques de financement.
(187) Les parties contestent la thèse de l'existence d'économies d'échelle importantes, en affirmant que si ces économies existaient, on observerait sans doute une tendance à la concentration croissante du secteur. Or, souligne POPC, la concentration du secteur a diminué ces dernières années du fait des activités des opérateurs plus récents.
(188) Un certain nombre d'acteurs (Airtours, Thomson, Saga, Island...) sont entrés avec un seul navire, puis se sont agrandis en ajoutant des navires. On voit donc que l'entrée à une échelle relativement petite est possible et que la réalisation d'économies d'échelle n'est donc pas indispensable à la réussite de l'entrée sur le marché.
C.2.5.5. Transfert du panachage de nationalités et de la capacité entre pays
(189) La capacité de transférer la commercialisation d'une marque d'un pays à un autre et de modifier le panachage des nationalités à bord des navires est une caractéristique importante de ce secteur.Des exemples récents montrent que les concurrents peuvent très vite accroître leurs activités dans un pays en opérant des transferts de capacité sur des navires à commercialisation multinationale, par exemple des navires de type américain et des croisières de type européen méditerranéen.
(190) Dans sa communication des griefs, la Commission est parvenue à la conclusion provisoire que la préférence des consommateurs britanniques pour les croisières de type britannique entraverait substantiellement la capacité des opérateurs assurant des croisières de type méditerranéen ou des croisières de type américain d'exercer une pression concurrentielle significative sur les parties, car cette préférence pourrait entraver la capacité des opérateurs exploitant des navires avec des passagers de plusieurs nationalités d'augmenter la proportion de clients britanniques.
(191) Toutefois, à la lumière des réponses reçues et de l'analyse effectuée depuis la publication de la communication des griefs, la Commission considère que cette conclusion provisoire a exagéré l'importance de ces goûts nationaux comme obstacle à l'entrée. Comme on l'a déjà vu au considérant 138, près d'un quart des clients P & O considèrent que les marques de type américain RCI, NCL et Celebrity sont leur deuxième option. Les preuves fournies dans l'étude [commandée par POPC]* (voir considérant 134) viennent étayer la conclusion que les croisières de type américain et de type britannique sont en concurrence directe. L'étude [commandée par POPC]* donne à penser que, même si une minorité non négligeable de clients potentiels préfèrent une croisière de type britannique, la majorité des clients actuels et potentiels sont indifférents ou préfèrent une croisière de type américain.
(192) En outre, les preuves apportées dans la réponse de Carnival donnent un certain nombre d'exemples de transferts importants du panachage de nationalités de ses navires, comme l'augmentation de la proportion de clients britanniques à bord des navires de Cunard. Ainsi, en l'espace de deux ans, le taux de fréquentation du Caronia de Cunard par des clients britanniques a augmenté de [...]* points de pourcentage. Plusieurs autres exemples de transfert de plus de 10 % de la proportion de clients britanniques entre 1999 et 2001 ont été communiqués.
(193) RCCL vient d'augmenter de manière substantielle sa part de marché au Royaume-Uni en augmentant le nombre de passagers britanniques à bord de ses navires. Il est intéressant de noter que le seul coût qu'elle a engagé pour réaliser cette expansion est l'argent qu'elle a consacré à la commercialisation. Aucune dépense n'a été engagée pour les équipements ou les services à bord des navires, et RCCL a obtenu cette progression de sa part de marché sans affecter de navire exclusivement au marché britannique.
(194) Pour assurer leur expansion, les organisateurs de croisières peuvent non seulement modifier le panachage de nationalités, mais aussi continuer à réaffecter des navires entiers entre différents pays. Ce "transfert de navires" est un facteur important. À titre d'exemple, un rapport publié en mars 2002 par UBS Warburg(75) montre que, de 2001 à 2003, dix navires auront été réaffectés du marché américain à l'Europe, ce qui représente un transfert sur les marchés européens de 7 % de la capacité existant sur le marché américain. Parmi ces navires figurent le Crown, le Regal et l'Ocean de POPC. On trouve un autre exemple illustrant la souplesse d'utilisation des navires avec le Viking Serenade de RCCL, qui est exploité par la nouvelle marque Island Cruises et effectue des croisières en Europe au printemps et à l'été de cette année avant de retourner sur le marché américain pour la saison d'hiver 2002-2003.
(195) La Commission pense qu'une tentative d'augmenter les prix après la concentration serait contrée par les opérateurs américains et paneuropéens, et notamment par RCI et NCL qui pourraient accroître à brève échéance le taux de fréquentation de leurs navires par des passagers britanniques. Cela n'obligerait pas ces entreprises à créer de nouvelles marques ou des réseaux de distribution, puisqu'elles sont déjà présentes dans la vente de croisières au Royaume-Uni avec des marques reconnues et avec l'accès aux réseaux de distribution nécessaires. À moyen terme, ces entreprises pourraient tirer parti de cette présence pour affecter des navires exclusivement au marché britannique.
C.2.6. Conclusion concernant le marché britannique
(196) Il est évident que l'opération créera une entité détenant une part relativement élevée du marché des croisières maritimes au Royaume-Uni. Mais cette part ne confère pas à elle seule une position dominante et plusieurs spécificités du marché en cause amènent la Commission à conclure que l'opération envisagée ne créera pas de problèmes de concurrence.
(197) Encore assez loin de la maturité, le marché britannique devrait connaître une croissance rapide dans les années qui viennent. Cette croissance fournira aux acteurs existants des occasions d'étendre leurs activités et aux nouveaux acteurs des occasions de pénétrer sur le marché, comme le démontre l'évolution récente du marché.
(198) Dans le segment des croisières de type britannique, le chevauchement entre Cunard et P & O Cruises est limité. En effet, Cunard représente moins de [0 à 5 %]* du marché britannique, une part due essentiellement au paquebot Queen Elizabeth II. Une partie importante de l'activité de Cunard se situe dans des créneaux particuliers, comme ses traversées de l'Atlantique à bord du Queen Elizabeth II, qui n'ont rien à voir avec les croisières ordinairement vendues par P & O Cruises.
(199) Au Royaume-Uni, la plupart des clients potentiels ne limitent pas leur choix aux compagnies proposant des croisières de "type britannique", mais envisagent au contraire des croisières présentant une série de caractéristiques proposées par un éventail d'opérateurs.
(200) Aucun obstacle important ne se dresse devant les opérateurs internationaux pour leur expansion. À court terme (en l'espace d'un an), ces opérateurs peuvent se développer en augmentant la proportion de clients britanniques à bord de leurs navires et la menace de cette expansion fera peser de fortes pressions concurrentielles sur l'entité issue de la concentration. À moyen terme (en un an et demi à deux), ils pourront renforcer leur position au Royaume-Uni en affectant des navires au seul marché britannique.
(201) C'est pourquoi la Commission conclut que l'opération n'aura pas pour conséquence de créer ou renforcer sur le marché britannique de la croisière maritime une position dominante qui entraînerait des restrictions substantielles de concurrence à l'intérieur du Marché commun et de l'EEE.
C.3. Allemagne
C.3.1. Parts de marché et capacité du marché allemand
C.3.1.1. Parts du marché allemand en nombre de passagers en 2000
(202) Le tableau 8 donne l'estimation de Carnival des parts du marché de la croisière maritime - comprenant des organisateurs de croisières côtières par ferry comme HurtigRuten - détenues par les parties en 2000(76).
Tableau 8 - Estimation des parts de marché des parties en Allemagne (nombre de passagers) en 2000
<EMPLACEMENT TABLEAU>
(source:
Carnival)
C.3.1.2. Parts du marché allemand en 2001 (en jours passagers-croisière)
(203) Le volume total du marché en 2001 indiqué au tableau 9 est tiré de l'enquête sur le marché allemand de la croisière publiée chaque année par le DRV, qui est considéré comme la source la plus fiable pour ce marché(77). La catégorie "Divers", qui représente la différence entre le total des JPC de l'enquête de la Commission et le volume total du marché indiqué dans l'enquête du DRV(78), englobe un certain nombre de marques de croisières de luxe(79) et un certain nombre d'acteurs présents dans des créneaux particuliers(80).
Tableau 9 - Parts du marché allemand en JPC en 2001
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
Commission, à partir d'informations fournies par les parties et des concurrents.
(204) Le tableau 9 montre que les parts de marché (en JPC) détenues ensemble par les parties en 2001 sont de [20 à 30 %]*, ce qui est inférieur à l'estimation de Carnival pour 2000 sur la base du nombre de passagers.
C.3.1.3. Parts de marché actuelles en valeur
(205) Les parts de marché actuelles des parties en valeur sont sans doute légèrement inférieures à leurs parts en JPC, en raison du prix élevé auquel se vendent actuellement les produits allemands traditionnels(81).
C.3.1.4. Modifications imminentes des capacités
(206) D'après les prévisions, le marché allemand devrait se développer rapidement. G. P. Wild prend l'hypothèse d'un minimum de 8 % par an, tandis que Carnival va jusqu'à envisager des taux de croissance annuels de 25 % ou 39 %(82). La Commission pense que les estimations de Carnival sont très optimistes. D'autres acteurs du marché ont donné des estimations beaucoup plus basses, mais dans l'ensemble, l'attente d'une croissance forte dans l'absolu est incontestée. Dans le droit-fil de leurs attentes relatives à la croissance du marché, certains acteurs du marché prévoient une extension considérable de leur capacité. Au premier plan, on trouve Carnival et POPC qui entendent affecter six navires majoritairement au marché allemand d'ici à 2004, contre deux navires en 2001. Près de la moitié de cette augmentation de capacité a déjà été réalisée en 2002 dans le cadre de l'action de création de marques des parties (voir considérant 222).
(207) En 2001, POPC exploitait deux navires d'une capacité totale de 1686 couchettes inférieures, qui étaient affectés au segment des croisières de type allemand (Arkona - 500 couchettes; AIDAcara - 1186 couchettes). D'ici à 2004, POPC prévoit d'ajouter quatre navires à sa capacité sur le marché allemand, tandis que l'exploitation de l'Arkona a cessé en 2002. Les nouvelles unités seront en partie des navires neufs et en partie des navires provenant de Princess, la marque américaine de POPC. La capacité allemande de POPC se trouverait ainsi portée à un total de 6906 couchettes inférieures. En 2004, la capacité de POPC (Seetours) pour les croisières de type allemand devrait se composer des navires suivants: AIDAcara - 1 186 couchettes; AIDAvita - 1 270 couchettes; AIDAaura - 1 270 couchettes; A'Rosa Blu/ex-Crown Princess - 1 590 couchettes; A'Rosa 2/ex-Regal Princess - 1 590 couchettes.
(208) Le navire de Carnival qui est actuellement affecté exclusivement à la clientèle allemande sous la sous-marque de Costa "La Deutsche Vita", c'est-à-dire le Costa Marina, a une capacité de 763 couchettes inférieures. De plus, [...]*(83).
(209) Un certain nombre de compagnies méditerranéennes "paneuropéennes" qui proposent des croisières et sont désireuses d'attirer des clients de diverses nationalités européennes, procèdent elles aussi à l'augmentation de leur capacité. Festival, MSC et Royal Olympic, toutes trois représentées sur le marché allemand, ont mis de nouveaux navires en service ces dernières années ou vont le faire dans les années qui viennent. La capacité de ces opérateurs augmentera de plus de 40 % entre 2001 et 2004, en même temps que leur flotte sera substantiellement modernisée. Étant donné que chacun de ces opérateurs n'attire qu'une certaine quantité de passagers allemands à bord de ses navires, l'effet de cette augmentation sera dispersé sur un certain nombre de marchés géographiques.
(210) Toutes les marques américaines prévoient d'augmenter leur capacité mondiale entre 2001 et 2004. La majeure partie de cette augmentation sera effectuée par les parties, mais une augmentation substantielle de capacité est également prévue par RCCL et, dans une moindre mesure, par NCL. Actuellement, le taux de fréquentation des navires de type américain par des clients allemands est faible.
(211) En 2001, le groupe de concurrents le plus fort en parts de marché était composé de compagnies maritimes allemandes majoritairement traditionnelles qui ne devraient pas étendre leur capacité d'une manière tant soit peu comparable.
(212) Dans sa communication des griefs, la Commission a présenté une prévision de parts de marché pour 2004 fondée sur l'évolution des capacités qui vient d'être exposée et montrant que la part de marché groupée des parties serait nettement plus élevée qu'en 2001. Une prévision établie par RCCL sur la base du nombre de passagers attendus en 2005 est elle aussi arrivée à une part de marché des parties plus élevée que celle qu'elles détenaient en 2001.
(213) Dans leurs réponses respectives à la communication des griefs, Carnival et POPC ont mis en doute les hypothèses sur lesquelles ces prévisions reposent, notamment en ce qui concerne l'utilisation des capacités, le panachage des nationalités et le degré de certitude des prévisions de capacité.
(214) La Commission convient que ces hypothèses introduisent une incertitude non négligeable dans les projections de parts de marché, car rien ne garantit que l'une ou l'autre de ces hypothèses se vérifiera. En ce qui concerne leur capacité, il n'est pas exclu que les parties et leurs concurrents changent leur fusil d'épaule. De même, le panachage des nationalités à bord des navires peut changer et il est impossible de prévoir avec une certitude suffisante l'utilisation de la capacité par chacun des opérateurs(84). Si la Commission table sur une croissance de la part de marché groupée des parties en raison de l'évolution des capacités décrite aux considérants 206 à 208, en revanche, compte tenu de l'impossibilité de prévoir avec certitude l'effet exact de cette évolution, elle ne juge pas approprié de fonder sa décision sur les prévisions de parts de marché présentées dans la communication des griefs.
C.3.2. Positionnement des marques
C.3.2.1. Codes linguistiques et culturels: allemands/internationaux
(215) La majeure partie du marché allemand des croisières maritimes, soit environ 50 % de ce marché(85), est représentée par des produits proposant des croisières germanophones axées sur les goûts allemands.
(216) Le pourcentage de croisières de "type international" est plus limité. Parmi elles, les croisières de type méditerranéen paneuropéen comme celles que proposent la marque Costa (Carnival) ainsi que Festival ont enregistré des taux de croissance considérables ces dernières années, jusqu'à atteindre globalement une part de marché de 25 %.
(217) Les croisières de type américain n'attirent toujours qu'une minorité de clients allemands (environ 5 %), mais elles ont sans doute un certain potentiel de croissance en raison de l'augmentation du nombre de clients réguliers plus jeunes qui ont une meilleure maîtrise de l'anglais(86). Il faut noter que, dans ce segment, RCI et Celebrity détiennent actuellement la plus forte part de marché
(218) Une particularité du marché allemand par rapport aux marchés français, italien et espagnol réside dans le fait que Cunard, qui propose essentiellement un produit "classique britannique", est relativement bien connue en Allemagne et séduit une certaine catégorie de croisiéristes réguliers allemands.
(219) Ces dernières années, le marché allemand a été principalement caractérisé par l'importance et l'intérêt croissants des offres méditerranéennes paneuropéennes aux yeux des clients allemands.
(220) Costa, la marque de Carnival, est (conjointement avec MSC en termes de ventes, mais avec une présence de marque infiniment plus forte) le leader du segment des croisières paneuropéennes pour la clientèle allemande. Cette position de pointe se reflète dans la croissance prononcée du nombre de passagers entre 1999 et 2001. De même, dans le droit-fil de la forte augmentation de sa capacité durant ces années-là, Festival a enregistré une progression considérable du nombre de ses passagers allemands, mais elle reste tout de même à la troisième place, loin derrière Costa et MSC.
(221) Longtemps, les croisières de type allemand ont été dominées exclusivement par des organisateurs de croisières allemands traditionnels, et surtout par Hapag Lloyd, Peter Deilmann, Phoenix Reisen et Transocean Touristik, mais aussi par Delphin Seereisen, Plantours et, plus récemment, Hansa Touristik. Dans la plupart des cas, il s'agit de petites entreprises qui possèdent ou, souvent, affrètent un ou deux paquebots de taille moyenne. Ainsi, Peter Deilmann exploite deux paquebots plus un voilier pour les croisières aux Galapagos, tandis que Hapag Lloyd, filiale de Preussag/TUI, exploite quatre paquebots et deux voiliers de croisière.
(222) Cette situation a vu l'amorce d'un changement avec l'acquisition de Seetours et AIDA par POPC. La création récente d'une marque allemande de POPC, A'Rosa, et la décision de Costa d'affecter l'un de ses navires exclusivement au marché allemand en 2002 avec la création de la sous-marque "La Deutsche Vita" vont accélérer, dans le segment principal du marché allemand, l'abandon des acteurs traditionnels au profit des marques nationales possédées par les grands opérateurs, actuellement Carnival et POPC.
C.3.2.2. Segments qualitatifs et classification par étoiles
(223) D'autres éléments du positionnement des marques sont apportés par la classification en catégories de luxe, "prestige" (haut et bas)(87) et économique. Ces catégories peuvent être rapprochées des classifications par étoiles du type Berlitz, mais elles ne sont pas identiques à celles-ci.
(224) Dans ce contexte, il faut noter que les offres des parties se situent majoritairement dans le ou les segments prestige (correspondant grosso modo à 4 étoiles et 3+ étoiles) qui sont les segments essentiels de l'offre de croisières et les seuls où un produit peut à la fois générer une marge plus élevée et attirer un large éventail de clients(88).
(225) Plus petit que dans d'autres pays d'Europe, le segment économique du marché allemand se compose d'un côté d'une poignée d'opérateurs allemands et, de l'autre, d'opérateurs méditerranéens comme Louis, ROC, MSC et Festival qui exploitent des navires de catégorie économique 2 et 3 étoiles, mais dont la plupart cherchent aussi à pénétrer dans le ou les segments "prestige". En 2001, le segment économique a constitué environ 20 %(89) du marché allemand total des croisières maritimes en termes de passagers, mais beaucoup moins en termes de valeur. Il est significatif que les opérateurs qui y sont présents cherchent à pénétrer dans le ou les segments "prestige" en passant commande pour de nouveaux bateaux.
(226) En termes de passagers, le marché allemand des croisières maritimes est occupé à 11 % par la catégorie luxe(90) où Hapag Lloyd et Peter Deilmann sont en position de force. À côté d'entreprises internationales comme Silversea et Radisson, Carnival est représentée dans ces segments avec ses offres "internationales" Seabourn, Windstar et Cunard(91).
(227) On peut tabler sur une position future relativement forte des parties dans le ou les segments "prestige", lesquels constituent environ les deux tiers du marché total(92). Alors que la marque A'Rosa se trouve dans le haut du segment prestige, les deux autres marques sont légèrement au-dessous. Mais en dépit des points forts des parties, des opérateurs comme Peter Deilmann, Hapag Lloyd, Phoenix, Transocean et d'autres opérateurs allemands plus petits, peuvent continuer à compter sur leur clientèle régulière traditionnelle tout en cherchant à moderniser leur produit.
(228) En outre, la concurrence dans le ou les segments "prestige" viendrait des opérateurs méditerranéens paneuropéens qui ont modernisé une partie de leur flotte tout en restant présents dans le segment économique, ce qui leur permet de profiter de la tendance de leurs clients réguliers à "passer un cran au-dessus". Ils savent par expérience comment satisfaire les goûts allemands et peuvent organiser des croisières entièrement germanophones.
(229) Enfin, RCCL et de NCL pourraient constituer une offre intéressante dans la catégorie "prestige" avec leurs nouveaux navires, immenses et superbes, qui pourraient séduire une clientèle plus jeune et de mentalité plus internationale.
C.3.2.3. Les croisières classiques par rapport aux croisières festives
(230) Les croisières "classiques" sont proposées essentiellement par les opérateurs allemands traditionnels. Elles se déclinent sur un mode plus recherché, avec des tenues plus habillées, des divertissements plus paisibles parfois teintés d'une note didactique ou culturelle, et un service stylé "à l'ancienne". Si le formalisme recule à mesure que l'on descend dans la gamme, il n'est cependant jamais complètement abandonné et une tenue correcte est généralement exigée au restaurant. Les divertissements s'adressent surtout à la clientèle d'un certain âge que ce produit séduit tout particulièrement.
(231) Les croisières "fête et animation" ont été introduites sur le marché allemand durant la deuxième moitié des années 90 par AIDA avec son concept de bateau-club. L'équivalent le plus proche de ce mode de croisière est représenté par l'offre dite "contemporaine" des paquebots américains, illustrée par CCL avec des variantes proposées par NCL, RCI et Princess. La croisière "fête et animation" constitue une formule plus décontractée et bon enfant, avec un programme des réjouissances plus animé. Une diversité de restaurants, de bars et de boîtes de nuit répondent aux goûts d'une diversité de passagers. Plus l'accent est mis sur la fête et le "style club", plus la clientèle est jeune et plus elle compte de passagers dont c'est la première croisière. C'est ce qui explique qu'en Allemagne, AIDA compte un pourcentage très élevé de croisiéristes novices et, pour l'Europe, une moyenne d'âge exceptionnellement basse comparable à celle que l'on trouve à bord des navires américains de type "contemporain" où le client moyen a une quarantaine d'années.
(232) Le positionnement des marques A'Rosa et Costa/La Deutsche Vita par rapport à ces catégories opposées d'offre "traditionnelle" contre "contemporaine" est significatif. Après avoir abandonné sa marque Arkona qui était présente dans le segment classique jusqu'en 2002(93), POPC a décidé de lancer un nouvelle marque destinée à combler le fossé entre ces deux extrêmes. A'Rosa tente de séduire le client plus difficile et expérimenté, mais "jeune d'esprit" (45 à 65 ans), en lui proposant une formule à la fois décontractée et raffinée, contenant des éléments festifs qui ne sont pas exagérément trépidants. Sa cible se recoupe dans une certaine mesure avec les croisiéristes classiques traditionnels et les croisiéristes contemporains qui, en eux-mêmes, ne constituent pas une catégorie de clientèle homogène, mais représentent toute une série de profils de clients.
(233) D'un autre côté, la marque Costa - La Deutsche Vita s'adresse elle aussi à ces deux clientèles, encore que sous un angle différent, à savoir l'angle familial avec une note italo-méditerranéenne. La palette des tranches d'âge auxquelles s'adresse cette marque est sans doute très large et variable selon la saison, les familles avec enfants étant plus nombreuses en été. L'approche de la marque Costa - La Deutsche Vita est résolument décontractée, "contemporaine" et modérément axée sur les activités (sauna, gym, jogging). Comblant ainsi, à l'instar d'A'Rosa, le fossé entre la croisière classique et la croisière contemporaine, La Deutsche Vita a une clientèle qui, sur un certain nombre d'aspects, chevauche probablement celle de la marque A'Rosa.
(234) Les clients constateront qu'un ensemble d'itinéraires similaires sont proposés par La Deutsche Vita et A'Rosa. Ainsi, en 2002, les deux marques proposent une série de circuits comparables à des prix comparables, au départ de l'Allemagne du Nord (Kiel, Warnemünde, Hambourg), alternant entre la Norvège et la Baltique. Toutefois, des clients de ces croisières peuvent aussi trouver intéressant d'opter pour les opérateurs méditerranéens dont certains ports d'embarquement se trouvent dans le nord de l'Italie, une région très facile d'accès pour de nombreux clients allemands. Les entreprises méditerranéennes commencent aussi à se lancer dans les croisières en Norvège et en mer Baltique (également avec des ports d'embarquement faciles d'accès pour les clients potentiels allemands).
C.3.3. Appréciation de position dominante - Allemagne
C.3.3.1. Position de marché des parties
(235) Les parts de marché que les parties détiennent actuellement ensemble sont nettement inférieures à un niveau qui pourrait être préoccupant sur un marché en expansion, mais on peut tabler sur une progression de ces parts (voir considérants 206 à 208).
C.3.3.2. Les concurrents
(236) Deux des trois groupes de concurrents des parties procèdent eux aussi à une extension de leur capacité entre 2001 et 2004. Tous deux sont susceptibles de faire peser de réelles pressions concurrentielles sur les parties. On peut attendre des marques de concurrents de type américain comme NCL et RCI qu'elles présentent, à l'intention de certains des clients d'AIDA, une formule capable de concurrencer celle-ci. Une autre marque de type américain comme Celebrity pourrait envahir le pré carré d'A'Rosa et les opérateurs méditerranéens peuvent monter à l'assaut de la position de La Deutsche Vita.
(237) De plus, on peut s'attendre à ce que les opérateurs allemands bien implantés, même s'ils n'augmentent pas leur capacité, vont limiter le pouvoir de marché des parties en ce qui concerne la préférence des clients pour les navires allemands et donc se montrer inflexibles à l'égard du passage à des marques internationales. De fait, les parties doivent chercher à élargir leur clientèle au détriment de ces opérateurs.
C.3.3.3. Menace d'offre excédentaire de capacité et nécessité de remplir les navires
(238) L'économie élémentaire du secteur de la croisière incite très fortement à atteindre une utilisation de la capacité de 100 % ou presque. Cela s'explique par le fait que - une fois la capacité établie - les coûts marginaux sont très faibles. La quasi-totalité des coûts sont fixes et seuls des postes comme la nourriture représentent des coûts variables. Ces coûts sont largement compensés par le chiffre d'affaires généré à bord par chaque passager. Dès lors, le seul frein aux remises de dernière minute est le mécontentement que des prix réduits accordés aux clients réservant tardivement peuvent susciter chez ceux qui ont réservé plus tôt et payé le prix fort, ainsi que la dispersion des rendements futurs qui en résulte. Dans le droit-fil de ces considérations économiques, les parties s'attachent ouvertement à fonctionner avec des taux d'utilisation de la capacité de 100 %(94).
(239) En général, pour atteindre l'objectif d'une utilisation très élevée de la capacité, les entreprises gèrent soigneusement leurs courbes de ventes et cherchent à influer sur ces courbes par une tarification tactique et d'autres promotions.
(240) La projection des parts de marché effectuée par la Commission montre que si les augmentations de capacité prévues ont lieu, il faudrait que le marché connaisse une croissance fulgurante pour absorber la nouvelle capacité qui serait alors mise sur le marché allemand (environ 20 %), même avec des taux d'utilisation certainement inférieurs à ceux visés par les parties. La croissance du marché allemand en nombre de passagers a été de 2 % (en 1995), 17 % (en 1996), 11 % (en 1997), 8 % (en 1998), 8 % (en 1999), 15 % (en 2000) et 3 % (en 2001)(95). On peut noter que, même si le marché allemand d'avant le 11 septembre 2001 manifestait des signes d'accélération de l'expansion, une croissance de 20 % sur trois années d'affilée semble très optimiste. Et si la croissance n'est pas à la hauteur des attentes, il est difficile de prévoir quels autres scénarios pourraient voir le jour.
C.3.3.4. Obstacles à l'entrée et à l'expansion
Historique de l'entrée - Entrée potentielle
(241) En ce qui concerne les obstacles à l'entrée, des considérations analogues à celles qui ont été abordées plus haut à propos du Royaume-Uni (considérants 167 à 192) s'appliquent ici. En Allemagne, le segment des croisières économiques au cours des cinq à dix dernières années a été principalement caractérisé par l'entrée, puis l'expansion d'opérateurs méditerranéens (comme MSC et Festival) vendant une partie de leurs croisières à la clientèle allemande. Quelques entreprises allemandes de plus petite taille, généralement des affréteurs, ont également fait leur entrée (voir considérant 243).
(242) En ce qui concerne le segment "prestige", AIDA y a pris pied dans la seconde moitié des années 90 avec un seul navire. Elle a été rachetée par POPC en 1999/2000, en même temps que Seetours. Un deuxième navire AIDA a été ajouté en 2002 (et un troisième le sera en 2003). Toujours en 2002, Costa (Carnival) a créé une sous-marque allemande spécialisée ("La Deutsche Vita") et POPC-Seetours a lancé la nouvelle marque allemande A'Rosa.
(243) Si les voyagistes allemands n'ont pas manifesté une propension démesurée à pénétrer sur le marché des croisières maritimes, il se peut en revanche que de plus petits opérateurs, affiliés ou non à des voyagistes, continuent à pénétrer sur ce marché, comme ce fut le cas en 2001 avec Hansa Touristik (qui a affrété un navire ancien mais rénové, le "Paloma") et comme ce devrait être le cas en 2003 avec Holiday Kreuzfahrten (exploitant l'actuel "Victoria" de P & O Cruises, rebaptisé "Mona Lisa"). ADAC Reisen, la branche voyages de l'automobile club d'Allemagne, a fait une entrée timide dans le secteur de la croisière, comme affréteur des croisières offertes aux membres du club. La croissance prévisionnelle du marché facilitera cette entrée. Du côté des croisières de luxe, le marché a vu arriver les opérateurs des deux navires de luxe "Sun Bay". S'il est peu probable que cette entrée-là menace directement les marques des parties, il n'est cependant pas exclu que toutes ces entrées modestes limitent un peu plus le pouvoir de marché des parties.
Historique et potentiel d'expansion
(244) Dans le segment "prestige" de type non allemand, les marques de type américain connaissent un succès très modeste en Allemagne, comme l'illustre leur faible part de marché totale (environ 5 %) et le fait que seules deux marques, RCI et Celebrity, détiennent chacune une part supérieure à 1 %(96). La lenteur de leur expansion est évidente quand on sait qu'elles sont présentes sur le marché allemand depuis 1994(97). Toutefois, ces marques devraient avoir les moyens de participer à la croissance de ce marché, la plupart d'entre elles proposant de nouveaux navires "prestige" pour les croisières "contemporaines". Cette participation à la croissance pourrait revêtir la forme d'une augmentation du taux de fréquentation par la clientèle allemande, ce qui serait réalisable avec une action commerciale plus soutenue.
(245) Les compagnies méditerranéennes ont réussi à prendre pied en Allemagne et à y prospérer. Elles sont plus solidement implantées dans les segments des croisières économiques et transportent un pourcentage significatif de croisiéristes allemands. Des changements de panachage des nationalités à bord des navires méditerranéens ont eu lieu dans le passé et pourraient encore avoir lieu en réaction à une hausse des prix consécutive à la concentration. Avec ses nouveaux navires "prestige", Festival s'est bien implantée dans le segment du même nom.
(246) L'opérateur allemand Transocean Tours, qui affrète ses navires, vient de se développer. Après l'introduction d'un navire de 590 couchettes en 1996(98), un second navire (de capacité similaire, précédemment exploité par POPC-Seetours) a été ajouté en 2002. Le schéma d'entrée de Transocean Tours peut être comparé à celui de Fred Olsen au Royaume-Uni. D'autres opérateurs allemands plus petits pourraient suivre cette voie. Du reste, la croissance attendue du marché allemand facilitera l'expansion.
Notoriété des marques
(247) Le mode traditionnel, toujours employé par les leaders du marché Hapag Lloyd et Peter Deilmann, est la marque à navire unique qui peut ensuite être associée à une marque phare de l'opérateur. Cette situation peut évoluer avec les activités des parties assurant la promotion des marques (prévues pour être) à navires multiples A'Rosa, AIDA et La Deutsche Vita. En 2002, avec le démarrage de la sous-marque de Costa, La Deutsche Vita, les frais de commercialisation engagés par Costa en Allemagne ont [...]* par rapport à l'année précédente(99). Les frais de commercialisation engagés par POPC pour A'Rosa et Aida sont tout aussi considérables. Il se peut que la marque Astor/Astoria à deux navires de Transocean soit le premier signe d'un début de restructuration de l'offre allemande. La commercialisation conjointe par Hapag Lloyd de ses deux navires d'exploration et de son voilier de croisière Sea Cloud est un autre signe de cette évolution.
Commercialisation et distribution
(248) La structure du marché allemand des agences de voyages est caractérisée par l'absence de points de vente spécialisés dans la croisière et par le très grand nombre d'agences de voyages, la plupart regroupées au sein de coopérations(100). Cette distribution est généralement considérée comme facile d'accès. Rien ne permet de penser que cet accès sera plus susceptible de constituer un obstacle à l'entrée après la concentration.
(249) Si une grande partie du budget marketing est consacrée à la publicité et à la création de l'identification des marques, une somme substantielle est cependant affectée à d'autres actions commerciales, comme la formation et la familiarisation des professionnels. La commercialisation de Carnival en Allemagne sera renforcée par l'accès au réseau de vente et de commercialisation d'AIDA-Seetours qui est plus solidement implanté. Mais cela n'empêchera pas les concurrents d'intensifier eux aussi leurs actions commerciales.
(250) Certaines difficultés de commercialisation en Allemagne peuvent être surmontées en ayant recours à un agent général qui peut se charger des produits de plusieurs opérateurs et qui, en sa qualité de voyagiste spécialisé, peut les mettre dans un catalogue commun. Plusieurs grands voyagistes se chargent de formater les produits de croisière et de réaliser les catalogues (FTI-MyTravel par Air Maritime; Thomas Cook par Neckermann et Terramar; TUI formate sous sa propre marque). La commercialisation par ce canal constitue une bonne solution de remplacement à la commercialisation par l'opérateur.
C.3.3.5. Conclusion sur les pressions concurrentielles
(251) La Commission conclut que les pressions concurrentielles qui pèsent sur les parties, et notamment la concurrence des opérateurs en expansion (par l'ajout de navires et la modification éventuelle des panachages de nationalités à bord de leurs navires commercialisés en multinational), ainsi que le besoin des parties de développer leurs ventes pour remplir leurs navires sont suffisants pour l'emporter sur le risque que présente l'augmentation de capacité prévue par les parties, laquelle devrait déboucher sur des parts de marché plus élevées, même si cette projection est entourée d'un certain nombre d'incertitudes. Par ailleurs, les obstacles à l'entrée ne sont pas considérés comme élevés et n'atteindront pas un niveau insurmontable par les nouveaux arrivants.
C.3.4. Conclusion relative à Allemagne
(252) En 2001, la part de marché combinée des parties était de [20 à 30 %]* en JPC. Des augmentations considérables de capacité sont prévues d'ici à 2004 pour les marques des deux parties affectées au marché allemand.
(253) La Commission constate que les concurrents peuvent eux aussi développer leurs activités. En particulier, les opérateurs méditerranéens et américains sont en mesure de modifier le panachage des nationalités à bord de leurs navires commercialisés en multinational. Ils ont accès à une capacité suffisante et augmentent actuellement leur capacité. Les opérateurs méditerranéens, notamment, ont pénétré avec succès sur le marché allemand ces dernières années et ont modernisé leur offre, comme dans le cas de Festival. En outre, quelques entreprises allemandes plus petites, généralement des affréteurs, sont entrées sur le marché.
(254) La Commission constate que l'entrée et l'expansion sur le marché allemand ne présentent pas de difficultés. La concentration envisagée ne créera pas d'obstacles substantiels à l'entrée. On peut donc s'attendre à ce que de nouveaux arrivants viennent animer les conditions de concurrence sur le marché allemand de la croisière maritime.
(255) La forte croissance prévisionnelle du marché constitue un élément qui soutiendra à la fois l'expansion des concurrents existants et les arrivées nouvelles. Une autre pression efficace sur la capacité des parties d'augmenter les prix d'ici à 2004 est l'augmentation de capacité sur laquelle elles se sont partiellement engagées.
(256) En conséquence, la concentration envisagée n'entraînera pas la création ou le renforcement d'une position dominante sur le marché allemand de la croisière maritime.
C.4. Marchés méditerranéens: Italie, France, Espagne
C.4.1. Configuration des marchés en Italie, France et Espagne: aspects généraux et position des parties
(257) Le secteur de la croisière en Espagne, en Italie et en France, c'est-à-dire les marchés dits méditerranéens ou méridionaux, se trouve à un stade embryonnaire, comme le montrent les taux de pénétration très faibles de 0,17 % (Espagne), 0,38 % (Italie) et 0,45 % (France)(101). Il s'agit donc de marchés qui ne sont pas vraiment arrivés à maturité (par rapport au marché américain et même au marché britannique) et qui présentent un potentiel de croissance particulièrement important et donc un intérêt indéniable pour l'entrée et/ou l'expansion. Bien qu'ils constituent des marchés nationaux distincts, ils présentent un certain nombre de caractéristiques communes qui permettent de les traiter globalement.
(258) La langue et les préférences nationales sont des aspects importants dans la commercialisation de croisières. Ainsi, les croisières anglophones sont nettement désavantagées par rapport aux croisières hispanophones, italophones et francophones. Une partie importante des croisières proposées peut donc être considérée comme des produits à vocation paneuropéenne/méditerranéenne qui tiennent compte des différences culturelles certes minimes, mais qui existent tout de même, entre les nationalités du Sud. Cette vocation explique la présence substantielle d'opérateurs comme Festival, MSC et, dans une moindre mesure, Royal Olympic Cruises ("ROC") sur tous ces marchés. Elle explique aussi la notoriété et la remarquable position de marché de Costa, la marque de Carnival, qui est de loin l'acteur le plus puissant dans ces trois pays, et notamment en Italie et en Espagne.
(259) Les principaux acteurs opérant actuellement sur les trois marchés concernés sont les suivants: i) Italie: Carnival (Costa et CCL), MSC, Festival, Royal Caribbean (RCI et Celebrity) et ROC; ii) France: Carnival (Costa et Cunard), Royal Caribbean (Celebrity et RCI), Festival, Transtours, le voyagiste Nouvelles-Frontières, ROC et MSC; iii) Espagne: Carnival (par Costa et CCL), Royal Caribbean (RCI et Celebrity), le voyagiste Pullmantour, Festival (en direct et par le voyagiste Spanish Cruise Lines, une entreprise commune), MSC et ROC.
(260) Le tableau 10 donne la configuration des marchés méditerranéens en termes de position (parts de marché) des grands acteurs qui y opèrent.
Tableau 10 - Parts des marchés méditerranéens
<EMPLACEMENT TABLEAU>
Source:
Informations et chiffres communiqués au cours de l'enquête de la Commission par la très grande majorité des acteurs du marché, sur la base de leurs ventes respectives en 2001.
(261) Dans ce contexte (sur une base "toutes croisières confondues"), l'opération envisagée se traduit techniquement par des marchés affectés en Espagne, en Italie et en France. La position de Carnival dans ces trois pays est déjà significative, indépendamment de l'opération envisagée, notamment en Italie et en Espagne. Elle détient actuellement une part de [55 à 65 %]* du marché italien, [25 à 35 %]* du marché français et [25 à 35 %]* du marché espagnol (pour 2001 par JPC)(102). Quant à l'augmentation des parts de marché imputable à POPC, à savoir moins de 1 % sur les marchés italien, espagnol et français (pour 2001, enquête la Commission), elle est si limitée qu'on peut en fait la considérer comme négligeable.
C.4.2. Concurrence potentielle en Italie, en France et en Espagne
(262) Au cours de l'enquête préliminaire de la Commission, diverses entreprises ont affirmé que, indépendamment du chevauchement horizontal insignifiant mentionné plus haut, l'opération envisagée pourrait diminuer la concurrence potentielle sur les marchés espagnol, italien et français, toutes croisières confondues.
(263) Dans ce contexte, l'"entreprise commune méditerranéenne" (ci-après: "l'entreprise commune") créée par POPC et RCCL par une opération parallèle dans le cadre plus large de la concentration POPC/Royal Caribbean, a été mentionnée. Cette entreprise commune serait le vecteur d'une entrée en force sur les marchés méridionaux. La dissolution ou tout autre forme de changement du contrôle de l'entreprise commune déclencherait un mécanisme d'"option de vente" imposant une énorme pénalité économique à la partie qui se retire, sauf si certains critères d'exploitation ne sont pas satisfaits à une certaine date. Au cours de l'examen préliminaire de la Commission, Carnival a déclaré qu'elle considérait la dissolution de cette entreprise commune comme une condition préalable de son offre et elle pense que la direction de POPC a la faculté de dissoudre l'entreprise commune sans que cela ne coûte trop cher. Le fait que le UK Takeover Panel (l'autorité britannique de surveillance des fusions) ait accordé à Carnival un calendrier tout à fait exceptionnel pour assurer que son opération n'aura pas besoin d'être arrêtée avant janvier 2003 (lorsque l'entreprise commune pourra être dissoute sans ces pénalités) doit être vu comme un indice supplémentaire que les autorités boursières considèrent elles aussi la dissolution de l'entreprise comme une possibilité, et confirme que l'entreprise commune est en fait une "pilule empoisonnée" destinée à faire barrage à une autre offre. Du reste, POPC a déclaré que "l'entreprise commune méditerranéenne a essentiellement été créée et structurée pour donner à RCCL la protection qu'elle exigeait pour l'opération et à laquelle elle avait subordonné la conclusion du contrat de concentration avec POPC"(103).
(264) Des tiers se sont montrés préoccupés par le fait que la possibilité d'entrée de POPC était l'une des rares restrictions crédibles à la position actuelle et future de Carnival, mais qu'elle serait supprimée au moment où Carnival envisagera d'augmenter sa capacité spécialisée, renforçant ainsi sa position. Ces tiers considèrent que Carnival occupe une position dominante.
(265) Une étude de marché plus approfondie a été entreprise afin d'obtenir des preuves concluantes des indices que la Commission avait initialement recensés comme ayant une éventuelle incidence négative en termes d'élimination de la concurrence actuelle et potentielle. En ce qui concerne l'expansion dans un proche avenir du segment anglophone des marchés méridionaux, les résultats de la deuxième étude confirment les indications initiales relatives à l'importance de facteurs comme la langue, la culture et les préférences nationales pour la commercialisation de croisières maritimes en Italie, en Espagne et en France. En effet, comme on l'a vu plus haut, la plupart des clients se sentent attirés par des produits méditerranéens/paneuropéens tenant compte des différences nationales. En conséquence, les acteurs les mieux placés sur les marchés en cause sont ceux qui adoptent une formule équilibrée en termes de choix de nourriture, de divertissements, d'horaires, de langues de l'équipage (venant de pays divers et variés) et de langues parlées à bord. Ces considérations ont mené à la conclusion que l'expansion du secteur de la croisière maritime sur les marchés méditerranéens se situera essentiellement dans le segment national paneuropéen.
(266) À propos de l'existence de solutions de rechange possibles pour Costa, l'étude approfondie remet en question l'idée que POPC serait le concurrent potentiel le plus plausible pour les marchés méditerranéens et confirme que la concurrence des acteurs bien implantés qui opèrent déjà en Italie, en Espagne et en France est plus pertinente pour la situation de la concurrence que l'arrivée hypothétique de POPC.
(267) Les critiques formulées durant l'examen préliminaire reposaient sur l'hypothèse que POPC est le concurrent potentiel le plus plausible pour Costa. À ce propos, il faut noter que:
i) l'entreprise commune constituée entre RCCL et POPC ne peut être interprétée comme un véritable signal des intentions de POPC de pénétrer sur les marchés méditerranéens;
ii) en outre, la tentative avortée de POPC d'acquérir Festival il y a quelque temps ne fait pas vraiment de POPC un arrivant potentiel viable. D'autres organisateurs de croisières, des investisseurs et des entreprises de tourisme, tels les voyagistes, seraient capables de le faire;
iii) quant à la soi-disant compétence de POPC pour créer un produit s'adressant aux divers goûts et préférences méditerranéens, il faut souligner que cette compétence est inexistante, puisque les croisières commercialisées par cet opérateur en Europe ne sont pas des croisières de type méditerranéen/paneuropéen, mais essentiellement des produits de type national visant à répondre aux desiderata des citoyens des pays d'Europe du Nord, sans dimension pluriculturelle méditerranéenne. En outre, l'expérience allemande de POPC n'est pas le fruit de sa propre action, mais de l'acquisition de Seetours en Allemagne.
(268) Toutes ces considérations autorisent à remettre en question la crédibilité de l'idée selon laquelle POPC serait le "meilleur concurrent potentiel". [Déclaration relative aux intentions de POPC concernant son entrée]*.
(269) En ce qui concerne la faculté d'autres acteurs de pénétrer sur ces marchés ou de s'y développer, c'est la présence d'opérateurs déjà implantés dans le domaine concerné, comme Festival(104), MSC, ROC (dans une moindre mesure) et d'acteurs nationaux qui est pertinente pour la situation du marché plus que l'arrivée potentielle de POPC. Ces opérateurs ont une bonne notoriété et ont augmenté leur capacité au cours des dix dernières années. Ils entreprennent d'importantes actions de création de marques et de commercialisation et, comme on l'a vu plus haut, ils possèdent la compétence nécessaire pour satisfaire les préférences de la clientèle italienne, française et espagnole en proposant un produit méditerranéen répondant à leurs attentes.
(270) La poursuite de l'expansion de RCCL (qui est présente en Italie, en Espagne et en France avec des parts de marché respectives de [0 à 5 %]*, [5 à 10 %]* et [0 à 5 %]* en 2001) est plus probable, avec ou sans POPC. La preuve en est la place de numéro deux mondial de RCCL et le fait qu'elle dispose manifestement des moyens nécessaires pour proposer le type de produit que demandent les marchés concernés. L'expérience de RCCL avec le Splendour of the Seas dénote l'intérêt que cet opérateur porte aux marchés méridionaux.
C.4.3. Conclusion relative aux marchés méditerranéens
(271) En conséquence, la Commission conclut que la présente opération ne débouchera pas sur la création ou le renforcement d'une position dominante sur les marchés italien, français et espagnol de la croisière maritime.
C.5. Construction navale
(272) Les résultats de l'examen de la Commission ne corroborent pas suffisamment les préoccupations exprimées par des tiers quant à l'effet produit par la puissance d'achat que les entités qui fusionnent exerceront vis-à-vis des entreprises de construction navale(105).
(273) À cet égard, il convient de noter que, comme l'a révélé l'enquête de la Commission, la construction de grands paquebots est une activité concentrée où les acteurs sont en nombre limité, le savoir-faire est spécifique, les compétences de différentes industries jouent un rôle important et l'existence d'un vaste réseau de sous-traitants est indispensable. Ces facteurs constituent une protection contre l'exercice de leur puissance d'achat par les organisateurs de croisières. Alors qu'un certain nombre de chantiers navals, dont l'activité principale est la construction de paquebots, sont capables de construire d'autres types de navires (porte-conteneurs, transbordeurs, sous-marins, navires de guerre, méthaniers barges de haute mer ...)(106), ils n'ont pas pu obtenir un nombre suffisant de commandes pour ces types de navires (selon le cas) en raison des conditions commerciales pratiquées dans ces segments. Par conséquent, il existe une interdépendance entre les organisateurs de croisières et les constructeurs de paquebots.
(274) La concentration peut permettre à la nouvelle entité de négocier des conditions plus avantageuses pour différents types de fournitures, y compris la fourniture de navires. Toutefois, la Commission n'a obtenu aucune preuve démontrant que des organisateurs de croisières concurrents auraient été empêchés d'avoir accès aux chantiers navals ou d'être livrés dans les délais prévus. Cela ne s'est pas produit dans le passé et rien ne prouve que cela se produira à l'avenir. Par conséquent, l'examen n'a pas montré que la concentration risquait de produire des effets d'éviction d'autres acheteurs de paquebots.
(275) Il faut noter que la demande de paquebots dépend en gros de deux facteurs: les tendances de la demande et les niveaux de concurrence sur le marché de la croisière. En ce qui concerne le premier facteur, un potentiel de croissance important a été établi, comme on l'a déjà vu au considérant 16. Cette croissance de la demande induira une demande de tonnage supplémentaire comprenant des navires neufs, mais aussi la rénovation de vieux navires afin d'améliorer les prestations proposées aux clients. En ce qui concerne le second facteur, la présente décision constate que l'opération envisagée ne créera, ni ne renforcera de position dominante sur le marché de la croisière maritime des pays de l'EEE.
VII. Conclusions
(276) En conséquence, la Commission conclut que la concentration envisagée n'aboutira pas à la création ou au renforcement sur un quelconque marché d'une position dominante qui aurait pour conséquence d'entraver de manière significative la concurrence à l'intérieur du Marché commun ou dans une grande partie de celui-ci. Dès lors, l'opération doit être déclarée compatible avec le Marché commun et le fonctionnement de l'accord EEE, en vertu de l'article 8, paragraphe 2, du règlement des concentrations et de l'article 57 de l'accord EEE,
A arrêté la présente décision:
Article premier
L'opération notifiée, par laquelle Carnival acquiert 100 % de POPC, est déclarée compatible avec le Marché commun et l'accord EEE.
Article 2
Le destinataire de la présente décision est: Carnival Corporation Carnival Place
3655 NW 87 Avenue
Miami, Florida 33178 USA.
(1) JO L 395 du 30.12.1989, p. 1. Version rectifiée (JO L 257 du 21.9.1990, p. 13).
(2) JO L 180 du 9.7.1997, p. 1.
(3) JO C 233 du 30.9.2003.
(4) JO C 233 du 30.9.2003.
(5) Le terme "les parties" a été utilisé pour faciliter la rédaction de la décision, mais il ne signifie pas que les parties aient traité conjointement avec la Commission.
(6) Le chiffre d'affaires est calculé conformément à l'article 5, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations et à la communication de la Commission sur le calcul du chiffre d'affaires (JO C 66 du 2.3.1998, p. 25). Lorsque le calcul porte également sur la période antérieure au 1er janvier 1999, les chiffres d'affaires en cause sont calculés sur la base du taux de change moyen de l'écu et convertis en euros sur la base de 1 écu = 1 euro.
(7) Des parties de ce texte ont été omises afin de garantir qu'aucune information confidentielle ne soit communiquée. Ces parties sont indiquées par des points de suspension entre crochets, suivis d'un astérisque.
(8) En ce qui concerne la filiale allemande de POPC, elle porte également sur l'organisation de croisières fluviales.
(9) Les chiffres se réfèrent au nombre de croisiéristes par an par rapport à la population totale (G. P. Wild, Fleet Changes, p. 56).
(10) JO C 204 du 28.7.1993, considérant 19, point A.
(11) [Référence à la déclaration de POPC]*.
(12) La Commission n'a toutefois pas été en mesure de rassembler des données lui permettant de réaliser des tests quantitatifs sur les limites du marché en cause. Lorsque de telles données sont disponibles, il est possible de réaliser des tests empiriques, tels que le test de l'augmentation légère, mais significative et permanente, des prix, afin de tenter de déterminer comment les clients réagiraient à une modification des prix relatifs des produits en cause.
(13) Conformément à un postulat commun à l'ensemble du secteur, le terme "croisière" s'appliquera uniquement à des voyages maritimes et fluviaux de plusieurs nuitées, accomplis à des fins de loisirs.
(14) Voir G. P. Wild (International) Limited, Maritime Tourism Competing in a World Market, septembre 2000, p. 71.
(15) [Référence à la déclaration de POPC]*.
(16) [Référence à la déclaration de POPC]*.
(17) IRN Research, Investigation of Cruises in the UK Holiday Market, avril 2002.
(18) Mintel Consultancy, A report on the UK Cruise Sector, avril 2002.
(19) Étant donné la faible taille des échantillons, IRN a ensuite confirmé que la valeur "réelle" de cette estimation pouvait se situer entre 50 et 80 %.
(20) Rapport sur une seconde enquête commandée par RCCL à Conquest Research, remis le 8 juillet 2002.
(21) Les enquêteurs ont réalisé plus de 1000 entretiens et affirment que l'échantillon était très représentatif.
(22) Ce chiffre concerne plus particulièrement la Nationwide Tracking Survey entreprise pour Holland America Ligne, juin 2000.
(23) The Mintel Group: All Inclusive Holidays, Leisure Intelligence, août 2001, p. 8.
(24) Il s'agit de catégories correspondant à la classification socio-économique utilisée dans les études de marché au Royaume-Uni, la plupart du temps dans les analyses sur les habitudes en matière de dépenses et les attitudes des consommateurs. Ces catégories sont les suivantes: A - Professions libérales (non manuelles); B - Cadres moyens (non manuels); C1 - Tous les autres travailleurs non manuels; C2 - Tous les travailleurs manuels qualifiés; D - Tous les travailleurs manuels semi-qualifiés et non qualifiés, et E - Chômeurs/Sans emploi.
(25) Cruise Information Service, Passenger Shipping Association, Annual Cruise Review 2000 (Royaume-Uni et Europe), p. 9.
(26) The NOP Holiday Survey, 1999, NOP Research Group Limited.
(27) [Référence à l'étude commandée par POPC]*.
(28) Passenger Shipping Association/Cruise Information Service: Turning the Tide; mai 2002.
(29) NERA Economic Consulting, POPC/RCCL - Analysis of cruise yields and capacity by Destination, 2 avril 2002.
(30) Dans cette étude, on entend par rendement la moyenne (pondérée) des recettes générées par les billets émis par jours/lit sur l'ensemble des croisières POPC allant vers une destination donnée au cours du mois concerné.
(31) NERA Economic Consulting, POPC/RCCL - Analysis of cruise yields and capacity by Destination, 2 avril 2002, p. 12.
(32) Margaret E. Guerin-Calvert et Janusz Ordover, Profits and prices in evaluation of capacity expansion, 27 juin 2002.
(33) Les auteurs ont obtenu de Carnival Cruise Lines des données sur les recettes et les coûts par bateau pour 1995-2001. Deux mesures des profits ont été présentées: le bénéfice brut (différence entre les recettes provenant des croisiéristes et le coût des ventes) et le bénéfice d'exploitation brut, avec également déduction des dépenses d'exploitation.
(34) Document Ordover, section II.
(35) À ce propos, un concurrent a fourni des preuves montrant que la qualité du service (mesuré par le nombre de membres du personnel) diffère considérablement, sur un même bateau, avant et après qu'il a été transformé en un produit "voyagiste". Les effectifs ont été réduits de 18 %.
(36) Ces informations ont également été communiquées à la commission de la concurrence britannique et sont parties intégrantes de son rapport. Elles ne sont toutefois pas accessibles au public.
(37) Réponse du 26 juin 2002, les chiffres relatifs aux compagnies de croisières et voyagistes étant corrélés de façon positive avec un coefficient supérieur à 0,9.
(38) [Référence à la déclaration de POPC]*.
(39) [Référence à la déclaration de POPC]*.
(40) Il est bien sûr possible que deux produits ayant des prix très différents soient en concurrence l'un avec l'autre. Toutefois, compte tenu du fait que les caractéristiques fondamentales des deux types de croisières sont similaires, plus les prix sont proches, plus il est probable qu'il y ait un rapport direct entre ces deux segments sur le plan de la concurrence.
(41) Essentiellement des croisières de 7 et 14 jours, combinées à des options avec 10, 12 et 16 jours.
(42) Croisières Méditerranée/Scandinavie avec croisières dans les Caraïbes.
(43) Cette enquête comprend également des prix cités par POPC.
(44) L'enquête a porté sur trois produits de prestige (4 étoiles) et quatre croisières "voyagistes" proposées par l'ensemble des trois principaux voyagistes britanniques (European Stars de Festival, Costa Victoria, Splendour of the Seas de RCI; Carousel d'Airtours, Topaz de Sunbird Thomson et Island Escape de Island Cruise). Les tarifs sont ceux indiqués par les services de réservation des compagnies de croisières le 13 mars 2002. La Commission note, toutefois, que le plus important organisateur de croisières de prestige au Royaume-Uni, P & O Cruises, ne figure pas dans l'échantillon "prestige", dans la mesure où il ne proposait pas de croisières comparables.
(45) Cet échantillon comprenait une croisière P & O Cruises (sur l'Oriana), une croisière RCI (sur l'Explorer of the Seas) et une croisière Airtours (sur le Sundream).
(46) Avec ajustement pour tenir compte des pourboires, cette différence est de 57 %.
(47) Voir Travel and Tourism Intelligence, "World Cruise Market 2001".
(48) DRV: Der Kreuzfahrtenmarkt Deutschland 2001, p. 13.
(49) Ces chiffres concernent l'Allemagne, où le marché des croisières fluviales est particulièrement développé. Voir Alf Pollak, Gaby Pollak-Lenke, The German Cruise Market, Census 2000, février 2001, p. 18 seq.
(50) Le site internet de cette société précise, à l'intention des touristes allemands: "Bitte bedenken Sie: Es handelt sich nicht um eine Kreuzfahrt" (Attention! Il ne s'agit pas d'une croisière). http://www.hurtigruten.de/html/ frame1.htm.26.
(51) Voir aussi le tableau 10 qui indique un chevauchement de < 1 % des JCP pour l'Espagne en 2001.
(52) Voir Passenger Shipping Association (PSA): Annual Cruise Market Digest UK (Europe) 2000, p. 32; G. P. Wild (International) Limited: Maritime Tourism Competing in a World Market, septembre 2000, p. 26; et estimations fournies par Carnival, annexe 7.2.3 du formulaire CO.
(53) G. P. Wild (International) Limited: Maritime Tourism Competing in a World Market, septembre 2000, p. 27.
(54) Il ne faut pas confondre la désignation du type avec l'itinéraire, ce dernier pouvant aussi se situer aux Antilles ou en Europe du Nord.
(55) Douglas Ward: Berlitz - Complete Guide to Cruising & Cruise Ships 2002, Princeton 2002. Le classement du guide repose sur le système bien connu d'une à cinq étoiles complété par l'attribution éventuelle d'un "plus" (+) dénotant que, aux yeux de l'inspecteur, le produit en question se situe un peu au-dessus de sa catégorie. Le guide Berlitz obtient son classement en attribuant un certain nombre de points à cinq aspects de chaque produit de croisière: navire (25 %), hébergement (15 %), cuisine (15 %), service (20 %) et agrément de la croisière (25 %). L'unité de base de ce classement est le navire.
(56) Pour les décisions concernant le secteur de l'hôtellerie, voir affaire n° IV/M.1133 - Bass Plc/Saison Holdings BV; affaire n° IV/M.1596 - Accor/Colony/Blackstone/Vivendi; affaire n° COMP/M.2197 - Hilton/Accor/Forte/Travel Services JV. Décisions concernant des secteurs de produits de grande consommation: affaire n° COMP/M.2544 - Masterfoods/Royal Canin; affaire n° COMP/M.2569 - Interbrew/Beck's, affaire n° IV/M.794 - Coca Cola/Amalgamated Beverages; affaire n° IV/M. 623 - Kimberly-Clark/Scott.
(57) G. P. Wild: Maritime Tourism, p. 73 et 57.
(58) En 2003, Cunard va ajouter à sa flotte le Queen Mary 2, le plus grand paquebot du monde et le plus coûteux aussi. Un autre navire, le [...]* ne sera ajouté qu'en 2005 et n'a pas été pris en compte dans cette projection. Même dans l'hypothèse du retrait simultané du Caronia, la capacité du [...]* augmentera la capacité totale, car elle est nettement supérieure à celle du Caronia.
(59) Pour POPC, les modifications de capacité suivantes ont été envisagées: transferts intersociétés de Princess: Oceana, ex-Sea Princess; transfert à Ocean Village: Arcadia. Pour Princess: ajout de navires neufs: Coral Princess, Star Princess, Diamond Princess, Island Princess, Sapphire Princess, Crown Princess (II); transferts intrasociétés à d'autres marques ou retraits: Ocean Princess, Pacific Princess, Regal Princess, Crown Princess (I), Sea Princess. Pour Swan Hellenic: remplacement du Minerva (I) par le Minerva (II).33.
(60) Le total des chiffres est supérieur à 100 %, car, parmi les personnes interrogées, certaines ont cru que la troisième catégorie chevauchait les deux premières, alors que d'autres ont cru que les trois catégories étaient complémentaires.
(61) [...]*.
(62) Conquest Research: Rapport sur l'enquête téléphonique menée auprès de croisiéristes au Royaume-Uni, 16 mai 2002, p. 5 et suivantes. Ce rapport a été commandé par Royal Caribbean. On a demandé aux gens de dire quelle compagnie ils auraient choisie à la place de celle sur laquelle ils ont voyagé la dernière fois. Un fort pourcentage (49 %) de personnes n'a choisi aucune des autres compagnies proposées, ce qui dénote un degré élevé de fidélité à la compagnie choisie pour la croisière effectuée en dernier. Le tableau exclut les personnes ayant déclaré qu'elles ne choisiraient pas une autre compagnie.
(63) Conquest Research: Rapport sur l'enquête téléphonique menée auprès de croisiéristes au Royaume-Uni, 16 mai 2002, p. 6 et suivantes.
(64) [...]*.
(65) [...]*.
(66) [...]*.
(67) [...]*.
(68) G. P. Wild (International) Limited "Implications of fleet changes for cruise market prospects to 2010", août 2001 et UBS Warburg Global Equity Research "It's high tide you looked at the Cruise Lines", 19 mars 2002.
(69) Un peu moins en hiver, car Airtours n'affrète un de ses navires qu'en été.
(70) Comme dans le cas d'Airtours, l'un des navires n'est pas affrété pendant la saison hivernale.
(71) [Renvoi à la déclaration de POPC]*.
(72) Réponse au questionnaire de la Commission du 25 juin, p. 18. Chiffres tirés des annexes 24.1 [...]*.
(73) Réponse de Carnival au questionnaire de la Commission du 25 juin, p. 15 et 18.
(74) Selon G. P. Wild, les parties représentaient 52 % des commandes de navires neufs à la fin de 2000 (Carnival 32 %, POPC: 20 %), G. P. Wild: Maritime Tourism, p. 42.
(75) [UBS Warburg Global Equity Research "It's high tide you looked at the Cruise Lines", 19 mars 2002]*.
(76) D'après les déclarations, Hurtig Ruten détient une part de 5,1 %. Voir considérants 107 et 108. Conformément à la définition du marché proposée, les parts de Hurtig Ruten ne figurent pas dans le tableau.
(77) DRV, "Der Kreuzfahrtenmarkt Deutschland 2001, Eine Studie von Alf Pollak und Gaby Pollak-Lenke, im Auftrag des Deutschen Reisebüro und Reiseveranstalterverbandes e.V". Les chiffres du DRV intègrent Norwegian Coastal Voyages/Hurtigruten pour une part de 7 %.
(78) Déduction faite de la part estimée de Hurtigruten, qui est exclue de la définition du marché par la Commission, mais figure dans les chiffres du DRV. Dans son estimation concernant 2000, Carnival estime la part de marché (en nombre de passagers) de Norwegian Coastal Voyages/Hurtigruten à 5 %. Ces 5 % ont été déduits du volume du marché donné par le DRV.
(79) Crystal, Radisson Seven Seas, Silver Sea, Sun Bay et Compagnie des Îles de Ponant.
(80) African SafariiClub, Quark, ADAC, Club Valtur, American Classic Voyages.
(81) Cette situation peut s'expliquer à la fois par la politique "zéro rabais" de ces compagnies et par le fait que Hapag Lloyd et Peter Deilmann possèdent un certain nombre de navires de luxe ou de haut de segment "prestige" et donc de valeur plus élevée.
(82) Dans son document "An Assessment of the EC Commission's Article 6(1)(c) decision" du 14 mai 2002, Carnival commente cette prévision de la demande et déclare que le chiffre de 8 % ne fait que refléter une prévision de faible croissance que G. P. Wild qualifie de "très prudente, voire pessimiste". Le document de Carnival ajoute les prévisions de croissance moyenne et forte de G. P. Wild, qui - si on les applique à l'Allemagne (ce que le document de Carnival présente comme une possibilité réaliste) - donnent des chiffres de croissance de la demande allemande de l'ordre de 25 % par an, soit une augmentation totale de cette demande de 2001 à 2004 respectivement de 100 % et 156 %).
(83) [...]*.
(84) Nonobstant les arguments développés au considérant 238.
(85) Voir tableau 9: "Opérateurs allemands" avec [30 à 40 %]* plus Aida et Arkona de POPC avec [10 à 20 %]*.
(86) On pourrait tabler sur une concrétisation plus large de cette croissance avec des destinations américaines comme l'Alaska, Hawaï, la Riviera mexicaine, les Caraïbes, la Barbade et la Nouvelle-Angleterre.
(87) Dans l'enquête du DRV sur le marché allemand de la croisière en 2001, le haut du segment prestige est désigné par le terme "prestige" et le bas de ce segment par standard. C'est pourquoi, dans la présente décision, le terme "prestige" s'entend comme couvrant les catégories DRV "prestige" et "standard". Cette enquête donne les fourchettes de prix/jour suivantes (en marks allemands et, entre parenthèses, en euros): Économique, 150 à 249 marks allemands (77 à 127); Standard, 250 à 349 marks allemands (128-178); Prestige, 350 à 499 marks allemands (179 à 255); Luxe, plus de 500 marks allemands (256). Ibidem, p. 13.
(88) En revanche, les croisières économiques peuvent attirer un grand nombre de croisiéristes novices mais en ne générant que de faibles marges, tandis que les croisières de luxe ont des marges élevées mais ne peuvent attirer qu'une catégorie restreinte de clients.
(89) DRV, Der Kreuzfahrtenmarkt Deutschland 2001, p. 13.
(90) Ibidem, p. 13. La démarcation entre le segment "luxe" et le haut du segment "prestige" est parfois floue.
(91) Mais pour Cunard, uniquement le Queen's Grill et les suites du Queen Elizabeth II.
(92) DRV: 68 % comprenant 23 % du haut du segment "prestige" ("Premium") et 45 % du bas du segment "prestige" ("Standard"). Ibidem, p. 13.
(93) Le navire est désormais affrété par Transocean Tours.
(94) Il n'est pas rare qu'elles fonctionnent même à des taux supérieurs, car les "couchettes supérieures", c'est-à-dire le troisième ou quatrième lit par cabine, ne sont pas prises en compte dans la mesure de l'utilisation de la capacité à 100 %.
(95) Les taux de croissance en JPC sont légèrement inférieurs, car la durée moyenne des croisières diminue lentement.
(96) Étant donné que la part de marché de RCCL en Allemagne reste inférieure à 5 % et que RCCL ne possède pas de marque de type allemand, ni même une marque de type européen, les positions respectives de Carnival et de RCCL en Allemagne ne sont pas comparables.
(97) La Commission ne dispose pas d'informations au-delà de cette date. Voir DRV "Der Kreuzfahrten-Markt Deutschland 1994", une étude réalisée par Alf Pollak à la demande du Deutscher Reisebüroverband, p. 6. CCL, Princess, HAL (parts de marché en 2001 < 1 %) étaient représentées par un agent général.
(98) L'affrètement d'un autre navire a pris fin en 1998.
(99) Réponse de Carnival au questionnaire de la Commission du 25 juin, p. 22.
(100) L'association allemande des voyagistes et agences de voyage compte 4270 adhérents et déclare qu'ils représentent trois quarts du chiffre d'affaires de ce secteur. (DRV, Fakten und Zahlen zum deutschen Reisemarkt, mars 2002.) À eux seuls, six voyagistes représentent plus de 80 % du marché des voyagistes. Un organisateur de croisières déclare ceci: "Le marché allemand des agences de voyage comprend quelque 22000 agences, dont la plupart sont membres de coopérations. Un tiers seulement de ces agences de voyages sont des agences dites libres qui choisissent elles-mêmes leurs produits".
(101) Chiffres de l'année 2000 communiqués par la UK Consumers' Association.
(102) Il y a un certain écart entre ces parts de marché et les estimations de Carnival (voir tableau 6). Cet écart est imputable en partie à l'absence de comparabilité directe des parts de marché en termes de passagers et de JPC, et en partie à des changements intervenus entre 2000 et 2001. Ainsi, la part plus faible de Carnival en Espagne en 2001 peut s'expliquer par la concurrence accrue d'opérateurs nationaux. Dans les deux hypothèses de parts de marché concernant Carnival, l'argument principal concernant la position de POPC reste inchangé.
(103) [Renvoi à la déclaration de POPC]*.
(104) Selon des informations de presse, Festival a mené à bien des négociations pour l'obtention d'un crédit supplémentaire (placement privé de titres et financement par l'émission d'obligations) lui permettant de conforter sa surface financière afin d'élargir son actionnariat et d'agrandir sa flotte. En outre, le président-directeur général de Festival a déclaré que des réservations record durant les premiers mois de cette année permettront de considérer l'année 2002 comme la "meilleure année" que Festival ait jamais connue.
(105) Les chantiers navals suivants construisent de grands paquebots: Chantiers de l'Atlantique (France), Meyer Werft (Allemagne), Fincantieri (Italie), Kvaerner-Masa (Finlande) et Aker MTW Werft (Allemagne). Comme Mariotti (Italie), Lloyd-Werft (Allemagne) ne produit pas de navires complets, mais équipe seulement des coques livrées nues.
(106) Chantiers de l'Atlantique et Fincantieri produisent d'autres types de navires, comme des navires de guerre, des transbordeurs, des méthaniers et des sous-marins. Kvaerner Masa-Yards produit des méthaniers, Meyerwerft des méthaniers et des transbordeurs, et Aker MTW Werft des porte-conteneurs, entre autres.