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Décisions

CCE, 30 avril 2003, n° M.2861

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Siemens/Drägerwerk/JV

CCE n° M.2861

30 avril 2003

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1310-97 (2), et notamment son article 8, paragraphe 2, vu la décision de la Commission d'ouvrir la procédure dans la présente affaire, après consultation du comité consultatif en matière de concentrations entre entreprises (3), considérant ce qui suit:

(1) Le 6 décembre 2002, la Commission a reçu notification, conformément à l'article 4 du règlement (CEE) n° 4064-89 ("règlement sur les concentrations") d'un projet de concentration par lequel les entreprises allemandes Siemens AG ("Siemens") et Drägerwerk AG ("Dräger") envisagent d'acquérir au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations, le contrôle conjoint de Dräger Medical AG & Co KGaA, Allemagne ("l'entreprise commune"), actuellement sous le contrôle exclusif de Dräger, par achat d'actions.

(2) Après examen de la notification, la Commission a constaté, le 21 janvier 2003, que le projet notifié relevait du champ d'application du règlement sur les concentrations et suscitait des doutes sérieux concernant sa compatibilité avec le Marché commun. La Commission a par conséquent engagé la procédure conformément à l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement sur les concentrations.

(3) Après examen approfondi de l'affaire, la Commission maintient sa position selon laquelle le projet de concentration notifié est en soi effectivement susceptible d'entraîner la création d'une position dominante ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun ou une partie substantielle de celui-ci. Toutefois, les engagements pris par les parties permettent de dissiper les réserves émises sous l'angle de la concurrence à l'égard de l'opération de concentration.

(4) La présente décision intervient conformément à l'article 10, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations, qui stipule que les décisions prises en application de l'article 8, paragraphe 2, doivent intervenir dès qu'il apparaît que les doutes sérieux visés à l'article 6, paragraphe 1, point c), sont levés. Ceci vaut en particulier dans les cas où les parties ont présenté des engagements. En l'espèce, au moment où les engagements ont été présentés, la Commission n'avait terminé que partiellement son enquête. Celle-ci avait confirmé les problèmes de concurrence que l'étude du marché avait dans un premier temps recensés sur de nombreux marchés nationaux en ce qui concerne les respirateurs, les appareils d'anesthésie et les moniteurs de surveillance. Dans la totalité des cas, les engagements soumis par les parties éliminent toutefois les doutes sérieux quant à la compatibilité de l'opération de concentration avec le Marché commun, de sorte que plus rien ne s'oppose à une décision de compatibilité sous conditions sur la base de l'article 8, paragraphe 2, et de l'article 10, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations.

I. LES PARTIES

(5) Siemens propose à l'échelle mondiale des produits et des services dans les secteurs suivants: information et communication, automatisation et systèmes de commande, fourniture d'énergie, transports, technologie médicale, éclairagisme, services financiers et immobilier. Dans son domaine d'activités "Solutions médicales", elle offre une large gamme de produits, de services et de solutions globales pour établissements hospitaliers et cabinets médicaux.

(6) Dräger est présente au niveau mondial dans les secteurs de la technique médicale, de la technologie de la sécurité et de la sous-traitance pour l'aéronautique. Au sein du groupe Dräger, l'entreprise commune s'occupe du domaine de la technique médicale. Elle conçoit, produit et commercialise mondialement des solutions globales pour le secteur hospitalier. Son activité principale porte sur les soins intensifs, en particulier les appareils d'anesthésie et les respirateurs, ainsi que leurs accessoires.

II. LE PROJET

(7) Siemens et Dräger souhaitent créer une entreprise commune de plein exercice dans le domaine des soins intensifs. Siemens devrait fusionner son secteur d'activité Electromedical Systems ("systèmes électromédicaux"), essentiellement ses divisions produits "systèmes de maintien en vie" et "surveillance des patients", ainsi que les services d'appui correspondants (marketing, logistique, distribution, après-vente et qualité), avec l'entreprise commune et recevoir en échange 35 % du capital de ladite entreprise constituée en société en commandite par actions.

III. OPÉRATION DE CONCENTRATION

(8) Siemens obtient au sein de l'entreprise commune des droits de vote qui dépassent la protection juridique habituelle des associés minoritaires et, partant, le contrôle conjoint de l'entreprise commune avec Dräger. L'entreprise commune devrait exercer toutes les fonctions que d'autres entreprises indépendantes assument de la même façon sur les marchés en cause. À cette fin, l'entreprise commune disposera notamment d'une direction propre, ainsi que de ressources suffisantes en termes de moyens financiers, d'effectifs et d'actifs. En principe, les produits conçus et produits par l'entreprise commune seront commercialisés par un réseau de distribution et de service après-vente interne. Toutefois, l'entreprise commune devrait aussi pouvoir recourir aux structures de distribution de Siemens et de Dräger. Une coopération entre les sociétés fondatrices de l'entreprise commune devrait permettre de proposer aux clients des solutions intégrées en matière de technique médicale. Autrement dit, outre les produits et les services de l'entreprise commune, les solutions informatiques de Siemens (informatique hospitalière, informatique appliquée au soutien fonctionnel) seront aussi éventuellement proposées. De plus, dans certains cas, l'entreprise commune pourrait agir en tant qu'intermédiaire de Siemens et proposer ainsi des produits médicaux spécifiques, qui dépassent le cadre de sa propre offre de produits.

(9) Le projet constitue une opération de concentration au sens de l'article 3, paragraphe 2, en lien avec le paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations.

IV. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

(10) Les entreprises concernées réalisent un chiffre d'affaires total sur le plan mondial supérieur à 5 milliards d'euros (4) (Siemens: 87 milliards d'euros au cours de l'exercice compris entre le 1er octobre 2000 et le 30 septembre 2001; Dräger: 1,257 milliard d'euros au cours de l'exercice 2001). Siemens et Dräger réalisent toutes deux un chiffre d'affaires communautaire supérieur à 250 millions d'euros (Siemens: [...]*(5) millions d'euros au cours de l'exercice 2000/2001; Dräger: 733 millions d'euros au cours de l'exercice 2001). Aucune des entreprises concernées n'a réalisé plus des deux tiers de son chiffre d'affaires communautaire à l'intérieur d'un seul et même État membre. L'opération de concentration notifiée est donc de dimension communautaire.

V. APPRÉCIATION SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE DU PROJET DANS LA FORME SUR LAQUELLE SE FONDE LA NOTIFICATION

(11) Le projet de concentration concerne le domaine de la technologie médicale, dont les principaux segments de marché sont les systèmes d'imagerie, l'informatique hospitalière et les soins intensifs.

A. LES MARCHÉS DE PRODUITS EN CAUSE

(12) Les parties dénombrent en matière de soins intensifs médicaux les groupes de produits suivants (liste non limitative) (6): consommables, gestion des liquides (pompes à perfusion, etc.), moniteurs de surveillance, appareils d'anesthésie, respirateurs, systèmes de gestion de données (informatique) et cardiologie. Les secteurs des soins à domicile et des premiers soins/transport ne font pas partie des soins médicaux intensifs.

(13) Les activités des parties se chevauchent uniquement en ce qui concerne les soins intensifs des patients hospitalisés, de sorte que les domaines des soins à domicile et des premiers soins/transport peuvent rester hors du cadre de la présente analyse. Les marchés en cause affectés par l'opération de concentration pourraient être constitués des secteurs suivants:

- respirateurs,

- appareils d'anesthésie,

- moniteurs de surveillance,

- accessoires de respirateurs,

- accessoires d'appareils d'anesthésie.

(14) Il ressort de l'étude du marché qu'il n'y a pas lieu de définir des marchés plus étendus que ceux proposés par les parties.

1. RESPIRATEURS

(15) Les respirateurs assistent ou remplacent la fonction respiratoire des patients. Ils se composent principalement des éléments suivants: ventilateur, dispositif de dosage d'oxygène, contrôle de la ventilation et accessoire fonctionnel.

(16) Certains acteurs du marché ont estimé qu'il serait logique d'opérer une distinction supplémentaire en fonction des domaines d'application et/ou de la puissance des respirateurs. Il serait possible de procéder à des regroupements selon la puissance et les domaines d'application et de réunir des appareils de différents fabricants selon leur performance (élevée, moyenne ou faible). En réponse à la demande de renseignements de la Commission du 27 janvier 2003, les parties ont fourni des listes (classées par pays) de modèles de respirateurs qui, à leur yeux, sont en étroite concurrence. Ces listes font apparaître que cette concurrence s'exerce surtout entre certains modèles au niveau de leur performance.

(17) Toutefois, les divers modèles de respirateurs sont des appareils extrêmement différenciés. Ils sont configurés et équipés individuellement en fonction des souhaits des clients, de sorte que selon le domaine d'application et les besoins d'un hôpital en appareils destinés à des groupes de patients donnés, les modèles de respirateurs répartis dans d'autres groupes de produits se chevauchent sensiblement. Cette constatation vaut également lorsqu'on a essayé de délimiter de manière autonome des groupes de produits essentiellement conçus pour les enfants, les nouveau-nés et les prématurés.

(18) À cela il faut ajouter que les parties, ainsi que leurs principaux concurrents, disposent sur chaque marché national d'un vaste portefeuille comprenant divers modèles de respirateurs de puissances différentes, destinés à des domaines d'application différents, de sorte que la Commission conclut, au terme de son appréciation globale des informations fournies par l'étude du marché, qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de procéder à une délimitation supplémentaire du marché de produits. Une différenciation supplémentaire des produits selon divers types d'appareils ne modifierait en rien l'appréciation sous l'angle de la concurrence.

(19) L'enquête de la Commission confirme que, suivant la proposition des parties, les respirateurs pour soins intensifs constituent le marché de produits en cause.

2. APPAREILS D'ANESTHÉSIE

(20) Les appareils d'anesthésie servent à administrer des gaz d'anesthésie aux patients pendant les opérations, à les alimenter en oxygène pendant l'opération, à leur procurer, le cas échéant, une assistance respiratoire, et à les surveiller pendant toute la durée de la narcose.

(21) De même que pour les respirateurs, il est possible d'opérer des distinctions en fonction des différences de puissance des appareils et de les regrouper selon leur performance. L'étude du marché montre toutefois qu'il s'agit de produits très différenciés qui, tout comme les respirateurs, ne sont pas fabriqués en quantité, mais sont configurés en fonction des souhaits personnels des clients. Les clients déterminent en fonction de leurs attentes les exigences auxquelles l'appareil doit satisfaire pour le bien de leurs propres patients. C'est pourquoi une distinction supplémentaire entraînerait, pour les appareils d'anesthésie également, d'importants chevauchements entre les modèles regroupés selon leur performance. Cette constatation vaut également lorsqu'on englobe les produits conçus essentiellement pour les enfants, les nouveau-nés et les prématurés.

(22) Lors de son appréciation des informations fournies par l'étude du marché, la Commission en a conclu que l'ensemble des appareils d'anesthésie constituait un marché de produits en cause.

3. MONITEURS DE SURVEILLANCE

(23) Les moniteurs de surveillance mesurent les fonctions vitales des patients (tension artérielle, fréquence cardiaque, fréquence respiratoire, etc.), qui sont visualisées sur l'écran. Ils sont utilisés dans divers services hospitaliers tels que les blocs opératoires, la cardiologie, les services de soins intensifs, la pédiatrie, etc. L'utilisation d'un appareil d'anesthésie ou d'un respirateur est toujours associée avec celle d'un moniteur de surveillance. L'opération vise les moniteurs de surveillance qui couvrent un large spectre de paramètres.

(24) Les respirateurs et les appareils d'anesthésie (regroupés sous l'appellation d'"appareils de thérapie") peuvent être couplés aux moniteurs de surveillance par l'intermédiaire d'interfaces afin de permettre la circulation des données de l'appareil de thérapie vers le moniteur. Les données provenant de l'appareil de thérapie et du patient peuvent ainsi être visualisées sur le moniteur. Pour que l'appareil de thérapie et le moniteur soient connectés, il faut que le protocole de communication de l'appareil de thérapie soit connu du constructeur de moniteurs et/ou que le protocole de communication du moniteur le soit du fournisseur d'informatique hospitalière (systèmes de gestion de données) ou du constructeur d'autres appareils. Les clients exigent de plus en plus de pouvoir transmettre des données à d'autres appareils et aux systèmes de gestion de données de l'hôpital. Lorsque la compatibilité des systèmes est avérée, les fabricants concernés délivrent un certificat une fois le contrôle réalisé avec succès. Outre cette compatibilité électronique, il faut aussi garantir la compatibilité mécanique entre le moniteur et l'appareil de thérapie. Les clients exigent, pour des questions de responsabilité (stabilité statique/stabilité de la configuration du moniteur, etc.), que la compatibilité mécanique soit contrôlée et également certifiée.

(25) En ce qui concerne les appareils d'anesthésie et les respirateurs, d'un côté, et les moniteurs de surveillance, de l'autre, il s'agit de produits complémentaires. Dans la mesure où une connexion informatique existe entre ces appareils, on peut également parler d'une relation verticale, mais cette distinction ne revêt qu'une importance secondaire pour l'appréciation sous l'angle de la concurrence.

(26) En moyenne, la durée de vie des moniteurs de surveillance est plus courte que celle des appareils de thérapie. Les clients indiquent que, dans le secteur des soins intensifs, ils renouvellent leurs moniteurs tous les huit à dix ans environ, alors que les appareils de thérapie ont une durée de vie moyenne comprise entre dix et quinze ans. Malgré cet écart, les appareils de thérapie et les moniteurs de surveillance sont souvent mis en adjudication et achetés en même temps que les moniteurs de surveillance.

(27) Les parties considèrent comme acquis que les moniteurs de surveillance constituent un marché de produits distinct. Certains acteurs du marché considèrent qu'il est nécessaire de définir des marchés de produits supplémentaires en fonction de la puissance, de la fonction, du domaine d'application et/ou de la technologie sur laquelle se basent les appareils.

(28) Les activités des parties ne se chevauchent pas au niveau de la production des moniteurs de surveillance, Siemens étant la seule à en fabriquer. Dräger a uniquement vendu des moniteurs de surveillance de GE/Marquette dans le cadre d'un contrat de distribution conclu avec General Electrics (GE), qui prévoyait la commercialisation simultanée de ses appareils de thérapie à ses propres clients. [...]* En outre, les moniteurs fabriqués par Dräger sont systématiquement intégrés dans l'appareil de thérapie et forment une partie constitutive des appareils d'anesthésie et des respirateurs. L'entreprise n'exerce pas d'autres activités dans ce domaine. En ce qui concerne l'appréciation de l'opération sous l'angle de la concurrence, seule la relation complémentaire et/ou verticale entre les moniteurs de surveillance et les appareils de thérapie revêt par conséquent de l'importance.

(29) Au moment où les engagements ont été présentés, l'étude menée sur le marché pour définir exactement le marché de produits relatif aux moniteurs de surveillance n'était pas encore achevée (considérant 4). La question de la définition exacte du marché de produits peut toutefois rester ouverte, car l'opération de concentration notifiée soulève déjà des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun si, comme l'ont proposé les parties, on considère que le marché de produits englobe la totalité des moniteurs de surveillance.

4. ACCESSOIRES POUR RESPIRATEURS ET ACCESSOIRES POUR APPAREILS D'ANESTHÉSIE

(30) Les accessoires se composent, d'une part, de pièces indispensables au fonctionnement des appareils de thérapie et, d'autre part, de pièces pouvant être utilisées pour le maniement de l'appareil principal. Il peut s'agir de pièces jetables et de pièces réutilisables.

(31) Les accessoires proposés par les parties sont distribués en tant que sous-produits des appareils de thérapie à proprement parler, bien qu'elles ne les fabriquent pas en grande partie elles-mêmes, mais s'approvisionnent auprès d'autres fournisseurs. La commercialisation des accessoires pour appareils de thérapie par les parties est liée, au niveau fonctionnel, à la vente desdits appareils.

(32) À l'instar d'autres fabricants d'appareils de thérapie également, les parties fournissent les accessoires en tant qu'équipement d'origine d'un appareil de thérapie en état de marche et, le cas échéant, les livrent aussi ultérieurement à la demande des clients. L'étude du marché réalisée par la Commission a montré que les parties n'étaient pas perçues en qualité de fournisseurs autonomes d'accessoires d'appareils fabriqués par des tiers, mais comme des fournisseurs d'accessoires dans le cadre de l'acquisition d'un appareil de thérapie neuf. Les parties considèrent qu'il s'agit en quelque sorte d'un service indissociable de leur activité principale.

(33) En conséquence, une analyse distincte, sous l'angle de la concurrence, des activités respectives des parties sur les marchés des accessoires pour respirateurs et appareils d'anesthésie ne s'impose pas. La position concurrentielle des parties sur les marchés des accessoires est liée à celle qu'elles occupent concernant les appareils de thérapie.

5. RÉSUMÉ DE LA DÉLIMITATION DES MARCHÉS DE PRODUITS

(34) L'étude du marché a confirmé la conception des parties en matière de délimitation des marchés de produits en ce qui concerne les appareils d'anesthésie et les respirateurs. La Commission considère donc qu'il existe deux marchés de produits en cause, le premier regroupant les respirateurs, le second les appareils d'anesthésie. En ce qui concerne les moniteurs de surveillance, la question de la définition exacte du marché peut rester ouverte. En l'espèce, la distribution d'accessoires pour respirateurs, d'un côté, et pour appareils d'anesthésie, de l'autre, est liée à l'activité relative aux appareils principaux et, partant, l'appréciation sous l'angle de la concurrence est tributaire de la position concurrentielle des parties dans ce dernier secteur. De ce fait, il n'est pas nécessaire de trancher la question de la définition du marché des accessoires pour respirateurs et des accessoires pour appareils d'anesthésie.

B. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES EN CAUSE

(35) Les parties estiment que les marchés géographiques des respirateurs, des appareils d'anesthésie et des moniteurs de surveillance couvrent au moins le territoire de l'Espace économique européen (EEE). Or, l'étude du marché réalisée par la Commission a montré qu'il devait être considéré comme acquis que les appareils d'anesthésie et les respirateurs constituent des marchés nationaux. En ce qui concerne le marché des moniteurs de surveillance, la question de sa délimitation géographique peut être laissée ouverte. Il atteint au maximum la dimension de l'Espace économique européen, mais certaines indications laisseraient supposer l'existence de marchés nationaux.

1. APPAREILS DE THÉRAPIE

Parts de marché des fabricants d'appareils de thérapie et présence de ces derniers dans les différents États membres de l'EEE

(36) En ce qui concerne les respirateurs, les parties elles-mêmes indiquent que leur pénétration du marché varie fortement d'un État membre à l'autre. Siemens enregistre ainsi des parts de marché très élevées, par exemple au Portugal ([55-65]* %), en Irlande ([55-65]* %), en Suède ([45-55]* %) et en Italie ([35-45]* %); en revanche, dans d'autres pays voisins, elle détient comparativement des parts de marché peu importantes, comme en France ([5-15]* %), en Allemagne ([5-15]* %), en Autriche ([5-15]* %) et en Grande-Bretagne ([5-15]* %). D'après ses propres informations, les parts de marché de Dräger fluctuent dans les différents États membres entre, d'un côté [65-75]* % en Autriche, [35-45]* % en Belgique, [35-45]* % au Danemark et [35-45]* % en Allemagne et, de l'autre, [5-15]* % en Grèce et entre [15-25]*-[15-25]* % en Irlande, au Portugal et en Norvège. En prenant en considération les parts de marché cumulées des parties dans le secteur des respirateurs, le résultat reste très contrasté, puisque celles-ci atteignent près de [85-95]* % dans certains États membres contre à peine [25-35]* % dans d'autres.

(37) Les parties sont par ailleurs confrontées à divers concurrents, fournisseurs de respirateurs dans les différents États membres. Alors que Tyco/Puritan Benett, Viasys et Hamilton sont largement présents sur l'ensemble du territoire de l'EEE (leur poids en termes de marché variant fortement selon les États membres) tous les autres concurrents tels que par exemple Stephan, Respironics, Taema, Kontron, Siare ou Datex-Ohmeda ne sont actifs que dans un seul ou un nombre restreint de ces pays (7).

(38) Dans le secteur des appareils d'anesthésie, la structure du marché est également très hétérogène. D'après les renseignements fournis par les parties, les parts de marché de Siemens s'échelonnent selon les États membres de [45-55]* % en Suède, [25-35]* % au Portugal jusqu'à [0-5]* % en Grande-Bretagne, [0-5]* % en Espagne et [0-5]* % en Allemagne. La présence de Dräger dans les divers États membres est inégale: elle est comprise entre [55-65]* % en Allemagne, [25-35]* % en Belgique, [25-35]* % en Autriche, et [0-5]* % en Irlande et [5-15]* % en Suède. Même en prenant en compte les parts de marché cumulées des parties, celles-ci se situent au total dans une fourchette comprise entre [5-15]* % et [55-65]* % selon l'État de l'EEE considéré.

(39) Datex-Ohmeda est le seul concurrent à être présent dans la totalité de l'EEE comme fournisseur d'appareils d'anesthésie. Tous les fabricants n'exercent la plupart du temps leur activité que dans un ou deux pays (8).

(40) Le fait que les fabricants de respirateurs et d'appareils d'anesthésie soient présents sur le marché de manière non homogène et que, dans leur majorité, ils n'exercent pas leur activité dans la totalité de l'EEE, s'explique par les structures et les mécanismes de marché analysés ci-dessous qui, dans l'ensemble, donnent à penser que les marchés géographiques en cause sont nationaux.

Réseau de distribution et de service après-vente pour les appareils de thérapie

(41) Les parties affirment que les principaux acteurs du marché disposent certes de leurs propres canaux de distribution dans tous les pays de l'EEE, mais que cela ne contredit pas l'hypothèse d'un marché européen uniforme. Les principaux fournisseurs commercialisent même leurs appareils dans le monde entier.

(42) L'étude du marché effectuée par la Commission a montré que pour garantir une distribution et un service après-vente des appareils de thérapie dans de bonnes conditions, il est absolument primordial que les représentants des fabricants d'appareils de thérapie pour hôpitaux soient disponibles rapidement et puissent fournir une assistance. Les fabricants proposent un service de clientèle et de maintenance fonctionnant en permanence et situé à proximité géographique; en règle générale, ce service est déjà compris dans l'achat de l'appareil. Une relation de confiance particulière s'établit ainsi entre le collaborateur du fabricant des appareils de thérapie chargé de la distribution et du service après-vente et le personnel hospitalier.

(43) La notoriété et la réputation du fabricant d'appareils de thérapie jouent un très grand rôle pour les responsables hospitaliers qui décident des achats de l'établissement et/ou des critères à fixer concernant l'appel d'offres (9). Dans la plupart des États membres, c'est le département commercial de l'administration hospitalière qui prend la décision d'achats, en accord avec les médecins de soins intensifs qui connaissent bien ces appareils. Les exigences, les besoins et les priorités des médecins en matière d'utilisation sont déterminants pour la décision d'achat et en constituent en définitive le fondement essentiel (10). C'est pourquoi les fabricants présentent ces appareils de thérapie lors des salons et des congrès médicaux et cherchent à établir des contacts commerciaux avec les médecins. Dräger déclare qu'il est habituel, dès le stade du développement des appareils de thérapie, d'impliquer les médecins en tant que spécialistes et conseillers (11). Siemens explique que les nouveaux produits sont présentés à des "équipes hospitalières chargées de l'évaluation". Celles-ci sont généralement composées de médecins de soins intensifs, d'infirmières, de techniciens et de directeurs des achats, dont l'influence sur la décision d'acquisition de l'hôpital est décisive (12). [...]*

(44) Les conclusions de l'enquête concordent avec les renseignements fournis par les parties (13), selon lesquels les clients exigent toujours davantage, au niveau des compétences techniques, de ceux qui sont chargés de la distribution et du service après-vente; de même, le passage de solutions mécaniques à des solutions informatiques en ce qui concerne les appareils de thérapie pose d'importantes contraintes, tant aux fabricants qu'aux salariés de l'hôpital, qui ont besoin de suivre des formations complémentaires externes. Les parties confirment dans ce contexte l'augmentation des coûts de distribution des fabricants.

(45) La prise en considération du chiffre d'affaires réalisé par les parties dans le secteur du service après-vente fait apparaître son importance tout à fait considérable par rapport à la vente elle-même des appareils de thérapie. Siemens évalue à [...]* euros son chiffre d'affaires mondial dans le service après-vente concernant les soins intensifs (systèmes électromédicaux) pour 2001, ce qui, en comparaison d'un chiffre d'affaires [...]* euros pour les respirateurs et de [...]* euros pour les appareils d'anesthésie, représente un montant élevé (14). En 2001, Dräger affichait un chiffre d'affaires mondial de [...]* euros dans le secteur du service après-vente, en regard de [...]* euros pour les appareils d'anesthésie et de [...]* euros pour les respirateurs. De même [...]*, qu'une grande partie [...]* des coûts unitaires de production se répartissent entre la recherche et développement, d'une part, et la distribution et le service après-vente, d'autre part.

(46) Enfin, la description par Dräger des structures commerciales de chaque État membre illustre la nécessité d'être présent d'une manière clairement organisée sur tout le territoire pour assurer la distribution et le service après-vente des appareils de thérapie. Il existe dans chaque État membre un réseau de distribution et de service après-vente distinct. Les directeurs, les responsables du service clientèle, les ingénieurs, les techniciens, les vendeurs et les distributeurs sont chargés, à l'intérieur de hiérarchies séparées, d'une zone géographique précise et/ou d'un nombre donné d'hôpitaux à l'intérieur du pays. Le réseau de distribution et de service après-vente de Dräger se différencie selon la taille de l'État membre ou les spécificités nationales et son niveau de segmentation et de spécialisation est plus ou moins grand. Dans la plupart des États membres, les contrats de service après-vente et d'entretien, conclus le plus souvent pour un an lors de l'achat d'un nouvel appareil, représentent ainsi le gros des prestations de service après-vente. Dans d'autres pays en revanche, comme la Suède, les contrats de service après-vente ne sont pas la règle. Le personnel chargé de la distribution et du service après-vente appartient presque toujours à Dräger, sauf dans certains pays comme l'Italie, où des tiers interviennent également dans la distribution (15).

(47) Dans l'ensemble, il ressort de l'enquête de la Commission concernant le rôle du réseau de distribution et de service après-vente que la présence sur le marché d'un État membre passe obligatoirement par la mise en œuvre d'un réseau local où du personnel spécialisé travaille sur place pour le fabricant d'appareils de thérapie; ce réseau sera nécessaire, aussi bien avant la décision d'achat des appareils, qu'après pour assurer l'encadrement, la formation et le service après-vente.

Marchés des appels d'offres, normes en vigueur dans l'EEE et coûts de transport peu élevés

(48) Les parties soutiennent que 75-80 % environ des respirateurs qu'elles commercialisent sont vendus par voie d'adjudication et que la demande s'oriente en fonction de l'offre existant à l'échelle européenne. En outre, le fait que les résultats des appels d'offres soient souvent publiés renforcerait la possibilité pour les clients de comparer les prix. Selon elles, les appareils doivent satisfaire à des normes uniformes à l'échelle de l'EEE, les petites adaptations nécessaires, comme la disponibilité du logiciel d'utilisation dans la langue du pays, n'entraînant pas d'importants efforts d'ajustement. Les frais de transport seraient négligeables pour des appareils comparativement coûteux et les obstacles au commerce entre États membres inexistants.

(49) L'étude du marché confirme qu'au sein de l'EEE, les hôpitaux achètent une grande partie de leurs appareils de thérapie par voie d'appels d'offres. Leur contenu étant déterminé en grande partie par les médecins qui travaillent avec les appareils de thérapie, tel qu'indiqué au considérant 43, les préférences affichées par les médecins lors de l'achat précédent jouent un grand rôle. Lors d'une nouvelle acquisition, les médecins préfèrent, la plupart du temps, acheter des appareils qu'ils connaissent et avec lesquels ils ont déjà travaillé. Ils souhaitent ainsi réduire au minimum l'effort d'adaptation qui découle du fait que des appareils de thérapie différents exigent un maniement différent selon le fournisseur, et présentent donc un plus grand risque d'erreurs de maniement par le personnel hospitalier. Étant donné que les appareils de thérapie examinés en l'espèce interviennent dans des secteurs extrêmement critiques pour la sécurité (où il en va littéralement de la vie ou de la mort), les préférences des utilisateurs jouent un rôle décisif dans le choix de l'appareil et ceux-ci sont très peu disposés à investir dans un appareil qu'ils ne connaissent pas. Les médecins n'accepteront en effet que difficilement un appareil de thérapie qu'ils n'ont pas encore du tout expérimenté et dont ils ne connaissent pas le fabricant, au moins par des produits d'un domaine hospitalier voisin. Il a de même été rapporté à la Commission que les "bonnes" fonctionnalités des appareils de thérapie sont basées sur une sorte de "croyance", voire simplement sur des habitudes bien établies, et qu'elles reflètent des théories médicales en partie différentes.

(50) Dans le cas, toutefois, où un appareil autre que ceux connus jusqu'alors est acheté, sur la base d'une offre avantageuse par exemple, il est de toute façon nécessaire (comme indiqué aux considérants 43 et 44) qu'une formation suffisante soit dispensée et qu'un service après-vente correspondant soit assuré au niveau local par un représentant du fabricant.

(51) Enfin, la publication des résultats des appels d'offres, imposée juridiquement dans certains pays de l'EEE, et mentionnée par les parties, pourrait en principe être de nature à accroître la transparence pour les clients, mais elle n'est de toute évidence pas en mesure d'influencer sensiblement les critères décrits en l'espèce, appliqués par les hôpitaux pour arrêter leurs décisions d'achat. En conséquence, d'après les propres dires des parties, ni Siemens ni Dräger ne collectent ou n'exploitent au niveau de la distribution les données publiées sur les appels d'offres (16). Il est ainsi manifeste, du point de vue du fabricant également, que les résultats des appels d'offres n'influencent guère les clients au moment de leur achat et qu'ils ne jouent donc aucun rôle dans la stratégie de distribution des producteurs d'appareils de thérapie.

(52) L'hypothèse de marchés à délimiter au niveau national n'est en définitive pas remise en question par le fait que les coûts de transport et les normes médicales ou techniques nationales ne constituent pas des obstacles très importants de nature à empêcher la livraison d'appareils de thérapie dans d'autres pays à partir d'un ou de plusieurs sites de production centralisés, comme dans le cas de Siemens et de Dräger. Dräger possède ainsi des sites de fabrication à Lubeck, en Allemagne, à Telford, aux États-Unis d'Amérique, et à Shanghai, en Chine. Siemens produit ses appareils de thérapie à Solna, en Suède, et ses moniteurs de surveillance à Danvers, aux États-Unis. Il n'existe pas non plus d'obstacles notables au commerce entre États membres.

(53) Globalement, il résulte de ce qui précède que les appels d'offres et les décisions d'achats portent en très grande partie sur les appareils dont la philosophie d'utilisation est connue des médecins utilisateurs et qui jouissent, selon ces derniers, d'une réputation et d'une reconnaissance sur le marché.

Écarts de prix entre les différents États membres

(54) Les parties font valoir que le niveau des prix dans la Communauté est relativement uniforme et que des listes de prix harmonisées en euros sont utilisées pour les respirateurs de Dräger et de Siemens dans l'ensemble de l'EEE. Les écarts de prix s'expliqueraient par les spécifications des produits fixées par les clients et par les différences au niveau du volume des commandes. Siemens admet toutefois que les prix appliqués aux clients finals sont déterminés par ses sociétés régionales ou les vendeurs sur place (17).

(55) L'étude du marché menée par la Commission a fait apparaître que les appareils de thérapie seraient effectivement fabriqués en fonction des spécifications et des souhaits individuels des clients et que, par conséquent, les barèmes de prix ne joueraient dans l'ensemble qu'un rôle secondaire.

(56) En revanche, certains concurrents interrogés ont indiqué que, dans la mesure où ils étaient présents dans plusieurs pays, ils pratiquaient des prix différents. Une partie d'entre eux ont signalé qu'avec l'introduction de l'euro, la tendance à l'uniformisation des prix était sensible.

(57) Dans l'ensemble, les hôpitaux interrogés ne connaissent pas les prix pratiqués à l'étranger et achètent leurs appareils par l'intermédiaire de leur réseau de distribution national. Certains hôpitaux néerlandais ont déclaré qu'ils savaient que les prix des appareils de thérapie étaient sensiblement moins élevés en Allemagne qu'aux Pays-Bas. Il est également apparu que, dans l'ensemble, on pouvait acheter à moindres coûts dans les grands États membres. En outre, il a été dit aussi que les hôpitaux étaient tenus d'acheter leurs appareils dans leur pays, par le canal des succursales des fabricants, et non à l'étranger.

(58) Les résultats de l'enquête ont clairement montré que les clients achètent les respirateurs et les appareils d'anesthésie localement ou au moyen d'une succursale implantée dans leur pays. Même les listes de prix uniformes en euros introduites partiellement sur le territoire de l'EEE n'incitent pas les acheteurs à s'approvisionner en dehors de leurs frontières nationales.

Diversité des préférences des clients

(59) Les parties soutiennent que les produits en cause proposés par les principaux acteurs du marché sont comparables, au niveau de leur nature et de leurs caractéristiques, dans l'ensemble de l'EEE tout au moins.

(60) L'étude du marché a en revanche montré que les acheteurs ont leurs préférences, qu'il existe des spécificités nationales en matière d'anesthésie et de respiration artificielle, et que les clients demandent donc des appareils de thérapie adaptés en conséquence.

(61) En principe, la narcose peut se faire soit par un système de réinspiration soit par un système sans réinspiration. Dans le cas du système de réinspiration, l'air expiré est réadministré au patient, sans dioxyde de carbone et enrichi d'oxygène frais. Dans le cas d'un système sans réinspiration, l'air expiré est rejeté à l'extérieur et la poursuite de la narcose nécessite l'administration de gaz frais. La consommation de gaz est alors sensiblement plus élevée par rapport aux systèmes de réinspiration.

(62) D'après les résultats de l'étude du marché, confirmés par les renseignements des parties (18), il subsiste encore des préférences nationales pour l'un ou l'autre système. La France, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas utilisent dans une proportion non négligeable le système sans réinspiration.

(63) En matière de ventilation artificielle également, les différents pays affichent des préférences pour certaines méthodes par rapport à d'autres, mais, ces dernières années, les respirateurs sont de plus en plus adaptables à différentes méthodes de ventilation artificielle.

(64) Ainsi, d'après les renseignements fournis par les parties, les utilisateurs préfèrent en général la "respiration artificielle contrôlée par volume" en Espagne, au Portugal, en Irlande et en Grèce, alors qu'ils optent en revanche pour "la respiration artificielle contrôlée par pression", surtout en Belgique, au Danemark, en Allemagne, en Italie, en Autriche et en Suède. La ventilation contrôlée par volume destinée à assister la respiration spontanée a aussi ses partisans dans différents États membres, avec quelques chevauchements.

(65) Dans l'ensemble, il faut donc en conclure que dans le cas des appareils de thérapie, les fournisseurs présents dans un pays ne peuvent d'emblée distribuer leurs produits avec succès dans un autre État membre, en raison également de leurs caractéristiques techniques et de leur philosophie d'utilisation.

2. MONITEURS DE SURVEILLANCE

(66) Les parties considèrent comme acquis que le marché géographique des moniteurs de surveillance couvre le territoire de l'EEE. Or, pour les moniteurs également, les parts de marché de Siemens varient sensiblement selon les différents pays de l'EEE. Les parties chiffrent ainsi leurs parts de marché à [15-25]* % dans l'ensemble de l'EEE. Dans certains États membres, Siemens détient, d'après ses propres informations, une part de marché allant jusqu'à [35-45]* %.

(67) L'étude du marché a en outre montré que les prix des moniteurs de surveillance différaient selon les États membres, et que le réseau de distribution et de service après-vente était comparable à la structure décrite aux considérants 41 à 47 pour les appareils de thérapie. Cette constatation vaut également pour l'introduction des produits et le rôle que jouent les médecins dans la décision d'achat. D'après les indications fournies par l'étude du marché, il apparaît clairement qu'il faut définir des marchés géographiques de petite taille, c'est-à-dire nationaux.

(68) En l'espèce, la question de la délimitation exacte du marché géographique des moniteurs de surveillance peut être laissée ouverte, étant donné que l'appréciation du point de vue de la concurrence aboutit au même résultat, que le marché soit considéré comme couvrant l'EEE ou constitué de marchés nationaux.

3. RÉSUMÉ DE LA DÉLIMITATION DES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

(69) L'enquête menée sur le marché par la Commission a montré que les marchés géographiques des respirateurs et des appareils d'anesthésie étaient nationaux. Le fait que les parties détiennent dans les différents pays de l'EEE des parts de marché très inégales et qu'elles soient confrontées dans chacun d'eux à plusieurs concurrents sont les principaux arguments à l'appui de cette thèse. La plupart des fabricants d'appareils de thérapie concurrents ne sont présents que dans un ou deux pays de l'EEE. D'après les résultats de l'enquête, la présence, au niveau local, d'un réseau de distribution et de service après-vente revêt une importance capitale pour la réussite commerciale. Dans l'ensemble, les appareils de thérapie sont distribués par voie d'appels d'offres, les préférences des clients jouant à cet égard un rôle considérable. Les médecins spécialistes de soins intensifs qui travaillent avec les appareils de thérapie optent la plupart du temps pour des appareils qu'ils connaissent et dont la philosophie d'utilisation leur est familière. L'apparition croissante de listes de prix uniformes en euros et la publication des résultats des appels d'offres, de même que l'existence de normes au niveau de l'EEE et la modicité des frais de transport, n'ont guère d'influence significative sur le comportement des clients au niveau de la demande. Au contraire, le conservatisme affiché par les clients au niveau de leurs préférences pour tel ou tel appareil est renforcé par les spécificités nationales qui existent encore en ce qui concerne les modes de ventilation préférés pour les respirateurs et le mode d'administration de gaz anesthésiques pour l'anesthésie.

(70) Dans le secteur des moniteurs de surveillance, il n'a pas été nécessaire de trancher la question de la délimitation exacte du marché. Il couvre au maximum le territoire de l'Espace économique européen, certains éléments donnant à penser que, dans ce cas également, il faudrait définir des marchés nationaux.

C. COMPATIBILITÉ DE L'OPÉRATION DE CONCENTRATION AVEC LE MARCHÉ COMMUN

C1. EFFETS HORIZONTAUX

(71) L'opération de concentration entraîne un important cumul de parts de marché sur la plupart des marchés nationaux des respirateurs et sur ceux des appareils d'anesthésie.

(72) Les appareils de soins intensifs concernés par l'opération de concentration sont des produits fortement différenciés. Les clients ont en règle générale une préférence pour un appareil donné et n'envisageraient de se tourner vers le produit d'un autre fabricant qu'en cas de hausse de prix plus ou moins sensible (par rapport à la concurrence). La relative "proximité" des différents produits sur le marché eu égard à leur substituabilité aux yeux des clients constitue par conséquent une caractéristique fondamentale de la concurrence sur les marchés considérés et détermine pour l'essentiel le pouvoir de marché des fournisseurs respectifs. Il en va de même lorsque les hôpitaux couvrent leurs besoins en appareils de soins intensifs par voie d'appels d'offres car, dans ce cas également, les préférences pour un produit donné s'expriment par les spécifications techniques détaillées et restreignent ainsi le nombre d'appareils qui correspondent auxdites préférences des acheteurs et peuvent donc entrer en considération. D'après l'enquête de la Commission, les anesthésistes et/ou les médecins spécialistes de soins intensifs jouent d'une manière générale un rôle clé dans le choix des appareils de thérapie d'un hôpital, en raison de l'importance cruciale de ces derniers en termes de sécurité.

(73) Les limites de capacité ne jouent à l'inverse qu'un rôle secondaire dans les décisions des fournisseurs au niveau du prix et de la fixation du volume à produire.

(74) Les parts de marché constituent un premier point de repère afin de déterminer la position des différents concurrents sur le marché du point de vue des clients.

(75) Siemens/Dräger font valoir qu'il n'existe pas de "données statistiques officielles" pour les marchés en cause. Par conséquent, pour calculer les parts de marché, les parties déclarent se fonder sur des bases de données d'analystes, des rapports de gestion, des renseignements tirés d'Internet ainsi que sur leurs propres recherches et évaluations (19). En ce qui concerne les marchés communautaires, les parties s'appuient sur des études de marché externes de Frost & Sullivan ("F& S") et de T for G. Les parties citent en outre parmi leurs sources trois rapports d'IHS sur divers marchés américains: The World Medical Market Fact File 1997, de MDIS, Respiratory Devices World Markets 1998, de Clinica Reports ainsi qu'une étude de la banque d'affaires américaine Bear Stearns sur Viasys (2/2002).

1. Respirateurs

Parts de marché

(76) D'après les données fournies par les parties dans le formulaire CO, l'opération de concentration aboutirait aux parts de marché suivantes dans le secteur des respirateurs:

Respirateurs: données fournies par les parties dans le formulaire CO

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Siemens/Dräger estiment ainsi leur part de marché cumulée dans l'EEE en 2001 à [45-55]* %, contre [45-55]* % en 2000 et [45-55]* % en 1999, une part importante de ce marché ([15-25]* %) n'étant attribuée à aucun concurrent. Il ressort de ces données que les parts de marché sont parfois nettement plus élevées dans certains États membres, même si elles (contrairement à l'identité des principaux concurrents) varient fortement d'une année sur l'autre dans les petits pays de l'EEE.

(77) Dans le cadre de l'étude approfondie du marché, la Commission leur a demandé de nommer les concurrents qui détiennent ces parts de marché initialement non attribuées ou d'expliquer l'origine de cette valeur résiduelle. Dräger a répondu à cette question comme suit: "La valeur résiduelle apparaît lorsque l'on essaye de représenter les chiffres d'affaires totaux des concurrents dans les différents États membres. L'estimation du volume du marché se révèle en effet bien souvent inférieure (sic) au total des chiffres d'affaires des concurrents". Il s'agirait donc en fait d'une valeur résiduelle non expliquée.

(78) Or, les concurrents énumérés par Siemens, mais auxquels cette entreprise n'a pas attribué de part de marché (Pulmonetic Systems, Bunell, Chirana-Prema, Cardiopulmonary Corp., Sechrist Industries, VersaMed, Takaoka, Tim Göttingen, e-vent, MÜFA AG et Medec), n'ont jamais été cités dans le cadre de l'étude du marché, que ce soit par un client ou par un concurrent, comme des acteurs du marché en cause en l'espèce, le marché des respirateurs. Le tableau suivant présente donc les parts de Marché communiquées par les parties après déduction des parts de marché non attribuées:

Respirateurs: données des parties après ajustement

<EMPLACEMENT TABLEAU>

(79) Parmi les études réalisées par des tiers et citées par les parties, celle de F& S (20) estime à 54 % (2000) la part de marché cumulée de Siemens/Dräger en Europe. Toutefois, les parties font valoir que les chiffres de F& S reposent sur une définition différente du marché qui classe les composants respiratoires des appareils d'anesthésie dans le marché des respirateurs. En effet, F& S classe Datex-Ohmeda (filiale de l'entreprise finlandaise Instrumentarium Oyj) parmi les concurrents importants de ce marché, bien que cette entreprise produise essentiellement des appareils d'anesthésie et très peu de respirateurs.

(80) T for G (21) estime à 70 % la part de marché cumulée des parties au niveau européen pour les respirateurs destinés aux services de soins intensifs. Leur principal concurrent serait Tyco/Puritan Bennett, avec une part de marché de 13 %. T for G présente également des chiffres de part de marché pour les marchés nationaux suivants:

Respirateurs destinés aux services de soins intensifs: T for G

<EMPLACEMENT TABLEAU>

(81) La division Electromedical Systems de Siemens estime, dans ses propres documents internes [...]*

(82) Dans les chiffres de parts de marché qu'elles ont fournis dans le formulaire CO, les parties ont donc estimé leur propre part de marché à un niveau nettement inférieur aux estimations des auteurs des études sur le marché de l'EEE, communiquées à la Commission et considérées comme valables par les parties. [...]*

(83) La Commission a donc procédé à ses propres calculs de parts de marché sur la base des chiffres d'affaires communiqués par les principaux concurrents. Le tableau suivant se fonde sur les chiffres d'affaires indiqués par les entreprises Siemens, Dräger, Tyco, Viasys, Hamilton, Respironics, Taema, Penlon et Stephan. Les parts de marché de Kontron, Newport et Siare n'ont pu être vérifiées au moment où les engagements ont été présentés et elles reposent sur les estimations des parties qui figurent dans le formulaire CO.

Il en résulte les parts de marché suivantes:

Respirateurs: enquête de la Commission((Les données sur les chiffres d'affaires des concurrents recueillies dans le cadre de l'étude du marché constituent des secrets d'affaires des entreprises concernées.))

<EMPLACEMENT TABLEAU>

(84) L'entreprise commune réunirait les deux premiers fournisseurs de respirateurs de l'EEE. Leur part de marché cumulée serait nettement plus élevée que celle de leurs principaux concurrents sur les différents marchés nationaux. Tyco serait ainsi le seul concurrent disposant d'un large portefeuille de produits dans le secteur de la technique médicale, même si l'essentiel de ses activités concernent des produits techniquement moins sophistiqués et à moindre intensité de capital (comme par exemple les consommables et les accessoires). [...]* Cela ressort également du recul de sa part de marché estimé par les parties (EEE, 2001: [5-15]* %, 2000: [15-25]* %, 1999: [15-25]* %). De même, Siemens constate dans le Business Plan 2001 de sa division Electromedical Systems que: [...]* Hamilton, Viasys et Taema sont certes présentes sur plusieurs marchés nationaux, mais leurs parts de marché sont modestes.

(85) Il existe en outre une série de concurrents locaux de moindre importance ("fringe competitors"), qui ne sont cependant présents que dans un seul État membre ou un petit nombre d'entre eux et qui sont quasiment inconnus des clients des autres marchés nationaux. Il s'agit notamment de l'entreprise familiale Stephan (Allemagne), Respironics (Allemagne), Kontron (France), Newport (Grande-Bretagne) et Siare (Italie). Certains de ces concurrents occupent des créneaux du marché avec des appareils qui ne peuvent pas directement se substituer à ceux des parties, comme par exemple Stephan (respirateurs pour nouveau-nés) et Kontron (respiration non artificielle). Dans leurs études internes du marché des respirateurs, les parties ne font pas mention de ces concurrents secondaires.

(86) Si les parts de marché de Siemens/Dräger et celles de leurs concurrents importants reflétaient également leur position relative sur le marché et la substituabilité de leurs produits aux yeux des clients, il ressortirait de ces seules parts de marché une forte présomption de position dominante sur les marchés des respirateurs en Belgique, au Danemark, en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Irlande, en Italie, aux Pays-Bas, en Autriche, au Portugal, en Espagne, en Suède et en Norvège.

(87) L'étude du marché montre, de plus, que les clients considèrent que Dräger et Siemens produisent les substituts les plus proches en ce qui concerne la qualité de leurs produits, leur positionnement et leur notoriété sur le marché des respirateurs, ce qui renforce encore leur pouvoir de marché. L'étude se fonde à cet égard sur les éléments suivants: 1) l'enquête auprès des clients et des concurrents; 2) des documents internes des parties, et 3) les appels d'offres présentés par les parties.

i) Enquête auprès des clients et des concurrents

(88) Dans le cadre de l'étude du marché, la Commission a demandé aux clients et aux concurrents de citer trois substituts ("substituts 1, 2 et 3") aux respirateurs respectifs de Dräger, Siemens et Tyco/Puritan Bennett. Elle a demandé aux premiers de prendre comme base les modèles qu'ils utilisaient alors, tandis qu'elle a imposé aux seconds une liste des principaux appareils des parties (Dräger: Evita XL, Evita 4, Evita 2 dura et Savina; Siemens: Servo 300, Servo 300A, Servo 900c, Servo-i Basic et Servo-i Universal). La majorité des clients sur l'ensemble des marchés nationaux et la quasi-totalité des clients de l'espace germanophone ainsi que du Danemark, de la Suède et du Portugal ont déclaré que les produits Dräger constituaient les meilleurs substituts aux produits Siemens et vice versa. De même, les produits Dräger et Siemens ont été cités comme les meilleurs substituts aux produits Tyco (modèles PB 840 et PB 760). Toutefois, la majorité des clients interrogés n'ont pas répondu à cette dernière question, probablement parce qu'ils ne connaissaient pas les appareils Tyco. Selon les clients qui ont fait l'objet de l'étude du marché, les appareils des parties constituent les substituts les plus proches sur chaque segment du marché.

(89) La Commission a aussi demandé aux clients quelle hausse de prix les amènerait à changer d'appareil. Bon nombre d'entre eux n'ont rien indiqué ou ont expliqué que le prix ne jouait qu'un rôle secondaire (par exemple, par rapport à la qualité et au service après-vente) dans le choix des produits. Ils ont sinon indiqué une fourchette de 10 à 30 %. Un hôpital autrichien a déclaré que seule une hausse de prix de 50 % l'inciterait à changer de fournisseur.

(90) Les réponses des concurrents à la question relative aux substituts n'ont pas permis de dégager une tendance claire. Certains concurrents ont partagé l'avis des clients (Dräger/Siemens comme substituts les plus proches), tandis que d'autres ont considéré que leurs propres produits étaient les meilleurs substituts à ceux des parties. Enfin, d'autres n'ont pas cité leurs propres produits parmi les trois meilleurs substituts.

ii) Documents internes des parties

(91) Les parties analysent toutes deux, dans leurs plans d'entreprise et dans les études préparatoires à l'opération, le positionnement des différents respirateurs présents sur le marché, les leurs et ceux de leurs concurrents. Elles s'accordent pour constater que leurs appareils relèvent du segment prix/performance supérieur, tandis que ceux de leurs concurrents relèvent surtout des segments inférieurs du marché.

(92) Siemens [...]*

(93) Dräger [...]*

iii) Appels d'offres

(94) À la demande de la Commission, Siemens et Dräger ont joint à leur notification la liste des appels d'offres auxquels elles ont participé dans le secteur des respirateurs. Elles indiquent à cet égard qu'elles ne disposent pas actuellement d'un système de rapports recueillant en permanence les informations demandées par la Commission et les stockant, le cas échéant, dans une base de données. Elles prétendent au contraire que leurs forces de vente respectives ont dû effectuer des recherches pour chaque appel d'offres et que les informations fournies pourraient donc être incomplètes et pourraient donner une idée fausse de la situation concurrentielle (selon elles, à leur détriment).

(95) Les listes demandées contiennent, entre autres, des informations sur l'adjudicateur, le nombre de pièces, le volume des commandes, le nom des soumissionnaires, le nom des adjudicataires, ainsi que, si possible, celui des adjudicataires précédents.

(96) Dans le cadre de l'étude approfondie du marché, la Commission a demandé aux parties de lui présenter d'autres appels d'offres afin d'augmenter la part des appels d'offres couverts. Les informations fournies par les parties se sont cependant révélées en grandes parties inutilisables, car aucun concurrent n'était cité. L'analyse suivante repose donc sur les renseignements contenus dans la notification.

(97) Elle se fonde sur les données au niveau de l'EEE. Compte tenu de la taille réduite de l'échantillon et du fait qu'il pourrait ne pas être représentatif, aucune analyse supplémentaire par État membre n'a été réalisée.

(98) Dans la notification, Siemens a présenté [...]* appels d'offres auxquels elle a participé dans le secteur des respirateurs et pour lesquels elle a précisé l'identité des autres soumissionnaires. Dräger a répondu à [...]* de ces appels d'offres. Sur les [...]* appels d'offres auxquels Dräger n'a pas participé, [...]* n'ont fait l'objet d'aucune offre concurrente. Les autres soumissionnaires les plus fréquents ont été Tyco/Puritan Bennett ([...]* participations), Hamilton ([...]*), Taema ([...]*) et Viasys/Bird ([...]*).

(99) Pour [...]* appels d'offres, Siemens a indiqué non seulement le nom de l'adjudicataire, mais aussi celui de l'adjudicataire précédent. Dans [...]* cas, c'est l'ancien fournisseur qui a de nouveau remporté le contrat ou il s'agissait d'un nouvel hôpital. Sur les [...]* appels d'offres qui ont donné lieu à un changement (partiel ou total) de fournisseur, le client est passé le plus souvent ([...]* fois) de Siemens à Dräger ou vice versa.

(100) Dans les appels d'offres présentés par Siemens, cette dernière s'est de loin le plus souvent trouvée confrontée à Dräger, et dans les [...]* des cas où le client a changé de fournisseur, cela s'est produit entre ces deux entreprises. Si l'on tient compte du fait qu'un fournisseur ne participe qu'aux appels d'offres pour lesquels il a une chance réelle de remporter le contrat, ces deux observations confirment la conclusion tirée de l'enquête auprès des clients et des documents internes selon laquelle Siemens et Dräger proposent les substituts les plus proches sur le marché des respirateurs.

(101) La même analyse que pour Siemens a été réalisée pour les appels d'offres présentés par Dräger. Cette dernière a présenté [...]* appels d'offres concernant les respirateurs et les différents pays de l'EEE, pour lesquels elle a précisé l'identité des autres soumissionnaires. Siemens a répondu à [...]* de ces appels d'offres. [...]* aucune offre concurrente n'a été soumise. Les autres soumissionnaires les plus importants ont été Hamilton ([...]* participations), Tyco/Puritan Bennett ([...]*), Taema ([...]*) et Viasys/Bird ([...]*).

(102) Pour [...]* appels d'offres, Dräger a indiqué non seulement le nom du nouvel adjudicataire, mais aussi celui de l'adjudicataire précédent. Dans [...]* cas, l'ancien fournisseur a de nouveau remporté le contrat ou il s'agissait d'une nouvelle clinique ([...]* appels d'offres). Sur les [...]* appels d'offres qui ont donné lieu à un changement (partiel ou total) de fournisseur, le client est passé le plus souvent ([...]* fois) de Siemens à Dräger ou vice versa. L'analyse des renseignements fournis par Dräger conduit à la même conclusion, à savoir que les informations relatives aux appels d'offres confirment que les respirateurs commercialisés par Siemens et Dräger présentent le plus haut degré de substituabilité.

Conclusions

(103) L'enquête auprès des clients, les documents internes des parties et les renseignements sur les appels d'offres confirment la présomption, fondée sur les parts de marché, que Siemens et Dräger produisent les substituts les plus proches aux yeux des clients. La réunion de leurs deux gammes de produits au sein de l'entreprise commune leur permettrait donc d'appliquer des prix plus élevés sur le marché, car une grande partie des clients perdus par l'une du fait de cette hausse de prix se tourneraient vers les produits de l'autre. La disparition de leur concurrent de loin le plus important, qui résulterait de l'opération de concentration, permettrait à Siemens/Dräger de fixer leurs prix d'une manière largement indépendante de leurs clients et de leurs concurrents.

(104) Les acteurs du marché considèrent que les barrières à l'entrée sont élevées, car les clients ont une préférence marquée pour les produits et les producteurs qui ont fait leurs preuves. En outre, il est ressorti de l'enquête de la Commission qu'un réseau de distribution et de service après-vente bien établi constituait une condition préalable à une entrée réussie sur le marché. Le fait de disposer d'une base installée, du moins sur des marchés hospitaliers voisins, facilite aussi considérablement l'entrée sur le marché. Cette dernière exige des coûts irrécupérables très importants, que ce soit pour la recherche et le développement ou la mise en place d'un réseau de distribution et de service après-vente.

(105) De même, il est improbable que des concurrents existants puissent acquérir une part de marché comparable à celle de l'entreprise commune. La part de marché du troisième concurrent après Siemens/Dräger, Tyco, ne représente actuellement qu'une fraction de la part de marché cumulée des parties. Pour l'accroître, celui-ci devrait sensiblement améliorer le positionnement de ses produits aux yeux des clients ainsi que son réseau de distribution et de service après-vente. Or, cela ne devrait pas se réaliser d'ici un à deux ans, la période à prendre en compte aux fins de l'appréciation sous l'angle de la concurrence, du moins eu égard à l'évolution du marché jusqu'à présent. La part de marché de Tyco a au contraire plutôt diminué au cours de ces dernières années. Plusieurs autres concurrents de moindre importance craignent un recul de leur part de marché dans les années à venir du fait du large portefeuille de produits de l'entreprise commune et, en particulier, de sa présence sur le marché vertical des moniteurs de surveillance. En outre, la création de l'entreprise commune est plus susceptible d'entraîner un renforcement qu'une réduction des obstacles à l'expansion des concurrents de moindre importance.

(106) Eu égard à la part de marché cumulée très élevée que détiennent Dräger et Siemens sur les marchés des respirateurs en Belgique, au Danemark, en Allemagne, en France, en Grande-Bretagne, en Irlande, en Italie, aux Pays-Bas, en Autriche, au Portugal, en Espagne, en Suède et en Norvège, à l'absence de concurrents d'un poids comparable et au fait que les parties à la concentration produisent les respirateurs présentant le plus haut degré de substituabilité aux yeux des clients, l'étude du marché confirme donc les doutes sérieux de la Commission quant au fait que l'opération en question pourrait entraîner la création d'une position dominante de l'entreprise commune sur ces marchés nationaux.

2. Appareils d'anesthésie

Parts de marché

(107) D'après les données fournies par les parties dans le formulaire CO, l'opération de concentration aboutirait aux parts de marché suivantes dans le secteur des appareils d'anesthésie:

Appareils d'anesthésie: données fournies par les parties dans le formulaire CO

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Siemens/Dräger estiment ainsi à [35-45]* % leur part de marché cumulée dans l'EEE, soit à peu près comme celle de Datex-Ohmeda.

(108) Selon ces données, ces trois entreprises sont les seuls fournisseurs qui exercent des activités importantes au niveau de l'EEE. En outre, les parties ont cité une série de fournisseurs ("Autres") qui ne sont présents que dans un seul État membre ou dans des États membres voisins (par exemple, UK/IRL, E/P, etc.). Dameca et Anmedic (Scandinavie), Taema (F), AMS (EL), Penlon et Blease (UK/IRL), Siare (I, AU), Medec (B, NL), ainsi que Hersill et Temel (E, P) comptent parmi ces fournisseurs présents sur un créneau précis. D'après les estimations de Frost & Sullivan ("F& S"), les plus importants de ces fournisseurs contrôlent au plus 3 % du marché européen. Pour une partie du marché ("Valeur résiduelle"), différente selon chaque pays, les parties n'indiquent aucun concurrent.

(109) Dans le cadre de l'étude approfondie du marché, la Commission leur a demandé de nommer les concurrents qui détiennent ces parts de marché initialement non attribuées ou d'expliquer l'origine de cette valeur résiduelle. Dräger a répondu à cette question comme suit: "La valeur résiduelle apparaît lorsque l'on essaye de représenter les chiffres d'affaires totaux des concurrents dans les différents États membres. L'estimation du volume du marché se révèle en effet bien souvent inférieure (sic) au total des chiffres d'affaires des concurrents". Il s'agirait donc en fait d'une valeur résiduelle non expliquée.

(110) Siemens précise en revanche que les concurrents suivants détiennent respectivement, selon ses propres estimations, une part de marché de 1 à 2 % dans les États membres indiqués entre parenthèses: Heyer (D, AU), Heinen & Löwenstein (D, AU), EKU (D, AU), Stephan (D), Smith Industries (UK, IRL), Samed (I) et Normeca (N). Des clients ont cité au moins certaines de ces entreprises comme acteurs du marché, mais ont reconnu que la qualité de leurs produits était nettement inférieure à celle des produits des parties et, partant, qu'elles n'étaient pas en concurrence directe avec ces dernières. Selon l'étude de T for G, les appareils de ces entreprises citées à titre complémentaire ne seraient pas utilisés dans les salles d'opération proprement dites, mais dans les salles de réveil. Au stade des engagements, l'étude du marché n'avait pas encore permis de répondre à la question de savoir si ces concurrents "rapportés" relevaient du marché de produits en cause. Faute de preuves concluantes du contraire, ces fournisseurs "rapportés" sont donc pris en compte aux fins de la présente décision (considérant 4).

(111) Comme cela a été fait plus haut au considérant 78 pour les respirateurs, le tableau suivant ne corrige donc les chiffres de parts de marché des parties qu'en retirant les chiffres d'affaires résiduels non attribués. Comme les autres concurrents énumérés par Siemens, mais auxquels cette entreprise n'a pas attribué de part de marché (Acoma, Kontron, B. Braun, Chenwei, Chirana-Prema, Megamed, Royal Medical et Tacoma), n'ont jamais été cités dans le cadre de l'étude du marché, que ce soit par un client ou par un concurrent, comme des acteurs du marché des appareils d'anesthésie, ils ne sont pas pris en compte dans ce tableau. Celui-ci présente donc les parts de Marché communiquées par les parties après déduction des parts de marché non attribuées:

Appareils d'anesthésie: données des parties après ajustement

<EMPLACEMENT TABLEAU>

(112) Parmi les études réalisées par des tiers et citées par les parties, celle de F& S (22) estime cependant à 49 % (Dräger: 39 %, Siemens: 10 %) la part de marché cumulée des parties au niveau européen (2000), et à 38 % la part de marché de Datex-Ohmeda. L'argument des parties selon lequel les chiffres de F& S seraient fondés sur une définition différente du marché, car celle-ci inclurait les composants respiratoires des appareils d'anesthésie dans le marché des respirateurs, ne devrait pas a priori avoir d'incidence sur le calcul des parts de marché pour les appareils d'anesthésie, parce que la distorsion sur ce marché s'applique proportionnellement à tous les concurrents (les appareils d'anesthésie se composent en principe d'une unité respiratoire et d'un mélange gazeux, mais cette unité respiratoire n'est absolument pas comparable à un respirateur).

(113) L'étude précitée (considérant 80) de T for G fournit également des chiffres de parts de marché pour les appareils d'anesthésie. T for G estime à 65 % (Dräger: 56 %, Siemens: 9 %) la part de marché cumulée des parties en Europe pour ce type d'appareils, et à 22 % la part de marché de Datex-Ohmeda. Plus précisément, T for G ventile comme suit les parts de marché:

Appareils d'anesthésie: T for G

<EMPLACEMENT TABLEAU>

(114) La division Electromedical Systems de Siemens estime, dans ses propres documents internes [...]*, les parts de marché des parties et de leurs concurrents comme suit: [...]*.

(115) Dans les chiffres de parts de marché qu'elles ont fournis dans le formulaire CO, les parties ont donc estimé leur propre part de marché à un niveau nettement inférieur aux estimations des auteurs des études extérieures, communiquées à la Commission et considérées comme valables par les parties. [...]*

(116) La Commission a donc procédé à ses propres calculs de parts de marché sur la base des chiffres d'affaires communiqués par les principaux concurrents. Le tableau suivant se fonde sur les chiffres d'affaires indiqués par les entreprises Siemens, Dräger, Datex-Ohmeda, Taema, Stephan et Penlon. Les parts de marché des autres concurrents reposent sur les chiffres de parts de marché fournis ultérieurement par les parties dans le cadre de l'étude approfondie du marché et n'avaient pas encore pu être vérifiées au stade des engagements (voir considérant 4).

Appareils d'anesthésie: enquête de la Commission((Les données sur les chiffres d'affaires des concurrents recueillies dans le cadre de l'étude du marché constituent des secrets d'affaires des entreprises concernées.))

<EMPLACEMENT TABLEAU>

(117) Dräger et Datex-Ohmeda sont les deux principaux fournisseurs d'appareils d'anesthésie sur la plupart des marchés nationaux. D'après les calculs de la Commission ainsi que selon F& S, T for G et la division EM de Siemens, Dräger est le plus important des deux au niveau européen. Ces deux entreprises détiennent des parts de marché importantes sur tous les marchés nationaux, à l'exception de la Suède et de l'Irlande où Dräger ne contrôle qu'une petite partie du marché.

(118) Siemens est le troisième fournisseur au niveau européen, même s'il arrive bien après les deux leaders. Sa part de marché varie toutefois considérablement d'un pays à l'autre. Cette entreprise est le leader en Suède, où sa division Electromedical Systems a son siège. Siemens n'est entrée sur le marché des appareils d'anesthésie qu'en 1997, en commercialisant le modèle Kion. Il s'agit d'un poste de travail intégré avec un moniteur de surveillance incorporé. Selon les acteurs du marché [...]*, sa conception innovante a été entachée d'importants problèmes techniques les premières années. Au début, son utilisation fut notamment considérée comme opaque et compliquée. À cela se sont ajoutés des problèmes de fiabilité technique. D'après les informations dont la Commission dispose, ces problèmes techniques ont entre-temps été résolus, mais l'enquête a montré qu'ils avaient durablement entaché la réputation de l'entreprise auprès de nombreux clients, [...]*. Dans ce sens, T for G constate au sujet des appareils de thérapie que: "la réputation de Siemens est très différente selon les pays et selon les divisions. [...]* Dräger jouit d'une grande notoriété dans toute l'Europe"(23).

(119) Contrairement aux fournisseurs présents sur des créneaux précis, Siemens possède un réseau de distribution bien établi au niveau européen et jouit d'une bonne réputation en raison de sa large gamme de produits de technique médicale sur des marchés hospitaliers voisins, pour pouvoir commercialiser de nouveaux appareils d'anesthésie. En l'espace de cinq ans seulement, depuis son entrée sur le marché, cette entreprise est devenue un fournisseur important d'appareils d'anesthésie dans la plupart des pays de l'EEE, et même le leader en Suède.

(120) L'entreprise commune notifiée lierait donc sur plusieurs marchés nationaux le numéro un (Dräger ou, en Suède, Siemens) et le troisième concurrent (Siemens ou, en Suède, Dräger). En Belgique, au Danemark, en Allemagne, en France, en Italie, aux Pays-Bas et au Portugal, leur part de marché cumulée élevée et les chevauchements horizontaux constituent déjà en eux-mêmes un indice de l'existence d'une position dominante.

(121) Comme pour les respirateurs, la question de savoir si les appareils d'anesthésie de Dräger constituent de bons substituts à ceux de Siemens et s'ils limitent ainsi la marge de manœuvre de cette dernière en matière de fixation des prix, est examinée ci-après. L'analyse se fonde, comme précédemment, sur les trois éléments suivants: 1) l'enquête auprès des clients et des concurrents; 2) des documents internes des parties, et 3) les appels d'offres présentés par les parties.

(122) En outre, en raison de la faiblesse de sa part de marché actuelle en tant que fournisseur indépendant, Siemens pourrait avoir, plus que Dräger et Datex-Ohmeda, un intérêt économique à poursuivre une stratégie agressive de conquête de parts de marché afin de réaliser des économie d'échelle et d'accroître sa clientèle habituelle. L'entreprise commune notifiée supprimerait donc potentiellement un concurrent particulièrement agressif. Cette thèse est examinée sur la base des plans d'entreprise et des documents stratégiques de Siemens.

i) Enquête auprès des clients et des concurrents

(123) Comme pour les respirateurs, la Commission a demandé aux clients et aux concurrents, dans le cadre de l'étude du marché, de citer trois substituts ("substituts 1, 2 et 3") aux appareils d'anesthésie respectifs de Dräger, Siemens et Datex-Ohmeda. Elle a demandé aux premiers de prendre comme base les modèles qu'ils utilisaient alors, tandis qu'elle a imposé aux seconds une liste des principaux appareils des parties (Dräger: Cicero, Cato et Primus; Siemens: Kion). La très grande majorité des clients interrogés, en particulier en Allemagne, au Danemark, en Belgique, en France, en Italie et aux Pays-Bas, mais aussi par exemple en Autriche et en Suède, ont estimé que les produits de Dräger constituaient les meilleurs substituts à l'appareil Kion de Siemens, même s'ils concèdent que la gamme de produits de cette dernière pour les appareils d'anesthésie se limite à cet appareil. Les réponses à la question relative aux susbstituts aux produits de Dräger sont à cet égard moins tranchées. Non seulement les produits de Datex-Ohmeda, mais aussi l'appareil de Siemens, ont été cités comme les meilleurs substituts. Les clients couverts par l'étude du marché ont estimé que le portefeuille de produits de Dräger constituait également le substitut le plus proche pour les clients de Siemens, bien que l'inverse ne soit pas tout à fait le cas.

(124) Les résultats de l'étude du marché ont montré que les clients jugeaient généralement les produits offerts par les fournisseurs présents sur des créneaux précis d'une qualité inférieure à celle des appareils des trois principaux fournisseurs. Plusieurs hôpitaux ont indiqué que leurs appareils produits par des fournisseurs présents sur des créneaux précis étaient plutôt obsolescents et leur servaient par exemple d'appareils de rechange.

(125) La Commission a aussi demandé aux clients quelle hausse de prix les amènerait à changer d'appareil. Bon nombre d'entre eux n'ont rien indiqué ou ont expliqué que le prix ne jouait qu'un rôle secondaire (par exemple, par rapport à la qualité et au service après-vente) dans le choix des produits. Ils ont sinon indiqué une fourchette de 10 à 30 %. Un hôpital autrichien a déclaré que seule une hausse de prix de 50 % l'inciterait à changer de fournisseur. En ce qui concerne la question de la disposition des clients à changer de fournisseur, il n'existe donc pas de grandes différences entre les respirateurs et les appareils d'anesthésie.

(126) Seuls un petit nombre de concurrents du marché des appareils d'anesthésie ont répondu de manière détaillée à cette question. Ces réponses n'ont pas permis de dégager une tendance claire.

ii) Documents internes des parties

(127) Les parties analysent toutes deux, dans leurs plans d'entreprise et dans les études préparatoires à l'opération, le positionnement des différents appareils d'anesthésie présents sur le marché, les leurs et ceux de leurs concurrents. Elles s'accordent pour constater que l'appareil Kion de Siemens et plusieurs produits de Dräger relèvent du segment prix/performance supérieur. Elles considèrent que Datex-Ohmeda couvre également une large gamme de produits.

(128) Siemens [...]*

(129) Dräger [...]*

(130) Siemens aborde également la stratégie commerciale de sa division Electromedical Systems dans ses plans d'entreprise 1999-2002. [...]*

(131) [...]* L'entreprise commune élimine donc un rival relativement agressif de Dräger (et du deuxième fournisseur Datex-Ohmeda).

iii) Appels d'offres

(132) À la demande de la Commission, Siemens et Dräger ont joint à leur notification la liste des appels d'offres auxquels elles ont participé dans le secteur des appareils d'anesthésie. Elles indiquent également ici qu'elles ne disposent pas actuellement d'un système de rapports recueillant en permanence les données demandées par la Commission et les stockant, le cas échéant, dans une base de données. Elles prétendent au contraire que leurs forces de vente respectives ont dû effectuer des recherches pour chaque appel d'offres et que les informations fournies pourraient donc être incomplètes et pourraient donner une idée fausse de la situation concurrentielle (selon elles, à leur détriment).

(133) Les listes demandées contiennent, entre autres, des informations sur l'adjudicateur, le nombre de pièces, le volume des commandes, le nom des soumissionnaires, le nom des adjudicataires, ainsi que - si possible - celui des adjudicataires précédents.

(134) Dans le cadre de l'étude approfondie du marché, la Commission a demandé aux parties de lui présenter d'autres appels d'offres afin d'augmenter la part des appels d'offres couverts. Les informations fournies par les parties se sont cependant révélées en grande partie inutilisables, car aucun concurrent n'était cité. L'analyse suivante repose donc sur les renseignements contenus dans la notification.

(135) Elle se fonde sur les données au niveau de l'EEE. Compte tenu de la taille réduite de l'échantillon et du fait qu'il pourrait ne pas être représentatif, aucune analyse supplémentaire par État membre n'a été réalisée.

(136) Dans la notification, Siemens a présenté [...]* appels d'offres auxquels elle a participé dans le secteur des appareils d'anesthésie et pour lesquels elle a précisé l'identité des autres soumissionnaires. Dräger a répondu à [...]* de ces appels d'offres. Sur les [...]* appels d'offres auxquels Dräger n'a pas participé, [...]* n'ont fait l'objet d'aucune offre concurrente. [...]* Datex-Ohmeda a été le seul soumissionnaire (au P, en IRL [...]*, en EL et en E); [...]* ce fut Taema (en F) et [...]* Iberdata (au P). Outre Dräger, les soumissionnaires qui ont participé ont été Datex-Ohmeda [...]*, Dameca ([...]*, exclusivement en Suède), Taema/Air Liquide ([...]*; [...]*) et Themel ([...]* en Espagne). Dräger et Datex sont donc de loin les principaux concurrents de Siemens pour les appareils d'anesthésie.

(137) Pour [...]* appels d'offres, Siemens a indiqué non seulement le nom de l'adjudicataire, mais aussi celui de l'adjudicataire précédent. Dans [...]* cas, c'est l'ancien fournisseur qui a de nouveau remporté le contrat. Sur les [...]* appels d'offres qui ont donné lieu à un changement (partiel ou total) de fournisseur, le client est passé le plus souvent ([...]* fois) de Dräger à Datex-Ohmeda ou vice versa. [...]* changements ont eu lieu entre Siemens et Datex-Ohmeda et [...]* entre Dräger et Siemens (comptages multiples, car certains contrats ont été attribués à plusieurs fournisseurs). Ces changements donnent une indication approximative de la position des producteurs sur le marché, mais la petite taille (et éventuellement la non-représentativité) de l'échantillon limite sa valeur informative.

(138) La même analyse que pour Siemens a été réalisée pour les appels d'offres présentés par Dräger. Cette dernière a présenté [...]* appels d'offres concernant les appareils d'anesthésie et les différents pays de l'EEE, pour lesquels elle a précisé l'identité des autres soumissionnaires. Dans [...]* cas, aucune offre concurrente n'a été soumise. Lorsque des concurrents ont pris part aux appels d'offres, ce sont la plupart du temps Datex-Ohmeda [...]* et Siemens [...]* qui ont présenté une offre. Les autres concurrents sont fortement cloisonnés géographiquement: Penlon [...]*, Taema [...]* et Anmedic [...]*. Tous les autres soumissionnaires ont présenté moins de [...]* offres.

(139) Pour [...]* appels d'offres, Dräger a indiqué non seulement le nom du nouvel adjudicataire, mais aussi celui de l'adjudicataire précédent. Dans [...]* cas, l'ancien fournisseur a de nouveau remporté le contrat ou il s'agissait d'une nouvelle clinique (un appel d'offres). Sur les [...]* appels d'offres qui ont donné lieu à un changement (partiel ou total) de fournisseur, le client est passé le plus souvent ([...]* fois) de Dräger à Datex-Ohmeda ou vice versa. [...]* changements ont eu lieu entre Siemens et Datex-Ohmeda et [...]* entre Dräger et Siemens (comptages multiples, car certains contrats ont été attribués à plusieurs fournisseurs). Ces changements donnent une indication approximative de la position des producteurs sur le marché, mais la petite taille (et éventuellement la non-représentativité) de l'échantillon limite sa valeur informative.

(140) Ces renseignements sur les appels d'offres fournis par les parties confirment que Dräger, Datex-Ohmeda et Siemens sont de loin les principaux fournisseurs du segment de marché qu'ils occupent. Ils montrent que les fournisseurs présents sur des créneaux précis que les parties ont cités ultérieurement au cours de la procédure aux fins du calcul des parts de marché ne constituent pas, dans la pratique, des concurrents effectifs.

Conclusions

(141) L'enquête auprès des clients, les documents internes des parties et les renseignements sur les appels d'offres confirment donc la présomption, fondée sur les parts de marché, que Siemens et Dräger produisent aux yeux des clients des substituts proches, sur le marché des appareils d'anesthésie techniquement sophistiqués. Avec son modèle Kion, Siemens ne couvre qu'une partie des segments de clientèle couverts par la large gamme de produits de Dräger. En particulier, Dräger constitue la meilleure option pour une grande partie de la clientèle existante de Siemens, par exemple lorsque cette dernière essaie d'augmenter les prix qu'elle pratique sur le marché. La réunion de leurs deux gammes de produits au sein de l'entreprise commune permettrait donc aux parties d'appliquer des prix plus élevés, notamment aux clients pour lesquels Dräger et Siemens représentent le premier ou le deuxième choix en matière d'approvisionnement, car une grande partie des clients perdus par l'une du fait de cette hausse de prix se tournerait vers les produits de l'autre.

(142) Comme cela ressort des plans d'entreprise, l'entreprise commune permettrait en outre d'éliminer un concurrent (Siemens) ayant un intérêt - du fait des faibles parts de marché actuelles - à poursuivre une stratégie relativement agressive de conquête de parts de marché. La disparition, à la suite de l'opération de concentration, de Siemens en tant que concurrent indépendant sur le marché des appareils d'anesthésie permettrait ainsi à l'entreprise commune de fixer ses prix d'une manière largement indépendante de ses clients et de ses concurrents.

(143) L'étude du marché montre que les opérateurs jugent les barrières à l'entrée du marché des appareils d'anesthésie élevées, car les clients ont une préférence marquée pour les produits et les producteurs qui ont fait leurs preuves. En outre, il est ressorti de l'enquête de la Commission qu'un réseau de distribution et de service après-vente bien établi constituait une condition préalable à une entrée réussie sur le marché. Le fait de disposer d'une base installée, du moins sur des marchés hospitaliers voisins, facilite aussi considérablement l'entrée sur le marché. Cette dernière exige des coûts irrécupérables très importants, que ce soit pour la recherche et le développement ou la mise en place d'un réseau de distribution et de service après-vente. Le fait que les clients considèrent Siemens comme un concurrent effectif sur le marché des appareils d'anesthésie tient en grande partie, selon l'étude du marché, à sa forte présence dans d'autres domaines de la technique médicale, y compris les respirateurs et les moniteurs de surveillance, et doit avoir contribué à son entrée relativement réussie sur ce marché.

(144) De même, il est improbable que des concurrents existants puissent acquérir une part de marché comparable à celle de Siemens, Dräger ou Datex-Ohmeda. Les concurrents suivants n'exercent leurs activités que dans un espace géographique limité. Une expansion sur de nouveaux marchés géographiques exigerait la mise en place d'un réseau de distribution et de service après-vente ainsi que l'établissement progressif d'une réputation auprès des clients, ce qui représenterait presque une nouvelle entrée sur le marché. Or, cela ne devrait pas se réaliser d'ici un à deux ans - la période à prendre en compte aux fins de l'appréciation sous l'angle de la concurrence -, du moins eu égard à l'évolution du marché jusqu'à présent. Plusieurs concurrents de moindre importance craignent un recul de leur part de marché dans les années à venir du fait du large portefeuille de produits de l'entreprise commune et, en particulier, de sa présence sur le marché vertical des moniteurs de surveillance. En outre, la création de l'entreprise commune est plus susceptible d'entraîner un renforcement qu'une réduction des obstacles à l'expansion des concurrents de moindre importance.

(145) Eu égard à la part de marché cumulée très élevée que détiennent Dräger et Siemens sur les marchés des appareils d'anesthésie en Belgique, au Danemark, en Allemagne, en France, en Italie et aux Pays-Bas et au fait que leurs appareils sont des substituts proches et que Siemens a un intérêt nettement plus grand que Dräger et Datex-Ohmeda à poursuivre une stratégie agressive de conquête de parts de marché, l'étude du marché confirme donc les doutes sérieux de la Commission quant au fait que l'opération en question pourrait entraîner la création d'une position dominante de l'entreprise commune sur ces marchés nationaux.

(146) Au moment où les engagements ont été proposés, l'étude du marché n'était pas encore achevée en ce qui concerne les autres marchés nationaux (considérant 4). Or, les engagements proposés élimineraient les positions dominantes que l'entreprise commune pourrait également créer sur ces marchés.

C2. EFFETS VERTICAUX/CONGLOMÉRAUX

3. Moniteurs de surveillance

Parts de marché

(147) En ce qui concerne les moniteurs de surveillance, les parties ont indiqué qu'elles détenaient les parts de marché suivantes (tableau récapitulatif).

Moniteurs de surveillance: données fournies par les parties dans le formulaire CO

<EMPLACEMENT TABLEAU>

(148) Selon leurs propres données, les parties détiennent une part de marché moyenne de [25-35]* % dans l'EEE. Avec des parts de marché parfois nettement plus élevées, elles sont les leaders dans plusieurs États membres. Une partie importante du marché ([15-25]*) % au niveau de l'EEE et plus de [15-25]* %) dans plusieurs pays) n'est attribuée à aucun concurrent. Pourtant, il existe dans chaque État membre encore trois autres concurrents qui détiennent une part de marché élevée et ont une présence importante dans le secteur de la technique médicale: Philips, General Electric (GE) et Datex-Ohmeda. L'entreprise Dräger ne produit pas elle-même de moniteurs de surveillance, mais achète essentiellement des appareils GE dans le cadre d'un accord de coopération, qui sont ensuite intégrés dans des postes de travail d'anesthésie ou de respiration artificielle. [...]* Il y a lieu de supposer que l'entreprise commune utiliserait avant tout des produits Siemens à la place des appareils GE. Toutefois, le nombre des concurrents effectifs resterait inchangé sur le marché des moniteurs de surveillance, car Dräger n'exerce pas - déjà aujourd'hui - d'activités de production sur ce marché. Au niveau horizontal, il ressort de l'enquête de la Commission que l'entreprise commune n'entraînera ni la création ni le renforcement d'une position dominante sur le marché des moniteurs de surveillance.

(149) En dehors des effets horizontaux précités aux considérants 71 à 146, l'entreprise commune élargirait sensiblement la gamme de produits que Siemens peut offrir en tant que solutions intégrées destinées aux hôpitaux. Outre les appareils d'anesthésie, les respirateurs et les moniteurs de surveillance réunis dans l'entreprise commune notifiée, Siemens est présente sur d'autres marchés de la technique médicale, notamment celui des systèmes d'imagerie à forte intensité de capital (échographie, tomographie assistée par ordinateur, radiographie, résonance magnétique, etc.) et celui des systèmes informatisés destinés aux hôpitaux. En particulier, GE et Philips semblent poursuivre une stratégie similaire, mais Siemens aurait accès, grâce à l'entreprise commune, au portefeuille de produits le plus large de tous les concurrents du marché et pourrait offrir les solutions à guichet unique ("one-stop-shop") les plus complètes. En raison des parts de marché élevées des parties et de la grande complémentarité des appareils, ce sont surtout les aspects verticaux entre les appareils d'anesthésie et les respirateurs, d'une part, et les moniteurs de surveillance, d'autre part, qui sont pertinents aux fins de l'appréciation sous l'angle de la concurrence de l'entreprise commune notifiée.

(150) Une coopération entre les différents producteurs est techniquement indispensable à l'intégration nécessaire des appareils d'anesthésie et respirateurs, d'une part, et des moniteurs de surveillance, d'autre part, pour pouvoir visualiser sur le moniteur les flux de données générés par les appareils et les données correspondantes sur les patients et/ou les entrer dans le système informatique de l'hôpital. Cela tient d'une part au fait que les interfaces, selon les acteurs du marché, ne sont pas standardisées et exigent donc une coopération et un échange d'informations entre les producteurs concernés aux fins du développement d'interfaces efficientes. Des concurrents indiquent en outre que le cycle d'innovation des moniteurs est plus court que celui des appareils d'anesthésie et des respirateurs si bien qu'un échange souple des différents composants devrait rester possible pour produire les meilleures combinaisons d'appareils du marché.

(151) Si de nombreux clients se félicitent donc également d'une plus grande intégration des différents composants, la position dominante de l'entreprise commune pour les appareils d'anesthésie et pour les respirateurs, découlant des effets horizontaux précités aux considérants 71 à 146, lui permettrait d'empêcher les producteurs concurrents de moniteurs de surveillance d'accéder effectivement aux marchés des appareils d'anesthésie et des respirateurs (verrouillage des marchés), par exemple en rendant l'accès aux interfaces plus difficile ou en configurant les appareils d'anesthésie et les respirateurs de manière à ce qu'ils ne puissent fonctionner qu'avec des moniteurs Siemens. Les hôpitaux ne pourraient plus (ou qu'avec difficulté) associer les meilleurs composants du marché pour chaque domaine d'application, provenant de différents producteurs.

(152) Même si l'étude du marché n'était pas encore achevée lorsque les parties ont proposé des engagements, les doutes sérieux de la Commission à l'origine de l'ouverture de la procédure n'ont pas été dissipés. Elle craint toujours que l'entreprise commune acquière, en raison de l'effet de verrouillage précité (considérant 151), une position dominante pour les moniteurs de surveillance non seulement au niveau de l'EEE, mais aussi dans chaque pays de l'EEE dans lequel elle obtiendra une position dominante pour les appareils d'anesthésie ou les respirateurs. Il n'est pas non plus exclu que la position dominante acquise par l'entreprise commune pour les appareils d'anesthésie et les respirateurs soit renforcée par sa position sur le marché des moniteurs de surveillance.

(153) Les engagements de cession proposés par les parties et exposés en détail à la section suivante aux considérants 154, 155 et 156 suppriment les chevauchements horizontaux en ce qui concerne les respirateurs et les appareils d'anesthésie. Seuls les appareils de thérapie Dräger seront incorporés dans l'entreprise commune. Or, Dräger détient déjà à elle seule des parts de marché dans plusieurs pays de l'EEE qui soulèvent en elles-mêmes des doutes sérieux quant à une possible position dominante. En ce qui concerne les respirateurs, cela vaut notamment pour la Belgique (part de marché de ([55-65]* %), le Danemark ([45-55]* %), l'Allemagne ([55-65]* %) et l'Autriche ([75-85]* %). Pour ce qui est des appareils d'anesthésie, il s'agit du Danemark ([55-65]* %), de l'Allemagne ([75-85]* %), de la Finlande ([65-75]* %), de la France ([45-55]* %), des Pays-Bas ([45-55]* %) et de la Norvège ([75-85]* %). L'élimination des effets horizontaux n'a donc pas totalement dissipé les doutes sérieux de la Commission quant à la compatibilité de l'opération avec le Marché commun.

VI. ENGAGEMENTS

(154) Par lettre du 6 mars 2003, les parties notifiantes ont proposé des engagements, en application de l'article 8, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations, afin d'éliminer les problèmes de concurrence mis en évidence par la Commission. Ces engagements ont été légèrement modifiés par lettre du 14 mars 2003.

(155) Cet engagement consiste essentiellement dans les points suivants: les parties s'engagent à veiller à ce que Siemens cède à un acquéreur indépendant la totalité de sa branche "Life Support Systems (LSS)", c'est-à-dire l'ensemble de ses activités mondiales en matière de respiration artificielle et d'anesthésie dans le secteur hospitalier. Ces activités comprennent entre autres la recherche et le développement, la production, la commercialisation, la distribution et la maintenance/le service après-vente dans le domaine des respirateurs et des appareils d'anesthésie. Ces activités sont actuellement exercées par Siemens Elema AB, sur le site de Solna, en Suède, mais aussi par plusieurs succursales régionales de Siemens et seront cédées en tant qu'entreprise en activité, c'est-à-dire y compris tous les actifs corporels et incorporels existants à la date de la présentation de cet engagement, ainsi que la totalité des effectifs. Siemens s'engage à préserver pleinement la viabilité et la compétitivité des activités en question. Les parties prennent aussi l'engagement de gérer séparément ces activités jusqu'à la date de leur cession.

(156) En vue de lever les réserves émises par la Commission sous l'angle de la concurrence à l'égard des aspects verticaux de l'opération de concentration, c'est-à-dire l'interopérabilité entre les appareils d'anesthésie et les respirateurs, d'une part, et les moniteurs de surveillance, d'autre part, ainsi que leur interopérabilité avec les systèmes de gestion des données des hôpitaux, les parties ont - outre la cession - proposé des engagements aux fins du maintien de l'interopérabilité de leurs appareils. Ces engagements consistent dans l'obligation d'offrir et de faire connaître l'ensemble des interfaces et des protocoles de communication existants et futurs de tous les appareils existants et futurs pour les moniteurs de surveillance des autres fournisseurs dans le domaine des soins intensifs et pour le raccordement aux systèmes de gestion des données des autres fournisseurs dans les hôpitaux. Toutes les informations relatives aux interfaces et aux protocoles de communication seront mises à la disposition des tiers sur demande, puis automatiquement après modifications. Dans les deux cas, les informations seront communiquées immédiatement, de manière non discriminatoire et gratuitement (ou au coût de la documentation). Les explications techniques sur les informations seront transmises, si approprié, immédiatement sur demande. De plus, les parties coopéreront en matière de certification de l'interopérabilité mécanique et électrique de leurs appareils avec les moniteurs de surveillance (ou les systèmes de gestion de données) des autres fournisseurs à la demande de ces derniers ou d'un client.

VII. APPRÉCIATION DU PROJET NOTIFIÉ SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE ET AU REGARD DES ENGAGEMENTS

(157) Les engagements ont été présentés aux clients et aux concurrents dans le cadre d'une consultation des acteurs du marché sur l'efficacité des engagements. Ceux-ci ont considéré la cession de la branche d'activité de Siemens LSS comme une mesure tout à fait efficace pour éviter un renforcement de la position de Dräger dans le cadre de l'entreprise commune. En outre, les clients et les concurrents ont reconnu que l'interopérabilité constituait un élément essentiel des engagements et ont confirmé que la diffusion des interfaces et des protocoles de communication, ainsi que la coopération en matière de certification des combinaisons ou des systèmes d'appareils, permettraient de préserver cette interopérabilité. Cependant, un concurrent a aussi émis des réserves quant au fait que les engagements pourraient continuer de conférer un avantage concurrentiel à l'entreprise commune en ce qui concerne le développement et l'adaptation des moniteurs de surveillance aux nouvelles interfaces, en particulier parce que l'entreprise commune ne diffuserait peut-être pas suffisamment tôt les informations.

(158) Les engagements prévoient que les informations sur les interfaces et les protocoles de communication sont communiquées immédiatement sur demande et automatiquement en cas de modifications. Eu égard notamment au cycle de vie relativement long des appareils de thérapie et des moniteurs de surveillance ainsi qu'à la durée des procédures d'appel d'offres, la Commission est toutefois parvenue à la conclusion, après avoir examiné les autres réserves concernant la diffusion à temps des interfaces, que les engagements étaient suffisants pour garantir que les concurrents seraient informés à temps.

(159) La Commission considère que les engagements précités aux considérants 154, 155 et 156 sont suffisants pour lever de manière appropriée les réserves émises sous l'angle de la concurrence à l'égard des marchés des respirateurs et des appareils d'anesthésie ainsi qu'à l'égard des aspects verticaux. La cession envisagée permettra notamment d'éviter que l'entreprise commune n'entraîne un cumul de parts de marché sur les marchés des respirateurs et des appareils d'anesthésie. Les engagements relatifs à l'interopérabilité garantissent que les moniteurs de surveillance des autres producteurs pourront, à l'avenir également, être raccordés sans problème aux respirateurs et aux appareils d'anesthésie de l'entreprise commune. Cela vaut également pour le raccordement des respirateurs, des appareils d'anesthésie et des moniteurs aux systèmes de gestion des données des hôpitaux.

VIII. CONDITIONS ET CHARGES

(160) Aux termes de l'article 8, paragraphe 2, deuxième alinéa, première phrase, du règlement sur les concentrations, la Commission peut assortir sa décision de conditions et charges destinées à assurer que les entreprises concernées respectent les engagements qu'elles ont pris à son égard en vue de rendre la concentration compatible avec le Marché commun.

(161) Les mesures entraînant une modification structurelle du marché doivent faire l'objet d'engagements, les mesures d'application nécessaires constituent, en revanche, des charges pour les parties. Si un engagement n'est pas rempli, la décision par laquelle la Commission a déclaré l'opération de concentration compatible avec le Marché commun est caduque. Lorsque les parties contreviennent à une charge, la Commission peut annuler une décision d'autorisation conformément à l'article 8, paragraphe 5, point b). En outre, des amendes et des astreintes peuvent être infligées aux parties conformément à l'article 14, paragraphe 2, point a), et à l'article 15, paragraphe 2, point a), du règlement sur les concentrations.

(162) Conformément à la distinction de base décrite ci-dessus aux considérants 160 et 161, la Commission subordonne sa décision à la condition que les engagements suivants soient pleinement remplis:

a) l'engagement relatif à la cession en tant qu'entreprise en activité, dans le délai de cession prolongé prévu au point 1 de l'annexe;

b) l'engagement de Siemens de céder à un acquéreur approprié la totalité de sa branche d'activité "Life Support Systems (LSS)", c'est-à-dire l'ensemble de ses activités, décrites au point 4 de l'annexe, en matière de respiration et d'anesthésie dans le secteur hospitalier);

c) les engagements relatifs à la préservation de la viabilité, de la compétitivité et de la cessibilité conformément au point 5 de l'annexe, ainsi qu'à la gestion séparée des activités et du flux d'informations conformément aux points 6, 7 et 8 de l'annexe;

d) l'engagement concernant l'interdiction de licencier des employés conformément au point 9 de l'annexe;

e) l'engagement relatif à un acquéreur approprié conformément aux points 13, 14 et 15 de l'annexe;

f) l'engagement de mettre en œuvre les mesures jugées nécessaires par le mandataire pour assurer le respect de ces engagements conformément au point 23 c) de l'annexe;

g) les engagements concernant la préservation de l'interopérabilité conformément aux points 35, 36, 37, 38 et 39 de l'annexe.

(163) Toutes les autres parties des engagements, en particulier l'obligation de maintien provisoire et de gestion séparée des activités à céder, ainsi que les modalités de désignation du mandataire par les parties, doivent en revanche faire l'objet de charges, car elles ne constituent que des mesures d'accompagnement de la mise en œuvre des conditions précitées.

IX. CONCLUSION

(164) En conclusion, l'opération envisagée ne devrait ni créer ni renforcer de position dominante ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le Marché commun ou une partie substantielle de celui-ci, si les parties respectent pleinement les engagements pris. Sous réserve du respect intégral des engagements figurant en annexe, l'opération de concentration peut donc être déclarée compatible avec le Marché commun et avec l'accord EEE, conformément à l'article 2, paragraphe 2, et à l'article 8, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations ainsi qu'à l'article 57 de l'accord EEE,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Le projet notifié, par lequel les entreprises Siemens AG et Drägerwerk AG acquièrent, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement (CEE) n° 4064-89, le contrôle conjoint de l'entreprise commune Dräger Medical AG & Co. KgaA, est déclaré compatible avec le Marché commun et l'accord EEE.

Article 2

L'article 1er est applicable pour autant que Siemens AG et Drägerwerk AG respectent pleinement les engagements mentionnés aux points 1, 4, 5 à 9, 13, 14, 15, 23 c) et 35 à 39 de l'annexe.

Article 3

La présente décision est applicable pour autant que Siemens AG et Drägerwerk AG respectent pleinement les engagements mentionnés aux points 2, 3, 10, 11, 12, 16 à 22, 23 a), 23 b), 23 d) à f), 24 à 34 et 40 à 43 de l'annexe.

Article 4

Siemens AG

CFL

Wittelsbacherplatz 2 D - 80333 München

Drägerwerk AG Moislinger Allee 53-55 D - 23542 Lübeck

sont destinataires de la présente décision.

(1) JO L 395 du 30.12.1989, p. 1. Rectificatif au JO L 257 du 21.9.1990, p. 13.

(2) JO L 180 du 9.7.1997, p. 1.

(3) JO C 269 du 8.11.2003.

(4) Le calcul du chiffre d'affaires a été effectué sur la base de l'article 5, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations et de la communication de la Commission sur le calcul du chiffre d'affaires (JO C 66 du 2.3.1998, p. 25).

(5) Des parties de ce texte ont été omises afin de garantir qu'aucune information confidentielle ne soit communiquée. Ces parties sont indiquées par des points de suspension entre crochets, suivis d'un astérisque.

(6) Formulaire de notification CO, p. 20.

(7) Réponse de Siemens à la demande de renseignements de la Commission du 18 février 2003.

(8) Note 7, à l'endroit cité.

(9) Renseignements tirés de la consultation des acteurs du marché sur l'efficacité des engagements et réponse de Siemens à la demande de renseignements de la Commission du 13 février 2003.

(10) Renseignements tirés de l'étude du marché effectuée par la Commission et données extraites du T for G Market Report 2000: Monitors and Ventilators, Section 3.2.

(11) Réponse à la demande de renseignements de la Commission du 20 février 2003.

(12) Réponse de Siemens à la demande de renseignements de la Commission du 20 février 2003.

(13) Formulaire de notification CO, p. 27.

(14) Réponse de Siemens à la demande de renseignements de la Commission du 27 janvier 2003, annexe 1.

(15) Réponse de Dräger à la demande de renseignements de la Commission du 20 février 2003.

(16) Réponse des parties à la demande de renseignements de la Commission du 27 janvier 2003.

(17) Réponse de Siemens à la demande de renseignements de la Commission du 20 mars 2003.

(18) Réponse à la demande de renseignements de la Commission du 27 janvier 2003.

(19) Formulaire CO, p. 57.

(20) European Anaesthesia and Respiratory Equipment Markets Report, 2001.

(21) T for G Market Report: Monitors and Ventilators, décembre 2000; [...]*.

(22) European Anaesthesia and Respiratory Equipment Markets Report, 2001.

(23) T for G Market Report: Monitors and Ventilators, décembre 2000, p. 28.

ANNEXE

Le texte original des conditions et charges conformément aux articles 2 et 3 peut être consulté sur le site Internet suivant de la Commission:

http://europa.eu.int/comm/ competition/index_en.html