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Décisions

CA Riom, ch. com., 17 janvier 2001, n° 99-02601

RIOM

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Lacroix

Défendeur :

Bellevret (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bardel

Conseillers :

M. Despierres, Mme Jean

Avoués :

Mes Lecocq, Mottet

Avocats :

Mes Michel, Sebile.

T. com. Billom, du 15 sept. 1999

15 septembre 1999

L'appel

Vu le jugement du 15 septembre 1999 du Tribunal de commerce de Billom fixant le montant des commissions dues à M. Lacroix, agent commercial, par la société Bellevret, à la somme de 19 245 F TTC et condamnant celle-ci à payer cette somme, outre, à titre de dommages et intérêts, celle de 10 000 F.

Vu les conclusions de M. Lacroix, appelant, du 23 novembre 2000 tendant à l'infirmation du jugement, sauf en ce qu'il a reconnu applicables les taux de 800 et de 2,5 % pour les grands groupes aux commissions lui revenant sur l'ensemble des opérations commerciales réalisées ou initiées sur son secteur, et à ce que la société Bellevret soit condamnée à lui payer les sommes de:

- 198 206,05 F TTC au titre des commissions dues,

- 298 075 F HT au titre de l'indemnité de cessation de contrat,

- 77 499,50 F au titre des frais de réemploi,

- 46 926,17 F TTC au titre de l'indemnité de préavis,

et ce avec les intérêts légaux sur les sommes sus-énoncées à compter du 22 mars 1995, enfin à débouter la société Bellevret de l'ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement d'une somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Vu les conclusions du 16 octobre 2000, de la société Bellevret tendant principalement à faire dire que le taux de commissions pour les grands groupes était de 1,5 % et non pas de 2,5 %, que la rupture du contrat est imputable à M. Lacroix et à débouter celui-ci de toutes ses demandes, et, en conséquence de fixer à la somme de 12 224,63 F la somme qu'elle doit à M. Lacroix, subsidiairement à la confirmation du jugement, plus subsidiairement à l'absence de préjudice justifiant une indemnité de rupture, à la fixation de l'indemnité de rupture à la somme de 5 901 F, et au débouté de la demande de remboursement de frais de réemploi, et enfin, en tout état de cause, à la condamnation de M. Lacroix à lui payer la somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Motivation

Attendu que par contrat d'agent commercial du 28 octobre 1993 la société Bellevret confiait à M. Lacroix le mandat de la représenter, à compter du 1er novembre 1993 sur un secteur exclusif comprenant les départements énoncés, avec une stipulation par laquelle la société Bellevret se réservait la représentation auprès des filiales ou succursales des grands groupes situés dans le secteur en question;

Attendu que ce contrat prévoyait en annexe une stipulation sur le montant des commissions, de laquelle il résultait que les commissions concernant les clients ordinaires (autres que les grands groupes), étaient de 8 % au minimum ("prix recommandé hors groupe "mini 8 %") et que pour les groupes, la commission forfaitaire s'élevait à 1,5 %.

Attendu que ce dernier taux était dit révisable;

Attendu que l'expert et le jugement ont retenu, pour calculer le montant des commissions encore dues, d'une part ce taux de 8 % et un taux de 2,5 % pour les groupes, au vu du même contrat dont la mention 1,5 % a été manuscritement surchargée;

Or attendu que sans plus attendre il doit être relevé que cette surcharge n'apparaît nullement comme une nouvelle convention entre les parties et que l'exemplaire du contrat comportant cette annexe surchargée (pièce n° 1 du dossier de la société Bellevret) n'est qu'une photocopie dépourvue de valeur probante (de même d'ailleurs que pour l'autre mention manuscrite ajoutée, qui n'apporte rien de plus : un "+" dans la formule "mini ± 8 %"!) ; qu'ainsi le taux à retenir pour le calcul des commissions concernant les opérations effectuées par M. Lacroix avec les groupes est-il bien celui de 1,5 % prévu au contrat, contrat non contractuellement révisé à ce titre; que le jugement doit être réformé en ce qu'il a retenu 2,5 %, le montant total résultant par ailleurs du nombre de contrats à retenir; que les dérogations qui ont pu intervenir sur le taux retenu ne sont pas établies comme ayant contractuellement modifié le taux conventionnel initial ;

Attendu que pour réclamer les autres indemnités et frais résultant de la rupture du contrat, M. Lacroix soutient que cette rupture est le fait fautif de la société et soutient ainsi :

1°) que la société mandante a manqué à son devoir de loyauté et d'information en ne communiquant pas l'intégralité des documents comptables lui permettant de calculer la rémunération qui lui était due;

2°) que l'intégralité de sa rémunération ne lui a pas été réglée;

3°) que la société Bellevret est intervenue dans le secteur qui lui était réservé en exclusivité ; et que même pour les groupes, réservés par la société mandante, une faute résultait de l'absence d'information donnée à M. Lacroix sur le fait d'être intervenu directement, faute à l'égard du devoir de loyauté et d'information;

4°) enfin que la société Bellevret a manqué à son obligation d'exécuter les engagements contractés par le mandataire conformément au pouvoir qui lui a été donné;

Attendu sur les deux premiers moyens, tous deux relatifs aux paiements des commissions dues à l'agent commercial, que l'expertise contient une analyse exhaustive des droits à commissions et a en particulier exclu nombre de demandes de M. Lacroix au motif que les opérations en cause avaient été initiées avant l'engagement de M. Lacroix, de sorte que leur réalisation au cours de son contrat ne lui donnait pas droit à rémunération; que par contre l'expertise a relevé quelques commissions encore dues, pour un total, selon son calcul, de 12 032,47 F et 7 213,25 F ; qu'il n'apparaît pas que l'expert n'ait pas disposé des données utiles à un calcul exhaustif, en dehors des quatre demandes non autrement établies ; que cependant, l'expert a considéré que M. Lacroix ne disposait pas de tous les éléments utiles au calcul de ses commissions et a pu, de façon erronée, réclamer des commissions indues ;qu'ainsi les comptes s'établissent-ils, alors que l'expert a disposé de pièces d'analyses qu'il a réclamées, au total qu'il établit;

Attendu que le moyen tendant à faire dire qu'une faute résulte de l'absence d'information de ce que la société Bellevret est intervenue directement dans le secteur de M. Lacroix, l'expert, qui fait le départ entre les grands groupes et les autres sociétés, estime que la société Bellevret n'a pas manqué à son obligation de ne pas intervenir sur le secteur géographique de M. Lacroix ;que la société Bellevret admet cependant avoir eu à intervenir, soulignant ne pouvoir négliger une clientèle alors que M. Lacroix n'était pas encore implanté parfaitement dans son secteur;que ces données ne constituent en tout cas pas une faute d'une gravité suffisante pour justifier une rupture du contrat, d'ailleurs intervenue plus tard, aux torts de la société Bellevret ;qu'il n'est par ailleurs demandé aucune indemnisation spécifique à ce titre;

Attendu que les défaillances dans l'exécution des commandes sont en effet admises par la société Bellevret, et donc établies pour le nombre que celle-ci reconnaît et avoue, soit 3 commandes dont elle énonce qu'elles ont été affectées par des retards de livraison ;que cette importance modeste ne saurait non plus, justifier une rupture de contrat;

Attendu qu'il est à admettre que le contrat a été rompu le 21 août 1995, lorsque M. Lacroix a cessé de prospecter la clientèle ;que la plupart des questions soulevées ci-dessus étaient très antérieures à cette date et ne peuvent venir justifier, par leur caractère modéré, prises individuellement, éparses dans le temps, et n'ayant pas donné lieu à des réclamations précises, contemporaines de leurs survenances, que le contrat ait été rompu pour ces motifs ;

Attendu qu'ainsi le contrat a été rompu à l'initiative de M. Lacroix, pour les motifs qui sont son fait et ne sont pas imputables au mandant ;qu'il en résulte que M. Lacroix doit être débouté des demandes propres à une rupture abusive à son encontre;que le jugement sera confirmé à ce titre; qu'il sera par contre réformé au titre d'une somme de 10 000 F allouée à titre de dommages et intérêts, dont la confirmation n'est d'ailleurs pas demandée en appel par l'appelant, ni sa réformation au titre d'une augmentation de montant, et qui surtout n'est pas fondée et ne correspond en outre à aucune demande initiale caractérisée et qualifiée ;

Attendu qu'il reste donc dû à M. Lacroix le montant des commissions restant, à calculer, pour les unes au taux de 8 %, comme l'a fait l'expert pour les sommes de 7 213,25 F et de 9 131,63 F, et pour les autres au taux de 1,50 %, soit, sur la base de calcul retenue par l'expert, la somme de 116 033,60 x 1,50 = 1 740,50 F; qu'il est dû au total 18 085,38 F;

Attendu que l'appelant supportera les dépens;

Attendu qu'il n'y a pas lieu à indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Condamne la société Bellevret à payer à M. Lacroix la somme de 18 085,38 F (dix-huit mille quatre-vingt cinq francs et trente huit centimes) avec intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 1995. Déboute M. Lacroix du surplus de ses demandes. Déboute la société Bellevret de ses autres demandes. Condamne M. Lacroix aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.