CA Paris, 25e ch. A, 22 mars 2002, n° 2000-11134
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Van Hool Belgique (SA), Total Raffinage Distribution (SA), Compagnie Aig Europe (SA), AGF Belgium Insurance (SA)
Défendeur :
Trans Fench (Sté), AXA Courtage (SA), Van Hool France (Sté), AGF (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Riffault-Silk
Conseillers :
Mme Bernard, M. Picque
Avoués :
SCP Gibou-Pignot, Grappotte-Benetreau, Me Teytaud, Olivier, SCP Bommart-Forster
Avocats :
Mes Cenac, Averdy Illouz, Charpentier, Savary, Berger
La société Autoroute du Sud de la France a consenti à la société Total Raffinage Distribution ci-après TRD une sous-concession en vue de la distribution de carburant sur l'aire du Village Catalan situé à Villemolaque (66) autoroute B 9. La station-service est exploitée par la société Phocédis.
Le 22 avril 1995 vers 9 heures, les installations de distribution de gasoil de cette station-service ont été entièrement détruites. L'incendie d'un car, qui stationnait là pour faire le plein de gasoil, s'est propagé en effet à ces installations. L'autocar à l'origine du sinistre, immatriculé 2545 XK 57, de marque Van Hool appartient à la société Trans Fench, assurée auprès de la Compagnie Uni Europe aux droits de laquelle se trouve désormais la société AXA Global Risks.
Deux expertises ont été réalisées à la suite de ce sinistre. Monsieur Lebras, expert-conseil, mandaté par la Compagnie Uni Europe a déposé le 15 mai 1995 un rapport accompagné de photographies prises le 4 mai 1995. Sur requête de la société TRD et de son assureur la SA Compagnie Aig Europe, une ordonnance de référé a désigné le 30 juin 1995 Alain Tomas, ingénieur INSA en qualité d'expert. Celui-ci s'est adjoint comme sapiteur Francis Foxonet pour l'évaluation financière du dommage. Par ordonnance du 6 décembre 1995, l'ordonnance du 30 juin 1995 a été rendue commune à la société Van Hool Belgique et par ordonnance du 22 janvier 1996, les opérations d'expertise ont été étendues à la société Telma. Alain Tomas a déposé son rapport le 9 août 1996.
Par assignation du 2 avril 1997, la SA TRD et la Compagnie Aig Europe ont demandé au Tribunal de commerce de Paris de déclarer la société Trans Fench responsable des conséquences de l'incendie survenu le 22 avril 1995 et de condamner in solidum la société Trans Fench et la société AXA Global Risks à payer à la Compagnie Aig Europe subrogée dans les droits de la SA TRD la somme de 831 339 F majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 1995, date du jour de son paiement et à la SA TRD la somme de 50 000 F correspondant à la franchise contractuelle, majorée des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 1997.
Par assignations séparées du 21 avril 1997, la société Trans Fench et la société AXA Global Risks ont sollicité la condamnation solidaire de la SA Van Hool France et des Assurances Générales de France ci-après AGF à les garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre et à leur payer, à la société Trans Fench la somme de 158 850,49 F au titre des différents préjudices et à la société AXA Global Risks, la somme de 1 192 696 F au titre des indemnités déjà versées tant à son assurée qu'aux passagers transportés de l'autocar, ces sommes étant majorées des intérêts au taux légal à compter du 21 avril 1997.
La SA Van Hool France et les AGF ont contesté les prétentions de la société Trans Fench et de la société AXA Global Risks, ont soulevé la prescription de l'action en garantie des vices cachés, et ont assigné le 20 mai 1997 en intervention forcée la société Van Hool Belgique dans les instances introduites par la SA TRD et la Compagnie Aig Europe ainsi que par la société Trans Fench et la société AXA Global Risks. Elles réclament que le jugement à intervenir soit déclaré commun à la société Van Hool Belgique et à son assureur Assubel et que ces derniers soient tenus de les garantir de toutes les condamnations prononcées contre elles. La société Van Hool Belgique a conclu au débouté des demandes de la SA TRD et de la Compagnie Aig Europe et à son absence de faute en relation avec l'origine de l'incendie.
Par jugement contradictoire rendu le 27 mars 2000, le Tribunal de commerce de Paris a joint les causes inscrites au rôle sous les numéros RG 97-033670, 97-034103 et 97-064696, a débouté la SA TRD et la Compagnie Aig Europe de l'ensemble de leurs demandes, a débouté la SA Van Hool France et les AGF SA, d'une part, et la société Van Hool Belgique, d'autre part, de l'ensemble de leurs prétentions, et a condamné "in solidum" la SA Van Hool France et les AGF SA, d'une part, et la société Van Hool Belgique, d'autre part, à payer à la société Trans Fench la somme de 158 850,49 F et à la société AXA Global Risks la somme de 1 192 696 F, lesdites sommes étant majorées des intérêts au taux légal à compter du 21 avril 1997, ainsi que la somme de 15 000 F en application de l'article 700 du NCPC. L'exécution provisoire a été ordonnée, à charge pour la société Trans Fench et la société AXA Global Risks, de fournir une caution couvrant, jusqu'à l'exigibilité de leur remboursement éventuel, toutes les somme versées en exécution du présent jugement, plus les intérêts pouvant avoir couru sur ces sommes.
Sont appelantes de cette décision, la SA Van Hool Belgique par déclaration du 29 mai 2000, la SA TRD et la SA Compagnie MG Europe par déclaration du 21 juin 2000. Par ordonnance rendue le 9 janvier 2001, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des procédures inscrites au rôle sous les numéros 2000-15127 et 2000-11134 et dit qu'elles se poursuivront sous le numéro 2000-11134.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 22 janvier 2002 et auxquelles il est renvoyé, la SA TRD et la SA Compagnie MG Europe soutiennent que c'est à tort que le tribunal a, pour les débouter de leurs demandes à l'encontre de la société Trans Fench, fait application des dispositions prévues à l'article 1384 alinéa 2 du Code civil relatives à la responsabilité du gardien en cas de communication d'incendie. Elles affirment que la Cour de cassation a consacré le principe selon lequel l'incendie provoque par un véhicule terrestre à moteur, fût-il en stationnement, est régi par les dispositions de la loi du 5 juillet 1985. Elles en déduisent que la société Trans Fench, propriétaire et gardien de l'autocar où a pris naissance l'incendie, doit être déclarée responsable des conséquences dommageables de cet incendie. Subsidiairement, les appelantes estiment que la responsabilité de la société Trans Fench est aussi engagée sur le fondement de l'article 1384 alinéa 2 du Code civil dans la mesure où l'expert judiciaire a retenu que la société Trans Fench était responsable avec les sociétés Van Hool France et Van Hool Belgique de l'affaiblissement de la résistance des protections du faisceau électrique dans la zone du foyer, par ses multiples interventions sur le câble de changement de vitesse et par un montage probablement non conforme de ce câble. Les appelantes reprennent donc leurs demandes précisées dans leur assignation du 2 avril 1997. Elles sollicitent en conséquence, par infirmation du jugement entrepris, la condamnation "in solidum" de la société Trans Fench et de son assureur, la société AXA Global Risks, à payer à la Compagnie Aig Europe la somme de 126 736,81 euros (831 339 F) majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 1995, à la SA TRD la somme de 7 622,45 euros (50 000 F) majorée des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 1997, et à chacune d'elles la somme de 5 335,72 euros (35 000 F) en application de l'article 700 du NCPC.
Dans le dernier état de ses écritures signifiées le 10 décembre 2001 et auxquelles il est renvoyé, la société Van Hool Belgique indique s'en rapporter, sur la motivation de son appel, aux conclusions signifiées par son assureur la Compagnie AGF Belgium Insurance, intervenue volontairement à la procédure le 27 novembre 2001. Par contre, elle déclare vouloir répondre aux moyens développés par les autres parties. La société Van Hool Belgique fait valoir d'abord, que la loi du 5 juillet 1985 n'est pas applicable puisqu'il n'est pas réclamé la réparation d'un accident de la circulation mais des conséquences dommageables d'un incendie né dans un véhicule à moteur à l'arrêt. Elle estime donc que c'est à juste titre que le tribunal a rejeté les demandes de la SA TRD et de la Compagnie Aig Europe en se référant à l'article 1384 alinéa 2 du Code civil. La société Van Hool Belgique rappelle ensuite que la société Trans Fench était propriétaire de l'autocar qui lui avait été vendu en novembre 1989 par la société Van Hool France, le fabricant étant la société Van Hool Belgique. Elle soutient que l'action tant principale que récursoire exercée contre la société Van Hool France, de même que celle régularisée par cette société et son assureur à son encontre ne peuvent reposer que sur les règles des vices cachés dans la vente édictées par les articles 1641 et suivants du Code civil. Elle invoque alors pour s'opposer à cette action en garantie des vices cachés le non-respect du bref délai tant à son égard qu'à l'égard de la société Van Hool France. A défaut, elle allègue que les éléments versés aux débats et notamment le rapport d'expertise n'établissent pas l'existence d'un vice caché de fabrication à l'origine de l'incendie et qualifie même de "hasardeuses et"les observations de l'expert judiciaire en raison des négligences commises dans la conservation des preuves et des interventions extérieures avant un constat contradictoire sur l'épave. La société Van Hool Belgique demande ainsi l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a retenu le vice de fabrication de l'autocar et est entré en voie de condamnation à son encontre. Elle réclame que les actions dirigées contre les sociétés Van Hool soient déclarées irrecevables et subsidiairement de dire et juger que la société Trans Fench, responsable à hauteur de 50 % du sinistre, soit condamnée à supporter dans les mêmes proportions les conséquences dommageables de l'incendie. Enfin, elle requiert la condamnation de la société Trans Fench, de la Compagnie AXA Global Risks ou de toute autre partie à lui payer la somme de 3 811,23 euros (25 000 F) en application de l'article 700 du NCPC.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 29 janvier 2002, dont seul le bordereau les différencie de celles signifiées le 22 novembre 2001, et auxquelles il est renvoyé, la société AGF Belgium Insurance SA, assureur de la société Van Hool Belgique déclare, en premier lieu, que dans l'hypothèse où les demandes présentées par la SA TRD seraient fondées, elle ne les couvrirait pas dans la mesure où elle ne garantit que la responsabilité civile exploitation et après livraison de la société Van Hool Belgique. En second lieu, elle critique la décision du tribunal qui a retenu l'existence de vices cachés à l'origine du court-circuit et de l'incendie, alors que l'expert judiciaire a reconnu qu'il ne pouvait déterminer la cause précise de l'incendie et qu'il n'a pas exclu des fautes commises par la société Trans Fench. La société AGF Belgium Insurance SA sollicite donc, comme son assurée, la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SA TRD et la Compagnie Aig Europe de leurs demandes et l'infirmation pour le surplus. Elle réclame, en conséquence, la condamnation de la société Trans Fench et de la Compagnie AXA Global Risks à lui restituer les sommes éventuellement perçues au titre de l'exécution provisoire. Subsidiairement, elle demande que la société Trans Fench soit déclarée responsable à hauteur de 50 % dans la réalisation du sinistre et soit condamnée à supporter dans les mêmes proportions les conséquences dommageables de l'incendie. Elle requiert en toute hypothèse qu'il soit dit et jugé qu'elle ne saurait être tenue que dans les limites contractuelles, le préjudice subi par la société TRD et la Compagnie Aig Europe n'étant pas garanti par le contrat d'assurance souscrit par la société Van Hool Belgique et que la société Trans Fench ainsi que son assureur soient condamnés solidairement à payer à la société Van Hool Belgique la somme de 3 811,23 euros (25 000 F) en application de l'article 700 du NCPC.
Dans le dernier état de leurs écritures signifiées le 12 novembre 2001 et auxquelles il est renvoyé, la société Van Hool France et les AGF font valoir qu'il résulte du rapport d'expertise que les interventions fautives de la société Trans Fench sur les câbles de vitesse sont à l'origine du sinistre, ce qui exclut l'application de la loi du 5 juillet 1985. Quant aux demandes de la société Trans Fench et de la Compagnie AXA Global Risks à leur encontre, les intimées allèguent comme la société Van Hool Belgique que les prétendus vices cachés invoqués par l'expert ne peuvent en aucun cas être à l'origine de l'incendie et qu'en tout état de cause le délai de forclusion de l'article 1648 du Code civil rend irrecevable en l'espèce l'action en garantie des vices cachés. Elles estiment, subsidiairement, qu'en l'absence de détermination précise de l'origine du sinistre, seule la responsabilité de la société Trans Fench doit être retenue, ou au moins à hauteur de 50 %, cette société ayant effectué de multiples interventions, voire des modifications sur le faisceau électrique et les protections électriques. Dans cette hypothèse, elles demandent que le constructeur de l'autocar Van Hool Belgique les garantisse des condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre. Elles concluent donc à l'infirmation du jugement entrepris à titre principal, et au débouté des prétentions des sociétés TRD, Aig Europe, Trans Fench, AXA Global Risks, Van Hool Belgique et de l'assureur de cette dernière. Subsidiairement, elles requièrent la garantie de la société Van Hool Belgique et la rectification de l'omission matérielle contenue dans le dispositif du jugement entrepris, de ce chef de la condamnation à garantie. En tout état de cause, elles demandent la condamnation "in solidum" des sociétés précitées à leur verser la somme de 10 000 F, soit 1 524,49 euros, en application de l'article 700 du NCPC.
La SA AXA Courtage venant aux droits d'Uni Europe et de la société AXA Global Risks et la société Trans Fench sollicitent la confirmation du jugement entrepris dans leurs dernières conclusions signifiées le 1er février 2002. Elles déclarent en effet que la preuve d'une mauvaise intervention de la société Trans Fench n'est pas rapportée et ce d'autant que l'expert judiciaire a expliqué que les changements de câblerie de boîte de vitesse étaient dus à l'absence de tôle de protection pare-chaleur entraînant un grippage des câbles exposés à une température anormale. Elles soutiennent donc qu'aucune faute ne peut être reprochée à la société Trans Fench. Aux condamnations prononcées par le tribunal, elles ajoutent par ailleurs, la condamnation de la société AGF Belgium Insurance SA au paiement des sommes dues "in solidum" avec son assurée et une demande de capitalisation des intérêts assortissant les sommes de 24 216,60 euros et de 181 825,33 euros. Dans la mesure où il serait fait droit cependant aux demandes de la société TRD et de son assureur sur la base de la loi du 5 juillet 1985, les intimées réclament la condamnation in solidum des sociétés Van Hool France et Van Hool Belgique ainsi que de leurs assureurs à les garantir de toutes condamnations pouvant être mises à leur charge. Enfin, la société AXA Courtage et la société Trans Fench demandent la condamnation in solidum des sociétés Van Hool France et Van Hool Belgique ainsi que de leurs assureurs à leur payer la somme de 3 048,98 euros en application de l'article 700 du NCPC.
Sur quoi,
Considérant qu'il n'est pas discuté que la société Trans Fench est propriétaire d'un autocar de marque Van Hool immatriculé 2545 XK 57; que ce véhicule vendu par la SA Van Hool France et fabriqué par la société Van Hool Belgique était assuré par la Compagnie Aig Europe aux droits de laquelle vient la société AXA Courtage; que transportant des écoliers, l'autocar a pris feu, le 22 avril 1995, sur l'aire de stationnement de la station- service Total implantée sur l'autoroute B9, alors que le chauffeur faisait le plein du réservoir de gasoil; que l'incendie qui a détruit l'autocar s'est propagé à l'installation de distribution de gasoil l'endommageant gravement;
Considérant que l'expert judiciaire Alain Tomas, a, dans son rapport, daté du 9 août 1996, localisé le foyer de l'incendie au niveau de l'essieu et du pont arrière et a estimé que son origine était un court-circuit; qu'il a déclaré que "l'état de destruction de l'armoire électrique, la non-conservation du faisceau empêchent la détermination précise de la cause" du court-circuit; qu'il a, toutefois, conclu qu' "à un niveau que nous estimons équivalent, les sociétés Van Hool France et Van Hool Belgique, d'une part, pour les deux vices cachés inventoriés, la société Trans Fench, d'autre part, pour la multiplicité de ses interventions sur le câble de changement de vitesse partagent la responsabilité de l'affaiblissement de la résistance des protections du faisceau électrique dans la zone du foyer";
Considérant que c'est justement que la société TRD, sous- concessionnaire de la distribution de carburant à la station-service Total, dont l'installation de distribution de gasoil a été endommagée, et son assureur la Compagnie Aig Europe demandent, en cause d'appel, l'application de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accident de la circulation;
Qu'il est, en effet, maintenant de jurisprudence constante que la loi du 5 juillet 1985, laquelle exige la survenance d'un accident de la circulation et l'implication d'un véhicule terrestre à moteur, est applicable lorsqu'un véhicule prend feu, quand il se trouve sur la voie publique ou dans un lieu ouvert à la circulation publique, fût-il en stationnement dès lors qu'il a participé à la réalisation du dommage;
Que les circonstances de l'espèce établissent que ces conditions d'application de la loi du 5 juillet 1985 sont réunies; qu'il suit que cette loi est seule applicable, peu important que les demandeurs aient en première instance fondé leur action sur l'article 1384 alinéa 2 du Code civil; que la société TRD victime, n'a pas à démontrer la faute de la société Trans Fench, propriétaire et gardien de l'autocar litigieux, le véhicule étant impliqué; que pas davantage la société Trans Fench et son assureur ne peuvent opposer à la société TRD pour diminuer leur responsabilité la force majeure ou le fait d'un tiers;
Considérant que le préjudice subi par la société TRD a été chiffré sans contestation aucune à la somme de 881 138,95 F HT par Francis Foxonet, expert sapiteur, dans son rapport daté du 6 août 1996; que ce préjudice est direct et certain; qu'il représente le coût des réparations suite au sinistre incendie survenu le 22 avril 1995 ; qu'il doit donc être intégralement réparé par la société Trans Fench et par la Compagnie AXA Courtage, ainsi qu'il sera dit dans le dispositif du présent arrêt, étant noté que la Compagnie Aig Europe justifie d'une indemnisation de la société TRD à hauteur de 831 339 F soit de 126 736,81 euros et que cette dernière a gardé à sa charge la franchise contractuelle de 50 000 F soit 7 622,45 euros;
Considérant, en revanche, que le fait d'un tiers peut être envisagé dans l'action récursoire en garantie exercée par la société Trans Fench et la société AXA Courtage à l'encontre des sociétés Van Hool France et Van Hool Belgique désignées par l'expert judiciaire Alain Tomas comme co-auteurs impliqués dans l'incendie ayant ravagé l'autocar le 22 avril 1995; que dans leurs conclusions d'appel, la société Trans Fench et la société AXA Courtage réclament la condamnation "in solidum" des sociétés Van Hool France et Van Hool Belgique et de leurs assureurs à les garantir des condamnations pouvant être mises à leur charge en application de la loi du 5 juillet 1985;
Considérant qu'il est avéré que cette action récursoire en garantie est fondée sur les vices cachés ayant affecté l'autocar vendu par la société Van Hool France à la société Trans Fench dès sa fabrication; qu'elle soit dirigée contre le fabricant la société Van Hool Belgique ou contre le vendeur la société Van Hool France, cette action doit être intentée dans le bref délai prévu par l'article 1648 du Code civil et dont les juges du fond apprécient souverainement la durée et le point de départ;
Considérant que s'agissant d'une action récursoire, le point de départ du bref délai devrait être en principe la date à laquelle la société Trans Fench et la société AXA Courtage ont été assignées au fond par la société TRD et son assureur, soit le 2 avril 1997;
Mais considérant que la preuve est amplement rapportée que la société Trans Fench et la société AXA Courtage ont eu connaissance de l'existence de vices cachés dès le 15 mai 1995 puisque Monsieur Lebras, expert mandaté par la Compagnie Uni Europe, conclut dans son rapport daté du 15 mai 1995 qu'un vice caché incombant au constructeur est à l'origine de l'incendie du car;
Que de plus, les sociétés Trans Fench et AXA Courtage ont été assignées en référé le 15 mai 1995 par la société TRD et la Compagnie Aig Europe en vue de la désignation d'un expert chargé de rechercher les causes de l'incendie et de fournir tous éléments pour statuer sur les responsabilités respectives; que c'est bien dûment informée par le rapport de Monsieur Lebras que la société Trans Fench assignait le 21 juin 1995 la société Van Hool France "en sa qualité de vendeur de l'autocar, tenu à la garantie des vices cachés" pour lui rendre opposables les opérations d'expertise; que la société Van Hool France a elle-même assigné la société Van Hool Belgique le 13 novembre 1995 pour lui rendre commune l'ordonnance du 30 juin 1995, désignant Alain Tomas comme expert;
Que ces assignations tendant à dénoncer les opérations d'expertise judiciaire sont insuffisantes à interrompre le bref délai de l'article 1648 du Code civil; que la loi exige qu'une action soit intentée contre celui contre lequel on veut prescrire;
Que force est de constater que la société Trans Fench et la société AXA Courtage n'ont assigné en garantie et à titre principal la société Van Hool France et les AGF que le 17 avril 1997 et que la société Van Hool Belgique n'a été attraite en intervention forcée que par la société Van Hool France le 20 mai 1997; que le délai mis pour agir est donc bien trop long compte tenu, de surcroît, du dépérissement des preuves dans cette affaire, en raison de l'état de détérioration de l'armoire électrique et des vols commis sur l'épave de l'autocar; que c'est à tort que la société Trans Fench et la société AXA Courtage ont attendu d'être elles-mêmes assignées au fond le 2 avril 1997 pour agir, alors que l'expert judiciaire Tomas avait déposé son rapport le 9 août 1996, et que surtout la découverte du vice caché ne découlait pas des conclusions d'Alain Tomas mais du rapport d'expertise de Monsieur Lebras comme il a été dit ci-avant, transmis en outre à chacune des parties par Alain Tomas le 24 janvier 1996 après la deuxième réunion d'expertise;
Considérant ainsi que le point de départ du bref délai soit fixé au 15 mai 1995 ou au 24 janvier 1996, l'action récursoire en garantie exercée par la société Trans Fench et la société AXA Courtage dans un délai supérieur à un an après la connaissance certaine du vice caché doit être jugée irrecevable;
Qu'il résulte de cette irrecevabilité d'agir à l'encontre des sociétés Van Hool France et Van Hool Belgique et de leurs assureurs que la société Trans Fench et la société AXA Courtage supporteront seules les condamnations prononcées au profit de la société TRD et de la Compagnie Aig Europe et que les appels en garantie réciproque des sociétés Van Hool France et Van Hool Belgique et de leurs assureurs seront déclarés sans objet;
Considérant qu'il est équitable d'allouer tant à la société TRD qu'à la Compagnie Aig Europe la somme de 2 287 euros en application de l'article 700 du NCPC en cause d'appel; que la société Trans Fench et la société AXA Courtage seront condamnées à payer cette somme;
Qu'il n'est pas inéquitable dans le contexte de l'espèce de laisser à la charge de chacune des autres parties les frais irrépétibles qu'elles ont exposés en première instance et en cause d'appel, que la société Van Hool France et les AGF, d'une part, la société Van Hool Belgique, d'autre part, seront par suite déchargées de la condamnation au paiement d'une somme de 15 000 F accordée par le tribunal à la société Trans Fench et à la société AXA Global Risks;
Par ces motifs, Contradictoirement, Reçoit l'intervention volontaire de la Compagnie AGF Belgium Insurance SA, Rectifie l'omission matérielle contenue dans le dispositif du jugement entrepris ainsi qu'il suit : "Condamne la société Van Hool Belgique à garantir les sociétés Van Hool France et les AGF de toutes les condamnations prononcées contre elles", Au fond, infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Déclare la société Trans Fench seule responsable des conséquences dommageables de l'incendie de l'autocar marque Van Hool survenu le 22 avril 1995, en application de la loi du 5 juillet 1985, Condamne en conséquence "in solidum" la société Trans Fench et la Compagnie AXA Courtage SA venant aux droits de la Compagnie AXA Global Risks SA à payer : - à la SA Compagnie Aig Europe la somme de 126 736,81 euros (831 339 F) majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 1995, - à la SA Total Raffinage Distribution "TRD" la somme de 7 622,45 euros (50 000 F) majorée des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 1997, - à la SA Compagnie Aig Europe et à la SA TRD, chacune la somme de 2 287 euros en application de l'article 700 du NCPC, en cause d'appel, Déclare irrecevable comme tardive, l'action récursoire en garantie fondée sur les vices cachés exercée par la société Trans Fench et la Compagnie AXA Courtage SA à l'encontre de la société Van Hool France et de son assureur les Assurances Générales de France ainsi qu'à l'encontre de la société Van Hool Belgique et de son assureur la Compagnie AGF Belgium Insurance SA, Constate que les appels en garantie réciproques des société Van Hool France et Van Hool Belgique ainsi que de leurs assureurs sont devenus sans objet, Condamne la société Trans Fench et la Compagnie AXA Courtage SA à restituer les sommes éventuellement perçues au titre de l'exécution provisoire, Déboute les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires, Condamne in solidum la société Trans Fench et la Compagnie AXA Courtage SA aux entiers dépens, incluant les frais de l'expertise judiciaire, Admet Maître Teytaud, Maître Olivier, la SCP Gibou-Pignot-Grappotte-Benetreau, avoués, au bénéfice de l'article 699 du NCPC.