CA Paris, 1re ch. H, 28 janvier 2005, n° ECOC0500081X
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Orange Caraïbe (Sté)
Défendeur :
Bouygues Télécom Caraïbe (Sté), France Télécom (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Carre-Pierrat
Conseillers :
M. Le Dauphin, Mme Mouillard
Avoués :
SCP Groppotte Benetreau, SCP Monin
Avocats :
Mes Calvet, Vogel.
La société Orange Caraïbe, détenue à 99 % par la société Orange Holding, elle-même détenue à 99 % par France Télécom, dispose d'une licence d'utilisation de fréquences GSM délivrée par arrêté du 14 juin 1996, modifié par un arrêté du 23 janvier 2002. Cette entreprise a déployé dans les trois départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane un réseau de téléphonie mobile et y propose des offres commerciales de services de téléphonie mobile depuis septembre 1996.
La société Bouygues Télécom Caraïbe, détenue à 99 % par la société Bouygues Télécom, dispose d'une licence de fréquences GSM délivrée par arrêté du 19 juillet 2001. Cette entreprise a déployé un réseau de téléphonie mobile couvant les trois départements des Caraïbes et propose des offres commerciales de services de téléphonie mobile depuis décembre 2000.
Faisant valoir que les sociétés Orange Caraïbe et France Télécom mettent en œuvre diverses pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la téléphonie mobile dans les trois départements français des Caraïbes et soutenant, notamment, que la société Orange Caraïbe abuse de sa position dominante sur ce marché en imposant une clause d'exclusivité aux distributeurs de ses produits ainsi qu'au seul réparateur agréé de terminaux dans les Caraïbes, à savoir la société Cétélec Caraïbe, en pratiquant pour les tarifs qu'elle propose à ses clients une différenciation excessive et discriminatoire entre les appels on net et les appels off net en captant la clientèle par des pratiques de fidélisation abusives, la société Bouygues Télécom Caraïbe a saisi le Conseil de la concurrence par lettre enregistrée le 9 juillet 2004 et a, accessoirement à sa saisine au fond, demandé sur le fondement de l'article L. 464-1 du Code de commerce, que des mesures conservatoires soient prises à l'encontre des sociétés Orange Caraïbe et France Télécom.
Par décision n° 04-MC-02 du 9 décembre 2004, le Conseil de la concurrence a dit :
Article 1er : il est enjoint à Orange Caraïbe, à titre conservatoire et dans l'attente d'une décision au fond, de supprimer dans tous les contrats, en cours ou à venir, conclus avec ses distributeurs indépendants les obligations d'exclusivité liant ses derniers, et notamment la quatrième alinéa du premier article du " Contrat d'agent commercial " et les dispositions de l'article 14 du même contrat intitulé " Non-concurrence ". Orange Caraïbe devra en informer l'ensemble de ses distributeurs indépendants par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification de la présente décision. Cette lettre devra comprendre, en annexe, une copie de l'intégralité de la présente décision.
Article 2 : il est enjoint à Orange Caraïbe, à titre conservatoire et dans l'attente d'une décision au fond, de supprimer l'ensemble des obligations d'exclusivité qu'elle impose à Cétélec Caraïbe. Orange Caraïbe devra informer Cétélec Caraïbe de cette mesure par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : il est enjoint à Orange Caraïbe, à titre conservatoire et dans l'attente d'une décision au fond, de faire en sorte que pour toutes les offres comportant des tarifs différents pour les communications on net, d'une part, et off net, d'autre part, l'écart entre ces tarifs on net et off net ne dépasse pas l'écart entre les coûts qu'Orange Caraïbe supporte pour l'acheminement de ces deux types de communications. Orange Caraïbe en informera ses clients par mention sur leur prochaine facture et par affichage visible dans les agences France Télécom et les points de vente Orange. Cette mesure devra prendre effet dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : il est enjoint à Orange Caraïbe, à titre conservatoire et dans l'attente d'une décision au fond, de permettre que ses clients utilisent les points de fidélité qu'ils ont acquis ou dont ils pourraient faire l'acquisition, en tant qu'à valoir venant en déduction du prix de tout achat d'un bien ou d'un service qu'elle propose à sa clientèle, la valeur du point étant celle fixée par Orange Caraïbe. Cette dernière en informera ses clients par mention sur leur prochaine facture et par affichage visible dans les agences France Télécom et les points de vente Orange de la notification de la présente décision.
LA COUR,
Vu le recours régulièrement formé par la société Orange Caraïbe à l'encontre de la décision susvisée, par voie d'assignation à l'audience du 10 janvier 2005, délivrée à la société Bouygues Télécom Caraïbe, à la société France Télécom, au ministère chargé de l'Economie et au Conseil de la concurrence et aux termes de laquelle la requérante demande à la cour :
- à titre principal, d'annuler la décision déférée,
- à titre subsidiaire, de la réformer.
Mais considérant que la société Orange Caraïbe ne justifie d'aucune atteinte au principe du contradictoire, lequel doit s'apprécier au regard de l'urgence inhérente à la procédure applicable en matière de mesures conservatoires, dès lors qu'elle a disposé d'un temps suffisant pour prendre connaissance et pour répondre utilement, avant la date fixée pour le dépôt de ses propres observations et, à plus forte raison, avant la séance du Conseil du 9 novembre 2004, aux observations par lesquelles la société Bouygues Télécom Caraïbe a complété l'argumentation exposée au soutien de sa saisine et précisé, sur des points mineurs, les demandes qui y étaient formulées ;
Qu'il s'ensuit que la demande d'annulation de la décision déférée n'est pas fondée ;
Sur la recevabilité du recours en tant qu'il est dirigé contre le chef de la décision du Conseil de la concurrence déclarant la saisine recevable :
Considérant qu'aux termes de son assignation (p. 15), la requérante fait valoir que " dès lors qu'aucun élément suffisamment probant ne permet de présumer sérieusement l'existence de pratiques anticoncurrentielles imputables à Orange Caraïbe, la cour ne pourra qu'annuler la décision attaquée en ce qu'elle a prononcé la recevabilité de la saisine de la société Bouygues Télécom Caraïbe " ;
Considérant cependant que si le Conseil de la concurrence a, en accueillant la demande de mesures conservatoires formée par la société Bouygues Télécom Caraïbe, nécessairement admis que la saisine était appuyée d'éléments suffisamment probants, le recours n'est pas recevable en tant qu'il vise ce chef de la décision indépendamment de celui relatif aux mesures conservatoires.
Considérant, en effet, qu'il résulte des dispositions des articles L. 464-7 et L.464-8 du Code de commerce que le recours en annulation ou en réformation devant la Cour d'appel de Paris prévu par ces textes n'est pas ouvert contre des précisions par lesquelles le Conseil de la concurrence estime que les faits invoqués à l'appui de la saisine sont suffisamment probants ;
Sur les mesures conservatoires :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 464-1 du Code de commerce que le prononcé de mesures conservatoires, lesquelles ne peuvent intervenir que si la pratique dénoncée porte une atteinte grave et immédiate à l'économie générale, à celle du secteur intéressé, à l'intérêt des consommateurs ou à l'entreprise plaignante et doivent rester strictement limitées à ce qui est nécessaire pour faire face à l'urgence, implique que l'autorité compétente, si elle n'est pas tenue de constater l'existence d'une pratique anticoncurrentielle avec le même degré de certitude que celui requis pour la décision sanctionnant une telle pratique, caractérise une présomption d'infraction raisonnablement forte aux règles de la concurrence ;
Considérant que le Conseil de la concurrence a exactement défini le marché pertinent comme celui de la téléphonie mobile dans les trois départements français de la zone Antilles-Guyane ; qu'au demeurant, cette appréciation n'est pas critiquée par la requérante ;
Considérant que la société Bouygues Télécom Caraïbe, qui ne le conteste pas davantage, occupe une position dominante sur ce marché ; qu'il suffit de relever ici qu'à la fin du mois de juin 2004, la part de marché d'Orange Caraïbe sur le parc de clients actifs de téléphonie mobile était supérieure à 82 % ;
Considérant, sur les pratiques ayant motivé le prononcé de mesures conservatoires, que le Conseil de la concurrence a, par des motifs complets et pertinents, que la cour fait siens et qui ne sont pas utilement combattus par l'argumentation développée et les pièces produites par la requérante, estimé qu'il peut être raisonnablement présumé que la société Orange Caraïbe exploite abusivement sa position dominante sur le marche considéré en imposant une obligation d'exclusivité et, après cessation des relations contractuelles, de non-concurrence aux distributeurs diffusant ses services, en imposant des liens d'exclusivité au seul réparateur de terminaux mobiles agréés dans les Caraïbes, en appliquant une tarification préférentielle non justifiée aux appels émis par ses clients à l'intérieur de son propre réseau par rapport à ceux destinés aux clients de Bouygues Télécom Caraïbe et enfin, en mettant en œuvre certains programmes tendant à la fidélisation de la clientèle ;
Considérant qu'il suffit de relever ici, en premier lieu, que les contrats d'agent commercial liant la requérante aux distributeurs indépendants, lesquels assurent l'essentiel des ventes Oranges Caraïbe puisque celles réalisées dans les agences France Télécom, autres distributeurs exclusifs des services de téléphonie mobile proposés à Orange Caraïbe et des téléphones associés à ceux-ci, ne représentent que 18 % des ventes à destination du marché résidentiel et 27 % de celles aux entreprises, prévoient systématiquement que l'agent s'oblige à représenter à titre exclusif le service d'Orange Caraïbe et s'interdit, en conséquence, d'accepter la représentation d'un service concurrent sans l'accord exprès et préalable d'Orange Caraïbe que celle-ci " peut refuser à son entière discrétion" ; qu'il est en outre stipulé, sous la mention " Non-concurrence " que l'agent s'engage à ne pas distribuer de quelque manière que ce soit, aux Antilles, de services de radiotéléphonie substituables au service d'Orange Caraïbe, sauf accord écrit et préalable de cette dernière, et que cette obligation de non concurrence s'applique pendant la durée du contrat et deux ans après sa cessation ;
Considérant que de telles clauses, faisant obstacle à la distribution multimarque, entravent l'accès au marché de la distribution dès lors que Bouygues Télécom Caraïbe doit, pour trouver des distributeurs indépendants qualifiés et disposant d'un emplacement attractif, sur des petits territoires, faire des efforts bien supérieurs à ceux qu'il aurait besoin de fournir dans des conditions de concurrence normale, alors surtout que cet opérateur est arrivé sur le marché quatre ans après Orange Caraïbe ; qu'il importe peu, sans l'angle de la licéité de cette pratique, reprochée à une entreprise en position dominante, que la requérante ait, comme elle l'affirme, consenti des investissements significatifs pour l'aménagement de certaines boutiques, en vue de la mise en place de la marque Orange ;
Considérant, en deuxième lieu, que " le contrat de services de maintenance " conclu entre Orange Caraïbe et la société Cétélec Caraïbe, seul réparateur de téléphone mobiles agréé par les constructeurs de ces appareils pour la zone géographique en cause, fait obligation à Cétélec Caraïbe de ne pas effectuer, de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement, sur le territoire, de prestations de maintenance de mobiles au profit d'un concurrent et de ses clients pendant la durée dudit contrat, sauf accord écrit et préalable d'Orange Caraïbe ;
Que l'exclusivité ainsi imposée à Célélec Caraïbe au profit d'Orange Caraïbe, qui a pour effet d'interdire à Bouygues Télécom Caraïbe l'accès aux prestations locales de réparation de téléphones dès lors que cet opérateur n'a pas une activité suffisante pour se doter de son propre centre de réparation en raison de l'importance des coûts fixés à la mise en place d'un tel centre, est de nature à augmenter ses coûts et à dégrader l'image du service offert au consommateur par cet opérateur compte tenu des délais nécessaires à la réparation dans un centre métropolitain et, par voie de conséquence, à susciter la migration de clients au profit de l'opérateur dominant et à rendre plus difficile l'acquisition de nouveaux clients ; qu'est inopérante au regard de la qualification que peut recevoir le comportement ainsi imputé à Orange Caraïbe l'invocation par cette dernière des investissements consentis pour l'installation et le fonctionnement de Cétélec Caraïbe ;
Considérant, en troisième lieu, que le Conseil de la concurrence a constaté, au vu de l'avis émis sur sa demande, le 14 octobre 2004 par l'autorité de régulation des télécommunications, que la société Orange Caraïbe met en œuvre une pratique de surtarification des communications passées par ses clients à destination de ceux de la société Bouygues Télécom Caraïbe (appels off net) par rapport aux communications passées par ses clients à destination de son propre réseau (appels on net), s'étendant à une partie substantielle de sa gamme tarifaire puisqu'elle s'applique aux communications émises en dépassement du forfait contractuel et aux offres de cartes prépayées lesquelles sont très largement utilisées dans la zone géographique considérée ; que le Conseil relève, en outre, conformément à l'avis de l'ART, et sans être utilement contredit que les différences de prix de détail entre les appels on net et les appels off net n'apparaissent pas justifiées par les écarts de coûts d'acheminement de ces appels, au regard des niveaux de prix des terminaisons d'appels facturées par Orange Caraïbe, d'une part, et par Bouygues Télécom Caraïbe d'autre part ;
Considérant que cette pratique de discrimination tarifaire non justifiée par une différence objective de situation, appliquée par un opérateur en position dominante, est de nature à renforcer par un effet de réseau ou " effet de club " dans la mesure où les clients sont incités à restreindre le volume des appels destinés à l'opérateur concurrent et, lors du premier achat ou d'un renouvellement, à tenir compte du réseau auquel appartiennent leurs principaux correspondants ; qu'il en est d'autant plus ainsi lorsqu'une telle pratique est observée sur un marché étroit (moins d'un million de clients potentiels), ne comportant que deux acteurs aux positions fortement asymétriques ;
Considérant, en quatrième lieu, que le marché de la téléphonie mobile de la zone Antilles-Guyanes, où l'on observe pour les départements de la Martinique et de la Guadeloupe un taux de pénétration supérieure à 70 %, est un marché mature, où les primo-accédants sont rares, comme le montre la faible croissance, voire la stagnation du parc total, relevée par l'ART (avis susvisé, p. 6) ; que les deux acteurs ayant seuls déployé des réseaux couvrant l'ensemble de la zone considérée ne peuvent, en conséquence, espérer augmenter leur part de marché qu'en proposant des offres attractives aux clients de leur concurrent ;
Considérant que dans un tel contexte, le dispositif de fidélisation de la clientèle mis en œuvre par la société Orange Caraïbe sous la dénomination " Changez de mobile ", en vertu duquel sont attribués aux clients titulaires d'un forfait (pré-payé ou post-payé) des points dont le nombre est indiqué sur la facture mensuelle, en fonction notamment du montant de celle-ci, mais qui ne peuvent être utilisés par l'abonné que par imputation sur le prix d'un nouveau terminal et sous la condition de souscrire un nouvel abonnement d'une durée de 24 mois, à défaut de quoi le client perd le bénéfice des points accumulés, est de nature à produire un effet de cristallisation des écarts de parts de marché en dissuadant le consommateur de faire jouer la concurrence au seul moment où cela lui est possible, c'est-à-dire au terme de sa période d'engagement ;
Considérant, quant à l'atteinte grave et immédiate à l'économie générale, à celle du secteur intéressé, l'intérêt des consommateurs ou à l'entreprise plaignante, que les pertes cumulées de la société Bouygues Télécom Caraïbe, dont la part de marché était limitée à 17,5 % fin juin après avoir atteint 26 % et dont les pertes cumulées étaient proches de 80 millions d'euro fin 2003, sont d'une ampleur telle qu'il existe un risque sérieux de désengagement de Bouygues Télécom, son unique actionnaire, en l'absence de représentant de la situation financière ; que la sortie du marché du seul opérateur de réseau alternatif, qui aurait pour conséquence de soustraire Orange Caraïbe à toute pression concurrentielle, ne pourrait qu'entraîner des conséquences négatives pour l'économie du secteur intéressé et l'intérêt des consommateurs ; que le Conseil observe pertinemment que le maintien de Bouygues Télécom Caraïbes sur le marché dans les conditions actuelles, impliquant un report des investissements dans les nouvelles technologies nécessaires à l'amélioration du service rendu au consommateur aurait, à terme, des efforts proches de ceux de la situation de monopole qu'emporterait le retrait du groupe Bouygues Télécom ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la requérante, les pratiques d'éviction ci-dessus caractérisées, qui tendent à entraver le marché de la distribution au détail et les transferts de clientèle et à élever le coûts du concurrent, sont, par leur cumul et leur durée, la cause directe et certaine de l'atteinte à l'entreprise plaignante - dont il n'est pas établi qu'elle ait ignoré les spécificités du marché antillo-guyanais, sur lequel elle a fortement investi - et, à travers elle, au secteur concerné et aux intérêts des consommateurs ;
Considérant que, sous réserve de la précision ci-après apportée quant au délai d'exécution des troisièmes et quatrièmes injonctions, les mesures conservatoires prises par le Conseil de la concurrence, proportionnées à l'atteinte relevée, sont strictement limitées à ce qui est nécessaire pour faire face à l'urgence ;
Considérant, à cet égard, d'abord, s'agissant des mesures relatives aux obligations d'exclusivité pesant sur les distributeurs d'Orange Caraïbe et sur le société Cétélec Caraïbe, que la situation ci-dessus décrite impose la levée sans condition ni réserve de l'ensemble de ces obligations, cette mesure n'ayant pas, au demeurant, pour conséquence de priver Orange Caraïbe du bénéfice commercial lié aux investissements dédiés à la marque Orange ;
Considérant, ensuite, qu'en donnant injonction à l'opérateur dominant de faire en sorte que pour toutes les offres comportant des tarifs différents pour les communications on net, d'une part, off net, d'autre part, l'écart entre ces tarifs ne dépasse pas l'écart entre les coûts qu'Orange Caraïbe supporte pour l'acheminement de ces deux types de communication, le Conseil n'a pas pour autant retiré à cette dernière la maîtrise de ses prix de détail ni " interdit la souplesse nécessaire pour une bonne politique commerciale adaptée aux besoins des consommateurs ".
Considérant, encore, qu'Orange Caraïbe ne rapporte pas la preuve de l'inadaptation alléguée du champ d'application de la quatrième injonction relative à l'utilisation des points acquis dans le cadre de son programme de fidélisation aujourd'hui dénommé " Changez de mobile ", étant rappelé que les points acquis par l'abonné ne peuvent être actuellement dépensés que pour l'achat d'un bien, à savoir un téléphone mobile ;
Que la requérante est en revanche fondée en sa demande tentant à ce que les délais maximum de mise en œuvre des troisième et quatrième injonctions soient portés à quatre mois à compter de la date de notification de la décision déférée, eu égard notamment aux impératifs techniques liés aux modifications à apporter à son système de facturation et aux dispositions de l'article L. 121-84 du Code de la consommation issues de loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 selon lesquelles tout projet de modification des conditions contractuelles de fourniture d'un service de communications électroniques est communiqué par le prestataire au consommateur au moins un mois avant son entrée en vigueur ;
Considérant qu'il y a lieu de rejeter les demandes réciproquement formées en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Par ces motifs : Rejette le recours en annulation formé par la société Orange Caraïbe ; Réforme la décision n° 04-MC-02 du 9 décembre 2004 du Conseil de la concurrence mais seulement en ce qu'elle a fixé à deux mois à compter de la notification de ladite décision le délai de mise en œuvre des troisième et quatrième injonctions ; Et statuant à nouveau de ce chef : Fixe à quatre mois à compter de la notification de la décision susvisée du Conseil de la concurrence le délai maximum de mise en œuvre des troisième et quatrième injonctions par la société Orange Caraïbe ; Rejette toute autre demande ; Condamne la société Orange Caraïbe aux dépens.