Cass. com., 6 juillet 1999, n° 96-20.970
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Société nouvelle de construction et de travaux publics (Sté)
Défendeur :
Trouvay-Cauvin (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bezard
Rapporteur :
Mme Vigneron
Avocat général :
Mme Piniot
Avocats :
SCP Philippe, François-Régis Boulloche, SCP Ghestin
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 4 septembre 1996), que la Société nouvelle de construction et de travaux publics (SNCTP) a commandé du matériel à la société Trouvay-Cauvin pour la réalisation d'un réseau de chauffage urbain ; que cette société a assigné la SNCTP en paiement du solde du prix du matériel et de dommages et intérêts pour résistance abusive ; que la SNCTP s'est opposée à ces prétentions en demandant de fixer à un montant égal au solde du prix sa créance indemnitaire en réparation de son préjudice causé par la fourniture de joints défectueux et d'ordonner la compensation entre les créances des parties ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la SNCTP reproche à l'arrêt d'avoir accueilli les demandes de la société Trouvay-Cauvin, alors, selon le pourvoi, que le jugement doit être signé par l'un des juges qui ont assisté aux débats et au délibéré, la régularité de la signature devant résulter des mentions du jugement ; que l'arrêt attaqué, qui ne précise pas l'identité du magistrat signataire de la décision, est ainsi entaché d'une violation de l'article 456 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que les mentions de l'arrêt, selon lesquelles lors des débats et du délibéré, la cour d'appel était composée de M. Casorla, président, de M. Poumarede et de Mme Letourneur-Baffert, conseillers, l'arrêt a été prononcé par Mme Letourneur-Baffert, et la signature apposée au bas de la minute a été précédée des mots "pour le président empêché" impliquant que la minute a été signée par Mme Letourneur-Baffert, ayant délibéré, qui avait prononcé l'arrêt ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche : - Vu les articles 1641 et 1645 du Code civil ; - Attendu que pour rejeter la demande de la SNCTP en réparation de son préjudice et condamner, en conséquence, cette société à payer à la société Trouvay-Cauvin la somme de 190 907,99 francs en principal, l'arrêt, après avoir relevé que le réseau de chauffage urbain a présenté des fuites en raison de joints défectueux fournis par la société Trouvay-Cauvin, retient que cette société n'était pas le fabricant des joints, qu'elle n'avait pas d'obligation en matière d'assistance au montage des tuyauteries et des joints, et qu'elle a livré en urgence des joints de remplacement ;
Attendu qu'en statuant ainsi après avoir retenu l'existence d'un vice caché des joints vendus et relevé que la société Trouvay-Cauvin était une "société spécialisée en la matière", ce dont il résultait qu'elle était vendeur professionnel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les textes susvisés ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa cinquième branche : - Vu l'article 1351 du Code civil ; - Attendu que la cour d'appel a confirmé le jugement du Tribunal de commerce du Havre, du 30 mars 1993 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que ce jugement avait été infirmé par arrêt de la Cour d'appel de Rouen du 27 octobre 1994, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche : - Vu l'article 1153, alinéa 4, du Code civil ; - Attendu que l'arrêt condamne la société SNCTP à payer à la société Trouvay-Cauvin, d'un côté, la somme de 190 907, 49 francs à titre de solde du prix du matériel avec intérêts de droits à compter de l'assignation et, d'un autre coté, la somme de 20 000 francs à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée ;
Attendu qu'en allouant ainsi des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires, sans constater l'existence, pour la société Trouvay-Cauvin, d'un préjudice indépendant du retard apporté au paiement de sa créance, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 septembre 1996, entre les parties, par la Cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Caen.