Cass. com., 26 octobre 1999, n° 96-22.538
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
La Tour d'Auxois (SARL)
Défendeur :
Périé (Consorts), La Tour d'Auxois (SCI)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bezard
Rapporteur :
Mme Vigneron
Avocat général :
M. Jobard
Avocats :
Mes Blondel, Roué-Villeneuve
LA COUR : - Donne acte à la société La Tour d'Auxois du désistement de son pourvoi, en tant que dirigé contre la société civile immobilière La Tour d'Auxois ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 23 octobre 1996), que M. Perié, Mme Jacqueline Périé et Mme Marie-Louise Périé (les consorts Périé) ont vendu un fonds de commerce d'hôtel-restaurant à la société La Tour d'Auxois (la société) ; que celle-ci, se plaignant que les locaux servant à l'exploitation du fonds n'étaient pas conformes aux règles d'hygiène et de sécurité, a assigné les consorts Perié en réduction du prix de vente ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches : - Attendu que la société reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande fondée sur le manquement des consorts Périé à leur obligation de délivrance alors, selon le pourvoi, d'une part, que statue sur le fondement de motifs inopérants la cour d'appel qui, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance par le vendeur de son obligation de délivrer une chose conforme à des normes impératives, se fonde exclusivement sur l'entrée en possession de l'acheteur et l'exploitation continue, par celui-ci, de la chose vendue ; qu'ainsi la cour d'appel ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1604 du Code civil ; alors, d'autre part, que selon l'article R. 123-43 du Code de la construction, les exploitants sont tenus de s'assurer que les installations ou équipements sont établis, maintenus et entretenus en conformité avec les dispositions réglementaires ; qu'ils doivent faire procéder périodiquement en cours d'exploitation aux vérifications nécessaires par des organismes ou personnes agréés dans les conditions fixées par arrêté du ministre de l'Intérieur et des ministres intéressés ; qu'en décidant que les consorts Périé, vendeurs et précédents exploitants de l'hôtel, n'étaient pas soumis à cette disposition, la cour d'appel la méconnaît ; et alors, enfin que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que, dans ses conclusions régulières signifiées le 1er août 1996, la société demandait à la cour d'appel de "réformer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Dijon le 1er juin 1995" et, "au principal, dire et juger que les consorts Périé ont manqué à leur obligation de délivrance" et, "très subsidiairement, dire et juger qu'ils seront tenus à garantie des vices cachés" ; qu'ainsi il n'existait aucune incompatibilité entre les chefs de demande, si bien qu'en écartant la demande principale au motif que l'action estimatoire ne sanctionne pas la méconnaissance de l'obligation de délivrance, la cour d'appel viole l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que, saisie par la société d'une demande en réduction du prix de vente fondée, à titre principal, sur l'inexécution par les vendeurs de leur obligation de délivrance, c'est sans méconnaître l'objet du litige que la cour d'appel, qui a relevé que la société était entrée en possession du fonds de commerce le jour de la vente, a retenu qu'il n'était pas établi que les consorts Périé avaient donné à la société des assurances fallacieuses concernant la conformité de leur établissement aux normes d'hygiène et de sécurité et en a déduit que les consorts Périé avaient rempli leur obligation de délivrance ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en second lieu, que la cour d'appel n'a pas dit que les consorts Périé n'étaient pas soumis aux dispositions de l'article R. 123-43 du Code de la construction ; D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que la société reproche encore à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande fondée sur la garantie des consorts Périé à raison des vices cachés de la chose vendue alors, selon le pourvoi, d'une part, que la qualité de professionnel de l'acquéreur, fût-elle établie, ne suffit pas à elle seule pour conférer au vice de la chose un caractère apparent, si bien qu'en décidant le contraire au seul motif que l'un des associés de la société était un professionnel de la restauration et que d'autres associés avaient passé plusieurs semaines dans l'établissement hôtelier acquis, ce qui en soi n'établissait d'ailleurs nullement une qualité de "professionnel" de l'hôtellerie, la cour d'appel ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1642 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'en validant la clause d'exclusion de garantie contenue dans l'acte de vente du fonds de commerce, au seul motif qu'une telle clause est valable entre professionnels, de même spécialité, cependant qu'elle constatait seulement que l'un des associés de la société, acheteur du fonds, exerçait le métier de chef cuisinier, et que les autres associés avaient seulement séjournés plusieurs semaines dans l'établissement, la cour d'appel qui ne constate pas in concreto une identité de compétence entre vendeur et acheteur, ne justifie toujours pas sa décision au regard de l'article 1643 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que les consorts Périé ont affirmé, sans être contredits, que, lors de la vente du fonds, l'un des associés de la société exerçait le métier de chef de cuisine, la cour d'appel a dit que cette société est un acquéreur professionnel ; que l'arrêt retient encore qu'elle aurait dû s'apercevoir que l'hôtel-restaurant des consorts Périé était ancien et nécessitait des travaux de modernisation pour être aux normes de sécurité et d'hygiène les plus récents ; qu'en l'état de ces appréciations, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la seconde branche, la cour d'appel a déduit que les vices n'étaient pas cachés et a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.