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Décisions

Cass. com., 12 octobre 1999, n° 96-22.578

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Transocéan (SARL)

Défendeur :

Gamma Cadjee (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bezard

Rapporteur :

Mme Vigneron

Avocat général :

M. Lafortune

Avocats :

SCP Gatineau, Me Blondel

T. com. Saint-Denis, du 22 mars 1995

22 mars 1995

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses six branches : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 3 septembre 1996), que la société Gamma Cadjee (société Gamma) a vendu un autocar à la société Transocéan ; que cette société a assigné la société Gamma en réduction du prix sur le fondement de la garantie des vices cachés de la chose vendue ;

Attendu que la société Transocéan reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, de première part, qu'un acheteur peut, après avoir exercé une action rédhibitoire, engager une action estimatoire dès l'instant où aucune décision irrévocable n'est intervenue à l'occasion de sa première action ; que la société Transocéan démontrait dans ses écritures d'appel que sa seconde action tendant à obtenir la réduction du prix de vente sur le fondement de l'action estimatoire avait été introduite le 17 juin 1993, soit avant que le délai de pourvoi relatif au premier arrêt signifié le 4 juin 1993 de la cour d'appel ne soit expiré et donc que cette première décision soit devenue irrévocable ; qu'en affirmant péremptoirement que le premier arrêt rendu par la cour d'appel était irrévocable sans expliquer en quoi cette décision revêtait un tel caractère, la cour d'appel a privé sa décision de motif en violation des articles 455 et 528 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de deuxième part, que l'autorité de chose jugée suppose une identité d'objet et de cause entre la chose demandée et jugée par la première décision et la chose demandée et jugée par la seconde décision ; qu'en l'espèce, la société Transocéan invoquant les vices cachés affectant le véhicule acheté et rendant ce dernier impropre à son usage avait tout d'abord introduit une action rédhibitoire ; que par son arrêt du 5 mars 1993, la cour d'appel avait écarté cette demande de résiliation du contrat de vente faute pour la société Transocéan de caractériser en quoi le véhicule était impropre à son usage ; que lors de la seconde procédure, la société Transocéan avait demandé, sur le fondement de l'action estimatoire, la réduction du prix de vente en invoquant des troubles nuisant au bon usage du véhicule ; que cette demande n'avait jamais été formulée ni tranchée lors de la procédure antérieure ayant donné lieu à arrêt du 5 mars 1993 ; qu'en opposant à cette demande l'autorité de chose jugée par ce dernier arrêt, la cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil ; alors, de troisième part,, que sous couvert d'interprétation, les juges ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis des documents dont ils doivent apprécier la portée ; que par son premier arrêt du 5 mars 1993, si la cour d'appel avait écarté la demande rédhibitoire de la société Transocéan car la chose restait propre à son usage, elle avait néanmoins retenu l'existence de nombreux défauts affectant le véhicule, défauts qui avaient été évalués à 55 000 francs ; qu'en relevant que par ce premier arrêt la cour d'appel avait dit qu'il n'y avait pas de vices cachés, la cour d'appel a dénaturé cette décision en violation de l'article 1351 du Code civil ; alors, de quatrième part, que dans ses écritures d'appel, la société Gamma se contentait d'invoquer l'autorité de chose jugée du premier arrêt rendu le 5 mars 1993 par la cour d'appel pour faire échec à la demande en réduction du prix de vente introduite par la société Transocéan ; qu'en relevant pour dire irrecevable cette dernière demande que la société Gamma avait fait remarquer avec pertinence que cette action avait été intentée trop tardivement, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de cinquième part, que le juge doit en toute circonstance faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant que la société Gamma avait souligné le caractère tardif de l'action estimatoire intentée près de quatre ans après la vente alors que ni cette société ni a fortiori la société Transocéan n'en faisait état, la cour d'appel qui n'a pas invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, a méconnu le principe du contradictoire et a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que toute action en justice interrompt le délai de prescription ; qu'après avoir saisi le juge des référés d'une demande d'expertise aux fins de déterminer les vices affectant le véhicule acheté, la société Transocéan a assigné, dès le dépôt du rapport expertal, son vendeur aux fins d'obtenir la résiliation de la vente ; que par une première décision passée en force de chose jugée, la cour d'appel a jugé que l'acheteur avait intenté son action dans le bref délai ; qu'en retenant pour y faire échec que l'action estimatoire de la société Transocéan avait été introduite tardivement, soit près de quatre ans après la vente, alors que l'interruption du bref délai intervenue à l'occasion de cette première instance devait bénéficier à l'acheteur dans le cadre de cette seconde action, la cour d'appel a violé l'article 1648 du Code civil ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, après avoir énoncé que l'acheteur qui a le choix entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire peut, après avoir exercé l'une, exercer l'autre tant qu'il n'a pas été statué sur sa demande par décision passée en force de chose jugée, l'arrêt constate, hors toute dénaturation, que la société Transocéan a engagé la présente action estimatoire après avoir été déboutée de son action en résolution de la vente pour vices cachés par arrêt de la cour d'appel du 5 mars 1993, faisant ainsi ressortir que cette décision est passée en force de chose jugée, et en déduit que l'action estimatoire est irrecevable ; que par ces seuls motifs et abstraction faite de ceux critiqués par les différentes branches du moyen, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses six branches ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.