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Décisions

Cass. com., 19 octobre 1999, n° 97-18.206

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Tois (Epoux)

Défendeur :

Bonnefoy (Epoux), Agence du donjon (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bezard

Rapporteur :

Mme Mouillard

Avocat général :

Mme Piniot

Avocats :

SCP Delaporte, Briard, Me Copper-Royer

T. com. Louviers, du 19 mai 1994

19 mai 1994

LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. et Mme Tois que sur le pourvoi incident relevé par la société Agence du donjon ; - Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué (Rouen, 15 mai 1997) que, par un acte sous seing privé du 1er octobre 1993 établi par la société Agence du donjon, M. et Mme Tois ont cédé un fonds de commerce de garage exploité sous l'enseigne "Garage du manoir" à M. et Mme Bonnefoy ; que ces derniers, à qui n'a pas été transmis le bénéfice du contrat "agent service Renault" dont les époux Tois étaient titulaires, ont assigné ces derniers en annulation de la vente, subsidiairement en réfaction du prix, solidairement avec la société Agence du donjon ;

Sur le premier moyen, commun au pourvoi principal et au pourvoi incident : - Attendu que les époux Tois et la société Agence du donjon font grief à l'arrêt d'avoir dit y avoir lieu à réduction du prix de vente du fonds de commerce en application des articles 1641 et 1644 du Code civil, et d'avoir en conséquence condamné les époux Tois, solidairement avec la société Agence du donjon, à supporter la réduction du prix de vente qui serait évaluée à dire d'expert alors, selon le pourvoi, que la mise en œuvre de la garantie du vendeur, sur le fondement de l'article 1641 du Code civil, suppose démontrée l'existence d'un défaut caché, antérieur ou concomitant à la vente, inhérent à la chose vendue et la rendant impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il l'avait connu ; que la cour d'appel ne pouvait donc condamner M. et Mme Tois à garantir les époux Bonnefoy sur le fondement de l'article 1641 du Code civil sans caractériser l'existence d'un défaut caché inhérent au fonds de commerce cédé aux époux Bonnefoy par M. et Mme Tois, antérieur ou concomitant à la cession, et répondant aux conditions posées par l'article 1641 précité ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient, justifiant légalement par là-même sa décision, que les époux Bonnefoy ont acquis un garage agréé par la marque Renault, pensant, ce qui était essentiel à leurs yeux, bénéficier du contrat "agent service Renault" concédé aux vendeurs, mais qu'il n'ont pu obtenir cette qualification parce que les époux Tois, tout comme le rédacteur de l'acte, ont omis de les informer que la transmission de l'agrément de la marque devrait être sollicitée auprès du concessionnaire par leurs soins ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal : - Attendu que M. et Mme Tois reprochent aussi à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande reconventionnelle en paiement du solde du prix du stock de pièces cédé aux époux Bonnefoy alors, selon le pourvoi, que, pour admettre que les époux Bonnefoy étaient entièrement libérés par le paiement d'une somme de 30 000 francs inférieure à celle convenue entre les parties, la cour d'appel aurait dû constater que les pièces de marque Renault vendues par M. et Mme Tois présentaient des vices cachés et que ces vices étaient de nature à rendre les pièces impropres à l'usage auquel elles étaient destinées ou qu'ils diminuaient tellement cet usage que les acquéreurs n'en auraient donné qu'un moindre prix s'ils les avaient connus ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du Code civil ;

Mais attendu qu'en estimant que la somme versée sur le prix du stock de pièces détachées était satisfactoire, ce stock étant en grande partie devenu inutile dès lors que la clientèle n'était plus liée à la marque Renault, la cour d'appel n'a fait qu'apprécier souverainement le préjudice subi par les acquéreurs en conséquence du vice caché affectant le fonds vendu ; que le moyen est inopérant ;

Et sur le troisième moyen du pourvoi principal et le second moyen du pourvoi incident, qui sont identiques : - Attendu que les époux Tois et la société Agence du donjon font enfin grief à l'arrêt d'avoir décidé que la réduction du prix de vente du fonds de commerce serait évaluée à dire d'expert, avec mission d'évaluer la valeur du fonds de commerce de garage alors, selon le pourvoi, que le juge ne peut refuser d'exercer son office en se dessaisissant et en déléguant ses pouvoirs à un tiers ; qu'en l'espèce, il appartenait à la cour d'appel de fixer le montant de la réduction du prix de vente du fonds de commerce devant être supportée, selon elle, par les époux Tois, solidairement avec la société Agence du donjon, la mission de l'expert ne pouvant être que de donner un avis de pur fait sur les éléments d'évaluation du prix de vente du fonds de commerce ; qu'en décidant néanmoins que la réduction du prix de vente serait fixée à dire d'expert, se dessaisissant et déléguant ainsi ses pouvoirs à l'expert qu'elle désignait, la cour d'appel a méconnu son office et violé l'article 4 du Code civil et les articles 5 et 481 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en recourant à une expertise afin de déterminer la valeur du fonds cédé, privé de l'agrément Renault, la cour d'appel n'a pas méconnu ses pouvoirs ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette les pourvois tant principal qu'incident.