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Décisions

CA Aix-en-Provence, 2e ch. com., 25 mai 2001, n° 97-16912

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Nicolas

Défendeur :

Sud Est Boissons (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dragon

Avoués :

SCP Sidier, SCP Primout-Faivre

Avocats :

Mes Bertolloto, Houlliot.

T. com. Toulon, du 11 juin 1997

11 juin 1997

Faits procédure et arguments des parties :

M. Jean-Pierre Nicolas a relevé appel d'un jugement, rendu par le Tribunal de commerce de Toulon le 11 juin 1997, et l'ayant condamné à payer à la SA Sud Est Boissons les sommes de 67 174 F avec intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 1996 et 2 500 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il expose qu'exploitant un fonds de commerce de débit de boisson sis à Toulon, il était lié par un "contrat exclusif d'achat de boissons" avec la SDB Porta depuis le 7 septembre 1992, et que cette société ayant été absorbée par la société Sud Est Boissons, cette dernière l'a mis en demeure, le 15 avril 1996, de respecter ses engagements et ne pas avoir acquis, en 1995 pour 100 000 F de produits, mais seulement 31 104 F [sic]; il conteste le jugement déféré qui a fait application de l'article 7 du contrat précité et l'a condamné au paiement d'une indemnité forfaitaire de 25 % sur un chiffre non réalisé.

Il invoque la nullité du contrat d'une part pour non-respect des dispositions sur le contrat de vente, et particulièrement celles relatives à l'indétermination des prix de vente des marchandises dans une convention qui n'est pas un contrat-cadre, en ce qu'il est conclu entre un distributeur et un détaillant, et d'autre part pour abus de position dominante contraire à l'article 86 du traité de Rome.

Il conteste, à titre subsidiaire avoir signé la convention sur laquelle des mentions ont été apposées postérieurement à sa signature et sur des pages non paraphées.

Il conteste avoir reçu la contre-partie de 17 000 F prévue à l'article 1 du dit contrat et fait valoir enfin que l'application de la clause pénale est infondée dans la mesure où le chiffre d'affaires réalisé en 1995 était de 55 419,66 F et non de 31 104 F, comme le prétend son adversaire.

Il demande en conséquence le déboutement de la SA Sud Est Boissons et sa condamnation à lui payer les sommes de 20 000 F à titre de dommages et intérêts et 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SA Sud Est Boissons conclut à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de M. Nicolas à lui payer, en outre, la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'une jurisprudence récente a écarté l'application des dispositions de l'article 1129 du Code Civil pour les contrats de bière et que seul un abus dans la fixation des prix peut être à l'origine d'une éventuelle annulation ou résiliation du contrat.

Elle expose que l'abus de position dominante ne peut être invoqué à bon droit en l'espèce alors qu'elle ne détient aucun monopole et que M. Nicolas a contracté en connaissance de cause.

Elle conteste avoir commis un abus de blanc-seing dans le cadre d'un contrat qui n'est soumis à aucune condition de forme, qui comporte la signature de l'appelant et est d'un seul tenant, alors même que M. Nicolas ne rapporte pas la preuve de ce que l'acte n'a pas été passé suivant ses intentions.

Elle expose enfin que trois chèques ont été remis à M. Nicolas pour un montant total de 16 430,72 F.

Motifs de la décision:

La recevabilité de l'appel n'est pas contestée; en l'absence de moyen constitutif susceptible d'être relevé d'office, il convient de le déclarer recevable.

L'examen formel du contrat intervenu le 7 décembre 1992 entre M. Nicolas et la SDB Porta, à laquelle il n'est pas contesté qu'a succédé la SA Sud Est Boissons permet de constater qu'il contient, in fine, la signature de M. Nicolas, et qu'il est d'un seul tenant, en deux feuilles ouvertes, ce qui permet d'affirmer que M. Nicolas, qui ne l'a certes pas paraphé à chaque page, en a accepté les conditions manuscrites; il ne rapporte pas d'ailleurs la preuve, qui lui incombe, de la dénaturation de ses intentions et le dit contrat, sous-seing privé, n'est pas soumis à des conditions de forme précises.

Au fond, la convention contestée est un contrat-cadre à exécutions successives et ne peut être considéré comme un contrat de vente, et dans ces conditions, l'indétermination invoquée du prix des contrats ultérieurs ne peut affecter sa validité, sauf à apporter la preuve de l'existence d'abus dans la fixation du prix, ce qui n'est nullement établi, alors même qu'il y est prévu, en son article 4, que "les parties déclarent avoir eu connaissance et accepté les prix et conditions de vente de l'entreprise fournisseur" et qu'il est même visé, en cas de contestation de "s'en remettre à l'avis de l'expert désigné par le tribunal de commerce saisi par la partie la plus diligente".

Par ailleurs, aucun monopole n'étant invoqué à l'égard de la SA Sud Est Boissons, la référence à l'article 86 du traité de Rome est inopérante et aucun abus de position dominante ne peut être invoqué avec succès à son égard.

Le défaut d'exécution, par la société Sud Est Boissons de ses propres obligations n'est pas non plus établi, dès lors que celle-ci fourni les références et dates des chèques adressés à M. Nicolas et n'est pas contredite utilement de ce chef.

Enfin, l'article 7 du contrat ayant prévu en cas d'inexécution le paiement d'une clause pénale forfaitaire de 25 % du chiffre d'affaires à réaliser, M. Nicolas ne peut en contester sérieusement le montant dès lors qu'il n'a pas atteint le dit chiffre.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé. Vu les articles 696 et 700 du nouveau Code de procédure civile,

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, - Reçoit l'appel - Confirme le jugement déféré - Y ajoutant, condamne M. Jean Pierre Nicolas à payer à la SA Sud Est Boissons la somme de 10 000 F [1 524,49 euros] en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile - Le condamne aux dépens, avec distraction, pour ceux d'appel, au profit de la SCP Primout-Faivre, avoué, sur son affirmation qu'elle en a fait l'avance sans avoir reçu provision.