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Décisions

CA Rouen, 1re ch. 1er cabinet, 19 décembre 2001, n° 98-01923

ROUEN

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Debretagne

Défendeur :

Azur Assurances (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Brunhes

Conseillers :

Mme Jourdan, M. Gallais

Avoués :

SCP Hamel Fagoo, SCP Gallière Lejeune Marchand Gray

Avocat :

Me Dubois.

TGI Rouen, du 9 avr. 1998

9 avril 1998

En vertu d'un traité de nomination du 26 juin 1984, prenant effet au 15 juillet 1984, Monsieur Thierry Debretagne a exercé les fonctions d'agent général de la société Assurances Mutuelles de France, appartenant au Groupe Azur, à Petit-Quevilly.

Il a, en outre, à compter du mois de janvier 1993, commencé à exploiter un portefeuille de courtage.

Faisant état d'une vérification comptable qui laissait apparaître au 31 mars 1995 un solde débiteur de 503 040,71 F, le Groupe Azur a notifié le 3 avril 1995 à Monsieur Debretagne la révocation avec effet immédiat de son mandat d'agent général.

Monsieur Debretagne a opté pour le paiement d'une indemnité compensatrice.

Il a cependant continué à effectuer des opérations d'assurance, notamment à Petit-Quevilly.

Le 2 août 1995, le Groupe Azur a assigné Monsieur Debretagne devant le Tribunal de grande instance de Rouen afin qu'il soit condamné au paiement de la somme de 535 118,71 F outre les intérêts légaux depuis le 31 mars 1995 et qu'il soit déclaré déchu de son droit à indemnité compensatrice.

Une transaction est intervenue entre les parties le 3 août 1995.

Monsieur Debretagne a, de son côté, assigné le 27 mars 1996 devant le même tribunal le Groupe Azur aux fins de condamnation de celui-ci au paiement de la somme de 174 571 F.

Le Groupe Azur a alors sollicité l'exécution du protocole d'accord du 3 août 1995 ainsi que des dommages et intérêts à hauteur d'un million de francs en raison des agissements de Monsieur Debretagne.

Par jugement du 9 avril 1998, le tribunal a:

- constaté que Monsieur Debretagne n'a pas exécuté les obligations contractées dans le protocole transactionnel du 3 août 1995 ;

- ordonné en conséquence la production par Monsieur Debretagne du listing des affaires composant son portefeuille au 30 août 1995;

- condamné Monsieur Debretagne, toutes compensations opérées, à payer à la compagnie Assurances Mutuelles de France la somme de 196 398,71 F ainsi qu'une indemnité de 6 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Monsieur Debretagne a interjeté appel de cette décision.

Après avoir sollicité, par conclusions du 10 mars 2000, la réformation du jugement et présenté diverses demandes, il a, dans le dernier état de ses écritures signifiées le 25 avril 2000, exposé avoir déposé plainte avec constitution de partie civile à l'encontre de la société Azur Assurances et de son agent, Monsieur Michel Leroux, pour escroquerie et recel et demandé en conséquence à la cour de surseoir à statuer sur son appel jusqu'à l'issue de la procédure pénale.

La SA Azur Assurances s'y est opposée et a formé appel incident.

Par arrêt du 11 octobre 2000 auquel il est renvoyé pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions initiales des parties, la cour a dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer et ordonné la réouverture des débats à l'audience du 31 octobre 2001 afin que soit précisée pour le 30 juin 2001 au plus tard, la portée des écritures de Monsieur Debretagne signifiées le 10 mars 2000.

Monsieur Debretagne a conclu le 25 juin 2001 puis le 14 septembre 2001.

Aux termes de ses dernières écritures, il demande à la cour de:

- Débouter la partie adverse de sa demande d'irrecevabilité concernant l'article 564 du nouveau Code de procédure civile,

- Dire et juger que l'article 567 du nouveau Code de procédure civile est applicable,

- Débouter le Groupe Azur de toutes ses demandes,

- Réformer le jugement entrepris,

- Qualifier la transaction du 3 août 1995 d'escroquerie et en conséquence l'annuler,

- Condamner Azur Assurances à lui payer:

* la somme de 103 601 F au titre de l'article 26 du statut des AGA,

* la somme de 400 000 F au titre de l'article 12,

* la somme de 50 0000 F au titre de l'article 27,

* la somme de 200 000 F au titre de l'article 520-1 du Code des assurances,

* le tout avec intérêts de droit à compter du 3 août 1995,

* la somme de 3 000 000 F de dommages-intérêts pour escroquerie et tentative de vol à son encontre,

* la somme de 1 500 000 F de dommages et intérêts pour tentative d'escroquerie au jugement à son encontre,

- Ordonner la publication des attendus du jugement (condamnation) dans les journaux suivants, aux frais de la compagnie:

* Paris Normandie, l'Argus des assurances, le Figaro, les Echos, la Tribune,

- Condamner Azur Assurances à lui payer une indemnité de 300 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 12 septembre 2001, la SA Azur Assurances demande à la cour de:

- Dire Monsieur Debretagne, tant irrecevable que mal fondé en ses demandes, compte tenu des exceptions de demandes nouvelles et d'incompétence.

- La déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes,

- Constater l'existence d'un protocole conclu le 3 août 1995, et l'inexécution de cette convention par Monsieur Debretagne,

- Confirmer le jugement du 9 avril 1998 en ce qu'il a déclaré bien fondé le Groupe Azur à solliciter l'exécution de ce protocole,

- Dire qu'en l'état, l'exécution du protocole du 3 août 1995 est rendue impossible, du fait des agissements de Monsieur Debretagne,

- Dire que la résolution du protocole doit être prononcée aux torts exclusifs de Monsieur Debretagne,

- Condamner, en conséquence, Monsieur Debretagne à lui verser la somme de 300 000 F pour rupture abusive du protocole,

- Dire qu'en cas de résolution du protocole, doivent s'appliquer les dispositions d'ordre public du statut des agents généraux d'assurance,

- Dire que Monsieur Debretagne lui doit une somme de 535 118,71 F outre les intérêts à compter de la sommation du 3 août 1995,

- Dire et juger qu'en présentant des opérations d'assurance dans la circonscription de son ancienne agence, en 1996 et 1997, Monsieur Debretagne a contrevenu aux dispositions de l'article 26 du statut des agents généraux d'assurance et doit être déchu de tout droit à indemnité compensatrice,

- Condamner Monsieur Debretagne à lui verser:

* la somme de 1 000 000 F à titre de dommages et intérêts pour avoir obtenu, en utilisant des moyens frauduleux, la résiliation de nombreux contrats en cours auprès du Groupe Azur et avoir provoqué une perte de confiance des assurés sur la circonscription,

* la somme de 565 000 F, au titre des primes non recouvrées pendant le mandat de l'agent, du fait de l'application frauduleuse à tout assuré de tarifs préférentiels,

* la somme de 300 000 F à titre de dommages et intérêts supplémentaires, pour procédure abusive,

* la somme de 60 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Par conclusions du 2 octobre 2001, Azur Assurances sollicite sur le fondement des articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile, le rejet des débats des conclusions signifiées par Monsieur Debretagne le 14 septembre 2001, jour de l'ordonnance de clôture.

Sur ce

Attendu que la société Azur Assurances, pour conclure au rejet des écritures signifiées le 14 septembre 2001 par Monsieur Debretagne, fait valoir que celui-ci a tardé à déposer ses premières conclusions et qu'elle n'a pu elle-même en conséquence répondre que le 12 septembre 2001 ;

Mais attendu que dans son arrêt susvisé, la cour avait accordé à Monsieur Debretagne un délai pour conclure qui expirait le 30 juin 2001 ; qu'il l'a respecté en signifiant ses conclusions le 25 juin 2001 ; que la société Azur Assurances ayant elle-même conclu le 12 septembre 2001, ne peut reprocher à l'appelant d'avoir répliqué le 14 du même mois, soit le jour de l'ordonnance de clôture et ceci d'autant plus que les dernières écritures de Monsieur Debretagne ne contiennent aucun moyen nouveau et ne sont que la reprise de ses précédentes conclusions auxquelles s'ajoutent quelques éléments de réponse à l'argumentation de l'intimée;

Que les conclusions de Monsieur Debretagne du 14 septembre 2001 ne seront en conséquence pas écartées des débats;

Vu en conséquence les conclusions des parties des 12 et 14 septembre 2001 ;

Sur la compétence de la cour et la recevabilité des demandes:

Attendu qu'Azur Assurances soulève à juste titre l'incompétence de la cour pour statuer sur une partie des demandes présentées par Monsieur Debretagne ; qu'elle n'a pas compétence en effet pour qualifier pénalement certains faits ni, par là-même, pour tirer les conséquences que l'appelant entend attacher à de telles qualifications ; qu'il s'ensuit que la cour doit se déclarer incompétente à l'égard des demandes tendant :

- à qualifier la transaction du 3 août 1995 d'escroquerie et en conséquence l'annuler,

- à condamner Azur Assurances à payer à Monsieur Debretagne la somme de 3 000 000 F de dommages et intérêts pour escroquerie et tentative de vol et celle de 1 500 000 F pour tentative d'escroquerie au jugement;

Attendu que le surplus des demandes de Monsieur Debretagne ne se heurte pas à l'irrecevabilité soulevée par Azur Assurances sur le fondement de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile ; qu'elles concernent, en effet, la rupture de ses relations contractuelles avec Azur Assurances ; qu'elles se rattachent ainsi aux prétentions originaires par un lien suffisant, ce qui les rend recevables, comme le soutient l'appelant, par application des articles 567 et 70 du nouveau Code de procédure civile;

Sur la transaction du 3 août 1995

Attendu qu'il est constant que le 3 août 1995 un document intitulé "protocole transactionnel" a été conclu entre les parties dont les éléments essentiels ont été justement rappelés par le tribunal ;

Que cette convention mentionnait:

1° Le montant du déficit de gestion au jour de la transaction : 511 670,74 F sauf à parfaire,

2° Le montant de l'indemnité compensatrice: 709 689 F ramenée à 638 720 F après application de l'abattement de 10 % stipulé par la Convention FFSA-FNSAGA,

3° La compensation entre les sommes définies par les articles 1 et 2 et le paiement du solde par la partie débitrice, au plus tard le 9 octobre 1995,

4° La cession du portefeuille de courtage, Monsieur Debretagne s'engageant à fournir le listing des affaires composant son portefeuille au 30 août 1995 afin de permettre d'en fixer le prix suivant les coefficients FFSA-FNSAGA,

5° L'autorisation donnée au Groupe Azur d'occuper les locaux sis 8 boulevard Charles de Gaulle à Petit-Quevilly jusqu'à l'échéance du bail le 31 (sic) novembre 1995, moyennant paiement du loyer et indemnisation de Monsieur Debretagne à hauteur de 1 200 F par mois pour usage du mobilier,

6° Une clause de non-oncurrence, le paiement de l'indemnité compensatrice entraînant l'application de plein droit de l'article 26 du statut aux cantons prévus dans le mandat (Rouen, Darnétal, Boos, Grand-Couronne, Sotteville, Maromme) et aux cantons de Saint-Etienne-du-Rouvray, Grand-Quevilly, Petit-Quevilly, Mont-Saint-Aignan, et Bois-Guillaume,

7° Engagement de Monsieur Debretagne de ne plus retourner dans les locaux de l'agence de Petit-Quevilly;

Attendu que cet accord contenait des concessions réciproques ; que Monsieur Debretagne ne se prévaut d'aucun moyen utile susceptible de le remettre en cause ; que cette transaction aurait donc dû recevoir exécution, ce qu'a justement énoncé le premier juge en des motifs que la cour fait siens;

Mais attendu qu'il est suffisamment démontré et d'ailleurs reconnu par Monsieur Debretagne que celui-ci a estimé n'être pas lié par les termes de cette convention et qu'il n'a pas en conséquence exécuté les engagements qui étaient les siens, notamment en ne fournissant pas la liste des affaires composant le portefeuille de courtage, en ne quittant pas les lieux où il était encore présent le 1er décembre 1995 et en continuant à effectuer des opérations d'assurance;

Que la société Azur Assurances est dès lors bien fondée à solliciter la résolution de la transaction aux torts de Monsieur Debretagne;

Qu'en revanche elle ne démontre pas ni même n'explique en quoi cette résolution serait à l'origine d'un préjudice pour lequel elle sollicite la somme de 300 000 F de dommages et intérêts; que faute d'éléments justificatifs fournis à l'appui de cette demande, elle en sera déboutée;

Attendu que la société Azur Assurances fait justement valoir qu'en conséquence de la résolution, la situation doit être réglée en application des textes régissant les agents généraux d'assurance; que cette analyse est au demeurant admise par Monsieur Debretagne puisque lui-même formule diverses demandes sur la base de ce statut;

Sur l'application du statut des agents généraux d'assurance

Attendu qu'il convient d'examiner successivement celles de ses dispositions dont l'application est demandée par la société Azur Assurances puis celles sur la base desquelles Monsieur Debretagne présente certaines réclamations.

Attendu que la société Azur Assurances sollicite la somme de 535 118,71 F et la déchéance du droit de Monsieur Debretagne à l'indemnité compensatrice ;

Attendu que la somme réclamée par Azur Assurances correspond au montant dont était débiteur le compte de Monsieur Debretagne lors de sa cessation de fonctions ; qu'un tel montant n'est pas contesté par l'appelant dans la mesure où celui-ci réclame 103 601 F sans s'expliquer plus avant sur ce point, et se limite en réalité à reprendre les chiffres retenus par le tribunal qui avait procédé à une compensation entre le solde débiteur du compte (535 118,71 F) et l'indemnité compensatrice (638 720 F);

Qu'il y a donc lieu de dire que Monsieur Debretagne doit verser à la société Azur Assurances la somme de 535 118,71 F qui pourra produire intérêts au taux légal, comme le sollicite l'intimée, à compter du 3 août 1995, une assignation en paiement ayant été délivrée le 1er août 1995;

Attendu que le problème est de savoir s'il y a lieu d'ordonner, comme le laisse entendre Monsieur Debretagne, la compensation avec l'indemnité compensatrice ou si l'appelant se trouve déchu du droit à celle-ci, comme le soutient Azur Assurances;

Attendu qu'il est constant que l'agent général a, depuis une lettre du 27 avril 1995, opté, en application du choix qui lui était offert par l'article 20 du statut le régissant, pour le versement par la société d'assurances, de l'indemnité compensatrice;

Que l'article 26 du même statut prévoit que "sauf accord particulier intervenu entre lui, son successeur et la société, l'agent général d'assurances qui cesse d'exercer ses fonctions ne doit, ni directement, ni indirectement, pendant un délai de trois ans, présenter au public dans la circonscription de son ancienne agence générale, des opérations d'assurance appartenant aux mêmes catégories que celles du portefeuille de l'agence générale."

Qu'or, il est démontré - et au demeurant non contesté - que Monsieur Debretagne, révoqué le 3 avril 1995, a, notamment en 1996, procédé à la résiliation d'un certain nombre de contrats d'assurance relevant de l'agence de Petit-Quevilly, parfois même, comme en témoignent divers courriers versés aux débats, à l'insu des intéressés ;qu'il a continué à se rendre dans cette agence et, ainsi qu'il sera exposé plus loin, est parvenu à en détourner à son profit la ligne téléphonique;

Que Monsieur Debretagne soutient que la société d'assurances ne pourrait se prévaloir de la déchéance du droit à l'indemnité compensatrice dans la mesure où le canton de Petit-Quevilly où il a continué à exercer son activité ne figure pas sur la liste des cantons mentionnés au traité de nomination;

Mais attendu que l'agence était située à Petit-Quevilly; que cette commune qui appartenait initialement au canton de Grand-Couronne, expressément visé par le traité, a ensuite appartenu au canton de Petit-Quevilly;

Qu'une exécution de bonne foi de la convention conduisait donc nécessairement Monsieur Debretagne à s'abstenir d'exercer l'activité prohibée dans ce nouveau canton ;

Que le non-respect des dispositions de l'article 26 susvisé est sanctionné par la perte du droit à l'indemnité compensatrice de sorte que Monsieur Debretagne ne peut prétendre à aucune compensation de ce chef;

Attendu qu'il réclame également la somme de 400 000 F en vertu de l'article 12 du statut, celle de 50 000 F en vertu de l'article 27, et celle de 200 000 F en vertu de l'article 520-1 du Code des assurances;

Attendu que l'article 12 du statut dispose "En plus des travaux de gestion prévus dans son traité de nomination, l'agent général d'assurances peut être appelé à effectuer des travaux supplémentaires pour le compte de la société ou des sociétés qu'il représente."

"L'exécution de ces travaux supplémentaires donne lieu à une rémunération spéciale et équitable." Que Monsieur Debretagne fonde sa demande à ce titre sur le temps passé et la perte de commission s'attachant aux opérations de transfert lorsqu'un client, assuré auprès d'un autre assureur, a entendu être ensuite assuré auprès du Groupe Azur;

Mais attendu que l'appelant ne démontre ni l'importance de ces opérations ni surtout en quoi elles n'auraient pas été prévues par le traité de nomination;

Qu'il sera donc débouté de sa demande de ce chef;

Attendu qu'il sollicite également la somme de 50 000 F au titre de l'article 27 du statut ; qu'après avoir reproduit dans ses conclusions les dispositions en cause qui concernent la cession par l'agent général des éléments lui appartenant en propre tels que matériel de bureau ou droit au bail, qui peuvent faire l'objet d'une convention particulière donnant lieu à paiement d'une indemnité distincte de l'indemnité compensatrice, Monsieur Debretagne se limite à faire référence à son courrier du 27 avril 1995 et à viser le bail, le mobilier et le téléphone;

Attendu qu'il est vrai que Monsieur Debretagne avait consenti le 6 avril 1995 au Groupe Azur une promesse de cession de son bail et avait fait savoir dans son courrier du 27 avril 1995 par lequel il optait pour une indemnité compensatrice qu'il conviendrait de " fixer un somme relative au mobilier m'appartenant et aux travaux d'embellissement effectués "; que, cependant, d'une part la cession de bail n'a jamais fait l'objet de la régularisation par acte authentique prévue, d'autre part le bailleur auprès duquel Monsieur Debretagne avait donné congé en s'engageant à libérer les lieux pour le 30 novembre 1995 a dû recourir à une procédure d'expulsion;

Qu'en définitive, il n'y a jamais eu de mise en œuvre d'une quelconque cession d'éléments propres à Monsieur Debretagne qui ne peut donc rien réclamer à ce titre.

Attendu enfin que celui-ci sollicite la somme de 200 000 F sur le fondement de l'article L. 520-1 du Code des assurances;

Attendu que ce texte donne droit à des dommages et intérêts au profit de l'agent général en cas de faute de la société d'assurances dans la rupture du contrat;

Mais attendu que l'appelant ne fait pas la démonstration d'une telle faute, la révocation se trouvant au contraire justifiée par l'existence d'un solde débiteur de plus de 500 000 F.

Que cette demande sera dès lors également rejetée;

Que le rejet des prétentions de l'appelant conduit à le débouter par voie de conséquence de sa demande tendant à la publication par voie de presse des dispositions portant condamnation de l'intimée;

Sur les dommages et intérêts sollicités par la société Azur Assurances

Attendu que la société Azur Assurances réclame des dommages et intérêts à hauteur de 1 000 000 F pour des faits de concurrence déloyale et illicite, 565 000 F en raison des pertes de primes durant le mandat de Monsieur Debretagne et de 300 000 Francs pour procédure abusive;

Attendu que plusieurs fautes ont été commises par Monsieur Debretagne;

Qu'il est ainsi démontré qu'il a, au cours de l'année 1996, soit postérieurement à sa révocation, procédé à la résiliation de contrats de clients assurés auprès de la société Azur Assurances ;que la preuve en est rapportée précisément pour 18 dossiers et il est établi que pour deux d'entre eux (ceux de Madame Perchet et de Monsieur Mad) cette résiliation est intervenue à l'insu des intéressés;

Attendu qu'il est par ailleurs démontré que pour obtenir l'attribution de la ligne téléphonique de son ancienne agence, et être ainsi contacté par les assurés du Groupe Azur, il a le 1er décembre 1995 établi et fait usage d'un faux auprès des services de France Télécom de Rouen ;qu'il a, pour ces faits, été pénalement condamné par jugement définitif du Tribunal correctionnel de Rouen en date du 14 novembre 1997;

Que compte tenu de ces fautes invoquées par l'intimée au titre des actes de concurrence déloyale et illicite et des éléments de preuve fournis relativement au préjudice subi, il y a lieu d'accorder de ce chef une indemnisation à hauteur de 200 000 F.

Attendu que la société Azur Assurances reproche par ailleurs à Monsieur Debretagne d'avoir, pendant la durée de son mandat, fait bénéficier ses assurés de tarifs réduits qui étaient réservés à certains professionnels ; que Monsieur Debretagne ne conteste pas ce fait mais fait valoir que certains clients n'acceptent de changer d'assureur que si des tarifs plus avantageux leur sont offerts;

Attendu, sur ce point, que si le principe même de la faute de gestion n'est pas discutable, le problème est celui de son ampleur ; qu'à cet égard la liste manuscrite fournie par la compagnie d'assurance ne peut suffire d'autant que les quelques contrats produits à titre d'exemples démontrent que certains ont été conclus par l'intermédiaire de Monsieur Debretagne mais que d'autres l'ont été par l'intermédiaire de Monsieur Leroux;

Qu'en définitive, la preuve à l'encontre de l'appelant n'est réellement rapportée qu'en ce qui concerne les contrats conclus par Madame Lefel, Monsieur Pertuzon, Monsieur Pallu et Monsieur Mouquet, dont les cotisations annuelles ont été respectivement de 4 722 F, 5 844 F, 7 331 F et 6 065 F, soit un réduction pour chacun d'eux comprise entre 5 % et 25 %;

Qu'en réparation du manque à gagner - la résiliation de ces contrats invoquée par ailleurs comme consécutive à une remise à un tarif normal, étant purement hypothétique - il sera alloué, pour tenir compte de l'aléa qui s'attache à la durée du contrat, la somme de 20 000 F;

Attendu enfin que le fait pour Monsieur Debretagne d'avoir interjeté appel du jugement ne peut être qualifié d'abusif étant observé que le Groupe Azur et son avocat indiquent eux-mêmes se réserver la possibilité d'agir judiciairement contre l'appelant en raison de certaines mentions figurant dans ses écritures;

Qu'il n'y a donc pas lieu d'accorder des dommages et intérêts à ce titre de sorte que Monsieur Debretagne sera condamné à verser à la société Azur Assurances une somme totale de 220 000 F en réparation des divers préjudices admis;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que Monsieur Debretagne succombant dans son recours sera condamné aux dépens d'appel ; qu'il ne peut prétendre au bénéfice de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; que l'équité commande que soit allouée à l'intimée, en application de ce texte, une indemnité complémentaire de 8 000F;

Par ces motifs, LA COUR - Dit n'y avoir lieu d'écarter des débats les conclusions signifiées le 14 septembre 2001 par Monsieur Debretagne, - Se déclare incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur Debretagne tendant aux qualifications d'escroquerie, tentative de vol, escroquerie au jugement ainsi que sur les conséquences qu'il entend y attacher et le renvoie à mieux se pourvoir, - Déclare recevables ses autres demandes, - Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société Azur Assurances bien fondée à solliciter l'exécution du protocole transactionnel du 3 août 1995 et constaté que Monsieur Debretagne n'avait pas exécuté les obligations en résultant pour lui, - Le confirme également en ses dispositions concernant les frais irrépétibles et les dépens, - Le réformant pour le surplus, - Prononce aux torts de Monsieur Debretagne la résolution dudit protocole, - Le déclare déchu du droit à l'indemnité compensatrice et le condamne à payer à la société Azur Assurances, * la somme de 535 118,71 F (81 578,32 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 1995 * la somme de 220 000 F (33 538,78 euros) à titre de dommages et intérêts, * la somme de 8 000 F (1 2 19,59 euros) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, - Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, - Condamne Monsieur Debretagne aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Gallière, Lejeune, Marchand, Gray avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.